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 WA - exercice n° 26 Voir la page du message 
De : Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen
Date : Jeudi 8 novembre 2007 à 16:25:59
Changement radical d’ambiance pour ce n°26. Vous allez écrire une histoire à 5 personnages principaux, parmi lesquels il y aura un couple. Ils ne se connaissent pas. Ils sont retenus malgré eux dans un endroit clos, pendant une durée au moins égale à 24 heures. A vous d’inventer où, comment, pourquoi, et de donner un dénouement à l’intrigue. Ce qui m’intéresse plus que tout, ce sont les rapports qui vont se tisser entre les personnages, le rôle que chacun va endosser, et l’influence que cela aura sur l’histoire.
A vous de jouer ! Je pense que ce n’est pas un exercice facile (quoique passionnant !), et je vous accorde ( et je m’accorde aussi !) trois semaines, soit jusqu’au jeudi 29 novembre.
A vos claviers, prêts ? Ecrivez !
Narwa Roquen,pour les idées, ça va, merci


  
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Réponses à ce message :
z653z  Ecrire à z653z

2007-11-09 11:33:49 

 ça me rappelle bigrement l'ambiance du film CubeDétails
Un couple (qui va se former) et trois autres personnes qui ne se connaissent pas et qui passent plus de 24 heures malgré eux dans un endroit clos.

Film que j'adore d'ailleurs (entre autres pour l'observation des relations entre les personnages) ;)

Ce message a été lu 6599 fois
horus maitre de guerre  Ecrire à horus maitre de guerre

2007-11-09 16:20:30 

 t es sur?Détails
Je me souviens pas avoir vu un couple se former dans Cube... d'un autre coté j'ai vu que le un.
Moi ça m'as plutôt fais penser a Saw 2 (dont la seule bonne idée est de confronter un groupe de personnages ne se connaissant pas), et a dix petit negres aussi, et six femmes pour l'assassin de mario bava... Pleins de polar en fait...
encore un message qui sert a rien

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z653z  Ecrire à z653z

2007-11-09 16:51:38 

 et l'architecte et l'étudiante ??Détails
Il ne se passe vraiment rien entre eux ? :)
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horus maitre de guerre  Ecrire à horus maitre de guerre

2007-11-09 19:57:41 

 euh...Détails
il me semble bien qu'il y a anguille sous roche entre eux mais rien de concret si je me rappel bien (j'ai vu se film pour la dernière fois il y a un an et demi je crois).
encore un message qui sert a rien

Ce message a été lu 6248 fois
Maedhros  Ecrire à Maedhros

2007-11-11 18:49:14 

 WA - Participation exercice n°26 partie 1Détails
Un exercice intéressant. J'ai une idée assez particulière. Je vous propose de vous la raconter en petits tableaux...

__________

STAIRWAY TO HEAVEN


Maintenant.

And as we wind on down the road,
Our shadows taller than our soul... (1)

Les portes se referment presque trop lentement au goût de John. Appelons-le John, pourquoi pas ? Il eu d’autres noms avant et ailleurs mais celui-ci ne lui va pas si mal. Athlétique, il est assez grand, un front large et dégagé, une coupe en brosse. Il pourrait être un militaire ou un homme du gouvernement. Il n’est plus très jeune. Les pattes d’oies au coin des yeux et la ride léonine entre les sourcils lui donnent un air sévère que tente d’atténuer le sourire lointain qu’il laisse en permanence flotter sur ses lèvres. Comme à son habitude, il cache ses mains dans les poches de la veste de sport et s’adosse contre la paroi de la capsule. La vie ne l’a pas ménagé. Il est si loin de chez lui. Cela fait si longtemps qu’il n’est plus retourné là-bas, au pays où les cerises ont le coeur tendre en juin. A Portland. Mais il sait qu’y retourner sera son dernier voyage. Alors, il mène une vie invisible ici, dans la grande ville, à l’autre bout du continent. Ses yeux sont fatigués de regarder le soleil se lever sur cet océan alors qu’il voudrait tant le voir se coucher de l’autre côté. Le temps a glissé comme du sable sur sa paume depuis Paranoid Park. Ce matin, profitant d’une demi-journée non travaillée, il s’offre un ticket pour le paradis. Histoire d’oublier un peu la crasse de la banlieue où il se terre, de l’autre côté de l’Hudson River.
.
Il jette un regard en biais à ses compagnons pour ce voyage qui ne durera pas plus d’une minute. Ils sont quatre, ayant comme lui attendus patiemment dans la file formée malgré l’heure matinale. Le Toit du Monde fascine toujours autant.

Face à lui, un jeune couple d’amoureux se mange du regard. On ne peut se tromper sur ces deux-là. Lui, grand et costaud, un côté viking relooké par East & West, doit certainement être le quarter back de l’équipe de foot de son campus. Elle le boit littéralement des yeux, c’est sûrement la chef des pom-pom girls, ces filles qui lèvent la jambe à chaque rencontre de football. Il faut excuser John, son existence l’a rendu amer si bien qu’il a tendance à noircir le tableau. Il a pourtant raison sur un point, ils sont tous deux étudiants comme le proclament fièrement leurs sweat-shirts où se lit en gros caractères Colombia University. Lui ferait donc partie des fameux lions bleus, à la tête de l’escouade offensive. Elle, à peine plus petite, possède un visage agréable, aux traits réguliers qui fleurent bon la bonne société. Des ascendances hollandaises, John en jurerait. Elle lui étreint le bras comme s’il pouvait se volatiliser de cette capsule hermétique. Un tour du grand David Copperfield! Elle est radieuse. John a tout juste le temps de remarquer l’ombre qui voile soudain le regard du jeune homme. Celui-ci détourne les yeux, gêné. Il a senti que John a vu. Pour le meilleur ou pour le pire, ils ont aussi acheté un ticket pour le paradis. L’anti-chambre du septième ciel dit-on !

De l’autre côté, il y a un homme de taille moyenne, entre deux âges. Des tempes poivre et sel. Un costume prêt-à-porter froissé qui trahit un indéniable laisser-aller. Son visage chiffonné est mal rasé et ses mains tremblent légèrement. John est étonné. Serait-il un dépressif décidé à se précipiter du toit ? John vient de lire un article dans le Daily News à propos du syndrome du suicide touristique. Selon son auteur, la plupart des suicides se déroulerait dans des lieux très connus comme l’Empire State Building, le pont de Brooklyn voire Time Square. Mettre fin à sa vie en beauté en quelque sorte! Mais ici, l’observatoire est muni de protections anti-suicide assez poussées. John se promet néanmoins de le garder à l’oeil.

Enfin, John s’attarde sur le cinquième passager. Un type encore assez jeune. Une allure soignée et décontractée. Des gestes policés, très fluides mais en même temps fermes et résolus. Une force silencieuse et domptée. Il n’est pas aussi grand que John ou le quater back. Un col roulé sous une veste de daim, sobriété et discrétion haut de gamme. Une paire de lunettes de soleil coiffe ses cheveux châtains qui ondulent de la plus domestique des façons. C’est vrai que là-haut, le soleil inonde sûrement la terrasse. C’est une belle journée de septembre qui commence. La promesse annoncée d’un été indien. L’homme tient dans la main un livre. Un auteur français. John lit beaucoup. Son seul véritable passe-temps après la journée de boulot à Port Authority. Il occupe une fonction obscure, au service de comptabilité, dans une aile écartée du bâtiment abritant les services généraux. Une porte anonyme marquée d’un numéro perdu parmi des centaines d’autres. Pour revenir au bouquin, il s’agit d’un roman de Sartre, « Being and Nothingness ». John l’a lu également. Il n’a pas été d’accord en refermant le livre sur la dernière page. Son destin n’a jamais été une suite de libres choix. D’autres les ont faits à sa place. Mais qu’y connaît-il vraiment en existentialisme ?

M

____

(1)

Et alors que nous serpentions sur la route,
Nos ombres plus grandes que notre âme...

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z653z  Ecrire à z653z

2007-11-12 13:39:12 

 panne d'ascenceur ?Détails
ou alors ils sont les premiers de la file et la terrasse est vide (et devient inaccessible pour une raison particulière).

:)

Ce message a été lu 6125 fois
Maedhros  Ecrire à Maedhros

2007-11-12 19:03:34 

 C'est froid....Détails
cf titre

M

Ce message a été lu 6056 fois
z653z  Ecrire à z653z

2007-11-15 14:41:17 

 Serge BrussoloDétails
hier soir, quelqu'une m'a parlé de Serge Brussolo quand on parlait de la psychologie des personnages dans le film Cube.
Quelqu'un a déjà lu un de ses livres ?

:)

PS : En direct des archives.... seul Menelon avait l'air d'en avoir lu et Lomega posait une question sur un des ses romans.

Ce message a été lu 6682 fois
horus maitre de guerre  Ecrire à horus maitre de guerre

2007-11-15 16:01:14 

 a l'image du dragonDétails
c'est le seul bouquin de brussollo que j ai lu. Les autres me sont litteralement tombés des mains...
Prefere de loin michel pagel et la comedie inhumaine...
qui a eu une sacrée surprise a sa soirée...

Ce message a été lu 6045 fois
Maedhros  Ecrire à Maedhros

2007-11-18 20:36:15 

 WA - Participation exercice n°26 partie 2Détails
La suite...tableau n°2... Alors, z653z, est-ce que cela t'aide un peu?

__________

Quelques poignées de secondes plus tard...

There walks a lady we all know,
Who shines white light and wants to show
How everything still turns to gold (2)

La décélération brutale fait tressauter la cabine qui interrompt son ascension dans un dernier soubresaut. Au fond des yeux des cinq passagers, la sérénité vacille, l’assurance se délite. Au-dessus de leurs têtes, les tubes basse tension hésitent, alternant ombre et lumière avant de s’éteindre définitivement, remplacés par la luminosité blafarde d’une veilleuse automatique. Une alarme clignotante se déclenche sur le panneau de commandes. Hormis le grondement sourd et lointain d’une machinerie qui s’étouffe rapidement, aucun bruit strident ne déchire leurs oreilles. Aucune sirène hurlante. Juste une immobilité déstabilisante.

Claire se serre un peu plus contre William. Si elle sent poindre l’inquiétude, sa passion journalistique prend rapidement le dessus. La sensation de vivre un moment unique, une occasion inespérée. Car Claire fait partie de l’équipe rédactionnelle du Spec, du Columbia Daily Spectator devrait-elle dire, le journal du campus où elle a déjà fait parler d’elle, il y a quelques temps déjà. Elle a goûté à la notoriété dûe à un article lu par plusieurs milliers de personnes. Son style était prometteur lui avait assuré son rédacteur en chef. Dans sa petite chambre, elle rêvait de devenir journaliste vedette, à l’instar de Kate Boo, Elizabeth Cohen, ou Megan Greenwell, d’illustres reporters qui travaillent maintenant au New-Yorker, à CNN ou même au Washington Post. Elles firent leurs premières armes, comme elle et avant elle, au Spec. Kate Boo obtint même le prix Pulitzer !

Et puis, elle a lu Jack, le poète romancier, l’éternel voyageur. Sur la route, elle rencontra William. L’amour de l’un se transforma en amour pour l’autre. Un amour irrépressible et irraisonné. Un amour de conte de fées. Elle qui méprisait souverainement les sportifs et au premier rang ces frimeurs et machos incorrigibles des Lions Bleus! Ainsi, elle tomba amoureuse de ce bel athlète blond au regard angélique, au sourire ensoleillé et aux épaules carrées si rassurantes. Ce magnifique quarter back qui adressait des balles puissantes, à la précision diabolique, par-dessus le pack de la défense adverse vers le receveur à l’autre bout du terrain, esquivant avec sang-froid la tentative de sack des deux monstrueux ailiers défensifs. Elle ne manqua dès lors aucun des matches des Lions, s’approchant doucement de son amour qui ne le savait pas encore. Ses grandes ambitions journalistiques s’envolèrent comme des oiseaux migrateurs au-dessus de la baie de Chesapeake quand les premiers froids descendent du grand Nord. Elles ne furent bientôt plus que des points scintillants dans le soleil couchant car Claire rêvait jour et nuit à William. Elle garda néanmoins une plume et en fit sans vergogne une arme qu’elle trempa dans des eaux noires et amères pour qu’il l’aime enfin.

Aujourd’hui, dans l’élan brisé de cette capsule, elle mesure tout le chemin parcouru. Il est là, tout près d’elle, à elle. Il l’aime. Elle l’aimera toujours. Elle le lui murmure souvent. Elle lui donnera tout ce qu’il désirera. Tant pis pour les circonstances et les raisons. Tant pis pour les larmes et les mensonges. Tant pis pour le mal fait. Elle ne regrette rien. Si c’était à refaire, elle le referait. Plutôt deux fois qu’une. Qu’importent les moyens. Jamais Père ne lui a refusé ce qu’elle exigeait. Aussi loin que remontent ses souvenirs, là-bas, dans la grande bâtisse de Fairfield.

Ils sont jeunes, ils sont beaux et ils sont riches. Le monde leur appartient. Elle ferme les yeux pour ne pas repenser à certaines choses. Père lui avait dit que dans ce monde, on avait rien sans rien. Alors elle a payé le prix pour que la vie pousse dans son ventre. Il ne la quittera jamais. Aujourd’hui, il lui offre un voyage plus près des étoiles. Quel endroit plus romantique pour une demande en mariage? Le toit du monde, là où se trouve leur vraie place.

Cette panne est providentielle. Son talent endormi s’ébroue et se libère des chaînes qui l’emprisonnaient. En un éclair, elle sait qu’elle pourra écrire plusieurs feuillets pour le Spec, dès demain. L’article sera bon. Non, il sera excellent. Son rédacteur en chef sera à nouveau fier d’elle. Dès qu’ils auront résolu l’incident. Elle regarde enfin les autres passagers.

En face, il y a cet homme, au regard froid et au visage sévère. Peut-être trente ou quarante ans. Grand, aussi grand que William, une allure de militaire en permission, peut-être même un officier, vu son âge. Il est adossé contre une paroi, les mains dans les poches, pas plus inquiet que ça. Une expression vaguement ennuyée se lit sur son visage. Il lui rappelle Sal, Sal Paradise. Quelque chose en lui évoque un ange déchu et une longue et éprouvante route.

A sa droite, c’est un cadre moyen, comme il en existe tant qui courent comme des rats entre les gratte-ciel de la grosse pomme. Plus près de la cinquantaine, il porte un costume acheté dans un Daffy’s quelconque, là où on vend la mode haut de gamme à prix discount. "Be Dafferent! ", c’est ce qu’ils disent. En tous cas, celui-ci l’est vraiment : mal rasé, mal barré, malheureux en définitive. C’est bon ça pour son article, ça respire la détresse morale. Il a forcément une histoire à raconter. Il la lui racontera, c’est sûr. Il tremble un peu et respire bruyamment. Claire prie le ciel qu’il ne soit pas claustrophobe, en plus.

Enfin, il y a cet italo-américain au look BCBG tout droit sorti d’une boutique Valentino, dans l’Upper East Side. Une ligne fluide et dynamique, confortable et sans fausse note. La veste en daim aurait pu constituer une faute de goût. Lui l’assume en lui conférant une indéniable légitimité. Un brushing très Clooney-like malgré la touche superflue de cette paire de lunettes qui lui donne un air de touriste débarquant de sa Floride natale. Elle observe avec intérêt ses mains, parfaitement manucurées. Il y a un mystère chez cet homme, une forme de menace domestiquée. Elle aperçoit finalement le livre qu’il tient. Sartre. Elle connaît aussi cet écrivain français. Il a raison, tout n’est qu’une question de choix. Elle n’a jamais eu besoin de justifier les siens. Et cela ne va pas commencer.

M

(2) Y marche une Princesse que nous connaissons tous,
Qui brille d'une lumière blanche et qui veut montrer
Comment tout se transforme toujours en or.

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z653z  Ecrire à z653z

2007-11-23 23:33:46 

 je ne sais pas quoi mettre iciDétails
Il est prévu combien d'épisodes ?
C'est long 24h ;)
Chacun va décrire les autres ou pas ?

z653z qui attend la suite :)

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2007-11-24 09:08:49 

 Chrono?Détails
On va essayer d'aller au plus court. Il n'y a pas Jack Bauer dans le coin!


M

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2007-11-24 19:13:21 

 WA - Participation exercice n°26 partie 3Détails
La suite...

___________________

17 minutes après...

And if you listen very hard,
The tune will come to you at last,
When all are one and one is all, (3)

La lumière blafarde vacille à nouveau. Un long tremblement, lourd et sourd, remue leurs tripes dans la cage. Uns sorte de râle profond, qui s’évanouit lentement quelque part au fond des entrailles du monstre. La veilleuse résiste vaillamment mais la clarté qu’elle diffuse est de plus en plus faiblarde.

Vincent a écarté légèrement les bras afin de ne pas perdre l’équilibre. Hier soir, il était tranquillement accoudé au comptoir de la Carreta, terminal E du MIA. Il sirotait un cocktail sans alcool, attendant son vol American Airlines à destination de JFK. Derrière la verrière, le ciel s’assombrissait au-dessus des pistes et les fuselages scintillants des avions semblaient embrocher son coeur.

Vincent vit à Miami, sa ville natale. Il a grandi à l’ombre d’un géant qui a très tôt remarqué ses aptitudes particulières. Loyauté et discrétion, honneur et infaillibilité. Vincent ne conduit pas de bolide décapotable importé à grands frais de Maranello. Les flics qu’il croise n’ont pas le visage de Crockett ou la démarche féline de Tubbs. De son balcon, un dernier étage sur Miami Beach, il rêve en contemplant le miroir infiniment bleu qui s’étire jusqu’à l’horizon, au-delà des lumières multicolores qui dansent sur Ocean Drive. Il voudrait être ce goéland qui s’éloigne à tire d’aile vers le large Il dériverait au-delà du bord du monde, laissant derrière lui cette terre de souffrances et de mort où il ne reviendra jamais...

Mais ce n’est qu’un rêve, car lorsque le géant lui parle doucement à l’oreille, Vincent achète un billet d’avion. Il ne se presse jamais. C’est une question de méthode, d’organisation. Après New-York, il s’envolera vers Los Angeles même s’il n’aime pas cette ville, ni la côte ouest d’ailleurs, trop clinquante et tape à l’oeil. Entre le crépuscule et l’aurore, il sera une ombre entre les ombres de la nuit. Aux premières lueurs du jour , il s’envolera droit vers le soleil levant, droit vers Miami, laissant la cité des Anges se réveiller derrière lui et nettoyer ses rues ensanglantées.

Ce matin, assis au fond d’un bar de l’autre côté de la rue, il a attendu John. Il l’a suivi dans les couloirs du métro jusqu’à Cordlandt Street. Il a suivi sans difficulté des mains enfoncées dans les poches, une haute taille et des cheveux coupés en brosse, à la mode G-Man. Le géant n’oublie pas, même s’il donne parfois l’impression d’une eau qui dort. Le passé rattrape toujours ceux qui le fuient et il leur saute au visage comme un chat enragé. Planqué derrière un groupe bruyant de touristes japonais dans la file d’attente de l’ascenseur, Vincent a été surpris par leur départ inopiné. Se retrouvant involontairement juste à côté de John, il n’a pu se défiler quand les portes se sont ouvertes et que le liftier leur a fait signe d’avancer.

Il a donné le change en faisant mine de se plonger dans la lecture d’un livre abandonné sur un fauteuil à JFK. Il ne connaît pas l’auteur. Il n’a même pas pris la peine de vraiment lire. En revanche, il a rapidement évalué les autres passagers. Un cave et un couple d’étudiants bien blancs et bien blonds. Aucune menace. Il a le temps, nullement pressé d’atterrir à Los Angeles. Ici, à Manhattan, il connaît un club sympa où des musiciens inspirés jouent la musique. Le jazz coule dans leurs veines et brille dans leur sueur. Le sang et la sueur, Vincent connaît aussi.

Son ipod ne le quitte jamais. Après avoir soigneusement placé les écouteurs infra-auriculaires, il n’entend plus le bruit de la rue, devenant lui-même une partie de cette musique magique qui l’enveloppe totalement. Au fond d’un taxi jaune, il glisse ainsi entre les stalagmites noires qui grimpent jusqu’au ciel, porté par les notes bleues d’un saxophone. Un oiseau chante pour son âme et personne ne le voit pleurer.

S’il n’est pas du genre expansif, il a remarqué qu’aucune parole n’a encore été échangée bien qu’une vingtaine de minutes se soit écoulée depuis que cette foutue capsule s’est coincée dans sa gaine de béton. On dirait qu’une sorte d’accord tacite les empêche tous de rompre le silence, comme si aucun ne souhaitait vraiment s’approcher des autres, en dépit d’une situation qui devient critique.

M

(3)
Et si tu écoutes très attentivement,
Finalement l'air te parviendra,
Quand tous ne feront qu'un et qu'un sera tous,

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2007-11-29 17:31:27 

 WA, exerxice n° 26, participationDétails
Le loup d’Anna







Jeudi dix-huit novembre, seize heures. Le ciel est lourd , quelques éclairs zèbrent le ciel dans le lointain. Les voitures qui passent sur la départementale ont allumé leurs phares. Le vent s’est levé, l’orage est proche. La route sinueuse serpente à flanc de montagne ; certains tronçons ont été creusés dans la roche, volés à la pierre par des hommes courageux et têtus. Elle est toujours dangereuse, et les riverains le savent, qui se gardent bien d’y rouler trop vite.
« Irina, tu dors ?
- Mmmh... »
Laurent Delbosc, ancien VRP devenu responsable de rayon dans un magasin de sport, incline le rétroviseur pour voir sa fille, sur la banquette arrière. La jeune adolescente se balance lentement, les yeux fermés, en serrant contre elle sa poupée de chiffon. Une mèche de ses longs cheveux blonds, plus fins que des fils de soie, est collée à sa joue, toujours si pâle. Elle est tellement fragile que le coeur de Laurent se tord chaque fois qu’il la regarde. Ses yeux sont comme des miroirs à peine bleutés où passent des rêves étranges et inaccessibles. Il se rassure en se disant qu’elle progresse, elle progresse tous les jours, il ne faut pas chercher plus loin. Et même si... Elle est la lumière de ses jours, et pour elle il a tous les courages et toutes les patiences.
Laurent soupire et se concentre sur la route.
« Aime pas la montagne. »
La petite voix fluette est boudeuse.
« Pourquoi, ma chérie ?
- C’est comme un gros chat, méchant chat, il griffe, le chat.
- Mais non... C’est juste du caillou, tu sais, un gros gros... »
Un coup de tonnerre fracassant fait trembler les vitres de la voiture. Instinctivement, Laurent freine. Bon réflexe. A cinquante mètres devant lui, au bout de la petite ligne droite qu’il vient d’entamer, tout un pan de montagne se détache, et s’écroule sur la route dans un vacarme d’apocalypse. Ne pas bloquer les roues. Freiner... Tu sais conduire, Laurent, tu as fait cent mille kilomètres par an pendant plus de dix ans... Il n’y voit plus rien. La poussière est opaque comme un linceul gris. Garder les roues droites, freiner...
Irina n’a même pas crié. Elle fait danser sa poupée sur ses genoux. Le véhicule s’est immobilisé, droit. Le pare-brise est intact. Jusque là, tout va bien. Laurent prend la torche dans la boîte à gants et va estimer la situation. La route est totalement obstruée. A droite, la roche nue, lisse, impénétrable ; à gauche, le rail de sécurité a été emporté dans la vallée abrupte dont la pente est recouverte d’un fouillis végétal peu engageant. Il a déjà la main sur la poignée de la portière, quand la lumière des phares l’éblouit, tandis que le crissement aigu de pneus malmenés le cloue sur place, le coeur en chamade, dans l’attente de l’inévitable choc... Non. Le 4 x 4 s’est arrêté à deux mètres. Un homme sur la quarantaine, en costume gris impeccable, bondit comme un diable hors de sa boîte.
« Espèce de con ! Non mais vous êtes taré de vous arrêter comme ça ! »
Laurent a horreur des conflits. Il y a des choses plus graves.
« Calmez-vous. Il y a eu un éboulement, ça vient juste d’arriver, je n’ai pas eu le temps de... »
L’homme hausse les épaules.
« Connard », grogne-t-il en reprenant le volant. Il est en pleine manoeuvre de demi-tour, moteur vrombissant et freinages secs, quand une Golf GTI s’arrête derrière lui. Un grand escogriffe d’une trentaine d’années, en jeans et anorak vert kaki, s’avance le sourire aux lèvres.
« Que se passe-t-il ? »
L’homme au 4 x 4 gesticule en hurlant. Laurent s’approche.
« Il y a eu un éboulement. La route est bloquée. »
Le nouveau venu lui sourit gentiment et jette un regard amusé au conducteur furieux qui baisse sa vitre.
« Mais pousse-toi, bordel de merde, tu vois bien que tu me gênes ! »
L’autre affiche son plus beau sourire goguenard et continue sur la route. Laissant le moteur allumé, l’impatient sort en hurlant de sa voiture.
C’est alors qu’une petite camionnette grise, qui a dû en voir d’autres, se gare à son tour derrière la Golf. En descend un vieux monsieur qui boite un peu, avec un pantalon de velours élimé, rentré dans des bottes vertes en caoutchouc, et une veste de chasse. Il pose la main sur l’épaule du costume gris, dont le possesseur est en pleine crise de colère hystérique.
« Laissez tomber. La route est barrée de l’autre côté aussi. »
Le coléreux se retourne, entre l’étonnement et le désespoir.
« Hein ?
- Ca s’est effondré juste derrière moi. Une chance, non ? C’était pas mon heure, faut croire. C’est fréquent, par ici, mais deux fois sur la même route, ça c’est pas tous les jours...
- Mais... », balbutie le costard-cravate, « comment je vais faire ? Il faut appeler le Samu, un hélicoptère, l’armée... »
Les deux autres se sont approchés, silencieux, médusés, ils regardent le vieux comme un sauveur.
« Les portables passent pas, ici. La montagne aime pas ça. Il va faire nuit, et l’orage va péter dans les cinq minutes. M’étonnerait qu’ils envoient quelqu’un avant demain...
- Mais je suis le professeur Duché ! Je dois donner une conférence demain matin à Toulouse ! C’est le Congrès Mondial de Cardiologie ! On m’attend !
- Eh bé, on vous attendra... », sourit le vieil homme, pas vraiment impressionné. « M’sieurs dame... Je m’appelle Aimé. J’habite par ici. Et j’crois ben qu’on va passer la nuit ensemble. »
Le grand échalas tend une main franche.
« Eric. »
- Laurent. Je suis avec ma fille, Irina. Viens, ma chérie, descends de la voiture. »
Un coup de tonnerre se présente aussi.
« Ca va pas tarder à tomber, les jeunes. Je connais un refuge, à mi-pente. On y sera mieux pour la nuit.
- Il n’est pas question que je...
- C’est comme tu veux, mon gars, mais quand ça va geler, c’te nuit, tu vas te sentir couillon... »
Le professeur Arnaud Duché n’a plus rien à dire. Il sort de son coffre une grosse valise sur roulettes et un attaché-case Hermès.
« La descente est raide, m’sieu. Devriez voyager léger. »
Laurent renverse son sac de voyage dans son coffre. Il y fourre des lainages pour Irina, des chaussettes, les comprimés en cas de crise, la bouteille d’eau, le paquet de biscuits et le chocolat.
« Donnez-moi votre sac », propose Eric quand il découvre le petit visage effrayé d’Irina. Occupez-vous de votre fille. » Sur l’épaule gauche, il porte déjà un sac à dos à moitié vide.
Aimé prend sa besace sur l’épaule et les mène à un endroit où le rail de sécurité est interrompu sur un mètre.
« Ne vous écartez pas du chemin et descendez lentement, ça glisse un peu. »
Derrière lui se place Eric, puis vient Laurent, qui tient Irina par la main ; le professeur ferme la marche, accroché à son attaché-case et pestant à mi-voix parce que les ronces et la boue et la mallette et les mocassins. Ils n’ont pas fait cinquante mètres qu’une averse impromptue de grêlons les bombarde sans pitié. Aimé ne ralentit pas pour autant. La lumière est crépusculaire, mais il n’hésite pas un instant. Les autres peinent un peu pour suivre son rythme, mais ça ne leur laisse pas le temps de se plaindre.
Enfin au bout d’une interminable dizaine de minutes, apparaît la silhouette sombre d’une petite cabane. Leur guide ouvre la porte qui n’est pas verrouillée, et avance dans le noir avec l’aisance d’un chat. Il craque une allumette, et la douce lueur d’une lampe à huile éclaire une petite pièce presque nue, aux murs blanchis à la chaux. Dans un coin, une table avec deux bancs. Contre le mur du fond, une cheminée noircie par les ans. Sous la fenêtre, un vieux bahut, près duquel sont posées deux bottes de paille. Le sol est de terre battue. L’air sent la cendre froide et le renfermé. Le vieil homme allume une deuxième lampe, qu’il pose sur le manteau de la cheminée.
Le cardiologue se redresse.
« Mais c’est magnifique ! Nous allons être vraiment bien ici. »
Négligemment, il sort son portable de sa poche, et le range aussitôt.
« Je vous l’ai dit, m’sieu, ça passe pas ici. Je vais chercher de l’eau à la source. Il y a des couvertures et des ustensiles dans le bahut. La paille c’est pour étaler par terre.
- Très bien ! Allez, mademoiselle, toi et moi on va mettre la paille. Vous deux, vous allez chercher du bois ? »
Laurent parle à Irina à voix basse ; elle acquiesce en silence et se laisse tomber sur le banc.


La grêle a vite cessé, mais l’air est devenu glacial, et le ciel blanchâtre.
« Il va neiger », murmure Eric.
« Ca n’arrange pas nos affaires, mais Irina va être ravie ; elle adore la neige... »
Les deux hommes se sourient.
Quand ils reviennent au refuge, ils aperçoivent Aimé qui remonte la pente péniblement avec un seau plein d’eau claire. Duché les attend en faisant les cent pas.
« Ah ! Quelqu’un a un couteau ? Je n’arrive pas à défaire les ficelles des bottes de paille. »
Devançant le Laguiole d’Aimé, Eric lui tend son Opinel avec un sourire grimaçant qui vaut une mise en garde, et que l’autre reçoit parfaitement.
La maisonnée s’organise. Le feu crépite dans la cheminée, la paille fait un tapis isolant sur le sol. Eric réchauffe des lentilles en conserve trouvées dans le bahut, dans le vieux chaudron de cuivre accroché à une chaîne, Aimé pose sur la table ses emplettes de l’après-midi : un gros pain, deux saucissons, une bouteille de vin et un pot de miel. Laurent ajoute les biscuits et le chocolat.
« Mais c’est un vrai festin ! », déclare gaiement le professeur. Tu m’aides à mettre le couvert, ma puce ? »
La jeune fille, à genoux devant la cheminée, n’a même pas levé la tête.
« Elle s’appelle Irina. Et... elle a certaines difficultés... en particulier dans les relations avec les gens...
- Ah oui, je vois... Je suis médecin, vous savez. Elle est en institution, je suppose. »
Laurent a un mouvement de recul.
« Non. Elle vit avec moi.
- Vraiment ? Quelle drôle d’idée... Enfin, c’est votre affaire...



La nourriture réchauffe les corps et apaise les esprits. Dehors la neige se met à tomber lentement, à gros flocons inexorables.
« Tu fais quoi dans la vie, mon pt’it gars ? », demande Aimé à Eric. « Tu as l’air de te débrouiller...
- Je voyage beaucoup. Je suis journaliste.
- C’est génial ! », s’exclame Laurent.
- « Ca dépend. Là, je rentre d’Irak. C’était... moche. »
Irina lève sur lui ses yeux presque transparents.
« Peur...
- Oui, Irina, là-bas tout le monde a peur. »
Il raconte à mi-voix, sans aucune ostentation, la poussière, le sang, le chaos, la mort, et le pire, l’incertitude de chaque instant.
« J’ai fait l’Algérie en ‘62 », soupire Aimé. « c’est toujours pareil. »
Dehors la neige tombe de plus en plus dru.
« Bon, c’est pas très gai tout ça ! Moi je suis cardiologue, je dirige le premier centre français de transplantation cardiaque et je...
- Neige ! »
Irina, qui est en face de la fenêtre, s’y précipite et colle son nez sur le carreau sale.
« Papa, papa, neige !
- Oui, Irina, je sais. Tu iras jouer demain. Viens finir de manger, sois gentille...
- Est-ce quelqu’un a entendu la météo ? » , demande le cardiologue un peu renfrogné.
- Oui. Il fait 30° à la Réunion, moins 10° à Moscou... Et nous, on verra bien demain », rétorque Eric avec un sourire franchement ironique.



Tout le monde s’installe pour la nuit, en sirotant une infusion de verveine qu’Eric a dénichée dans le bahut.
« Qui s’occupe de ce refuge ?
- Nous tous, les gens du coin. Il est pas grand, mais il a déjà sauvé des vies.
- Demain on vous laissera de l’argent pour refaire les stocks.»
Le vieux fait un geste vague, mais son hochement de tête exprime la satisfaction.
Irina serre la main de son père.
« Ecoute, papa. »
Laurent tend l’oreille. Un long hurlement, plainte lugubre comme venue d’un autre âge, emplit le silence paisible d’une inquiétude palpable.
« Il y a encore des loups, par ici ?
- Voyons, Laurent », ricane le professeur, «il n’y a plus de loup en Europe, sauf dans les réserves !
- Ca, je sais pas. Mais nous, l’an dernier, on en a traqué un, qui avait déjà tué huit moutons... Mais on l’a manqué... »
Les yeux d’Irina s’agrandissent démesurément.
« Loup ? Gentil, le loup ?
- Ici tu ne risques rien, ma chérie. Nous te protègerons. »
Aimé lui sourit gentiment.
« Ton papa et moi on est plus forts que le loup », ajoute Eric avec tendresse. « Et puis, peut-être bien qu’il est gentil... »
Le sourire d’Irina est d’une telle pureté qu’un instant Eric oublie qu’il existe des guerres.


Les respirations régulières se répondent calmement dans la quiétude du sommeil, celle d’Aimé un peu plus forte, celle d’Irina presque imperceptible. Pourtant, au coeur de la nuit, celle-ci appelle d’un voix angoissée.
« Papa !
- Dors, ma chérie, tout va bien.
- Oh la ferme, merde ! » (Ca, c ‘est le cardiologue.)
Laurent tend le bras vers la lampe qui veille sur la table et tourne un peu la mèche.
« Là, regarde, tout va bien ...
Les yeux exorbités elle regarde vers la porte.
« Femme... Il y a... une femme... Ecoute... Elle pleure... »
Laurent prend sa fille dans ses bras et tout à coup il sursaute.
« Tu as raison ! Eric ! Aimé ! Ecoutez ! »
Les deux autres se redressent. C’est un gémissement discontinu, saccadé, parfaitement distinct, et qui semble tout proche.
D’un bond, Eric est debout et enfile ses chaussures. Plus lentement, Laurent et Aimé l’imitent, mais celui-ci croit bon de préciser :
« Vous savez, avec l’écho dans les vallées, ce n’est peut-être pas tout près... »
Laurent va secouer le professeur, qui manifestement fait semblant de dormir.
« Je vous confie ma fille. D’accord ?
- Oui, vous êtes médecin », le toise Eric de toute sa hauteur. « Alors prenez soin d’elle. »
Duché s’assied en grognant.
« Ca va, ça va, je dormais... »


La neige a cessé mais il y a bien déjà trente centimètres au sol, éblouissante dans la lumière des torches. Un petit vent piquant fouette les visages. La plainte semble venir de la vallée. Les trois hommes descendent, précautionneusement, les reliefs sont effacés, la neige crisse sous leurs pas et transforme rapidement leurs pieds en moignons engourdis. On n’entend plus le loup. Ils sont tout en bas, maintenant, au bord du ruisseau. Il n’y a personne. Le silence est glacé. Puis les gémissements recommencent, entrecoupés de sanglots. Mais cela semble venir de plus haut, sur leur gauche. Ils reprennent leur marche cahotante et obstinée, trébuchant dans les ronces, incapables de courir. Les torches balaient le sous-bois en vain. Ils se fraient un passage non sans mal, contournant les buissons trop épais pour être traversés.
« Pourvu qu’on arrive à temps », murmure Eric dans une buée blanche qui danse dans la lumière.
Laurent pense à Irina, il s’en veut de l’avoir laissée seule avec ce type détestable, mais il ne veut pas passer pour un tire au flanc. Et puis elle est grande, elle ne risque rien et le gars est médecin, merde.
Ils sont remontés à mi-pente quand les pleurs leur font encore changer de direction. Et encore. Et encore. Ils ont l’impression de tourner en rond, d’être ballottés, entraînés, malmenés par une malédiction diabolique et perfide. Ils n’ont plus froid, maintenant, même s’ils ne sentent plus leurs pieds, mais ils sont perdus, désorientés, perplexes...
Un cri de terreur – une voix d’homme – vient ajouter à leur angoisse. Ils se regardent.
« Qui c’est ? Le toubib ? », demande Eric.
« Irina ! », hurle Laurent, qui se met à courir comme un fou, droit devant lui, sans savoir où il va.
« Attends, mon gars, tu vas te perdre ! »
Aimé essaie de se repérer, mais le paysage est tellement uniforme... Enfin, après détours, hésitations et retours, au dessus d’eux apparaît la lueur pâle de la fenêtre du refuge, au moment où le ciel commence à pâlir sur une aube terne et glaciale.
Irina est assise devant la cheminée, où rougeoient encore quelques braises. Elle caresse sans fin la tête de sa poupée. Duché est recroquevillé dans le coin le plus sombre, la tête sur les genoux, il sanglote comme un enfant. Laurent serre Irina dans ses bras, elle est calme et souriante. Eric s’approche du cardiologue, l’appelle, le secoue par le bras. L’autre pousse un cri affolé et lève un visage baigné de larmes, dont les yeux hallucinés reflètent une terreur profonde comme un gouffre sans fond. Il ouvre la bouche, mais aucun son n’en sort. Sa peur est vivante, envahissante, contagieuse. Les trois hommes se regardent, démunis et inquiets. Seule Irina, paisible, chantonne à mi-voix. Aimé va chercher au fond du bahut une vieille bouteille couverte de poussière et en remplit un gobelet ; les lèvres tremblantes du médecin en laissent échapper plus de la moitié, mais il parvient à en avaler un peu. Il a un soubresaut pathétique et son regard incrédule passe de l’un à l’autre comme pour s’assurer que tout est bien réel.
« Le... Le... loup... », parvient-il à prononcer, le corps secoué de spasmes. Laurent s’assied près de sa fille.
« Qu’est-ce qui s’est passé, ma chérie ? Est-ce que quelqu’un...est venu ? »
Elle lui sourit, et parle d’une voix fluide et claire comme jamais elle n’a parlé.
« Ah, oui... Le loup est venu... Un grand loup noir, très grand, très beau... Il était très gentil... D’abord il a grogné un peu, il avait faim, il voulait manger le monsieur... Mais je lui ai parlé, je l’ai caressé, et je lui ai donné le reste du saucisson... J’ai bien fait, n’est-ce pas ? C’est dur la vie d’un loup en plein hiver, les hommes veulent le tuer, il a froid, et les moutons sont tous dans la bergerie... Il a trouvé un rat avant-hier, mais ça n’est pas grand chose pour un loup... Ah, il a fini les lentilles aussi... Et il a adoré les biscuits ! Tu m’as toujours dit qu’il fallait partager... Après il m’a léché le nez et il est parti ; je crois qu’il était content. Ah... il m’a dit que pour de vrai il n’y avait pas de femme... Que c’était une histoire d’avant, dont la montagne se souvient. Elle s’appelait Anna. Tu la connais, papa, cette histoire ? »
Laurent est très pâle. Il regarde Aimé dans une interrogation muette. Le vieil homme soupire, et sert une tournée de la bouteille poussiéreuse, dont l’alcool arrache la bouche. Dehors la neige reprend son ballet de flocons, dans le jour pâle qui se lève.
« Il y a une très vieille légende, par ici. On dit qu’il y a près de deux cents ans, la femme d’un émigré espagnol, qui s’appelait Anna, se perdit un soir dans la montagne, au mois de novembre, en cherchant une brebis égarée. Elle trébucha et se cassa la jambe. Elle n’était pas très loin de la route, et elle appela longtemps au secours. Mais aucun des passants ne s’arrêta. On dit qu’une horde de loups se coucha près d’elle pour la réchauffer, mais qu’elle mourut quand même de ses blessures. On dit que son esprit est resté dans le corps d’un grand loup noir, puis qu’il est passé dans celui d’un de ses fils, puis d’un petit-fils. On dit que ça dure encore aujourd’hui, et que c’est pour ça qu’on n’arrive pas à piéger ce loup. On dit que depuis ce temps-là l’esprit d’Anna cherche à se venger des hommes peu charitables, comme en son temps elle avait dévoré les voyageurs qui ne lui avaient pas porté secours... Mais bon, c’est une légende... Ici nous on y croit, mais on est des paysans, et on sait bien qu’en montagne si on ne s’entraide pas on est mort... Je sais pas quoi vous dire... »
Eric et Laurent restent silencieux. Le regard d’Irina n’a jamais été si présent, si pénétrant.
« Il était gentil, ce loup, papa, je te promets... »
Les hommes font cercle autour d’elle, et tandis que la neige ajoute inlassablement des flocons aux flocons, le sommeil les cueille un à un, blottis les uns contre les autres comme une portée de louveteaux autour de leur mère. Seul Arnaud Duché reste blotti contre le mur, pétrifié dans son hébétude.




Les secours les retrouvent en milieu d’après-midi, endormis dans la même position devant le feu éteint. Le professeur Duché est hospitalisé, dans un état de mutisme inquiétant. Les autres se séparent après s’être longuement serrés dans les bras les uns des autres. Irina est rayonnante. Elle va bien.
Narwa Roquen, qui a dû faire face à une insurrection de ses personnages... et qui a dû se plier à leurs volontés... Donc si ça ne vous plaît pas, je n'y suis pour rien!

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2007-11-29 22:21:38 

 WA - Participation exercice n°26 partie 4Détails
L'avant dernière partie...mais je serai en retard! Un peu débordé ces temps-ci!

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56 minutes plus tard...

And she's buying a stairway to heaven (1)

Que lui chaut d’être prisonnier là-dedans ? Que lui importe d’entendre battre son coeur une folle chamade. Qu’importe qu’il ait oublié ses pilules? Que lui importe que tout aille au diable si elle n’est plus là ?

Quand il a compris qu’elle était partie pour de bon, il a couru jusqu’à la plage, jusqu’aux grands manèges immobiles et a crié son nom, là où tout avait commencé. Mais l’océan s’est contenté d’effacer sans rien dire ses pas sur le sable encore et encore. Dans le ballet des vagues, le passé est revenu à la surface. L’époque où on l’appelait Swan. C’était un matin comme celui-là où, face au soleil levant, Swan avait regardé les autres...ceux qui avaient survécu à la longue traque nocturne. Quelque chose dans son regard avait changé. Une détermination nouvelle. Il aimait Mercy et tout était différent. Il quitta le gang. Lui et Mercy vécurent à Coney Island, près de la plage. Il aime toujours Mercy même si plus personne ne les appelle plus ainsi. D’ailleurs qui se souvient d’Ajax, de Cochise, de Snow?

Il n’a pas téléphoné à son fils qui travaille à Chicago. Il n’a pas téléphoné à sa fille qui vit dans le sud. Non, ils ne peuvent l’aider. Comme un funambule, il a refait le voyage à l’envers. En chemin, il a croisé les fantômes de joueurs de base-ball qui agitaient vers lui leurs battes en grimaçant, mais ce n’était que le soleil qui jouait dans les branches de grands arbres. En traversant Central Park, il a cru entendre la voix de Cyrus qui s’adressait aux Electric Eliminators, aux Firetasters, aux Saracens et à toutes les autres bandes rassemblées là, mais ce n’était que le vent qui se moquait cruellement de lui. Elle ne l’a pas attendu. Elle n’était pas là. Alors, en désespoir de cause, il a poussé la porte d’un club et s’est accoudé au comptoir. Il a contemplé sans les voir les contorsions sensuelles de la danseuse exotique accrochée à une barre derrière les barreaux de sa cage suspendue, à travers l’ambre veloutée qui emplissait le verre. Mais ce n’était pas Mercy. Il a bu jusqu’au matin. Quand il est sorti, les immenses tours s’élançaient douloureusement vers les nuages. De là-haut, c’est sûr, il la verrait, où qu’elle soit. Sa vue était brouillée et sa langue pâteuse mais son corps n’avait pas oublié l’alcool...comme un vieil ami retrouvé après une longue absence.

Il pénétra à la suite des autres dans l’ascenseur...et il est là, coincé comme eux, suspendu entre la terre et le ciel. Il ne fait pas attention aux autres. Il ne fait pas attention aux minutes qui s’égrènent. Il attend tout simplement.

Durant une fraction de seconde, une sorte de flash lumineux inonde la cabine, accompagné d’un grondement rageur et trépidant. La capsule tangue vertigineusement, les bousculant comme des billes de billard, les uns sur les autres. Puis tout s’immobilise à nouveau. Il semble même que la veilleuse en soit sortie ragaillardie, une belle lumière chaude et claire se déverse à nouveau dans l’étroit habitacle. Comme une ampoule électrique en surtension. Une lumière un peu irréelle.

William n’est pas mécontent de ce contre-temps. Ce qu’il devait dire à Claire l’a empêché de dormir la nuit dernière. Il s’est tourné et retourné sur son matelas, la fenêtre grande ouverte pour lutter contre la moiteur suffocante de cette nuit de septembre. Il tiendra bon, il ne peut en être autrement. Claire. Il sent sa main cramponnée à son avant-bras. Il sent son corps frémissant contre le sien.

Elle est entrée dans son existence comme une voleuse. Elle a fracturé son intimité comme un cambrioleur crochète une serrure. Elle l’a piégé. Piégé et manipulé. Comme un collégien, il a cru à ses mensonges et à cet amour qui lui paraissait si lumineux. Il a été emporté dans un tourbillon émotionnel qu’il ne pouvait contrôler. Tout allait trop vite. Au début, il fut séduit et ébloui par cette grande fille volubile et téméraire, qui n’hésitait pas à l’attendre à la sortie des vestiaires, qui suivait l’équipe sous le prétexte fallacieux de couvrir le championnat universitaire pour le Spec. C’est vrai qu’elle était magnifique et terriblement valorisante. Ses copains clignaient de l’oeil en se poussant du coude quand ils la voyaient derrière le grillage, au bord du terrain d’entraînement. Elle le buvait des yeux. Les plaisanteries graveleuses ont circulé sous les douches et William prenait ça comme un jeune homme de dix-neuf ans qui se frottait les yeux en ne croyant pas à sa chance. Alors il a plongé et a cueilli la fleur qui s’ouvrait devant lui, la fleur et son fruit. La chair était tendre et sucrée, comme le miel de ses cheveux. Il l’a aimée.

Cependant, à dix-neuf ans, on est forcément inconstant. Il a voulu gentiment lui faire comprendre que leur histoire avait été belle, qu’elle ferait un joli souvenir mais qu’elle était terminée. Claire ne faisait pas mine de comprendre, éludant les conversations gênantes, éclatant de rire en piquant un baiser sur ses lèvres pour le faire taire. William ne voulait pas la faire souffrir. Plus il aspirait à rompre, plus elle le serrait dans un cercle de plus en plus étroit, écartant ses amis un à un.

Jusqu’au jour où, n’y tenant plus, il lui a parlé de manière directe, presque brutale. C’est ce jour qu’elle lui a fait peur. Il ne se souvient que de l’ambulance et des yeux étonnés du père de Claire, accouru en catastrophe. Il lui a maladroitement expliqué comment il l’avait retrouvée dans le bac de douche, les poignets tailladés avec une lame de rasoir. Et comment oublier Claire, assoupie, les poignets bandés, sous perfusion ? Elle ressemblait à un ange dans un décor blanc de paradis aseptisé. Comment oublier ce qu’elle lui a révélé à voix basse, pendant que son père était parti s’occuper des papiers pour le transfert dans une clinique acceptable ? Alors il lui a promis. Elle a souri aux anges, a tourné la tête et s’est endormie, rassurée.

Mais elle lui a menti. Il n’y a pas de bébé. Il n’y a jamais eu de bébé. Aujourd’hui, sur le toit du monde, il lui dira que tout est fini, qu’il part dans l’ouest avant le début de l’année universitaire. Il est assuré d’être désigné quarter back d’une autre prestigieuse équipe. Là-haut, près des nuages, il la fera sûrement pleurer mais quand ils redescendront, ils iront chacun de leur côté. Il sera enfin libre.

Mais pour l’heure, il remercie le ciel de ce retard. C’est si difficile de rompre une vie rêvée.

M

(1) Elle a acheté un escalier pour le paradis.

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2007-12-01 00:38:39 

 FrissonsDétails
Tous ces personnages sont terriblement parlants, réels, on les voit très distinctement, et qu'ils sont attachants... On voudrait en savoir un peu plus sur eux, les voir simplement évoluer, les regarder vivre. Et l'ambiance est magique... Mi-inquiétante mi-séduisante, comme tout ce qui est inconnu.
Félicitations, pour changer ^^

Elemm', qui court désespérément après la lecture des textes (Maedhros j'y viens! Enfin, bientôt!), et qui n'espère même plus écrire...

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2007-12-01 12:51:51 

 En attenteDétails
Pour l'instant, je me demande où on va :)
L'absence de parole est surprenante! Quelques fautes de frappe (mots en trop) montrent bien que tu fais vite, et forcément, tu es obligé de faire vite puisque tu ne peux pas faire court! Un défi prochain, l'exercice en 400 mots, pas plus?? ;)
En tout cas, j'attends la fin, pour voir où ça nous mène...

Elemm', qui a du mal avec l'ambiance froide.

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2007-12-02 20:12:30 

  WA - Participation exercice n°26 - FinDétails
La fin de l'histoire. Je ne sais pas si je l'ai bien retranscrite mais elle est particulière pour moi. Vous allez dire que c'est du Maedhros et je ne pourrai qu'acquiescer. Heureusement ou malheureusement.

__________

Come little angel and sit by my side
I need someone to talk to
Now I can see the light
My life is a station
Where the darkness meets the day
Hear the last lines before I design to fade away


L’accélération verticale les plaque littéralement au plancher de la cabine. Une accélération prodigieuse et fulgurante, comme un énorme coup de poing. La lumière forme un kaléidoscope fantasmagorique où les couleurs dansent sur les parois, maquillant les visages d’explosions de teintes surréalistes. Un sifflement étourdissant vrille leurs tympans. Ils tentent vainement de se boucher les oreilles de leurs mains maculées de lumières changeantes. Peine perdue, le sifflement franchit ce maigre barrage. C’est une vibration suraiguë qui s’insinue le long de leur colonne vertébrale et taraude leurs tempes. L’ascension irrésistible ne faiblit pas. A l’allure où le mouvement les entraîne, ils vont jaillir du toit comme un bouchon de champagne trop longtemps comprimé, comme un obus de canon tiré par un destroyer en pleine mer, comme une fusée qui se libère de toute la force de ses réacteurs. Leurs corps deviennent si lourds, la force gravitationnelle ne souffre aucune exception.

John essaie de lever un bras qui pèse une tonne pour atteindre le bouton d’arrêt d’urgence. Millimètre après millimètre, sa main avance vers le tableau de commandes. La vitesse ne cesse de s’accroître, les autres visages sont flous et trépidants, comme vus derrière un téléobjectif non stabilisé. William est tassé tout près de Claire dont les yeux reflètent une immense détresse, un début de panique. William bande ses muscles dans un effort surhumain pour résister à cette force implacable. Il a l’impression d’avoir été percuté par une centaine d’ailiers défensifs à la fois. Vincent a laissé glisser au sol le livre qu’il tenait et le bruit mat sur le plancher claque comme une énorme boule d’acier tombant d’une très grande hauteur. Vincent ne contrôle plus rien et cela le terrifie. Au coeur de ce malstrom, il repense alors à ce grand oiseau blanc volant librement au-dessus des nuages. Swan n’esquisse aucun geste, s’en remettant à la fatalité de ce jour sans lendemain.

Enfin, le doigt hésitant de John parvient au bouton désiré. Il appuie plusieurs fois sans résultat. L’ascenseur file toujours plus vite vers le haut. C’est impossible. Il aurait dû déjà s’écraser contre le plafond de la cage de béton. D’ordinaire, il lui faut 58 petites secondes pour atteindre le toit du monde, la terrasse qui domine New-York. 58 secondes et une allure beaucoup moins rapide. Son regard s’arrête soudain sur la montre que son geste a découverte. Derrière le cadran, les aiguilles se sont emballées, les minutes défilant comme des secondes, les heures succédant aux heures. Le temps fuit irrémédiablement. Diablement. Diaboliquement. Et la course vers les étoiles continue.

John éprouve beaucoup de difficulté à articuler les mots qu’il adresse à ses compagnons d’infortune :

« Ma montre est déboussolée. Que disent les vôtres ? »

Il les observe tandis qu’ils jettent un coup d’oeil sur leurs chronographes. Leurs gestes sont exagérément lents, attestant de la force de gravité qui s’oppose à eux. Des exclamations étonnées fusent dans le petit habitacle.

« C’est impossible ! » s’exclame la première Claire. « Ma montre devient folle, elle indique 6 heures P.M. Il ne peut pas être déjà six heures du soir.

-La mienne indique pourtant la même heure ! » lui répond William. « 6 heures du soir. C’est sans doute lié au dérèglement de l’ascenseur. Je ne sais pas, une altération dans le champ magnétique. »

Vincent a aussi vérifié sa montre. Six heures aussi et des LCD qui ressemblent plus à ceux d’un chronomètre de compétition qu’à ceux d’une montre griffée d’un grand couturier italien. Mais il ne répond pas directement à John. Il se contente de hocher la tête en haussant les épaules. Swan acquiesce également. Par une étrange malice, le temps file selon un rythme différent.

Les lumières virevoltent sans cesse autour d’eux. Claire commence à avoir mal au coeur. Ce mouvement ascendant contrarie les équilibres internes de leur horloge biologique. C’est alors que la voix de John s’élève à nouveau :

« Je ne sais que penser de tout ça ! » Trop fatigué pour faire le moindre geste, il parcourt la capsule d’un regard éloquent. « Rêve ou réalité ? Je ne saurais que dire. Je ne suis pas assez qualifié pour échafauder la moindre hypothèse. Ce que je sais par contre, c’est qu’il est matériellement impossible que cet ascenseur puisse encore filer à cette vitesse. Nous aurions dû déjà nous écraser contre le béton. Alors, sommes-nous inconscients, nos sens abusés par des émanations toxiques ? Peut-être. Sommes-nous dans la main de Dieu en cet instant où nos certitudes semblent balayées par des forces que nous ne comprenons pas ? Je n’ai jamais été croyant, aussi loin que je m’en souvienne. »

John s’interrompt un instant. Il a les yeux perdus bien au-delà d’ici. Il semble écouter une voix intérieure venue du passé. Il reprend :

« Je me rappelle d’un jour très particulier dans mon existence. Un jour où ma vie a basculé, a pris un chemin différent. J’avais une bonne paie, une fille qui m’aimait, plein de projets dans la tête. Il a suffi d’un moment et le rêve est passé. Un moment où mes yeux ont vu une scène que je n’étais pas censé voir. Deux hommes et un révolver. A la fin, le révolver fumait et un seul homme était debout. Il s’est tourné vers l’endroit où je me trouvais et je l’ai reconnu. Mon patron, mon mentor, mon deuxième père. Pauvre fou que j’étais. Mes yeux se sont dessillés et la vérité toute nue est apparue derrière les simulacres de ma réussite. Je travaillais pour la mafia locale. Tous mes rêves se sont évanouis en fumée. Les hommes du procureur assassiné m’ont retrouvé et m’ont promis l’absolution si je témoignais. Une vie nouvelle et un passeport vierge pour le paradis. Trahi et déçu par celui que je portais aux nues, j’ai fini par accepter. J’ai bénéficié du programme de protection des témoins. Mais le paradis promis s’est révélé un enfer quotidien, ici dans un bureau minable de Port Authority. Chaque jour qui se lève m’éloigne un peu plus de cet Eden. Et chaque matin, je me demande si cela sera le dernier. Je ne sais pas pourquoi je vous dis tout ça ? Peut-être parce que cela me fait du bien de partager ce fardeau avec vous. Peut-être parce que tout ça ne rime plus à rien maintenant. »

Au sol, le livre gît par terre, la couverture bien visible. Le visage de Jean-Paul Sartre en quadricolore se détache nettement, les yeux cachés derrière une paire de lunettes vertes.

John se tait. Une paix miséricordieuse illumine son âme. Il ferme les yeux, libéré d’un énorme poids, comme transporté par cette sensation d’élévation spirituelle qu’il n’avait jamais ressentie auparavant. Il sait qu’il est finalement libre. Sa vie antérieure s’est détachée de lui comme la chrysalide du papillon. Il sent ses nouvelles ailes frémir d’excitation. Jean-Paul Sartre avait raison. Il ne cachera plus sa liberté derrière de faux-semblants. Il est condamné sans doute, mais condamné à être libre.

Au même instant, la course affolante de l’ascenseur s’interrompt sans transition. Le mouvement se fige en immobilité instantanée. La lumière se fait chatoyante, se déversant d’en haut comme les rayons d’un éclatant soleil écartant sans peine les plus noirs nuages au sein d’un terrible orage, comme une lumière surnaturelle au sein des profondes ténèbres de l’enfer. La preuve d’une présence supérieure qui transcende la pauvre déficience de nos sens. Le ravissement d’un accord parfait au beau milieu d’une mélodie sirupeuse. L’abandon extasié des corps au moment de la rupture où tout se tient en équilibre sur le fil d’émotion qui sépare les deux coeurs. Le miracle renouvelé de la divine Assomption.

Il plonge ses regards dans ceux de Vincent, le reconnaissant enfin derrière son masque. Il sourit :

« Ainsi c’est toi l’instrument de sa vengeance ! Tu as mis le temps nécessaire. Ce livre t’appartient ? Tu ne réponds pas. Je viens juste de me rendre compte à quel point je me trompais sur le sens de ma vie. Je vivais en enfer. Parce que je m’étais résigné à conduire ma vie comme ils l’entendaient, sans jamais oser sortir des routines qu’ils avaient tracées pour moi, sans oser me rebeller. Oui, je vivais en enfer, comme toi, j’imagine. As-tu fait autre chose qu’obéir aux ordres donnés ? As-tu tenté d’échapper à ta condition ? Non ? Alors tu étais comme moi en enfer, compagnon ! »

Il se tourne vers trois autres :

« Je ne sais toujours pas ce que nous sommes en train de vivre mais c’est une chance qui nous est donnée de solder notre compte dans le grand livre ! Et croyez-moi, j’étais un fameux comptable sur la côte ouest. Ce français a écrit un jour que l’enfer c’est les autres. Ce qu’il entendait par cette expression, c’est que de nos actes procède notre liberté. Et rien n’est plus important que la liberté d’agir à notre guise. Quoique nous vivions, quel que soit le cercle d'enfer où nous nous trouvons, rien ne nous force à y demeurer. Nous avons le choix de le briser ou bien d’en rester prisonnier. Mais quel que soit ce choix, nous le faisons librement. Regardez, le temps a passé si vite. Une journée semble s’être écoulée alors que je n’ai pas l’impression d’avoir vécu plus d’une heure dans cet ascenseur !»

Vincent se met à lui sourire, et tous peuvent discerner sur le dais de lumière paradoxale qui ondule comme un ciel d’azur, un grand goéland qui déploie ses ailes, prêt à prendre le large pour ne plus revenir. Swan sent son coeur s’apaiser tandis que la figure de Mercy resplendit entre les rais lumineux tout en s’estompant progressivement. Ses lèvres forment un dernier baiser avant que l’image ne disparaisse à jamais. Un grand cygne majestueux s’éloigne sur les eaux enfin calmes d’un immense lac. Claire reste interdite un battement de coeur avant que sa main ne lâche doucement le bras de William. Ils échangent tous les deux un long et pénétrant regard et dans la magie de la lumière ambiante, il y a un ballon ovale qui s’élève dans le ciel et qui file, qui file vers l’ouest, lancé par une main fine et gracile. La main de Claire.

En ce mercredi 12 septembre, il est exactement 9h56. Une journée de poussière et delarmes attend les sauveteurs qui partent à l’assaut des quatre millions de tonnes de gravas qui s’amassent sur ground zero. Un silence de mort recouvre Manhattan sud. L’éclat du soleil est encore voilé par un nuage grisâtre qui persiste autour de l’île mutilée. Plus personne n’ira sur le toit du monde, cet observatoire posé au 107ème étage de la Tour sud des Twin Towers, dominant la ville à quatre cent vingt mètres du sol.

Les équipes de fourmis jaunes forment de longues files entre les blocs de béton gigantesques, armées de pioches et de cordes, criant à l’aveugle entre les interstices béants de l’enfer qui s’est refermé sur près de 3.000 personnes.

Anéanti par cette immense tragédie, qui remarquera l’éclair fugace qui miroite en s’élançant droit vers les cieux ? Qui lèvera les yeux vers ce ciel sourd et aveugle ne serait-ce qn’un seul instant au risque de ne pas voir le frémissement d’un signe de vie ? Pourtant, un observateur avisé aurait sans doute aperçu un immense escalier accroché en colimaçon au ciel sur lequel cinq silhouettes fantomatiques progressent aussi légères que des anges, une main posée sur la rampe diaphane qui s’enroule autour de la vis centrale. Marche après marche, elles s'éloignent vers le paradis. Et plus loin, au-dessus des eaux grises de l’océan, un goéland tire droit vers le sud. Nul ne le reverra plus.

There, beyond the bounds of you weak imagination
Lie the noble towers of my city, bright and gold.
Let me take you there, show you a living story
Let me show you others such as me
Why did I ever leave?




M

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2007-12-04 16:12:53 

 Commentaire Maedhros, exercice n°26Détails
Maedhros et les consignes... toute une histoire !


Tu en as cependant respecté quelques unes : il y a bien 5 personnages dont un couple, dans le même lieu et pendant 24 heures ( même si par une pirouette littéraire tu ne racontes qu’une heure et quart...)
C’est une histoire intéressante, un point de vue original sur un événement historique connu de tous. Il y a un gros clin d’oeil au « Pont de San Luis Rey », sur fond d’existentialisme sartrien... Why not ?
Le procédé des parties 1 et 2 est également astucieux : faire décrire les personnages par deux personnes différentes. On se demande tout du long pourquoi les personnages racontent leur vie – la fin le justifie pleinement.


Passons maintenant à ce qui me plaît moins. La consigne disait de décrire « les rapports entre les personnages, le rôle que chacun va endosser, et l’influence que cela aura sur l’histoire. » Autrement dit, je cherchais une approche de la dynamique de groupe. Or là, il n’y a pas de groupe, mais des individus. Ils pensent, se côtoient, mais ne se parlent pas. John parle seul, à la fin, dans un discours un peu étonnant pour une situation de crise ( au moins avant leur mort ; après, ça passe mieux, ils sont en paix). Aucun personnage n’influence le cours de l’histoire...

Par ailleurs j’ai trouvé le texte long, par rapport au peu d’action qui se déroule. C’est très bien écrit, mais tu nous balades d’un personnage à l’autre pendant 8 pages A4 où il ne se passe rien. En début de roman, c’est très bien. Sur les 2/3 d’une nouvelle, la proportion n’est pas équitable. Bien sûr à la fin tout s’éclaire, on comprend tout et l’action repart. Mais je trouve que la fin se fait un peu désirer.


C’est sympa pour le Faërium de publier ton histoire par épisodes ; mais ( et ça fait plusieurs fois que je m’en fais la remarque) je me demande si ça ne t’empêche pas d’avoir une vue d’ensemble, et de pouvoir corriger le tir à la relecture. Tu es retombé dans ton travers favori, t’écouter écrire, et du coup ça manque un peu de nerf. C’est dommage parce qu’il y avait là matière à faire un texte fort. Mais ton coeur balance toujours entre le roman et la nouvelle... ce qui ballotte un peu le lecteur...
Narwa Roquen,entre la mule et le bouledogue...

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z653z  Ecrire à z653z

2007-12-05 14:47:13 

 un peu pareil que NarwaDétails
J'ai l'impression que John a une position centrale dans l'histoire... pourquoi lui ?
C'est un peu long mais la fin de la fin ( qui commence par "En ce mercredi 12 septembre" ) est bien trouvée :)

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z653z  Ecrire à z653z

2007-12-05 15:07:00 

 C'est très joli mais...Détails
C'est long (je viens de vérifier... presque 6 pages A4).
C'est un peu trop rapide... surtout quand on vient de lire du Maedhros :)
(Ca, c ‘est le cardiologue.) <--- ceci me choque vraiment ... :/ "s'exclame le cardiologue" serait passé sans souci ;)

/me range sa baguette :)

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2007-12-05 17:06:07 

 Droit de réponseDétails
Oui, mais... "s'exclame le cardiologue" est neutre. "Ca, c'est le cardiologue" introduit une nuance de mépris, et c'était voulu.
Je suis aussi désolée que toi de la longueur, j'aurais préféré me coucher plus tôt pendant une semaine... Mais mes personnages se sont révoltés, et j'ai dû leur obéir...
Narwa Roquen,otage de ses personnages ( et atteinte du syndrôme de stockholm).

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2007-12-06 08:39:29 

 Eléments de réponseDétails
En premier lieu, je ne suis à l'aise que dans la longueur : elle me permet de densifier les "bords" de l'histoire principale. J'ai beaucoup de mal à me contenter d'aller à l'essentiel, sans pour autant changer de catégorie pour me frotter au roman...

Ensuite, le découpage par "épisodes" est sans doute casse-gueule en ce sens qu'il empêche éventuellement de corriger quelques équilibres mais il offre l'avantage d'être un sous-ensemble cohérent relativement autonome. Et puis, cela passe sans doute mieux qu'imposer un très long texte d'un seul tenant.

Enfin, cette histoire est une histoire de trajectoires. Avant leur dernier voyage, tous suivaient des trajectoires horizontales qu'ils ne maîtrisaient pas. En empruntant l'ascenseur de la Twin Tower le mardi 11 septembre, leurs trajectoires se verticalisent pour croiser leur destin commun. Lorsque l'avion percute la Tour, en passant de vie à trépas ils débutent un voyage relatif, sorte de purgatoire qui va durer 24 heures. Libérés de leurs démons intérieurs, ils s'élèveront définitivement vers le "paradis". L'absence de dialogues, outre que je n'aime pas les dialogues (!) accentue leur enfer intérieur où ils demeurent prisonniers. La parole est alors libératrice.

Maintenant, si vous avez une quinzaine de minutes disponibles au coeur de la nuit, je vous suggère de vous rendre successivement sur les deux liens ci-dessous. C'est un titre de prog rock qui illustre assez bien mes penchants pour les longs développements :

Invisible man :

Première partie

Deuxième partie

M

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z653z  Ecrire à z653z

2007-12-06 13:29:49 

 Si vous avez encore 10 minutes....Détails
...

Les deux parties ensemble

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2007-12-06 19:01:37 

 Je sais bien...Détails
... que je te contrarie! Mes remarques n'enlèvent rien à ton talent! Je ne voudrais pas que ton sang se coagule, comme Cyrano... Je te donne juste mon avis, parce que c'est le jeu! Et je me dis qu'à force d'insister, viendra peut-être le jour où ton clavier lui-même te murmurera à l'oreille " Attends, Maedhros, ne t'embarque pas dans ces détails, ça n'est pas indispensable à l'histoire..."
Ben quoi, dans le monde de la Faërie, ça peut arriver non?
Narwa Roquen, qui ne lâche pas l'affaire

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2007-12-06 20:14:26 

 Aucune offense...Détails
Au contraire, je suis toujours impatient de lire ton avis. Les miroirs mentent toujours, et le mien est un menteur professionnel!

J'adore les mots et les phrases, les détails sans importance, juste pour une belle association d'idées , pour une assonance ou une dissonance, un jeu de mots... voilà j'adore jouer avec les mots.

De nature paresseuse, les thèmes de la WA, en fait les tiens, constituent un excellent support pour exciter mon imagination. Cela faisait longtemps que je n'avais eu une production si régulière!

Je crains néanmoins que si mon clavier avait la moindre velléité de me souffler ce genre de conseil, je soupçonnerai d'abord qu'il soit made in microsoft et ensuite, sans autre forme de procès, je procèderai à un exorcisme, touche après touche, pour éradiquer le démon qui l'aurait investi.

M

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2008-01-30 17:11:23 

 Longueur de tempsDétails
Juste pour dire que ça ne me dérange nullement de lire des trucs longs, fractionnés ou pas, tant que c'est bon. Cela dit, je suis partiale vu que j'écris long et que j'oscille moi aussi au bord du roman...

Est', en pleine lecture.

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2008-01-30 17:16:17 

 Exercice 26 : Maedhros => CommentaireDétails
Jolis ces portraits. On les visualise parfaitement dans leur ascenseur, tes personnages. John m’est sympathique, un mec blasé, un peu mélancolique. Le couple est attendrissant tout plein. On les devine au début d’une de leurs toutes premières idylles. Les deux autres sont plus lointains. On ne sait pas trop leur expression, leur façon de se tenir... Ils vont rester 24h dans l’ascenseur, ces pauvres bougres ? Ton écriture est fluide, nickel, avec des images évocatrices, un peu de background pour rendre crédibles les personnages.
Les détails, comme ceux sur le journal du campus, achèvent la peinture réaliste et dessinent une ambiance un peu « série américaine », avec des figures typiques comme la cheerleader, le footballeur. Un peu roman noir aussi. J’ai trouvé l’enchaînement des deux images sur les ambitions journalistiques qui s’envolent un rien superfétatoire. La façon dont tu amènes le fait qu’elle est une petite bourge pourrie gâtée est particulièrement futée. La petite Claire a tout du journaliste rapace en quête de scoop. Très poétique l’évocation de Miami et du goéland. Très jolie aussi la manière dont tu suggères le métier de Vincent. « Un oiseau chante pour son âme et personne ne le voit pleurer. » : rhôôô.
Le temps passe et personne ne se parle. Pourtant la consigne spécifiait qu’on s’intéressait aux relations qui se tisseraient entre les personnages. Les consignes et toi, décidément...
Le portrait du mec sur le retour est efficace, peint par petites touches. L’ensemble des personnages compose un tableau bien sombre de l’Amérique, hantée par le crime, les gangs, la mafia... Habile aussi le récit du quarter back. On sent que tu te documentes à mort à chaque fois que tu écris une histoire pour lui donner un arrière-plan réaliste.
Il manque peut-être une phrase de transition avant l’accélération verticale de l'ascenseur. La formulation m’a parue un peu abrupte.
Original le coup de la montre, qui indique que la réalité vient de subir une altération. .
Le discours de John sonne bizarrement. Je ne m’attendais pas à ce qu’il s’exprime de façon aussi littéraire ni ne soit aussi bavard. De la même façon, la confession est amenée de manière un peu brute. Cela s’explique au vu de la fin. « Il est condamné sans doute, mais condamné à être libre. » c’est joli, ça.
Les métaphores qui indiquent que les personnages se pardonnent les uns les autres et se libèrent de leurs tourments sont bien tournées.
Je ne l’avais pas vu venir, le coup des tours jumelles... Bien joué !
J’ai trouvé le dernier paragraphe trop explicite. Je ne pense pas que le terme paradis aurait du être mentionné. Il aurait pu rester implicite. Pour garder un peu de mystère.
Très bonne ambiance et beaux portraits en tous cas.

Est', en pleine lecture

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2008-01-30 17:22:56 

 Exercice 26 : Narwa => CommentaireDétails
J’ai trouvé curieuse la mention du métier de Laurent au début, qui ne me paraît pas très caractéristique du personnage. C’est un peu comme quand on me demande « tu fais quoi dans la vie ? », j’ai d’avantage envie de répondre « je lis de la SF, je vais au ciné, je couds des ours... » que « je bosse dans l’informatique ». Tu vois ce que je veux dire ? Curieux que dans cette société, nous soyons à ce point définis par notre profession qui, à de rares exceptions près, est un gagne-pain choisi au hasard et pas une passion.
Hou... l’a pas l’air nette, cette petite. Je ne devine pas encore ce qu’elle a mais tu le fais bien sentir dans l’attitude du père. Tes personnages ont des styles bien tranchés. Tu écris qu’Irina est adolescente mais elle semble bien plus jeune par moments. L’expression « petit visage » jure avec « jeune fille » qui vient après. Je peine à me faire une représentation d’elle.
Tiens, Laguiole, versus Opinel, deux écoles... Chuis Laguiole quand à moi. On serait donc dans le massif central ? Le vieux a employé le mot couillon qui n’est pas vraiment de se coin-là. Tiens, le professeur commence à se dérider. Les autres sont sympas de ne pas lui en vouloir pour sa grossièreté de toute à l’heure.
Irina serait autiste ? Son comportement ne ressemble pas à ça... N’empêche, tu n’avais pas dit dans ta consigne qu’il devait y avoir un couple dans tes protagonistes ? C’est le père et la fille ? Il est rigolo, Eric, dans le genre blasé que tout amuse.
« (Ca, c ‘est le cardiologue.) » on l’avait reconnu, hihi ! Cela dit, la remarque parait un peu familière par rapport au reste du texte, même si je devine l'intention "encore ce gros raleur".
« profonde comme un gouffre sans fond » : plutôt maladroit comme formulation. Le père n’est pas surpris que sa fille lui fasse un long discours sur le loup ?! Pourtant, manifestement, elle ne parle presque pas d’habitude. Tous comptes faits, ça m’évoque plutôt les Pyrénées, comme cadre. Le loup aurait guéri la gamine, alors ?
Bizarre comme histoire. J’aurais pensé que l’histoire du fantôme serait approfondie. Là, elle fait alibi, deus ex machina. Et puis, je ne m’attendais pas à ce que ça finisse comme ça, à ce moment là... Ca me laisse une impression mi figue mi raisin. Le début prend son temps et la fin, hophophop ! On dirait que tes producteurs t’ont coupé le budget...

Est', en pleine lecture.

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z653z  Ecrire à z653z

2008-01-31 18:08:13 

 petits trucsDétails
"notre profession qui, à de rares exceptions près, est un gagne-pain choisi au hasard et pas une passion" Visiblement, je fais partie des rares exceptions qui ont choisi le secteur d'activité où elles voulaient travailler... Ceux que je connais qui bossent dans l'informatique avaient eux aussi de sérieux penchants étant enfants...

Dans ma famille, le mot couillon est employé dans le sud du Massif Central.

:)

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