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De : Maedhros Date : Jeudi 30 octobre 2008 à 21:01:29 | ||
Bon, lâchons les chevaux et que le vent fouette nos cheveux. Oyez, gentils damoiseaux et gentes damoiselles... c'est toujours la même histoire! _______ ONE STEP BEYOND Comme à Reichsoffen, La mort fauchant les rangs Attention ! Cavaliers ! Chargez ! D'une main ... » « Commandant, l’ordre de retraite est confirmé. Nous avons peu de temps pour regagner la position de repli ! » La voix de Duilin mon estafette, est déformée par les assauts incessants des contre-mesures et des virus intrusifs qui tentent de s’immiscer dans nos canaux de communication protégés. Pour l’instant, le wanfield tient bon. Jusqu’à quand? La mort dans l’âme, je sous-vocalise les routines qui vont reconfigurer les schémas tactiques des Oliphans, ces lourds monstres de plastacier qui ont péniblement progressé sous le déluge de fer et de feu déversé par les Adeptes du Jaggernaut. Et dire que nous nous sommes enfoncés dans ce qui semblait un point faible des lignes retranchées ennemies. Enfin, c’était ce que disaient les stratèges confortablement installés à bord du Braglorin, bien à l’abri dans le cône ombreux de la lune, devisant doctement autour des magnifiques projections holographiques où des points bleus et des points rouges brillent, clignotent et disparaissent. A cet instant, mon régiment Noldoli est un des points bleus qui doit clignoter dramatiquement. Nous avons débarqué pour ouvrir une brèche quel qu’en soit le prix. C’est la matière dont sont faits nos rêves quand nous parvenons à trouver le sommeil au fond des soutes crasseuses des immenses cargos de transport de troupes, à côté de nos machines blindées. Nous nous réveillons vraiment qu’à l’instant où jaillissant des sabords, nous dévalons des orbites d’assaut pour rejoindre les points de dispersion. Jusque là, nous nous efforçons de respecter les protocoles de la Flotte et les consignes de l’Etat-major stratégique. Quand je donne le signal, la terre tremble sous la charge des centaines d’Oliphans qui libèrent toute la puissance de leurs réacteurs. Notre devise est d’une limpide simplicité : « Droit devant ». Nous ouvrons la route. Je suis le commandant du 7ème de Cavalerie, héritier d’une longue lignée d’honneur, de bravoure et de gloire. Notre étendard a flotté sur de nombreux mondes, toujours devant les troupes régulières numénoréennes lourdement armées qui occupent le terrain éventré et réduisent les poches de résistance. Mon régiment est le premier sous le feu ennemi, le dernier à quitter le terrain. Pour l’heure, cette opération est un lamentable fiasco. Mes stats d’attrition sont épouvantables. J’ai perdu les trois cinquièmes de mes engins. Les champs de force et les systèmes de couverture électrodynamiques des Oliphans ont fait de leur mieux mais l’intensif pilonnage adverse a fini par saturer leurs capacités. J’ai vu les halos de contention trembler avant que la déflagration d’un coup au but ne fasse naître une fleur gigantesque aux couleurs malsaines sur la steppe désertique. Et je ne n’ai toujours pas aperçu leurs lignes enterrées. Ils nous attendaient comme à l’entraînement, nous observant franchir les rangées de collines serrées les unes contre les autres. Un assaut de fer tendu vers la terre promise, vers le dernier royaume humain sur Terre, vers Hyperborée ! Nous serons en retard, Oromë! Nous avons voulu croire que c’était possible, que nous étions devenus plus forts. Alors nous avons écouté nos coeurs et nous avons émergé des profondeurs pour revendiquer notre héritage. Mais Angra Mainyu nous attendait patiemment. Quel aveuglement fut le nôtre, quelle vaine arrogance. Quand s’éveilleront les tardigrades de leur sommeil éternel ? Une sonnerie suraiguë vrille mes tympans. Oromë, je ne serai pas au rendez-vous ! La froide cruauté de ce soleil de glace Et cette immense nuit semblable au vieux Chaos ; Je jalouse le sort des plus vils animaux Qui peuvent se plonger dans un sommeil stupide. Tant l'écheveau du temps lentement se dévide Mon rôle est obscur. Je ne suis qu’une technicienne solosimpi oeuvrant loin de la bataille qui fait rage sur notre ancienne patrie. Je veille mes tardigrades alignés derrière la paroi de plexiglas épaisse de plus d’un pied. Des milliers de sarcophages luisent doucement dans le halo bleuté de la soute gigantesque. Des centaines de milliers si l’on compte tous les ponts qui s’étagent dans le ventre bedonnant de la sphère tractée par le Pardon d’Alqualondë, le vaisseau mère. Celui-ci tire derrière lui, au creux de l’écrin onctueux de l’espace, une double rangée de perles scintillantes, un magnifique collier de perles lisses et nacrées. Et tout autour, flottent des milliers de vaisseaux semblables. L’Essaim. Ce sont d’immenses rivières de perles qui s’enroulent autour des planètes géantes du système solaire originel. Quand je les contemple depuis la salle d’observation du vaisseau mère, j’éprouve un sentiment indéfinissable, à la fois nostalgique et romantique Mes tardigrades. C’est une référence remontant à une période très ancienne, enfouie au plus profond des âges sombres. Cela désignait un minuscule organisme vivant de notre ancienne planète qui avait développé une aptitude singulière à résister à la fois au froid extrême de l’espace, à la chaleur infernale des déserts les plus brûlants et aux ravages inexorables du temps lui-même. Il renfermait ainsi la clé, celle qui allait ouvrir les voyages interstellaires pour les multitudes. La clé qui a permis les vagues successives des migrations, l’essaimage vers les étoiles lointaines, là où le Noir Ennemi n’a pu nous suivre. Là où nous avons fui pour échapper à ses griffes impitoyables. Mes tardigrades. Ils sont tous là, figés par la cryptobiose, cet état particulier qui présente toutes les caractéristiques de la mort mais qui n’est pas la mort, juste une stase dans laquelle le métabolisme est arrêté au-delà de toute mesure. Seuls les Veilleurs des Dormeurs sont capables de discerner la fragile et infinitésimale étincelle de vie sur la fugue des probabilités. Mes chers tardigrades, quasiment indestructibles et immortels, recroquevillés en position foetale dans leur cocon protecteur, attendant patiemment l’éveil, ce moment magique où ils s’élanceront pour fouler les vastes et vertes prairies d’une Terre renouvelée dans la glorieuse lumière où se mélangent l’or et l’argent. Car le cargo des Dieux s’approche doucement, descendant l’Olorë Mallë, le chemin des rêves. Il transporte dans ses flancs aux courbes infinies, la splendeur de l’arbre aux fleurs bordées d'or et la majesté de l’arbre aux feuilles brillantes comme l'argent. Nous revenons. C’est ce qu’ont proclamé les hérauts sur toutes les places d’Almaren quand les astres se sont enfin alignés. Il était temps de reconquérir ce que nous avions perdu, ce que nous avions laissé derrière nous. Nous étions forts, plus forts que jamais, plus fort que Lui. La bataille qui fait rage sur la troisième planète de ce système décidera du sort de l’Essaim et des tardigrades qui le composent. Si les armées des étoiles emmenées par les Istari renversent les troupes noires de l’Usurpateur Eternel, alors Fanuin tissera les fils brillants d’une nouvelle musique qui s’élèvera au sein du néant. La carte de ce monde agonisant sera redessinée avec ses forêts, ses mers, ses montagnes et ses neiges éternelles. Une Terre jeune et prometteuse où les perles géantes se poseront enveloppée de la douce lumière de la première aube, au coeur de vastes clairières. Ainsi débutera le cycle de la reviviscence. Tout se joue là-bas. Dans le fracas des armes. La mère de toutes les batailles. La dernière guerre. Je suis parvenu au bout du chemin. Derrière moi, la falaise plonge vertigineusement jusqu’aux rochers qui lacèrent la marée de sable montante. Un pas de plus signifie une chute définitive. Je regarde le ciel qui se poudroie d’or au-dessus de ma tête. A ma droite et à ma gauche, à perte de vue, les falaises de craie blanche défient les regards. Parois verticales qui marquent la fin du monde, la dernière limite du dernier royaume. Etre là, c’est comme être au bord du monde. Rien n’existe au-delà, hors le vide et le vent. Aucune chance de fuir. Le chemin ne va pas plus loin. Les grondements assourdissants des cohortes noires en mouvement couvrent l’appel de l’oliphant sur la plaine de sable où planent déjà les grands charognards. Ils attendent l’ultime assaut. Les derniers défenseurs hyperboréens essaient de maintenir la ligne pour entretenir un fragile espoir. Mais celui-ci s’éteint peu à peu. Je vois Oromë, l’envoyé des étoiles, qui harangue les troupes aux couleurs disparates massées à ses côtés. Je ne suis rien. Les palais aux fières tours de Godthab ont croulé sous l’assaut des légions du crépuscule. Mes livres et mon luth. Je les ai vus se consumer au milieu d’un enfer de rage et de sang. Sans rien pouvoir faire. J’ai cru devenir fou quand ils ont traîné mon fils par les cheveux au milieu des flammes rouges. J’ai frappé les gardes qui m’ont ceinturé pour me tirer malgré moi hors de danger tandis que la ville résonnait de cris inhumains. Ils n’ont rien laissé vivant derrière eux. Je les ai à peine entrevus. Des mufles et des cornes, des griffes et des écailles. Les plus effroyables créatures vomies par la forteresse noire. Leur épouvantable maître a rugi quand les vaisseaux blancs ont brillé plus fort que les étoiles pâlissantes. Il est plus noir et plus fou, plus cruel et plus démoniaque. Les armées des étoiles sont stoppées dans l’Est par les lignes ennemies, enterrées et fortifiées. Les grondements des canons et les explosions ébranlent le sol sur des distances incommensurables. Ils approchent. Ils approchent. Dans la clarté jaunâtre d’une aube qui n’en finit pas de se lever, une ligne noire souligne l’horizon. Ils arrivent après avoir balayé les défenses du Dernier Royaume comme des fétus de paille. Elles approchent, ces créatures que leur maître a déchaînées contre nous pendant que ses troupes d’élite affrontaient et mettaient en échec les bataillons Eldars. Qui suis-je? Juste un Bibliothécaire. Le gardien des mots. Inutile au combat. Un poids déjà mort. Le témoin impuissant de la fin tragique du royaume d’Hyperborée, le dernier Royaume de la Terre. Elles approchent rapidement, galopant comme des bêtes sur le sable rouge. Innombrables. Nous ne possédons que quelques armes légères conservées après la débâcle. Des armes de poing et des armes d’apparat. Des dagues et des lances. Quelques lasers. DE vulgaires jouets. Oromë m’adresse un long regard où se lit le courage du désespoir et la rage de la défaite annoncée. Il crie d’une voix puissante mais sa voix se noie au milieu du vacarme assourdissant des légions de l’enfer. Je vois leurs mufles et leurs crocs, leurs écailles et leurs queues. Nos armes en fauchent par dizaines mais elles sont si nombreuses comme les vagues d’une marée d’équinoxe. Une marée noire et nauséabonde. Une marée que je n’ai jamais vue mais que j’imagine aisément. Une marée qui va nous emporter car il n’y a nulle part où se cacher. Derrière nous, le vide et la mort. Devant nous, la furie et la mort. Elles bousculent déjà le premier rang des défenseurs qui plie sous l’assaut. Oromë est un promontoire qui s’enfonce dans l’océan en furie. Son épée brillante fauche à droite et à gauche en larges moulinets. Il sépare les flots et derrière lui quelques fantassins forment un éperon. Tout n’est que hurlements et claquements. Le sang et les larmes. Chacun se bat pour sa vie et pour celui qui est juste à côté. Si la ligne rompt, tout est perdu. Soudain, la vague hésite, un frémissement parcourt les rangs serrés des bêtes du démon. Elles hésitent, regardant derrière elles. Oui. Je vois une sorte de mouvement qui se dessine non loin, de l’autre côté des lignes ennemies. Cela avance et cela broie. Cela avance et cela brise. Les créatures se retirent vivement pour faire front à la menace qui progresse dans leur dos. Je ne distingue pas très bien mais il me semble reconnaître des silhouettes humaines. Des silhouettes humaines qui se tordent de façon fantastique dans la pâle lumière qui dégouline en arpèges blonds. Les armées des étoiles. Ce sont les Vanyars. Ou bien les Noldoli. Ou encore les Numénoréens qui ont fait une percée. Ils sont finalement parvenus ici avant la fin... Non... attendez... ils se rapprochent, taillant sans pitié dans les rangs ennemis. Aucune détonation. Aucun rayon lumineux émis par un laser de combat. Aucune épée scintillante accrochant la clarté du soleil moribond. Non. Ils sont bientôt si proches... voyez comment les légions maléfiques se débandent en tous sens, fuyant le courroux irrésistible qui s’abat sur elles. Je les reconnais. Des jets de chairs incontrôlés, des résurgences glauques et vitreuses, des membres surnuméraires au développement anarchique... Nos frères et nos soeurs.... Ceux de la fosse sans fond... ceux de la crevasse oubliée... ceux que nous qualifions hier de monstres ! Ils sont là devant nous, sur la plaine désormais vide et silencieuse. Ils nous font face, les mains rouges du sang de nos ennemis. Ils nous font face et je vois enfin clair derrière les traits déformés et les corps tourmentés. Je vois le frère que j’avais abandonné, la femme que j’avais aimée. Ils sont tous si beaux et si purs ! Alors, je sais que le Royaume est sauvé. Oromê me sourit. Les trompes et les cors résonnent enfin dans le lointain. M Ce message a été lu 9875 fois | ||
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3 Exercice 47 : Maedhros => Commentaire - Estellanara (Ven 12 dec 2008 à 17:21) 3 Commentaire Maedhros, exercice n°47 - Narwa Roquen (Lun 3 nov 2008 à 18:24) |