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 WA - Participation exercice n°56 part 1  Voir la page du message Afficher le message parent
De : Maedhros  Ecrire à Maedhros
Date : Lundi 16 mars 2009 à 21:47:00
Il est revenu... il revient toujours... et il est question de miroir aussi. Et le côté Noldor pour la consigne...

C'est une pièce en un acte et 2 scènes. Les protagonistes parlent à la 1ère personne.
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LA PRISONNIERE DU MIROIR


DECOR :

Une pièce aveugle, un lit, une table, quatre murs.

Côté jardin : un grand miroir sur le mur.

Côté cour : une femme allongée sur le lit, mains ligotée aux barreaux de la tête de lit. Elle semble jeune et vieille à la fois. Une jeunesse sur laquelle le temps serait passé à une vitesse phénoménale. Des cernes sous les yeux et un teint blafard. Pas loin, un vieux pot de chambre renversé côtoie un plateau repas sur lequel peuvent se voir une assiette à moitié vide d’une sorte de brouet une bouteille d’eau en plastique et un croûton de pain

Sur le mur du fond : une porte fermée.



SCENE 1

La Fille :

(en parlant vers la salle)

La lumière au plafond s’est allumée alors cela doit être un nouveau jour. J’ai l’impression d’avoir dormi longtemps. Très longtemps. J’ai rêvé mais je ne me rappelle aucun de mes rêves. J’ai perdu cette capacité depuis que je suis enfermée ici. J’ai la sensation d’avoir rêvé tant que je garde mes paupières closes, mais il suffit que j’ouvre les yeux pour qu’elle disparaisse d’un seul coup. Il m’a retranché du monde des vivants. C’est son plus grand crime. Il a dit qu’il reviendrait. Il tient toujours ses promesses.

(elle se tourne vers le miroir)

Tu te rappelles ? J’ai commencé à parler à ce miroir après qu’il l’ait posé au mur, le tout premier jour de ma captivité. Je l’ai regardé faire, ligotée sur le lit avec dans la bouche la sensation écoeurante du chiffon avec lequel il m’a bâillonnée pour me jeter dans son fourgon. Ce miroir. Combien je l’ai haï quand j’ai vu ce que je devenais. J’ai voulu le briser mais il semble que rien ne puisse ébrécher son reflet glacé. Je l’ai souillé souvent au début mais chaque matin, à mon réveil, il était parfaitement nettoyé. Et puis, peu à peu, nous nous sommes mutuellement apprivoisés. Ce miroir était devenu un confident, l’ami muet et compatissant, un élément essentiel du décor.

Au début, j’ai cru ça jusqu’à ce que je m’aperçoive que ce n’était pas le miroir qui me fascinait, pas cette surface ouverte sur un ailleurs identique à mon univers. Non. C’était l’inconnue qui y vivait et qui me regardait de l’autre côté. Une inconnue qui me ressemblait vaguement. Une grande fille un peu paumée, amaigrie, avec des cernes sous les yeux. Mon dieu, combien aurais-je donné pour un tube de rouge à lèvres! Toi. D’abord, tu as été une présence silencieuse, puis subtilement et progressivement nécessaire. Les jours ont passé et tu es devenue mon amie. Puis bien plus que mon amie, ma soeur, une soeur jumelle. Celle que mes parents m’avaient toujours cachée ou bien celle que j’avais toujours cachée à mes parents, celle qu’ils avaient finalement abandonnée sur le chemin de l’adolescence, quelque part entre Denver et Dallas.

La Fille dans le miroir :

Je crois que nous sommes plus proches encore que des soeurs jumelles. Nous sommes beaucoup plus intimement liées. Je calque mes gestes sur les tiens comme tu calques tes gestes sur les miens. Si nous nous ressemblons maintenant, c'est parce que chacune a fait un bout du chemin en direction de l’autre, abolissant cette distance qui nous séparait. Dommage qu’il soit apparemment trop tard. Tu as raison sur un seul point : le temps a passé. Moi, je t’ai pardonnée. Peut-être un vieux reste de cette éducation religieuse à laquelle maman tenait tant. Cette religiosité que te faisait marrer jusqu’à provoquer maman avec tes habits noirs, ta musique s_a_t_a_n_i_q_u_e et tes airs cadavériques. Cette religiosité qui te faisait peur, comme te faisait peur le fait de t’ouvrir à tes semblables, d'avoir confiance dans la communauté, d'être comme les autres simplement. Tu as toujours été une fille compliquée.

La Fille :

Nous n’aurions jamais dû quitter Denver. C’était le pays des chevaux et j’adorais les chevaux. Papa avait un ranch où il élevait les plus beaux mustangs de tout l’Etat. Beaucoup de moi est resté là-bas, dans le Colorado et ce vide est toujours là comme une invisible blessure qui s’agrandit de plus en plus. J’aimais par-dessus tout galoper juste avant que l’aube ne se lève, sentir la campagne autour de moi, avoir le sentiment de liberté à perte de vue. Il y a avait moi, le cheval et l’infini. Si j’étais morte à ce moment là, quand le soleil étendait ses premiers rayons sur la grande plaine, par-dessus les Rocheuses, cela aurait été un moment de pure plénitude. Si j’étais morte, je n’aurais pas vécu cet enfer.

La Fille dans le miroir :

Tu sais, le Texas, c’est aussi le pays des chevaux et des cow-boys. Mais dès que nous y sommes arrivés, tu as fermé ton coeur. Moi, je me souviens bien de notre maison à Dallas. Ce n’était pas un ranch puisque Papa a pris le boulot là où il l’a trouvé. Toi, cette maison, tu ne l’as jamais aimée mais as-tu simplement cherché à me demander mon avis? Je te l’ai souvent donné pourtant.

D’après toi, qui écrivait ces lignes sur ton journal intime, ces lignes que tu relisais avec stupéfaction parce que tu ne te rappelais pas les avoir écrites? Ces lignes qui contrastaient tellement avec les tiennes, qui ne correspondaient pas à tes propres sentiments? C’était moi. Ma main était dans ta main quand la plume du stylo glissait en arrondissant des mots que tu refusais d’entendre. Oui, tu en as barré des lignes d’un grand trait rageur, en ajoutant en plus ces petits gribouillages serrés pour interdire toute possibilité de relecture, même en transparence.

Cette négation absolue de tout ce qui n’était pas toi, tout ce qui n’était pas cette autre image que tu te plaisais à renvoyer aux garçons de la classe. Cette arrogance et cette insolence qui t’ont propulsée sur le devant de leur scène. Tu étais devenue cette poupée Barbie qui les émoustillait tant, dévergondée et superficielle. Ce n’était pas toi. Ce n’était pas moi.

Tu étais devenue une étrangère dans ta propre existence et tu ne t’en rendais pas compte. Tu t’es finalement perdue entre tous tes reflets. Mais j’étais là, prête à t’aider. Il aurait suffi que tu regardes plus attentivement dans le miroir, ce miroir devant lequel tu te démaquillais chaque soir. J’étais là, j'étais ce visage qui apparaissait fugitivement sous les traces du coton démaquillant, derrière le fard et la poudre. Si tu avais juste suspendu ton geste, ne serait-ce qu’un instant, tu aurais croisé mon regard et tu aurais lu en moi. Mais non, tu te contentais de nettoyer tout ça au plus vite pour téléphoner à ton petit copain du moment.

La Fille :

Tu n’as jamais compris les raisons qui m’ont poussée à foutre le camp de la maison. Pourquoi je m’étais enfuie... pourquoi j’avais fait toutes ces conneries... pourquoi je me retrouve là aujourd’hui? Je ne suis pas folle. Je n’ai pas réussi à devenir folle hélas... les fêlures et les cassures de mon âme ne m’ont pas permis de me réfugier dans la folie que j’ai souvent appelée de mes voeux.

Alors je l’ai regardé faire... c’est comme s’il s’acharnait sur une autre, pas moi... plus moi... je l’ai regardé faire jour après jour et même si j’ai crié, même si j’ai vomi, je n’ai pas pu expulser ces souillures de mon esprit. Je suis restée froide et lucide, comme détachée. Je n’ai pas pleuré. Je n’ai jamais pleuré ici. Il faut des larmes pour pleurer et je n’en avais déjà plus quand il m’a enlevée dans la nuit glaciale de janvier. Est-ce tu comprends ça? J’ai l’impression que quelques fois tu ne m’écoutes pas et que je contemple un simple reflet dans une glace. Comme une idiote.

La Fille dans le miroir :

Je t’écoute. Je t’ai toujours écoutée. Je t’ai répondu aussi, à chaque fois que tu me posais une question. C’était juste que tu ne m’entendais pas. J’étais à côté de toi quand tu as claqué la porte de la maison. Je me rappelle avoir tourné la tête vers la fenêtre de la chambre du premier étage où dormaient les parents. As-tu pensé à Maman quand tu es partie sans laisser de mot derrière toi ? As-tu pensé à la peine que tu lui faisais en t’enfuyant? Non. Tu n’as pensé qu’à toi, à ton mal-être, à tes fantasmes de petite fille grimée à grands coups de pinceaux outrageux. J’ai souffert car tu m’as empêché d’exister.

Tu dis que tu es prisonnière dans cette geôle hors du temps? Ce n’est que ta réalité. Pas la mienne. Moi, je suis libre ici, libre pour la première fois. Ce qu’il te fait, il me le fait. Mais ce n’est juste qu’une illusion... un reflet qui danse dans le miroir quand ses mains sont sur ton corps. Un simple jeu de lumière. Inoffensif. Il ne me dégoûte pas autant qu'il te dégoûte. Je le connais sans doute mieux que toi parce que j’évolue sur un plan différent. Là, il ne peut cacher les fractures qu’il dissimule aux autres. Il est fragile, presque vulnérable et je peux lire dans ses yeux autre chose que la violence dont il nourrit ses actes.

La Fille :

Comment peux-tu justifier ce monstre? Comment peux-tu lui trouver des excuses? C’est le mal absolu. Tu as vu ce qu’il m’a fait ? Tu as vu les traces sur mon corps? Certaines se lavent mais ne s’effacent pas. Tu crois que c’est un de ces films où la victime est sauvée à la fin? Tu crois que nous jouons dans un épisode de FBI Portés disparus? Ce n’est pas un décor de cinéma. Quand la lumière s’éteint, les machinistes n’envahissent pas le plateau et l’acteur qui joue le monstre ne boit pas un verre de gin en rigolant avec les scénaristes. Non. Ici c’est réel et mortel. Ils ne viendront pas nous délivrer. J’ai beau prié ton bon dieu, il ne me délivrera pas du mal. Non.

Tu dis que tu étais là depuis longtemps. Mais où étais-tu bon sang quand j’ai eu besoin de toi? Quand j’ai appelé au secours. Où étais-tu quand ils m’ont attirée dans leurs filets pleins de mirages et de mensonges. Où étais-tu donc passée? J’ai cru qu’ils allaient faire de ma vie un conte de fée. Que j’allais être une nouvelle star et que le champagne allait couler à flots. Ils m’ont promis tant de merveilles que j’ai voulu les croire. Cela n’a pas duré longtemps.

Mais c’est le passé. Il est mort et enterré. Comme moi ici dans ce tombeau où il me tient à sa merci.

La Fille dans le miroir :

Où il nous tient à sa merci. Je suis comme toi. Si tu ne peux t’échapper, je ne le peux pas également, même si cette prison m’a rendu la liberté. Chut, j’entends du bruit. Ne dis plus rien. Il arrive.

M

à suivre....


  
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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2009-03-19 10:47:39 

 WA - Participation exercice n°56 part 2 & fin.Détails
La fin... et bon courage! C'est une histoire assez bizarre finalement.

________________________


LA PRISONNIERE DU MIROIR


SCENE 2


La porte du fond s’ouvre. Un homme pénètre dans la pièce sans fenêtre. Il est grand, très grand, massif. La fille sur le lit ne bouge pas et ses yeux sont clos. Il tourne ostensiblement le dos au miroir.


L’Homme :

Je sais que tu es réveillée. Ton visage est différent quand tu dors. Une forme d’absence que je ne peux maîtriser.

La Fille :

Quel jour ? On est quel jour ? Dis-le moi.. J’ai perdu le compte des jours... dis-le moi !

L’Homme :

Jeudi, vendredi, dimanche... quelle importance ? Ce qui importe vraiment c’est le temps que tu passes avec moi. C’est le temps que nous partageons ensemble. Tout ce que je peux te dire, je te l’ai déjà dit Tu es restée ici plus longtemps que toutes les autres avant. Quelque chose de différent m’intrigue en toi. Quelque chose que j’entrevois et qui me fascine même si je n’arrive pas à dire exactement quoi. Mais il y aura une fin à l’histoire, c’est sûr... ça aussi je te l’ai dit... Il y a une fin à toutes les histoires. En fait, c’est ce que je préfère quand je lis un bouquin. La dernière page, sous le dernier paragraphe, l’apparition magique du mot de trois lettres en gros et gras caractères. Finalement, je ne dévore les lignes que pour arriver plus vite à ce putain de mot. J’en rêve tout le temps avant. J’aime les fins. Autant que je m’en souvienne, je n’ai jamais eu de vrai commencement. C’est ennuyeux les commencements. Il faut placer le décor, les personnages, trouver l’intrigue et les péripéties et puis remplir, remplir.... Jusqu’à ce que la fin devienne incontournable. Ce sont les fins qui ont jalonné ma vie, qui ont structuré mon existence. Je n’aime que les fins.


La Fille :

Détache-moi s’il te plaît. J’ai mal aux poignets et mon dos n’est qu’un noeud de douleur. J’ai faim aussi. Très faim.

La Fille dans le miroir :

Tu joues à quoi ? Que crois-tu qu’il recherche ? Chaque jour, il réclame son dû. Il prélève son tribut. C’est sa seule façon d’être au monde. Il est si seul dans son enfer quotidien. Je t’ai dit que je le connais mieux que toi. Tu veux savoir pourquoi ? Tu veux que je te montre comment ? Demande-lui donc de regarder dans le miroir !

L’Homme :

La faim n’est plus un problème pour toi. J’ai écouté les infos et j’ai lu les journaux. Ils disent que tu es déjà morte. Ta photo a disparu des flash télévisés. L’actualité va vite. Il y a encore eu des morts en Irak, des morts en Afghanistan... il y a tant de morts qui ont pris ta place. Moi, je dis que ce sont les morts qui nous montrent la route. On parle de moins en moins de toi, cela signifie qu’ils parlent de moins en moins de moi non ?
La Fille :

Pourquoi tournes-tu le dos au miroir? C’est vrai ça...pourquoi lui tournes-tu tout le temps le dos? Je ne crois pas t’avoir vu une seule fois le regarder en face ? Et si tu ne peux le regarder en face, pourquoi l’avoir posé ?

L’Homme :

Le miroir, ah oui... il y avait un miroir dans le dortoir là-bas. Juste en face des lits. Un miroir qui nous renvoyait inlassablement nos peurs et nos démons. Mes peurs et mes démons en particulier. Il y a des images qui sont gardées prisonnières du miroir, des images horribles et douloureuses. Des images fantomatiques qui dansaient dedans alors qu’ils faisaient tous semblant de dormir. Moi aussi, j’ai fait semblant de dormir. Nous avons tous fait semblant de dormir et de ne rien entendre. Tu ne peux pas t’imaginer ce que cela fait de ne pas bouger dans le noir, de crisper ses paupières pour ne pas qu’elles s’ouvrent intempestivement sur l’horreur qui se déployait juste à côté. Tu ne peux t’imaginer ce que cela fait de garder ses bras inertes le long du corps, par-dessus la couverture, en réprimant cette envie insupportable de se boucher les oreilles. Afin de ne pas entendre les gémissements et les cris, les râles et les coups. Quand je suis parti, je n’ai jamais plus regardé dans un miroir mais paradoxalement, je n’ai jamais pu vivre bien loin non plus. C’est une répulsion qui m’attire et qui m’est nécessaire. Il y a tout au fond des miroirs tant de choses qui ne demandent qu’à être révélées. Je sais que j’y suis quelque part prisonnier aussi mais je sais aussi que je ne supporterais pas de voir cette image de moi.

La Fille dans le miroir :

Il a raison Toi, tu ne vois que son dos dans le miroir. Mais moi, je vois son visage et je pense que nous ne voyons pas le même homme. Il est jeune et fragile. Il est perdu et pourtant il espère. Il refuse d’affronter de qu’il est de l’autre côté, ce qu’il est devenu. Ce n’est pas lui...

L’Homme dans le miroir :

A qui parles-tu ? Nous sommes seuls ici. Je ne vois que toi. Tu sais bien que je t’aime et que je ne te quitterai jamais. J’ai l’impression de vivre par intermittence mais ce que je sais, c’est que malgré tout mon amour, tu te meurs un peu plus chaque fois que tu m’appelles à toi. Tu es toujours un peu plus pâle, un peu plus lasse. Comme si la vie te fuyait inexorablement. Je ne sais pas si ce que je vis est un rêve mais ce n’est que dans ce rêve que j’ai l’impression de vivre.

La Fille dans le miroir :

Il y a un monde en dehors de nous. Un monde tellement différent qu’il nous est définitivement inaccessible. Un monde brutal et gris, sale et douloureux, un monde où tout ce que nous sommes est aussi plus noir et plus glauque. Je sais bien que tu ne peux te retourner et c’est mieux ainsi. Si jamais tu étais tenté de regarder par-dessus ton épaule, je crois que nous serions frappés par la même malédiction qui a scellé le destin d’Orphée. Notre univers se briserait en mille morceaux et nous nous perdrions à jamais. Tu veux savoir à qui je parle? Je ne parle qu’à moi-même en fait, une étrange forme de monologue... je deviens sans doute un peu folle. Ce mal qui me ronge entame désespérément mon énergie. Regarde, j’ai les bras qui me font tellement mal qu’il n’y a que dans cette position que je puis trouver un peu de repos. Oui, je parle toute seule parce que tu n’es pas avec moi. Tout contre moi.

La Fille :

Je ne vois effectivement que ton dos dans le miroir. Je sais ce qui te fait si peur. Tu ne veux pas voir ce que tu es devenu pour laisser une chance à ce que tu as été d’être à nouveau. J’ai fait aussi beaucoup d’erreurs et je me suis trompé sur toute la ligne. Je n’ai pas fait confiance aux bonnes personnes, à celles qui m’aimaient et qui me voulaient du bien. Non, j’ai suivi celles qui m’ont entraîné sur le chemin où règne l’ombre. Ce chemin qui m’a conduit jusqu’ici. Le caniveau longe toujours le trottoir et bien souvent, ce qui traîne sur l’un finit dans l’autre. Je ne suis qu’une pauvre pute dont le sort a fait un tout petit tour de manège enchanté et puis a quitté la scène. Personne ne s’en est aperçu. Et toi, tu n’es qu’un tueur de putes comme ce beau pays a réussi à en enfanter beaucoup. Pourquoi tu ne te retournes pas? Tu dis que tu aimes les fins. Cela serait une excellente fin pour cette histoire non ? Tourne-toi et contemple celui que tu es réellement. Enterre une fois pour toutes ce qui reste de pur en toi. Moi, je vois mon reflet et je sais que j’ai bousillé ma vie. Mais la fille dans le miroir m’a pardonné et je crois que je suis en paix avec moi-même maintenant. Cela n’a pas été douloureux, à peine dérangeant. Dans le miroir qui te fait si peur, nous sommes tels que nous aurions pu être.

L’Homme :

Tu parles... tu parles.... et tu m’embrouilles l’esprit. Il est temps d’en finir. Le miroir n’est pas pour moi. Le miroir n’est pas pour toi non plus. C’est juste un témoin. Dans ses reflets sont prisonnières toutes celles qui ont été ici avant toi. Je n’ai nul besoin d’y plonger mes regards, elles sont toutes présentes et elles y resteront à jamais. Pourquoi ? Je n’en sais rien, c’est plus fort que moi.

L’Homme dans le miroir :

J’ai envie de t’embrasser. De t’embrasser longtemps.. Si je pouvais par mon souffle t’insuffler une nouvelle énergie, interrompre cette glissade vers le néant... Si je pouvais, par le miracle de ce baiser, te maintenir en vie, je voudrais qu’il ne s’arrête jamais. Ta peau est si douce et ton corps contre le mien est une exquise sensation. Laisse-moi poser mes lèvres sur les tiennes et que le temps nous emporte à jamais...


Le miroir se ternit progressivement au fur et à mesure que s’achève le destin de la fille sur le lit sous l’étreinte implacable de son geôlier. Fondu au noir.

M

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-03-19 23:13:50 

 Commentaire Maedhros, exercice n°56Détails
TU L'AS FAIT! Tu as eu la force de surmonter ta répugnance et le courage de te lancer: rien que pour ça, smack! Tu continues à me surprendre!
Qui plus est pour un coup d'essai, c'est un coup de maître. C'est du pur Maedhros, et ça passe la rampe! Bien sûr, ce n'est pas un texte facile. C'est un questionnement sartrien sur l'Identité dans le Temps, avec un personnage qui me rappelle un peu Goetz dans l'acte I de "Le Diable et le Bon Dieu": lui aussi préfère prendre plutôt que recevoir. C'est un texte dépouillé à l'extrême: aucun repère temporel, un décor réduit au minimum, les personnages n'ont rien qui leur appartienne, même pas un nom. Deux personnages. On est dans l'essentiel. Et puis de deux, tu en fais quatre, et nous revoilà dans la spirale infernale, à essayer de ne pas perdre pied. Je me souviens avoir ressenti la même sensation de vertige en allant voir une pièce de Sartre, avec les acteurs qui ne s'arrêtent jamais alors qu'on aimerait bien avoir le temps de savourer une phrase, d'y réfléchir... Tu fais partie des auteurs cruels, qui malmènent leur public. Ce n'est pas commercial, mais quand on aime, on est accro...


Les ressemblances et les différences des deux personnages hors miroir tiennent lieu d'intrigue. Tous deux blessés dans leur narcissisme, elle trouve la rédemption dans le miroir, alors que lui joue avec l'idée du peut-être, mais ne parvient pas à l'affronter. On se dit que le hasard n'existe pas et que ces deux-là se sont reconnus, même si l'histoire doit suivre son cours inéluctable. Quand on y ajoute le reflet de chacun et ce qui se passe entre les deux reflets, c'est un kaléïdoscope d'identités qui s'entremêlent, et se retrouvent pour mieux se perdre... Je suis personnellement très impressionnée par ce genre d'exercice de haute voltige!

Sur le plan de la mise en scène: la fille est allongée tout le temps; quand tu dis qu'elle se tourne vers le miroir, en fait elle ne peut tourner que la tête. J'y vois deux inconvénients: les spectateurs ne la voient pas bien, et dans le miroir on ne la voit pas mieux. Et si elle pouvait s'asseoir, en n'étant attachée que d'une main? Mais peut-être as-tu choisi la position couchée et immobile pour signifier sa totale impuissance.


Quelques détails:
- éducation qui tenait tant à maman: à laquelle maman tenait tant, non?
- cette religiosité qui te faisait peur, t'ouvrir..., avoir... : tu mets sur le même plan un nom et des verbes, ça choque un peu l'oreille


Des fautes de frappe:
- le champagne allait couler à flots
- tout ce que je peux te dire
- je ne dévore les lignes
- moi je dis que ce sont les morts
- pourquoi tournes-tu le dos au miroir?
-afin de ne pas entendre les gémissements
- tu es toujours un peu plus pâle
- la fille dans le miroir m'a pardonné


Quand tu publieras en un recueil toutes tes nouvelles sur le thème du miroir, je pense que ce texte constituera une fin élégante...
Narwa Roquen,vulnerant omnes...

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z653z  Ecrire à z653z

2009-03-27 00:47:57 

 le fameux lâcher prise ...Détails
... auquel mon esprit d'analyse se refuse...
Quand un texte tourne (tourbillonne) autant sur lui-même, j'ai toujours le réflexe de prendre du recul et de m'impatienter de l'éventuel changement de rythme qui vient rarement dans les textes de Maedhros (j'entends parfois le boléro de Ravel quand je les lis).

Sinon, excellente idée de faire naître deux personnages de plus.

z653z, pourquoi je réponds ici

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2009-09-07 13:49:43 

 Exercice 56 : Maedhros => CommentaireDétails
Oh, un miroir ! Ca faisait longtemps, hihi ! Je ne sais pas trop quoi dire de ce texte. Il m’a laissée perplexe. Je me suis embrouillée dans les personnages et leurs reflets et je n’ai rien compris de la fin, snif. Ah, si, j’ai trouvé que la phrase « Tu crois que nous jouons dans un épisode de FBI Portés disparus? » jurait avec le reste du texte. Cela met un élément trivial dans un texte d’un ton extrêmement sérieux.

Est', larguée.

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