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 WA - Participation exercice n°54 Voir la page du message Afficher le message parent
De : Maedhros  Ecrire à Maedhros
Date : Dimanche 15 fevrier 2009 à 17:52:22
Bon, l'exercice était assez compliqué. J'ai triché en choisissant un accompagnement musical propice à suggérer ce que je voulais faire ressentir...

Alors, avant de lire, je vous conseille de cliquer
sur ce lien et lire ensuite.

A vous de juger.
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LEAP OF FAITH



Ils me traquent toujours.

Ils sont à mes trousses, encourageant leurs chiens courants qui n’ont pas perdu ma trace. J’entends parfois leurs cors sur une crête boisée ou au fond d’une combe noyée d’ombre. Dans le ciel, le soleil a passé le zénith et je sens mes forces s’amenuiser. En amples foulées, je bondis au-dessus d’un taillis pour me fondre dans le sous-bois protecteur, le long de la rivière. Quelque chose me retient près d’elle. Je sais que l’eau est désormais silencieuse et abandonnée. Nulle aide ne viendra de là. Le cercle enchanté a été brisé il y a longtemps. Et toutes les belles demeures que nous avions construites, légères et aériennes, ont disparu dans l’abîme du temps. Je ne peux m’éloigner du coeur de l’ancien royaume, là où se dressait Caras Galadhon, la cité d’argent dans les arbres, resplendissant sous la caresse de la lune complice. Je suis indéfectiblement lié à ces lieux où j’étais jeune et fort, comme le monde alors.

Aujourd’hui, ils sont tous repartis vers l’Ouest, sans regarder en arrière, laissant les Havres Gris hors de vue. J’étais sur une hauteur dominant le port. Je t’ai vue t’éloigner à bord de l’un des derniers vaisseaux blancs, ta chevelure flamboyant comme un fanal ardent dans le soleil couchant. J’ai su que jamais je ne te reverrais. En cet instant, m’as-tu cherché du regard? J’étais là, tenant mon arc devant moi. Tu étais à côté d’Elrond, mon parent. Si tu m’entends, par delà le temps et l’espace, ne m’oublie pas. Notre rencontre fut brève mais elle a compté pour moi.

Peu firent comme moi. L’amour de cette terre à jamais m’attache à elle et je reste avec les fantômes qui furent mes amis et mes frères, tous tombés pour sa défense. Les cycles ont passé et les arbres se font chaque année moins nombreux. L’ancienne magie a disparu, n’ayant pu lutter avec leur industrie et ses fumées. Finalement notre grand ennemi a gagné et règne sans partage sur ce monde alors que nous croyions l’avoir défait, pauvres fous que nous fûmes. Sur ses conseils, la science des hommes a supplanté les vieux savoirs. Les paysages familiers ont été modifiés. Notre monde meurt un peu plus chaque jour et je meurs avec lui. L’idée de la mort ne me fait pas peur. Je soutiendrai sans faiblir le regard de Mandos, même s’il me condamne à errer pour l’éternité dans les sombres cavernes. De la sorte, je retrouverai les miens.

Il faut que je souffle un petit peu. Je m’immobilise, dissimulé par les rares illusions de lumière qui hantent encore ces lieux. Leurs chevaux se rapprochent, je le sens au plus profond de moi. Ces chevaux ne ressemblent pas à nos fières montures, celles qui ont chargé les légions vomies de Minas Morgul mais ils sont endurants à leur façon. Leurs cavaliers sont vêtus de rouge et de blanc et leurs bottes noires brillent d’un sombre lustre. Je suis le dernier Elfe de ces forêts. Ils me pourchassent à chaque saison, en grand équipage, avec leurs beagles harrier et leurs tricolores. Chaque saison, ils me talonnent toujours d’un peu plus près malgré mes ruses et mes courses. Leurs chiens de recherche éventent plus rapidement mes changes et mes doubles voies. Ils me suivent de près. Ma seule chance est de traverser encore et encore la rivière, celle qui a emporté naguère les cavaliers noirs, afin de retarder l’échéance inéluctable. Mais cette fois-ci Elrond ne pourra pas libérer les chevaux d’écume. Je suis le dernier de ma race et mes heures sont désormais comptées. Il n’y aura pas de forlonger : je ne passerai pas ce jour.

Les cors retentissent à nouveau. J’ai été aperçu. Ils sonnent le rassemblement en rameutant les chiens éparpillés. Je reprends ma fuite, me faufilant entre les taches de soleil qui trouent le manteau forestier. Je fais un large détour pour pénétrer dans un grand champ cultivé. Blé ou maïs. A découvert, je suis vulnérable, ma haute stature devient visible de tous côtés. A quelque distance, je serai à nouveau à couvert dans la grande forêt domaniale. Les cors poussent leur sinistre note. Ils me débusquent, les chiens sentent le sang et leurs aboiements deviennent sauvages. Les valets les excitent de la voix, appelant à la curée...

Je suis un Noldor et Maedhros fut mon parent. Un ensorcellement singulier et terrible s’est abattu sur tous ceux qui sont restés sur cette terre et ont refusé de rejoindre Valimar. Aujourd’hui, saurais-tu me reconnaître, toi qui m’avais pourtant reconnu chez Elrond, sans me voir auparavant ? Je suis prisonnier d’une enveloppe charnelle différente, magnifique mais inhumaine. Tous mes frères elfes sont décimés un à un ou parqués derrière des barrières de métal, pour le plus grand plaisir des hommes mécaniques. Telle est la triste fin qu’il nous a réservée. Jamais je n’accepterai de vivre dans une cage, aussi belle soit-elle.

Alors, je fuis devant les chasseurs. Ils m’ont repoussé vers la falaise et je ne pourrai pas aller bien plus loin. L’abrupt de la paroi se jette dans le ravin en contrebas, tout au fond duquel la rivière scintille faiblement. Les cors résonnent de tous côtés, sonnant l’hallali. Je suis exténué, mes forces m’ont définitivement quitté. Je devine des mouvements entre les arbres. Les aboiements rageurs des chiens de la meute s’élèvent tout près. Les chasseurs débouchent enfin, serrant les rênes de leurs montures, prenant tout leur temps. Aucune issue, je suis acculé sur un promontoire rocheux qui s’avance au-dessus du vide. En demi-cercle, les cavaliers en rouge et blanc font taire les chiens et m’observent en silence. Ils ne savent pas. Cela fait partie du sortilège. Ils sont les instruments inconscients d’une vengeance qui les dépasse. Oromë ne viendra pas à mon secours.

Le soleil est dans mon dos et je dois resplendir devant eux, ma ramure s’élevant bien plus haut. Mes bois sont les plus fiers et les plus majestueux que ces lieux virent ou verront jamais. Les chiens grondent nerveusement, maintenus avec difficulté par les valets. Puis, un homme sort lentement du bois et s’avance à l’air libre. Il tient à la main un long couteau. Je le reconnais. Tous les Elfes le reconnaîtraient. Il ressemble aux autres hommes mais quelque chose dans son regard le trahit sans doute possible. Il n’a pu s’empêcher de goûter cet instant rare où il tranchera la gorge d’un de ses éternels ennemis. Les chiens s’écartent sur son passage, presque apeurés par l’ombre gigantesque et impalpable qui marche à ses côtés. Il sait que je l’ai reconnu et il sourit cruellement. Les autres chasseurs se tiennent à une distance respectueuse.

Je le menace en abaissant mes bois aux extrémités écartées d’une bonne dizaine d’empans. Je ne serai pas une victime expiatoire, je me battrai même si je sais n’avoir aucune chance contre Lui. Les chiens. Ils ont lâché les chiens. Ils accourent vers moi en aboyant furieusement. Ils sautent à ma gorge et vers mes flancs. Je les balaie d’un large revers de mes bois mais le sang a coulé et cela les excite plus encore. Deux ne se relèveront plus. Les autres reviennent à la charge. Je secoue ma ramure de droite à gauche mais ils mordent et s’agrippent. J’ai beau en faucher encore et encore, il en revient toujours. La lutte sera courte, je sens ma vie qui s’échappe par maintes blessures ouvertes. Je halète, cherchant ma respiration. Je suis un Noldor et j’ai vu tant de beauté au cours de ma longue existence, tant de belles choses qui mourront avec moi. C’est ce qui me désole le plus. Ce monde n’est plus le mien mais je l’aime toujours. Je m’appelle Maedlin mais qui se souvient de moi ? Qui se souvient du prince que je fus ? Je ressens une immense et soudaine fatigue et je tombe sur mes antérieurs, incapable de poursuivre le combat inégal.

Les chiens ont flairé la fin et ils forment une ronde de crocs et de fureur autour de moi. Il reprend sa marche. Des voix inquiètes s’élèvent derrière lui qu’il fait taire d’un mot impérieux. Une jument encense soudainement. Elle ressemble à une autre jument, loin dans le passé. Sa cavalière la maîtrise en riant nerveusement. Elle perd sa coiffe et ses cheveux cascadent librement sur ses épaules. Mais ils ne sont pas couleur soleil couchant. Ce n’est pas toi.

Il est tout près à présent, le bras levé pour le dernier geste. Une obscène jouissance dégouline de ses yeux où brûle une haute et sombre montagne rouge. Alors, mobilisant toute ma volonté dans un dernier effort, je me redresse, tremblant et de sang ruisselant. Il esquisse un recul tandis que les chiens instantanément se jettent à nouveau sur moi. Je fais un saut immense, un saut qui semble ne plus finir, un saut dans le vide où j‘entraîne plusieurs beagles terrorisés.

La rivière se rapproche rapidement, ainsi que les rochers qui en bordent les rives. La dernière image de ce monde que j’ai tant aimé te rappelle encore à moi. Un oiseau de proie tourne haut dans le ciel et pousse un seul cri déchirant avant de s’enfuir vers l'astre déclinant...

M


  
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Réponses à ce message :
3 Exercice 54.1 : Maedhros => Commentaire - Estellanara (Mar 25 aou 2009 à 17:03)
3 Pour une fois que je demande un texte plus long.... - z653z (Jeu 12 mar 2009 à 12:19)
3 Commentaire Maedhros, exercice n°54 - Narwa Roquen (Jeu 19 fev 2009 à 22:24)
       4 en demi-cercle les cavaliers rouge et blancs... - Netra (Lun 23 fev 2009 à 21:50)
              5 Je ne crois pas... - Narwa Roquen (Lun 23 fev 2009 à 22:07)
                   6 Ben oui mais alors... - Netra (Mar 24 fev 2009 à 10:16)
                       7 Bien sûr! - Narwa Roquen (Mar 24 fev 2009 à 13:21)


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