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 WA - Participation exercice n°26 partie 1 Voir la page du message Afficher le message parent
De : Maedhros  Ecrire à Maedhros
Date : Dimanche 11 novembre 2007 à 18:49:14
Un exercice intéressant. J'ai une idée assez particulière. Je vous propose de vous la raconter en petits tableaux...

__________

STAIRWAY TO HEAVEN


Maintenant.

And as we wind on down the road,
Our shadows taller than our soul... (1)

Les portes se referment presque trop lentement au goût de John. Appelons-le John, pourquoi pas ? Il eu d’autres noms avant et ailleurs mais celui-ci ne lui va pas si mal. Athlétique, il est assez grand, un front large et dégagé, une coupe en brosse. Il pourrait être un militaire ou un homme du gouvernement. Il n’est plus très jeune. Les pattes d’oies au coin des yeux et la ride léonine entre les sourcils lui donnent un air sévère que tente d’atténuer le sourire lointain qu’il laisse en permanence flotter sur ses lèvres. Comme à son habitude, il cache ses mains dans les poches de la veste de sport et s’adosse contre la paroi de la capsule. La vie ne l’a pas ménagé. Il est si loin de chez lui. Cela fait si longtemps qu’il n’est plus retourné là-bas, au pays où les cerises ont le coeur tendre en juin. A Portland. Mais il sait qu’y retourner sera son dernier voyage. Alors, il mène une vie invisible ici, dans la grande ville, à l’autre bout du continent. Ses yeux sont fatigués de regarder le soleil se lever sur cet océan alors qu’il voudrait tant le voir se coucher de l’autre côté. Le temps a glissé comme du sable sur sa paume depuis Paranoid Park. Ce matin, profitant d’une demi-journée non travaillée, il s’offre un ticket pour le paradis. Histoire d’oublier un peu la crasse de la banlieue où il se terre, de l’autre côté de l’Hudson River.
.
Il jette un regard en biais à ses compagnons pour ce voyage qui ne durera pas plus d’une minute. Ils sont quatre, ayant comme lui attendus patiemment dans la file formée malgré l’heure matinale. Le Toit du Monde fascine toujours autant.

Face à lui, un jeune couple d’amoureux se mange du regard. On ne peut se tromper sur ces deux-là. Lui, grand et costaud, un côté viking relooké par East & West, doit certainement être le quarter back de l’équipe de foot de son campus. Elle le boit littéralement des yeux, c’est sûrement la chef des pom-pom girls, ces filles qui lèvent la jambe à chaque rencontre de football. Il faut excuser John, son existence l’a rendu amer si bien qu’il a tendance à noircir le tableau. Il a pourtant raison sur un point, ils sont tous deux étudiants comme le proclament fièrement leurs sweat-shirts où se lit en gros caractères Colombia University. Lui ferait donc partie des fameux lions bleus, à la tête de l’escouade offensive. Elle, à peine plus petite, possède un visage agréable, aux traits réguliers qui fleurent bon la bonne société. Des ascendances hollandaises, John en jurerait. Elle lui étreint le bras comme s’il pouvait se volatiliser de cette capsule hermétique. Un tour du grand David Copperfield! Elle est radieuse. John a tout juste le temps de remarquer l’ombre qui voile soudain le regard du jeune homme. Celui-ci détourne les yeux, gêné. Il a senti que John a vu. Pour le meilleur ou pour le pire, ils ont aussi acheté un ticket pour le paradis. L’anti-chambre du septième ciel dit-on !

De l’autre côté, il y a un homme de taille moyenne, entre deux âges. Des tempes poivre et sel. Un costume prêt-à-porter froissé qui trahit un indéniable laisser-aller. Son visage chiffonné est mal rasé et ses mains tremblent légèrement. John est étonné. Serait-il un dépressif décidé à se précipiter du toit ? John vient de lire un article dans le Daily News à propos du syndrome du suicide touristique. Selon son auteur, la plupart des suicides se déroulerait dans des lieux très connus comme l’Empire State Building, le pont de Brooklyn voire Time Square. Mettre fin à sa vie en beauté en quelque sorte! Mais ici, l’observatoire est muni de protections anti-suicide assez poussées. John se promet néanmoins de le garder à l’oeil.

Enfin, John s’attarde sur le cinquième passager. Un type encore assez jeune. Une allure soignée et décontractée. Des gestes policés, très fluides mais en même temps fermes et résolus. Une force silencieuse et domptée. Il n’est pas aussi grand que John ou le quater back. Un col roulé sous une veste de daim, sobriété et discrétion haut de gamme. Une paire de lunettes de soleil coiffe ses cheveux châtains qui ondulent de la plus domestique des façons. C’est vrai que là-haut, le soleil inonde sûrement la terrasse. C’est une belle journée de septembre qui commence. La promesse annoncée d’un été indien. L’homme tient dans la main un livre. Un auteur français. John lit beaucoup. Son seul véritable passe-temps après la journée de boulot à Port Authority. Il occupe une fonction obscure, au service de comptabilité, dans une aile écartée du bâtiment abritant les services généraux. Une porte anonyme marquée d’un numéro perdu parmi des centaines d’autres. Pour revenir au bouquin, il s’agit d’un roman de Sartre, « Being and Nothingness ». John l’a lu également. Il n’a pas été d’accord en refermant le livre sur la dernière page. Son destin n’a jamais été une suite de libres choix. D’autres les ont faits à sa place. Mais qu’y connaît-il vraiment en existentialisme ?

M

____

(1)

Et alors que nous serpentions sur la route,
Nos ombres plus grandes que notre âme...


  
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Réponses à ce message :
3 panne d'ascenceur ? - z653z (Lun 12 nov 2007 à 13:39)
       4 C'est froid.... - Maedhros (Lun 12 nov 2007 à 19:03)


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