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 WA, exercice n°119 Voir la page du message 
De : Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen
Date : Jeudi 4 avril 2013 à 22:52:56
Allez, un exercice un peu ludique pour lutter contre la morosité de la météo ( et du reste...).
Prenez une idée absurde, sotte et grenue au possible, le genre d'idée que si vous êtes rationnel et à jeun vous appelez "idée idiote", mais dont l'incongruité vous semble assez amusante. Par exemple "le mensonge n'existe plus", "tout le monde est obligé d'adopter trois grenouilles", ou "le Temps se dérègle, et perd ( ou gagne) dix minutes par heure".
Et puis poussez cette idée jusqu'à l'extrême de votre imagination... Il pourrait en résulter ( si vous ne devenez pas fou avant d'avoir fini votre nouvelle) une histoire vertigineuse dont le lecteur devrait se souvenir quelque temps...
Encore une fois vous aurez quatre semaines, jusqu'au jeudi 2 mai, pour accomplir votre mission, si vous l'acceptez.
Je rappelle à tous ceux qui n'ont jamais participé que les exercices de la WA sont ouverts à tous, qu'il n'est pas besoin de montrer patte blanche, que tous les textes seront commentés, que cette rubrique est faite pour tous ceux qui prennent du plaisir à écrire, qu'elle ne vit que grâce à ses participations, et que si vous êtes en retard pour la date limite... vous serez juste comme tout le monde! Par ailleurs si ce thème ne vous inspire pas, vous pouvez aussi écrire sur un des thèmes passés, et vous serez commentés également.
Amusez-vous, faites-nous rire ou trembler, vous êtes libres du genre (SF, fantasy, fantastique...), libres du style et de la longueur du texte. Et après on dira que je suis exigeante!
Narwa Roquen,fan du site xkcd- what if, pour ce qui est de pousser les idées jusqu'au bout, c'est un modèle du genre...


  
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Réponses à ce message :
Maedhros  Ecrire à Maedhros

2013-04-24 20:02:59 

  WA - Participation exercice n°119Détails
Cette histoire a une histoire.... j'ai un peu détourné la consigne. Mais nul ne pourra me reprocher de n'être pas allé jusqu'au bout de l'absurde. Ce texte m'est venu en écoutant certains commentaires sur une affaire récente. J'ai incrusté le tout dans un contexte aux racines très contemporaines aussi. Mais désolé, ce n'est pas un texte très gai...

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TALIONEM IMPONERE


J'avais oublié la BO...

Il claque la porte, laissant le monde et son cortège de bruits à l'extérieur. Il donne un tour de clé. Personne ne violera son intimité.

En posant sa sacoche près de la console de l'entrée, il éprouve une brève bouffée de liberté. D'évasion. C'est la fin de la semaine. Deux jours hors d'atteinte. Il n'aura pas à faire semblant devant ses collègues de bureau. Il gèrera son temps comme il l'entendra.

Et puis, c'est plus fort que lui, la honte succède sans transition à ce sentiment de paix fugitive. La honte de se sentir plus léger soudain, comme si le poids écrasant qui pèse sur ses épaules avait disparu. Mais ce n'est pas possible. La vie ne sera jamais plus comme avant. Sa vie. Leur vie. Le couloir est silencieux. La cuisine est vide. Personne dans le séjour. Elodie, sa femme, n'est pas encore rentrée. Il consulte sa montre. Presque six heures. Elle ne va plus tarder. Elle a dû faire un crochet par le supermarché. Il lorgne vers le bar à roulettes où trônent plusieurs bouteilles d'alcool. Un whisky? Il repousse cette idée. Trop facile de s'enfuir dans l'ivresse. Il en est sorti difficilement. Mais l'idée est pernicieuse et revient sournoisement à la charge. Juste un doigt, autant dire rien du tout! Juste pour teinter la grisaille ordinaire d'un léger halo ambré. Il tend la main mais arrête son geste avant de saisir la bouteille de pur malt. Il chasse définitivement cette idée de son esprit. Il ne doit pas céder à cette tentation. Il en a fait la promesse. Ah, s'ils n'étaient pas là, dehors, les autres, à le regarder de travers, à épier le moindre de ses gestes, voir s'il ne se dirigerait pas vers...Non! Il fait le vide dans sa tête. S'il y repense encore, il va devenir fou, c'est sûr!

Il s'assied dans le canapé. Le grand téléviseur lui fait face. La télécommande attend sur la table basse. Dans les profondeurs de l'écran éteint, il y a un inconnu, aux traits indéfinissables dans le contre-jour, qui le dévisage. Il se sent si fatigué comme l'un de ces stupides coureurs de fond. Il court un steeple-chase interminable où, incapable de bien sauter, il heurte chaque obstacle et cela lui brise les jambes. Encore et encore. Mais à chaque fois qu'il tombe en hurlant, il se relève malgré la douleur et continue de courir parce qu'il doit franchir cette putain de ligne d'arrivée. Après, il pourra s'agenouiller et souffler, souffler et prier, prier et pleurer. Oui, enfin pleurer sans que plus personne ne s'étonne, n'attende de lui autre chose. Vous ne comprenez-pas?

Il est perdu dans ses pensées. Il se rappelle un passé pas si lointain. Un passé heureux dans cet appartement maintenant froid et vide, même si Elodie et Antonin sont là. Un passé fait de petits riens, de petits instants de bonheur volés entre deux portes, de regards sans nuage qui s'échangent et qui se comprennent, de ces mille choses insignifiantes qui composent une vie banale mais ô combien irremplaçable et précieuse. Il y a une ombre juste là qui s'évanouit peu à peu. Que c'est dur de la laisser disparaître. Que c'est cruel de la voir s'estomper sans pouvoir rien y faire. Les larmes lui montent aux yeux. Comme chaque fois qu'il y pense.

Mais même cet instant de mélancolie est terni par l'image de la meute qui hurle tout autour, cette meute aux yeux brillants et aux crocs baveux. Cette meute qui ne le lâche pas. Qui ne les lâche pas. Il frissonne malgré lui. Ils sont tous si monstrueusement compatissants.

L'horloge de la box clignote. Le temps passe à vide. Ce vide qu'il ne parvient pas à combler. Ce vide qui l'attire comme s'il était en équilibre au bord d'un gouffre dont le fond se perd dans l'obscurité. Il est sûr qu'elle n'est pas là. Mais il y a quelque chose qui l'appelle d'en bas. Une autre image l'assaille comme une lame brille dans la nuit. Une envie de violence qu'il a appris à reconnaître. Une pulsion familière, née de sa part d'ombre et de chaos. Ses clés de voiture sont apparues comme par enchantement dans le creux de sa main. Il n'a qu'à se lever et passer la porte. Tout le reste sera facile. Une suite logique et implacable d'évènements qui le conduira là-bas. Il n'a qu'à faire le premier pas. Si simple... Non. Horrifié, il jette les clés loin de lui. Elles tombent avec un bruit mat sur le tapis. Non, ce n'est pas lui, ce n'est certainement pas lui, quoi qu'en disent les voisins. Quoi qu'en disent les anciens amis. Quoi qu'en dit la ménagère de moins de cinquante ans devant son poste de télévision. Quoi qu'en pensent ses parents. Quoi qu'en disent les sondages. Il n'ira pas. Ils n'iront pas. Elodie partage son avis en tout point. Il connaît des exemples où le couple prétendument soudé a volé en éclats. Les émissions de téléréalité sont friandes de ce type de reportages.

Un bruit de clé bataillant dans la serrure provient de l'entrée. Il se redresse d'un bond. Elodie. La porte palière s'ouvre et sa femme pénètre dans l'appartement. En le voyant, un sourire flotte sur ses lèvres.

"Tu es rentré tôt!" dit-elle en posant les sacs de plastique qui débordent de courses.

"J'en ai eu marre aujourd'hui. J'ai plié mes affaires, filtré mon téléphone et le travail m'attendra bien jusqu'à lundi!" répond-il en poussant un soupir.

"Mauvaise journée, mon chéri?" rétorque-t-elle en s'approchant de lui et en l'enlaçant tendrement.

"Pfoufff... je crois que j'avais surtout hâte que cela finisse, tu sais ce que je veux dire! Franck, le chef de la division Etranger a tenu à déjeuner avec moi. Il a tourné un peu autour du pot mais il a fini par mettre le sujet sur le tapis! J'ai pris sur moi, je n'ai rien laissé paraître. Il n'a pas pu s'empêcher de me faire la leçon, à sa manière, en y mettant les formes bien sûr, je suis un cadre supérieur comme lui. Il m'a dit qu'à ma place... et patati et patata... qu'il comprenait pas pourquoi je n'usais pas de mes prérogatives car j'étais dans mon bon droit! Tu entends ça? Dans mon BON droit! Comme si c'était un droit naturel! Il semblait choqué que j'y renonce! Il m'a débité toutes les fadaises habituelles! Il me prend lui aussi pour une sorte d'handicapé social! Emporté par son élan, il a failli prononcer les mots qui m'auraient fâché pour de bon mais au dernier moment, il s'est retenu. Il a dû comprendre qu'il avait été trop loin alors il a bredouillé une vague excuse. Tout le reste du repas, nous n'avons pas échangé une seule parole. Tu te rends compte! Franck! Je le connais depuis l'école de commerce. Je suis le parrain de son fils! Il... il..."

Il ne parvient pas à poursuivre, les mots s'étranglent dans sa gorge. Elodie a toujours été la plus forte des deux. Elle l'embrasse doucement.

"Nous devons tenir bon, Jacques, en souvenir d'elle, parce que nous défendons ce en quoi nous croyons. Il ne reste que quelques heures et tout sera fini. Demain matin. Et ensuite, cela sera l'affaire de la Justice, la vraie! Tu dois être fort, pour moi, pour Antonin, pour elle! Rappelle-toi bien de ça, Jacques! Rien n'est plus triste que ce qui nous arrive mais rien ne serait plus monstrueux que ce qu'ils veulent de nous! Promets-moi de ne pas craquer si près du but. Tu me le promets?"

En cet instant, le ciel bleu se résume à l'éclat brillant de ses yeux remplis d'amour. Il sent ses forces et son courage affluer à nouveau. C'est tellement bon de se sentir vivant, voir la pluie et la tristesse s'éloigner pour un temps même si le soleil qui les réchauffera vraiment ne se lèvera pas de sitôt. Mais ils pourront tourner la page, commencer le deuil nécessaire et se reconstruire pas à pas, sans rien oublier mais sans renier ce qu'ils ont toujours défendu. Ils tiendront bon, contre vents et marées, contre l'incompréhension assassine de cette meute qui gronde à leur porte, de plus en plus fort au fur et à mesure que le terme du délai approche. Elle attend que le sang coule encore.

Il hoche la tête en signe d'assentiment puis il s'empare des poches et les dépose sur la table de la cuisine. Elodie le suit. Elle ouvre le réfrigérateur et sort une bouteille d'eau glacée. Elle s'en sert un grand verre et le boit d'une traite.

"Cela fait du bien mais c'est froid!" rit-elle, les lèvres humides.

"Ta journée a été bonne, chérie?" demande-t-il en s'asseyant.

"Pas meilleure que celle d'hier! J'ai la chance que mes élèves ne soient pas encore en âge de bien comprendre. Mais j'avais un rendez-vous avec un parent aujourd'hui..."

"Tu n'as pas pu le reporter?" s'étonne-t-il.

"Non, c'était à ma demande. Le gosse a vraiment des difficultés. Tu sais, c'est celui dont je t'ai déjà parlé. Celui qui refuse de communiquer et qui s'exclut de plus en plus de la classe!"

"Celui dont le père a été reconduit à la frontière?"

"Oui! Tu verrais sa mère! Cette pauvre femme souffre, cela se voit à la façon dont elle s'exprime, à son maintien. Elle agrippe son fils comme si elle redoutait qu'on vienne l'enlever à chaque instant. Je crains qu'un de ces jours, elle le retire complètement de l'école et cela serait pire encore! J'ai tenté de la conseiller mais elle n'a rien voulu entendre. Je lui ai expliqué du mieux que j'ai pu les conséquences de cet état de fait sur l'évolution psychologique de son enfant. La résonnance sur sa construction mentale. J'étais à deux doigts de la convaincre, j'en suis sûre. J'avais besoin d'un petit peu de temps encore et je suis certaine qu'elle m'aurait écoutée. Mais, entre deux sanglots, j'ai vu quelque chose voiler son regard. Elle m'a dévisagée comme si elle me rencontrait pour la première fois. Elle m'a dit d'une voix blanche : "Qui es-tu pour me faire la leçon? Je suis sa mère, tu comprends. Ils sont venus chercher son père parce que ses papiers n'étaient pas en règle. J'ai eu beau pleurer, payer l'avocat mais le juge il a dit que c'était la Loi! Alors ils l'ont mis dans l'avion et il est parti. Le juge a dit que nous aussi, on pouvait l'accompagner si on voulait! Mais là-bas, c'est la guerre et la famine. Alors, il est parti et je suis restée avec mon enfant. J'ai promis à mon mari que je ferais ce qu'il faudrait pour notre enfant! Alors, si quelqu'un touche un cheveu de mon fils, je te jure que je lui fais la misère! Mais toi? Tu crois que je ne t'ai pas vue à la télé? Qu'as-tu fait pour ta fille? Que vas-tu faire? " Elle m'a dit ça sans méchanceté ni agressivité. Non, juste parce qu'elle ne savait plus quoi dire. Mais j'ai pris ces mots en pleine figure et je n'ai pas su quoi répondre à mon tour. Elle s'est levée, à pris son fils et ils sont partis. J'ai serré les dents et j'ai regardé les dessins d'enfants sur les murs de la classe. Ils m'ont dit que j'avais raison et qu'elle avait tort mais qu'elle ne le savait pas. Dans ces dessins réside la vérité. Toute cette vie, toutes ces promesses, ces oiseaux de toutes les couleurs, ces familles unies qui se tiennent par la main. Il y a le vrai monde dans ces dessins, j'en suis persuadée. Le monde tel que nous le rêvons. Un monde sans violence et sans désillusion. Un monde perpétuellement innocent. Tu vois, ma conviction reste ferme. Tu te rappelles les manifestations contre le mariage pour tous?

"Comment oublier? C'est là que nous nous sommes rencontrés! Tu étais l'égérie d'un groupuscule d'extrême-gauche!"

"Arrête, à tes yeux, tout ce qui n'était pas libéral était forcément d'extrême-gauche! Alors tu te rappelles aussi cette femme qui se prenait pour la Marianne du tableau de Delacroix? La Liberté conduisant le peuple. Tu te souviens de ses pathétiques appels à la guerre civile? Les échauffourées du faubourg Saint-Germain? Je t'y vois encore. On avait quoi, vingt ans? On n'était pas du même monde mais ce qui nous unissait était plus fort que ce qui nous séparait!"

"Oui, dit-il avec un franc sourire cette fois-ci, ce fut bien la première et la dernière fois que je prenais part à un mouvement qui soutenait le régime socialiste! A Saint-Germain, ce fut vraiment chaud! Tu étais prise à partie par trois loubards au crâne rasé. Je n'en menais pas large mais dès que je t'ai vue, j'ai su que cela allait le faire entre nous! Alors, j'ai troqué mes fringues à la mode contre la panoplie du justicier masqué, les muscles en moins, pour voler à ton secours ! "

"Si je me souviens bien, ils t'ont quand même bien amoché et si les CRS n'étaient pas arrivés à temps, ce n'est pas simplement à l'hôpital qu'on nous aurait peut-être amenés! Rappelle-toi de ce que les Cassandre piaillaient sur tous les perchoirs! Elles disaient que la loi scélérate marquerait la fin de la civilisation, la fin des valeurs morales, la mort de la famille idéale... qu'on allait même assassiner les enfants! Les parents homosexuels n'étaient pas capables d'éduquer les enfants sans les pervertir! On a tenu bon néanmoins!

"Pour ce que cela a donné? Je croyais que nous avions gagné quand la loi a été promulguée après l'échec du recours devant le Conseil Constitutionnel. Mais souviens-toi de ce qu'a fait le gouvernement dix ans après? Il a détricoté la loi Taubira et les choses sont revenues à la case départ! Et c'est même pire qu'avant!" dit-il en faisant une moue dépitée.

"Les dommages collatéraux de la crise, lui répond-elle. On n'est pas obligé de faire ce qu'ils croient qu'on brûle de faire! Qu'ils aillent tous se faire foutre! J'aime ma fille quoi qu'ils en pensent. Nous aimons Marie. Et c'est justement parce que nous l'aimons que nous ne ferons pas ce qu'ils attendent de nous! N'est-ce pas?"

Elle a trouvé les mots justes. Elle trouve toujours les mots justes. Marie est partie. Il la pleure jour et nuit. Elle ne reviendra plus. Il n'entendra plus le son de sa voix, la voix joyeuse et insouciante de ses dix huit printemps. Elle dort pour toujours au sommet de la montagne qu'elle aimait tant. Sa beauté resplendit dans chacune des étoiles d'argent qui parsèment la prairie d'altitude. Marie. Cela fait quatre mois.

Elodie range les courses. Il l'entend vaquer dans la cuisine et en fermant les yeux, il pourrait presque croire que tout est rentré dans l'ordre. La sonnerie du téléphone retentit. Le temps se fige. Qui les appelle à cette heure?

"C'est peut-être Antonin!" souffle Elodie qui tient une brique de lait.

Jacques se dirige sans se presser vers téléphone. La sonnerie ne s'interrompt pas et insiste. Il saisit le combiné.

"Allo, dit-il d'une voix qu'il espère assurée.

Elodie le voit froncer les sourcils et blêmir d'un coup. Elle l'entend s'emporter :

"Laissez-nous tranquille! Foutez-nous la paix!"

Il raccroche violemment le téléphone sur sa base et lui lance une oeillade impuissante. "Ils ont réussi à mettre la main sur notre nouveau numéro!"

"Alors, enlève la prise murale. Je ne veux pas qu'ils nous emmerdent ce soir!" lui conseille-t-elle.

Il fait comme elle dit. Cela fait quatre fois qu'ils sont obligés de changer de numéro. Ils ont été régulièrement harcelés d'appels intempestifs de gens bien intentionnés. Au début, c'étaient des marques de soutien et de compassion. Des gens bouleversés par le drame qu'ils vivaient. Puis les forces de l'ordre appréhendèrent un suspect et celui-ci passa rapidement aux aveux. Alors la nature des appels évolua. La Ligue de Solidarité envers les Victimes se manifesta en leur proposant le service de ses avocats spécialistes des nouvelles procédures.

La conjonction était propice à enflammer les réseaux sociaux et les flux d'information continue. Cela faisait tout juste cinq ans que le nouveau cadre pénal avait été instauré par les parlementaires des deux chambres réunis en congrès à Versailles à la suite du référendum qui avait approuvé, à une écrasante majorité, la proposition de la présidente de la République. Des débats passionnés réunirent à nouveau d'éminents pénalistes qui dissertèrent avec brio sur les amendements apportés à la loi du 9 octobre 1981 et le contentieux qui opposait toujours l'Etat français et la Communauté Européenne devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme. En effet, les nouvelles dispositions semblaient enfreindre à la fois la convention européenne des droits de l'homme et le second protocole facultatif au pacte international des droits civils et politiques. L'Etat français contestait avec la dernière vigueur ce qu'alléguaient les autorités de Bruxelles. La France était sans doute regardée avec scepticisme et réprobation mais ses juristes ont toujours été brillants et leurs démonstrations tenaient en échec les différents procureurs européens qui s'étaient succédés dans ce dossier emblématique. En outre, la France n'était pas isolée. Elle comptait des alliés sur tous les continents. Certains n'avaient pas hésité à s'inspirer de son exemple.

Tout changea quand il devint évident que Jacques et Elodie refuseraient de recourir aux nouvelles dispositions prévues par la loi en pareilles circonstances. C'était la première fois que cela arrivait. L'incompréhension succéda à l'apitoiement. Le public s'échauffa, frustré de ne pas assister à la fin attendue. Des âmes charitables les inondèrent de propos véhéments qui tentaient de les ramener à la raison commune. Comment pouvaient-ils rester ainsi, sans rien faire, alors que l'assassin de leur fille était vivant? Comment pouvaient-ils rester aussi indifférents et froids. Les voix qui tentèrent de les défendre furent bien vite couvertes par les clameurs de ceux qui réclamaient que justice soit faite! Comment ne pas saisir le glaive que le code pénal leur tendait dans sa bénévolence? Comment supporter que Marie soit morte après avoir subi les pires outrages et que le monstre continue de vivre? Un monstre qui n'en était pas à son premier crime.

Les amis de Jacques et Elodie s'éloignèrent d'eux, étrangement silencieux, comme s'ils avaient contracté une maladie virale incurable, une sorte de lèpre qui les bannissait à la marge de la société. Les commerçants serraient les dents quand ils les servaient. Sur les trottoirs, on se retournait sur leur passage, on les montrait du doigt. Au début. Puis vint le temps des invectives et des insultes à peine voilées. Ils allèrent porter plainte au commissariat de leur quartier. L'officier qui remplit le formulaire leur fit comprendre à mots couverts qu'ils allaient en baver jusqu'à la fin du délai réglementaire. Rien dans le code pénal ne les obligeait à quoi que ce soit, bien sûr, mais il leur expliqua que leur position était tout simplement intenable dans la société actuelle, traversée par de profondes soubresauts identitaires. Il les raccompagna jusqu'à la sortie et, tout en refermant le sas de sécurité, leur souhaita bonne chance.

On sonne à la porte d'entrée. Trois coups, une pause et deux autres ensuite, plus rapides. Un code convenu entre eux. C'est Antonin. Elodie va ouvrir. Jacques l'entend pousser un cri d'effroi. Il se précipite à son tour. Il voit son garçon, âgé de quinze ans, le visage tuméfié, un oeil quasiment fermé, encadré par deux policiers étrangement indifférents. L'un d'eux leur dit :

"Bonsoir m'sieur dame. On ramène vot' fils qui a été pris dans une bagarre à la sortie de son entraînement de foot !"

"Comment c'est arrivé? s'exclame Elodie.

"Oh, des histoires de jeunes! Vous savez, madame, à cet âge, c'est courant. Un regard de travers, et boum, ça part!" répond le policier."Bon, cela n'a pas l'air bien méchant. Pas de dent cassée et il n'a pas voulu qu'on l'emmène à l'hôpital pour un examen de contrôle!"

"Mais..." commence à dire Jacques quand son fils le coupe :

"Laisse tomber p'pa! C'est rien! "

"Comment ça c'est rien! Tu t'es bien regardé!" dit Elodie.

"Il a raison m'man! C'est bon!" répond nerveusement Antonin.

"Bien, m'sieur dame, on a notre service à reprendre! Alors si vous n'y voyez pas d'inconvénient on y retourne! Au revoir"

Les deux policiers se dirigent vers l'ascenseur quand celui qui n'a pas ouvert la bouche se retourne vers eux:

"Sauf vot' respect, prenez-le comme vous le voulez mais réfléchissez bien à ce vous allez faire. Vous ne voulez pas que vot' fiston revienne avec la figure à l'envers demain, après-demain et encore le jour d'après non? Alors, réfléchissez-y bien et prenez la bonne décision! Il vous reste cette nuit. C'est largement suffisant. Le juge lui, il dormira toujours sur ses deux oreilles. Pas vous!"

"Qu'est-ce que tu racontes!" l'admoneste son collègue, agacé.

"Qu'est-ce que vous vouliez dire! crie Jacques. Je peux avoir votre nom? Donnez-moi votre nom!"

"Excusez-le! Ses mots ont dépassé sa pensée. Allez toi, rentre là-dedans et ferme ton clapet!" répond le policier en poussant l'autre fonctionnaire dans la cage d'ascenseur qui s'ouvre à point nommé.

"Votre nom, je veux votre nom..." s'acharne Jacques en les poursuivant sur le palier mais la porte de l'ascenseur se referme déjà. De dépit, il assène un coup de poing sur le métal. Il revient vers Elodie et Antonin qui l'attendent sur le seuil de l'appartement.

"Tu vas me raconter ce qui s'est exactement passé!" demande-t-il à son fils.

"Mais avant, je m'occupe de lui! Antonin, suis-moi dans la salle de bain" intervient Elodie.

Antonin les rejoint dans le séjour après s'être douché et changé. La couleur des contusions a viré du mauve violacé à une teinte plus jaunâtre, en partie grâce à la pommade largement étendue dessus. Antonin s'assied dans un fauteuil face au canapé qu'occupent ses parents.

"On t'écoute!"

"Bon, si vous y tenez! Donc après l'entraînement, je suis allé au troquet avec Louis et Paul. A six heures, je suis parti et c'est sur le quai du métro que trois ou quatre mecs m'ont cherché des crosses. Au début, je croyais qu'ils en voulaient à mon Iphung mais j'ai vite compris que ce n'était qu'un prétexte!"

"Comment ça?" s'enquiert son père.

"Ils jouaient un rôle. Assez mal. On voyait bien qu'ils n'avaient pas l'habitude. Non, ils cherchaient autre chose. Ils m'ont demandé si je m'appelais bien Antonin. Mais ils connaissaient la réponse. J'ai voulu me dégager et c'est à ce moment que cela a dégénéré. J'ai bien tenté de me défendre mais à quatre contre un, et malgré mon gabarit, je n'ai pas fait le poids!"

"Et les témoins, il y avait sûrement des gens sur le quai du métro à cette heure? s'étonne sa mère. Ils ne se sont pas interposés?"

"Je n'ai vu personne bouger et j'étais trop occupé à parer les coups! Puis la sécurité du métro a déboulé et a fait fuir les mecs. Ensuite les flics m'ont ramené ici!"

"Tu leur a dis que ce n'était pas une simple bagarre!?"

"A quoi bon?"

"A quoi bon? tu te fous de moi? dit Jacques en levant les bras au ciel. C'était des militants du MPT!"

Antonin se tait et regarde le bout de ses chaussures. Le MPT, le Mouvement de Protection du Temple, a été officiellement créé après l'avènement de la Nouvelle République, lors du raz-de-marée qui avait porté une femme jusqu'à l'Elysée. Mais ses racines remontent plus loin. Il était en gestation dans les grandes manifestations du début des années 10 organisées contre l'adoption de la loi élargissant le mariage à tous. On pouvait déjà lire ses initiales sur les banderoles et les pancartes roses et bleues brandies dans les cortèges, même si les mots étaient différents. Jacques était convaincu que les agresseurs d'Antonin appartenaient au MPT, le service d'ordre musclé, mais officieux, du parti au pouvoir qui l'utilisait pour exécuter ses basses oeuvres.

Jacques ferme les yeux. Antonin n'a que quinze ans. Indirectement, il vient de payer pour les convictions idéologiques de ses parents. Jacques se sent inquiet pour la première fois. Ils s'en sont pris à leur fils. Un frisson parcourt sa colonne vertébrale. Que ses amis lui tournent le dos, il n'en a cure. Que les gens le toisent dans la rue, et alors? Que ses parents lui fassent grise mine, il s'en accommode sans difficulté. Mais son fils? Il a naïvement pensé qu'on le laisserait hors de tout ça. Il rouvre les yeux et coule un long regard à sa femme. Derrière elle, sur l'étagère, la chemise qui renferme tous les papiers que leur a adressés le Ministère public attire son attention. La notice d'explication de la loi, les formulaires à remplir, les différentes possibilités, les procurations vierges. Quand Jacques s'était étonné qu'aucun acte de renonciation ne figure parmi les pièces du dossier, le procureur de la République, en toussant pour s'éclaircir la voix, avait répondu que la loi n'avait pas prévu ce cas. En revanche, il lui était possible de ne pas exercer le droit qui lui était reconnu et c'était parfaitement légal.

Depuis cinq ans, neuf cas avaient réuni toutes les conditions requises pour déclencher les dispositions prévues par les nouveaux articles 12 et suivants du Code Pénal et leurs articles correspondants du Code de Procédure Pénale. Neuf criminels particulièrement abjects, dénués de toute humanité. Neuf psychopathes dangereux, neuf prédateurs assouvissant sans remords leurs instincts les plus vils. La peine de Mort avait été abolie en 1981 et la France ne l'avait jamais rétablie. En contrepartie, de brillants juristes, zélés et serviles, avaient conféré aux victimes un statut exorbitant et leur avaient créé un espace juridique original qui les plaçait, dans la procédure pénale, entre le policier et le juge. L'article 12 avait été utilisé à neuf reprises. A chaque fois, le juge s'était contenté de valider la peine dans une salle d'audience en liesse. A chaque fois, le banc des accusés était vide.

Jacques soupire et, lâchant la main d'Elodie, se lève lentement. Il se dirige vers une porte fermée tout au fond du couloir. Une porte fermée depuis longtemps. La chambre de Marie. Il tourne le bouton de porte et pénètre dans la chambre. Les affaires de Marie, le lit de Marie, le bureau de Marie, rien n'a bougé. Les livres sont toujours étalés au sol, le foulard est toujours noué autour de la lampe, les draps sont toujours repoussés au pied du lit. Il sent les larmes perler au bord de ses paupières. Marie. Combien elle lui manque! Il en perd le souffle. L'émotion entière et intense le submerge vague après vague. Marie. Elle lui sourit dans la photographie punaisée au mur. Elle était si jolie. Elle était si vivante. Si prometteuse. Et là, sous un pont, elle s'est envolée quand ses cris se sont tus. Avec les voitures juste au-dessus. Avec les bateaux sur la Seine juste à côté. Il faisait froid. Il faisait noir. Jacques repasse la scène encore et encore. Il voit le visage de l'assassin. Le visage du monstre. Il a lu les rapports de police et les aveux du monstre. Il a vu les photos judiciaires. Tout est dûment classé dans la chemise posée sur l'étagère. C'est ce qu'exige la procédure de l'article 12. Tout doit être fait conformément à la loi. Jusqu'au moindre détail nauséabond. Marie. Sur une autre photo, elle lui envoie un baiser du creux de sa paume, ses yeux pétillent de bonheur. Elle est assise sur le scooter qu'il lui a offert pour son bac avec mention. Son avenir était brillant. Elle aurait pu faire tout ce qu'elle aurait désiré. Tout. Et là, sous ce pont, en quelques instants, le monstre avait tout saccagé. Tout. Et plus encore.

Jacques refoule un sanglot. Sera-t-il aussi fort qu'Elodie? Résistera-t-il? Il s'attarde sur le petit singe qui, sur le drap, contemple fixement le plafond. C'était son doudou depuis qu'elle avait quatre ans. Il attend Marie avec patience, comme attendent les peluches.

"Bordel!" jure-t-il en claquant violemment la porte pour ne plus souffrir.

Elodie est là et elle l'enlace à nouveau. Elle lui caresse la nuque et l'apaise peu à peu. Elle lui murmure des mots à l'oreille. Il sent son coeur se calmer dans la poitrine.

"Encore une nuit, chéri! Encore une nuit! Demain matin tout sera fini. Veux-tu conserver cette pureté qu'incarnait Marie? "

Bien sûr qu'il le veut. Ils entendent soudain le générique du journal de vingt heures. La voix grave du journaliste vedette annonce les titres.

"Viens!" lui demande Elodie qui retourne vers le séjour.

Le premier reportage vient de commencer. C'est un micro-trottoir. Son objet est prévisible. Jacques écoute, horrifié, les propos peu amènes qui fustigent leur lâcheté, leur inhumanité, leur insensibilité. C'est leur fille, putain, dont il s'agit. Comment comprendre qu'ils ne veuillent pas châtier comme il se doit ce monstre? Ils pourraient se payer les services d'un professionnel agréé par les pouvoirs publics. La procuration qui est dans le dossier n'est pas faite pour les chiens, non? Moi, à leur place, j'y serais allée dès le premier jour. J'aurais pris l'épée ou la hache. Je me fous du sang. Je ne l'aurais pas laissé en vie ce pourri, ce dégénéré. Il n'a pas le droit de vivre. Je ne crois pas que la loi du Talion soit la plus grande avancée de notre société. Cela ne fera pas revenir Marie, non? Laissez-moi, j'ai le droit de dire ce que je pense! Moi, j'aurais utilisé le pistolet et j'aurais appuyé le canon sur sa tempe à ce monstre. Une balle entre les oreilles. Il ne mérite que ça! Pourquoi ils ne le font pas? C'est prévu par la loi, non? En tant que parents, en tant que victimes, ils ont le droit pour eux, non? On va pas payer le gîte et le couvert de ce monstre avec nos impôts pendant des lustres, non? Moi, je lui aurais coupé les burnes avant, juste pour voir ses yeux! Voir la douleur dans ses yeux et lui dire qu'il ressent un peu ce qu'a ressenti la petite Marie! Comment ça, on ne peut pas le brûler vif? C'est pas prévu? Vous parlez d'un oubli! Moi, je pense que la loi est bien faite. Comment? En ce sens que la peine de mort n'existe plus, et c'est normal, mais que les victimes dans des cas bien définis puissent la donner, cela me semble la bonne solution, non?

Le journaliste réapparait à l'écran :

"Il reste moins de dix heures aux parents de la jeune Marie. Demain matin à six heures, le prévenu, celui qu'on surnomme le Tueur Fou du Pont, sera remis entre les mains de la justice traditionnelle. Un juge d'instruction sera désigné et le prévenu comparaîtra devant une cour d'assises. Il risque la prison à perpétuité assortie d'une période de sûreté de vingt ans! Alors que l'Article 12, comme il est familièrement désigné, va fêter ses dix ans dans quelques semaines, cette affaire risque d'être la première dans laquelle les victimes auront renoncé y recourir. Je vous rappelle qu'il leur permet de mettre personnellement à mort celui qui a si odieusement massacré leur fille! Cela soulève dans l'opinion un très vif courant de désapprobation qui..."

"On peut changer de chaîne, s'il te plait?" demande Jacques, d'une voix lasse et éteinte.

"On peut!" répond Elodie qui fait un signe à son fils.

Un film américain remplace le journal télévisé. La soirée se passe sans autre alerte. Bien sûr, il y a un gentil fantôme qui plane dans la pièce, une présence familière impalpable. Marie. Quand le héros sauve la princesse avant que la fin ne le chasse de l'écran, ils se lèvent et vont se coucher. Demain, tout sera terminé. Ils ne se sentent ni héroïques, ni coupables, juste humains. Ils s'endorment du sommeil des justes.

A son réveil, Jacques consulte le réveil. Huit heures et demie. Ca y est. Le cauchemar est enfin terminé. Ils ont tenu bon. La justice, la vraie, va suivre son cours et bientôt, oui, bientôt, ils pourront commencer leur deuil. Quand le juge prononcera enfin la sentence des hommes. Oui. Ce n'est plus qu'une question de temps!

Le jour perce à la fenêtre. Jacques se sent plus léger. Le poids a disparu. Il a envie de croissants chauds et d'un grand bol de café noir. La boulangerie est juste en bas. Il s'habille rapidement et vérifie sa monnaie. Il dévale les escaliers et sort dans la rue. C'est samedi. C'est le printemps. Paris est magnifique au printemps. L 'air embaume le muguet. C'est le 1er mai. Il fait beau. Il fait bon. Jacques aperçoit dans les cieux une alouette qui danse au-dessus des toits. Marie?

Un inconnu le bouscule. Son visage est flou. C'est monsieur tout le monde. Jacques ressent une douleur aigüe, aussitôt suivie par plusieurs autres. Il porte ses mains à la poitrine et les regarde ensuite. Elles sont poisseuses de sang. Son sang. Jacques lève sa tête vers cet homme qu'il ne connait pas. Qu'il n'a jamais vu. Une expression étrange est peinte sur ce visage de bon père de famille. Une expression où se confondent incrédulité, fanatisme et satisfaction du devoir accompli. Il tient un long couteau rouge de sang. Jacques s'affaisse sur les genoux, essayant de retenir la vie qui s'échappe de son corps. Alors que les bâtiments entament une ronde effrénée autour de lui, Jacques entend à peine les mots crachés par l'inconnu :

"Crève donc, tu n'es pas digne de Marie!"

M

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2013-05-09 22:58:54 

 WA, exercice n°119, participationDétails
Portrait de fille dans le noir




La réalité c’est ce qui refuse de disparaître
quand on a cessé d’y croire.
Ph. K. Dick




Il est plus facile de déplacer un fleuve que de changer son caractère.
La grenouille au fond d’un puits ne sait rien de la haute mer.
La porte la mieux fermée est celle qu’on peut laisser ouverte.
Il est difficile...

« Miaou ! »
Je sursaute. C’est le chat. Il est déjà 19 heures, et il n’est toujours pas rentré. J’ai laissé la porte ouverte, je l’attends en lisant « Sagesse chinoise ». Il vient de miauler. Où est-il ? J’ai posé la journée de demain pour l’emmener chez le vétérinaire, je dois le faire vacciner. Je me suis résolue à contrecoeur à sa castration, pensant que cela le calmerait, mais l’animal continue de vivre comme avant, plus souvent dehors que dedans. Je dors la fenêtre ouverte pour qu’il puisse rentrer quand il veut, et je claque des dents sous ma couette en attendant le bon plaisir de Son Altesse... qui ne manque jamais de dormir tout le jour sur la pile de linge fraîchement repassé où il dépose une auréole sombre de longs poils noirs agrémentée de quelques puces, malgré les spots et les sprays dont je l’inonde...
Il a miaulé ! Où est-il ? Que fait-il ?
Je sors sur le pas de la porte.
« Lao ?
- Miaouou ! »
Mon coeur s’affole. Ce miaulement est très inquiétant. S’est-il coincé la patte dans le grillage ? S’est-il fait agresser par un chien errant ? S’est-il battu en duel ?
« Lao, je t’en prie, réponds ! »
Il est peut-être trop épuisé pour émettre le moindre son... Il faut que je le retrouve ! Je fais le tour de la maison, en pantoufles, et l’herbe mouillée me trempe les pieds, je vais sûrement m’enrhumer... Soudain je m’aperçois que la porte de la cave est restée ouverte. Il est là, j’en suis sûre, il est là, peut-être mis à mal par une armée de rats sanguinaires... Je lui interdis de manger des souris, cela ferait régresser son karma. Mais s’il était la victime innocente de bestioles stupides et affamées... N’écoutant que mon coeur, je m’engouffre dans l’escalier raide et étroit en m’accrochant à la rampe. Ce n’est qu’une fois en bas que je me souviens d’avoir enlevé le fusible de l’éclairage parce qu’il y avait un court-circuit qui faisait sauter le disjoncteur. C’était il y a deux ou trois mois, et j’ai encore oublié d’appeler l’électricien... Qu’importe ! Les yeux des chats brillent dans le noir, c’est bien connu.
J’avance. Je me cogne le pied dans un objet dur que j’explore à tâtons. Ah, c’est le coffre en bois de ma grand-mère. Je croyais l’avoir rangé au fond à gauche... Mais quand j’ai cherché l’original de mon diplôme, pour mon entretien d’embauche, j’étais pressée, j’ai déplacé pas mal de choses... Bon, c’était l’année dernière, c’est fou ce que le temps passe vite... Et puis une cave, zut, ça n’a pas besoin d’être bien rangé...Oui, sauf quand on cherche quelque chose, ou quelqu’un...
Je cligne des yeux pour mieux voir, mais il n’y a pas de fenêtre et il fait un noir d’encre. Et s’il avait fermé les yeux ?
« Lao, Lao... »
Le sol est en terre battue, c’est dégoûtant, mais si je lui marche dessus... Et je ne veux pas que les rats lui fassent du mal, c’est plein de maladies ces bêtes-là, et si en soignant le chat j’étais contaminée...Je suis allergique à la pénicilline, mon médecin le sait mais je ne l’ai écrit nulle part, et si je tombe sur son remplaçant... Ah non ! Déjà que j’ai eu la varicelle en CM2, et que ça m’a fait rater la sortie au Futuroscope !
J’avance à quatre pattes sur une surface humide et froide qui me colle aux mains. Mon jeans va être bon pour la machine à laver. Zut, c’est le jeans neuf, il va falloir le laver à la main. En rentrant, je me doucherai à la Bétadine et je ferai un gargarisme de thym.
« Lao, Lao... »
Un coup violent à la tempe m’envoie rouler au sol et une grêle de livres me dégouline dessus. Aïe ! J’ai percuté l’étagère où j’ai rangé les policiers que j’ai déjà lus. Quand on connaît la fin, ce n’est pas la peine de les relire. Je porte la main à ma tête. Un liquide poisseux et tiède souille mes doigts. Du sang ! Il faut que je remonte, il faut que je me désinfecte, je dois faire le rappel du tétanos l’année prochaine, est-ce que je suis encore suffisamment protégée ?
Je me lève. Piétinant les feuillets qui jonchent le sol, je marche comme une somnambule, les mains en avant, vers l’infime lueur qui sera mon salut. Je gravis l’escalier en soufflant, je suis sûrement en train de me vider de mon sang, mais je n’ose plus toucher à la plaie avec mes mains sales. Arrivée en pleine lumière, tout me semble flou. Plaie du crâne, troubles de la vision... Aurais-je un traumatisme crânien grave ? Je dois appeler le 15 ! Machinalement je porte la main à mon nez pour remonter mes lunettes. Mes lunettes ! Je ne les ai plus. Elles ont dû tomber dans la cave. Ca ne va pas m’aider à retrouver le chat !
Je désinfecte la plaie qui ne saigne plus. J’enfile une grosse veste car je claque des dents, je suis en état de choc. Vite vite, une petite verveine avec du miel pour reprendre des forces et j’y retourne. Je lis juste un nouveau proverbe pour me donner du courage et j’y vais.
Il est difficile d’attraper un chat noir...
« Miaou ! »
Je bondis sur mes pieds, je saisis au passage ma lampe électrique et je me précipite à la cave. Clic. Re-clic. Et pas de lumière. Je ne m’en sers jamais, de cette lampe. Les piles se sont déchargées. Et comme je n’utilise jamais de piles, je n’en ai pas en stock.
« Lao, mon mignon, viens voir maman... »
Ce chat ne miaule que quand ça l’arrange. Et moi je meurs de chaud avec cette veste ! Mais où la poser ? Je ne vais pas remonter pour ça. Donc je continue à dégouliner de sueur en suivant d’une main hésitante le mur de droite, comme si j’étais dans un labyrinthe. Je tâte le sol du bout du pied à chaque pas pour ne pas risquer d’écraser le chat. Oh ! Quelque chose de mou ! C’est lui, j’en suis sûre, je l’ai trouvé ! Je m’accroupis, je tends la main vers ma boule de poils préférée, mon splendide, magnifique et adorable chat... Aaah ! Le contact est humide, gluant et visqueux. Une nuée d’insectes, dérangés à l’improviste, se venge par une attaque en formation serrée. Je n’ose imaginer dans quelle charogne putride j’ai mis les doigts... Si je n’avais pas le nez bouché par mon rhume des foins, j’aurais pu la sentir ! Mais trop c’est trop. Tant pis, je renonce, je remonte, je me douche, j’annulerai le véto, j’irai travailler... Je repars vers la lumière du jour d’un pas décidé. Crac. Sur quoi ai-je marché ? Je me baisse. Mes lunettes. Enfin, ce qu’il en reste. Un verre cassé, la monture tordue. Je vais devoir utiliser ma journée pour aller chez l’opticien.
Je me douche voluptueusement, je me lave les cheveux, la vie est merveilleuse. Deux doigts de porto, et ma «Sagesse chinoise ». Je suis calme et détendue.
Il est difficile d’attraper un chat noir dans une pièce sombre...
Je ferme les yeux, savourant ce moment de béatitude. Et puis la lumière jaillit dans mon esprit, avec une évidence phosphorescente. Un chat noir, bien sûr ! Mais un chat blanc ?
Je me jette sur le placard, en extrais les deux kilos de farine qui ont glissé derrière la pile de casseroles – casseroles par terre, assiette cassée, paquet de riz renversé, rangerai plus tard – et triomphante je m’engouffre à nouveau dans les entrailles de la terre où j’épands à tous vents, du geste auguste du semeur, la poudre miraculeuse qui va mettre un terme heureux à ce problème agaçant. Et je ris, je ris, une euphorie bienfaisante me gagne, je vais réussir, je vais réussir... Atchoum ! Atchoum ! Une salve d’éternuements incoercibles me fait monter les larmes aux yeux, suivie par une quinte de toux à m’en déchirer les poumons. Haletante, suffocante, je bas en retraite au pas de course... et je rate la première marche de l’escalier. Une douleur fulgurante traverse ma cheville droite, me contraignant à m’asseoir, dans l’ombre et la poussière, les yeux brûlants, la gorge en feu et le nez dégoulinant de morve comme le dernier des vagabonds. En me recroquevillant sur moi-même, sidérée par l’intense douleur, j’ai baissé la tête et mes cheveux encore mouillés sont venus recouvrir mon visage. Je les relève d’une main et... berk ! Des ficelles collantes, des spaghettis mal cuits, des vers de terre glacés... J’ai la tête pleine de farine !
Marche après marche, en ne posant que le talon, je sanglote à gros bouillons en me hissant à la rampe que je sens vibrer sous mes efforts. Je suis presque arrivée en haut quand celle-ci cède sous mon poids, et je roule et je boule en hurlant jusqu’au sol humide et dur où j’atterris cul par-dessus tête, dans le craquement sinistre de mon joli peignoir de bain blanc brodé de roses rouges, tandis que mes pantoufles s’envolent quelque part dans le ciel noir. Immobile, terrassée, je recense mes douleurs. La cheville droite. Le poignet gauche. Le front. La hanche gauche. Le genou droit. L’épaule gauche. Je ne veux pas mourir ici ! Il faut que je rentre chez moi, il le faut...
Je me traîne comme une limace pitoyable dans cet escalier de malheur. Je n’ose me mettre debout de peur de perdre à nouveau l’équilibre. Alors je rampe, déchirant de plus belle le peignoir, souffrant le martyre à chaque appui et secouant la tête comme une forcenée pour chasser mes cheveux qui s’obstinent à venir se coller sur mon visage. Quand enfin j’atteins le seuil salvateur, je marque une pause soulagée. La maison n’est plus qu’à quelques mètres. Ding-dong ! C’est le carillon du jardin. Il est suivi par le grincement du portillon qui s’ouvre, et une voix de femme s’écrie : « Mademoiselle Leblanc ! Vous êtes là ? C’est le comité « Jolis jardins ». Vous avez été sélectionnée, je vous avais dit que nous passerions dimanche après-midi... »
Je lève le nez. J’aperçois dans le brouillard de ma myopie deux silhouettes minces, presque jumelles, veste courte et cintrée, jupe plissée sombre, mocassins plats... Je ne distingue pas leur expression, mais elles se figent à ma vue, reculent, tournent les talons et disparaissent en laissant le portillon ouvert, sans ménager cependant leurs commentaires.
« Mais quelle horreur !
- Oui... Pauvre femme... Ah, les méfaits de l’alcoolisme... »
Moi qui souhaitais m’intégrer dans la vie sociale du village, je n’ai plus qu’à déménager encore une fois...
Retour à la douche qui se termine par un jet d’eau glacée, Arnica, Bétadine, pansements, bandages... Ma cheville a triplé de volume et j’ai l’oeil gauche à moitié fermé par le gonflement de l’arcade sourcilière. J’ai retrouvé mes vielles lunettes d’il y a trois ans, qui ne me sont pas vraiment utiles. Le chat est couché sur le livre ouvert. Je tends la main pour le caresser, et il s’enfuit aussitôt par la porte ouverte.
Il est difficile d’attraper un chat noir dans une pièce sombre, surtout quand il n’y est pas.
En claudicant, je vais jeter cette saleté de bouquin stupide à la poubelle. De toute façon, j’ai toujours détesté les chinois.
Narwa Roquen, qui se traîne comme une vieille sorcière

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2013-05-12 23:23:01 

 Commentaire Maedhros, exercice n°119Détails
C’est un texte très différent de ce que tu écris d’habitude, un conte humaniste sur fond de politique-fiction, où l’émotion, quoique retenue, est partout présente. Il m’a rappelé « Au bout du conte » (WA 93), où d’ailleurs l’héroïne s’appelait aussi Marie. Pas très gai, là n’est pas la question. C’est une histoire pure, l’histoire de gens ordinaires qui deviennent des héros, de la manière la plus difficile qui soit : en restant fidèles à leur idéologie, en s’insurgeant seuls contre une société redevenue barbare, sans espoir de reconnaissance et pire encore, qui sont châtiés pour leur différence d’avec le consensus populaire. C’est un bien triste avenir que tu imagines là, dont je ne peux que souhaiter en croisant les doigts qu’il reste à tout jamais du domaine de la fiction.


Bricoles :
- Le poids écrasant qui pèse sur ses épaules lui avait disparu : sans lui
- Il se rappelle d’un passé : se rappeler est transitif, contrairement à « se souvenir de » ; une exception : avec un pronom personnel complément représentant un être humain ( tu te rappelles d’elle )
- Ce type de reportages : il me semble que « reportage » devrait être au singulier
- Une sorte d’handicapé social : en principe, le h est aspiré, même si dans l’usage il est souvent muet
- Nous défendons en ce que nous croyons : je suppose que c’est « nous défendons ce en quoi nous croyons »
- J’ai la chance que mes élèves ne sont : ne soient
- J’avais un rendez-vous avec un parent : « j’avais rendez-vous » devrait suffire
- Je crains qu’un de ces jours elle le retire : elle ne le retire
- Je suis certaine qu’elle m’aurait écouté : écoutée
- Elle s’est levée, à pris son fils et ils sont partis : ...a pris son fils ( par la main ?)
- Tout ce qui n’était pas libéral est forcément : était forcément
- Ce qui nous unissait était plus fort que ce qui nous séparait : ça me rappelle quelque chose...
- Ce fût vraiment chaud : ce fut
- J’ai su que cela allait le faire entre nous : je ne sais pas pourquoi, je ne vois pas cet homme dire ça comme ça...
- Puis les forces de l’ordre appréhendèrent... : le paragraphe commence au présent et passé composé puis dérape dans le passé simple
- Comment... indifférents et froids . : ?
- « Leur position était tout simplement intenable dans la société actuelle, traversée par de profonds soubresauts identitaires » : je ne suis pas sûre de bien comprendre ; tu veux dire que cette modification de la loi a pour but de consolider l’unité nationale ?
- Il fait beau. Il faut bon : fait, je suppose

Ce texte, je l’ai lu, relu et re-re-re-lu. Deux choses me gênaient : d’une part, l’homme et la femme s’expriment exactement de la même manière, d’un langage très intellectuel émaillé de quelques cris du coeur grossiers. Mais ils vivent ensemble depuis probablement au moins dix-neuf ans, et ils s’aiment toujours ; le mimétisme est possible, sinon probable.
D’autre part, avec un sujet aussi pathétique, je me suis étonnée que tu restes toujours en deçà de l’émotion. Et puis j’ai réalisé que tu ne faisais que respecter la volonté de tes personnages, des gens pudiques, honnêtes, dont l’ego n’est pas surdimensionné ; seules des circonstances exceptionnelles les transforment en héros, mais ils n’en ont même pas conscience. Ils ne cherchent pas à ouvrir une voie à la postérité. D’un commun accord, ils font simplement ce qui leur semble juste. Leur fils maintenant unique, pourtant à l’âge des rebellions adolescentes, se comporte exactement comme eux. Il assume sa part de malheur sans se plaindre, il est solidaire de ses parents. Et donc, ça m’a plu.
J’ai bien aimé la comparaison avec le coureur de fond. Et l’entrevue avec la mère de l’élève sonne très juste.
Quant à la chanson de Brel... Elle décrit seulement la véritable misère, la misère du coeur, celle contre laquelle viennent se briser les rêves.
Ton histoire nous rappelle qu’à tout moment de notre vie (même en commentant un texte), on est confronté à la différence de l’autre. Le premier mouvement est hélas trop souvent un geste de rejet. Et pourtant, si l’on veut bien essayer de comprendre, juste en occultant un instant notre préjugé profond qui prétend que nous sommes les seuls à détenir la vérité, alors la rencontre de cette différence est un enrichissement immense.
Merci pour cette belle leçon d’humanité, d’autant qu’elle n’est pas imposée mais proposée en toute simplicité, comme une lampe posée au bord de la route pour éclairer un voyageur aléatoire...
Narwa Roquen, it ain't necessairely so...

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2013-05-18 15:59:13 

 La nuit, tous les chats...Détails
D'abord il y a cette citation mise dans la bouche d'un contemplateur des abysses de l'âme humaine, j'ai nommé Philip K Dick et cela ne peut être en soit qu'une bonne chose. Par certains côtés, elle tutoie le principe de raisonnement du rasoir d'Occam, illustrant le principe de parcimonie. En d'autres termes, généralement, la solution la plus simple est la meilleure.

Partant, tu décris par le menu une histoire toute simple agrémentée de jolies mises en Abymes. C'est une invitation à plaindre cette femme qui suit une voie remplie d'obscurité à ses risques et périls. Narratrice de cette aventure, elle ne s'observe pas mais nous livre ses impressions et ses sensations (souvent douloureuses mais la Voie n'est-elle pas une forme d'initiation pour parvenir à la Vertu?). Elle est solitaire mais un chat surprenant au nom évocateur la mène par le bout du nez.

Cette histoire pourrait être une fantaisie légère et enlevée sur les malheurs d'une brave dame qui se met dans tous ses états, jusqu'à se mettre en danger et à compromettre son insertion sociale. Il est passé où, le chat à la voisine?

Les efforts déployés pour retrouver sa trace (excellent, l'averse de farine) comme les déboires qu'elle essuie sont rythmés et réjouissants. La chute finale est sans doute assez deus ex machina mais elle met en relief le côté absurde de cette quête jusqu'au-boutiste que rien ne parvient à arrêter. Evidemment, le chat bien-aimé attend impassible à l'endroit où tout a commencé, enfonçant un peu plus le clou, semblant narguer sa maîtresse qui en un rien de temps a jeté dans les orties les préceptes de la sagesse chinoise!

Elle aura certainement besoin de cours de rattrapage. Elle a suivi bien entendu la voie où elle a fait preuve de constance. Dans son aveuglement, elle n'a malheureusement pas pris la mesure de la situation. Alors, si elle ne veut pas connaître une longue solitude, elle devra fuir pour tout tenter de tout recommencer!

Je doute que Tao Te King, bien que reconnaissant ses petits, soit enclin à lui révéler ses merveilles.

M

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z653z  Ecrire à z653z

2013-05-21 13:30:52 

 chat victime innocente ?Détails
Dès le début, j'ai été accroché par le texte.
Même si je me doutais de la chute, connaissant le proverbe, j'étais vraiment curieux de savoir ce qu'elle allait faire pour retrouver son chat.
Et rien pour avoir eu l'idée de lui faire jeter de la farine dans le noir, j'adore ce texte.

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2013-06-01 17:00:45 

 Commentaire RoquenDétails
Je ne connaissais pas le proverbe, moi, mais je ne connais pas grand chose en philosophie chinoise :)
Comme souvent quand l'histoire est bonne, on oscille entre plusieurs sentiments, on a envie de rire de cette pauvre dame et de ses aventures, mais en même temps elle débloque et ça fait peine, et puis on a envie d'intervenir et de lui dire "mais non, pas par là! Pas comme ça!", enfin bref, elle aurait sacrément besoin de l'aide de Mélamine celle-là :)
Histoire très sympa, donc, et je comprends mieux pourquoi... mais mes deux petits chatons tout neufs ne sont pas noirs, et je n'ai pas de cave. Ouf!

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2013-06-11 14:11:31 

 Commentaire WA 119 : NarwaDétails
Excellente, cette citation de Dick ! Et j'aime bien ton titre également, qui pose dès le départ l'ambiance décalée.
Ton personnage est extra, original et complètement barré, avec son obsession du bien être du chat, au détriment d'elle-même. Le côté parano et hypocondriaque est bien vu aussi. Et le caractère décousu de son discours, avec les digressions.
J'ai apprécié aussi l'avalanche de lieux communs débiles, comme les yeux des chats qui brillent ou les rats pleins de maladies.
Tu as super bien géré la systématisation de tes procédés et j'ai bien rigolé avec le coup du traumatisme cranien, les lunettes écrasées, la farine, le comité des jardins...
Pauvre fille, ce que tu lui fais vivre, hihi ! Décidément, j'aime bien ce personnage, que je trouve bien écrit et crédible.
Chouette chute aussi. Tu devrais écrire plus souvent des trucs rigolos (moi aussi peut-être).

Au final, j'ai adoré ce texte drôle et complètement décalé, et ton personnage à la dinguerie rafraichissante.

Trucs et bidules : rien trouvé !

Est', en pleine lecture, toujours.

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2013-06-11 14:15:28 

 Commentaire WA 119 : MaedhrosDétails
Putain ! Excusez ma grossiereté mais je viens de finir ce texte et putain, quel texte !
Quel suspens qui a torturé mes neurones jusqu'à la révélation de cette loi ignoble, quelle horreur que cette uchronie politique habilement conçue, quel calvaire que celui que vivent les personnages, seuls contre une meute de monstres assoifés de sang, quelle fin d'une noirceur insondable !
C'est parti pour la deuxième lecture !
Brillant ce titre ! J'avais bien repéré le talion mais, comme je suis nulle en latin, j'ai dû faire la traduction.
Excellent paragraphe sur l'ancien alcoolisme du héros, saisissant de réalisme. On comprend rapidement qu'il a perdu quelqun mais beaucoup de choses restent floues au début à la première lecture. Tout s'emboite à la deuxième et tu uses du foreshadowing en maître.
Tu ménages ton suspens un temps incroyable et du coup, on ne peut pas lâcher le texte cinq minutes, tellement on veut avoir le fin mot !
L'orientation politique différente des deux époux est une trouvaille habile qui te permet de montrer que l'on peut être contre la peine de mort quelle que soit le parti et que cette question se joue bien au delà des différences droite/gauche.
Mais c'est Marine Le Pen ou quoi, ta présidente ?
C'est marrant, ce rapport que tu fais à plusieurs reprises entre le mariage gay et ton uchronie... Je ne vois pas bien comment l'un a pu mener à l'autre.
Emouvant, le passage où le père retourne dans la chambre de sa fille.
Atrocement réaliste aussi, le journal télévisé. Ce monde fait vraiment froid dans le dos... Pour le coup, je trouve la consigne magnifiquement respectée.
"Quand le juge prononcera enfin la sentence des hommes." c'est joli, ça.
Et la fin, pfiou, terrifiante !

Au final, un texte de politique-fiction brillant, habilement construit, au suspens haletant, et à la fin plus noire que vous ne pensez.

Trucs et bidules :
Franchement, sur un texte pareil, j'ai un peu honte de relever les bidules mais en voici un :
"En le voyant, un sourire flotte sur ses lèvres." : le sujet de la phrase change en cour de route, ce qui n'est pas homologué.

Est', en pleine lecture, encore.

PS : tu ne serais pas du sud de la France, toi ? Parce que "poche" pour "sac plastique"... (^-^) Héhé, je n'ai pas renoncé à te soutirer quelques infos perso sur toi. Ca me frustre de vous "cotoyer", Narwa et toi, depuis si longtemps, sans même savoir quel âge vous avez, où vous vivez, ce que vous faites comme taf, ce genre de trucs... Idiot ? Oui, sans doute.

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2013-06-11 20:20:15 

 Merci pour ta lecture!Détails
Dans ce texte, j'ai utilisé en le poussant à l'extrême (ce qui est sémantiquement juste), le contexte social et économique actuel que, personnellement, je trouve assez malsain, avec des tentations glauques et liberticides.

Les manifestations contre le mariage pour tous ont été à cet égard, assez révélatrices de ce qui peut remonter à la surface quand une société est inquiète.

Maintenant, mon uchronie prend appui sur ce qui aurait pu arriver si les avertissements de fin du monde avaient été pris au pied de la lettre...

J'ai vu un bout d'émission dans laquelle des aventuriers traversent les USA par leurs propres moyens et doivent apparemment demander de l'aide à la population locale. Dans un coin reculé, une brave candidate qui frappe à la porte d'une maison pour demander un renseignement, se voit reprocher son geste (dans ce coin, visiblement, il est interdit de déranger les voisins).

Un autre candidat qui a le malheur de faire de l'auto-stop est violemment apostrophé par un automobiliste qui lui reproche d'être sur le bord de la route et qui le menace de l'emmener en prison s'il n'obtempère pas, et ce, malgré la présence de la caméra! Le shérif local avoue que les gens ont peur de tout et il conseille aux candidats de passer rapidement leur chemin! Edifiant!

Je ne suis pas vraiment convaincu que ce que je décris dans cette uchronie ne trouverait pas des partisans dans notre beau pays!

Et pour la géolocalisation, bien tenté! Beau joueur, je te donne un indice : j'habite une capitale européenne mais pas administrative!

M

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2013-06-13 21:16:37 

 J'ai droit à combien d'essais ? (^-^)Détails
Tu es un petit canaillou, toi, de faire des énigmes ! Et un grand timide aussi (ou alors un membre d'anonymous recherché par le FBI et forcé à la plus extrême prudence). Aaagl, j'hésite entre deux mais je vais dire Strasbourg.

Est', la curiosité n'a pas juste tué le chat, elle l'a balancé dans l'Ankh avec un rocher attaché aux pattes !

PS : c'est le seul forum que je fréquente où les gens n'ont pas de conversations perso. Du coup, on se croise sans se connaitre, de manière impersonnelle. Je trouve ça dommage. Où est-il, le temps où les faeriens se retrouvaient IRL pour festoyer gaiement d'un pudding à l'ebly cuit ?

PPS : si j'ai bon, je peux rejouer en posant une autre question ? *bat des paupières*

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2013-06-15 15:21:49 

 Limites...Détails
Je veux bien te fixer une limite mais pas en nombre mais en délai.

Tu as jusqu'au 31 décembre 2013.

Après, it will be over!

M

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2013-06-16 21:54:04 

 Gné ?Détails
Et pour Strasbourg, j'ai bon ou pas ? *a pas comprendu*
Non ? Je peux te demander ce que je veux jusqu'au 31 décembre ??
Si c'est le cas, je commence par :
- t'as quel âge ?
- c'est quoi ton bouquin préféré ?
- c'est quoi ton signe zodiacal ? (non, je rigole !)
- t'as lu le Trône de fer ?
- tu fais quoi comme boulot (je dirais bien professeur d'histoire)
- ça t'arrive de venir sur Lille ?

Est', chachat curieux.

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2013-06-17 21:24:19 

 Considérations au coin du feu.Détails
En fait, tu peux rejouer, s'agissant de la ville. Mais je pensais que l'indice et surtout la date butoir t'auraient mise sur la bonne M... voie!

Pour les autres questions, bah.... voyons :

- un Noldor a-t-il un âge? Et pour être raccord avec l'épreuve de philosophie du jour, la question de l'âge est-elle pertinente à propos d'un Noldor? Z'avez quatre heures.

- Mes bouquins préférés : y en a beaucoup. En vrac, le Silmarillion, le SDA (bien sûr), Dune, la trilogie de Smiley, Fortune de France, Kaputt, la forêt des Mythagos, l'Univers élégant (et les ouvrages de Brian Green et de Trinh Xuan Thuan), les ouvrages de Richard Dawkins, Gormenghast, quelques Pratchett et plein d'autres bien sûr!

- Le trône de fer : très bon au début, trop délayé après... on se perd dans les méandres des micro-histoires et les mille façons de faire un brouet aux navets et lardons. Pas assez de rythme sur la distance. J'ai décroché au 3ème tome de l'intégrale.

- Le boulot : en Faeries, c'est un concept au-delà de l'horizon non? Un peu comme dans Matrix, tu vois? Mais je ne suis pas prof d'histoire!

- LIlle : hélas, je ne m'y suis jamais rendu!

M

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2013-06-18 09:22:20 

 Re gné ?Détails
Marseille ?? Je l'avais écartée vu que tu m'avais dit non pour le sud (c'était mon premier mouvement, la capitale de la culture et, du coup je comprenais pas la date).
Ah chouette, des infos !
OK, bon je remballe mes questions IRL, j'ai compris. Tant pis...
(Cela dit, l'âge, que ce soit d'un noldor ou de qui que ce soit d'autre, en apprend beaucoup sur le genre de culture auquel la personne a biberonné. Par exemple, moi, je suis de la génération Dorothée et c'est une sacrée influence)
Tiens, y a plein de bouquins que je connais pas. Les Mythagos sont sur ma liste à lire.
Certes pour le Trône, mais je continue pour quelques persos que j'adore (Tyrion, Arya...).
Dommage pour Lille mais sans doute le concept de prendre un café ensemble t'eût-il paru trop IRL ;o)

Est', du feu à Marseille avec cette chaleur ?

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2013-06-18 10:10:02 

 Trouvé!Détails
confer titre...

D'ailleurs, j'ai planté plusieurs de mes décors dans la ville qui s'étend aux pieds de la Bonne Mère!

M

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