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 WA, exercice n°68 Voir la page du message 
De : Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen
Date : Jeudi 24 septembre 2009 à 19:18:47
Le plan habituel d’une nouvelle est : présentation, déroulement de l’intrigue, bouquet final, conclusion. Vous allez procéder différemment, en commençant par le bouquet final, bataille, règlement de compte, confrontation etc... La suite servira à expliquer. Le deal : garder intacte l’attention du lecteur alors qu’il connaît déjà la fin.
Il ne faut pas abuser de ce genre de construction, mais de temps en temps, c’est un exercice salutaire et qui change de l’habituel récit chronologique.
Vous avez trois semaines, jusqu’au jeudi 15 octobre. Sauf protestations véhémentes de votre part, les WA tourneront désormais au rythme de trois semaines, ce qui vous laissera plus de temps pour participer aux Concours. Quant à moi, je ne vous cache pas que je cours désespérément après un temps avare qui refuse de s’allonger à ma demande, et que les idées de WA sont de plus en plus difficiles à trouver. Alors si vous avez des suggestions... Mais attention, j’essaie toujours de privilégier le côté technique, pour bien différencier les WA des Concours où l’imagination est reine...
Narwa Roquen, fatiguée, des soucis, à la bourre


  
Ce message a été lu 19117 fois

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Réponses à ce message :

Pages suivantes : 1 - 2
Maedhros  Ecrire à Maedhros

2009-09-24 21:34:27 

 Message placé par erreur!Détails
Bingo... j'ai fait une erreur de WA!

M

Ce message a été lu 6021 fois
Netra  Ecrire à Netra

2009-10-12 14:56:25 

 WA, exercice n°68, participation PAS glauque et pas hard non plus. (vous l'aurez voulu !) Détails
Désolé, c'est l'effet "passe les musiques de Blade Runner au boulot"

Et pour une fois, vous pouvez pas dire que c'est court... (bon, OK, c'est pas long non plus)

Just fall in love


T'as vraiment une putain de jolie gueule quand tu crèves de trouille, tu sais, Eddie. Ah, c'est vrai, tu n'aimes pas Eddie. Tu préfères Edward, c'est ça ? Et ben, je vais te faire plaisir, je vais t'appeler Edward, pour le peu de temps qui nous reste à passer ensemble. C'est un temps putain court, tu vois, Edward. Moi, j'y peux rien, j'ai ces putains d'ordres. Ca m'embête même un peu, de devoir te tuer, en fait. Tiens, tu veux une clope ? En remboursement de celle que tu m'as filée, y'a trois semaines, quand j'étais en rade. Non ? Sûr ? Putain, c'est bien la première fois que tu refuses une clope ! Que j'arrête de dire putain ? Pourquoi, ça te gêne ? Y'a pourtant pas grand-chose qui doit te gêner, avec tout ce que t'as fait. Paraît que t'étais le meilleur, que les clients se disputaient pour t'avoir... De quoi ? Ma gueule ? Tu veux que je ferme ma gueule ? Edward, putain, qu'est-ce que tu -

Ed -

T'es mort, connard. T'es mort, eh. Comme Peter. Mais Peter, je voulais pas le tuer. C'est pas pareil, c'est pas pour toi que je pleure. Toi, je connais même pas ton nom. T'es juste un mec qui obéit. Moi j'obéis plus. Dereck a tué Peter avec mes mains. Et puis je t'ai tué au lieu que tu me tues. C'est peut-être pas si grave. C'est juste que je veux mourir de ces mains qui ont tué Peter, tu vois. Pas au bout de ta saloperie de flingue.
Je sais, je devrais culpabiliser. J'avais pas à tomber amoureux, il paraît, ben tu sais quoi ? Je m'en fous. Grave. J'ai toujours détesté ce boulot, même si j'avais pas le choix.
Je me demande quand les flics arriveront. Sans doute quand un voisin osera décrocher son téléphone. Enfin ! J'ai encore le temps. Ce sera tout fini, d'ici là je serai aussi froid que toi.

C'est dingue ce que c'est chaud, le sang. Chaud comme le sexe de Peter. J'en ai partout. Mais c'est pas grave.

Tu sais comment ça a commencé, tout ce bordel ? C'est la faute de mon vieux. J'en avais trop marre qu'il castagne ma mère. Je me suis barré, je me disais qu'il arrêterait si j'étais plus là. J'avais pas la force de protéger m'man. Depuis j'ai lu dans la feuille de chou d'un client qu'il l'avait tuée. Encore une connerie qui n'aura servi à rien. Tant pis, tu vois, ça m'aura permis de rencontrer Peter. Le reste, maintenant, je m'en fous. Comme de rester là à causer à ton cadavre. T'es encore plus moche mort que vivant.

Marrant, je vois tout flou, là. Comme quand je mettais les lunettes de Peter.

Mais moi, je suis beau, hein ? C'est ce que cherche Dereck. Des garçons avec des gueules d'ange, comme il dit. Il m'a proposé un travail, j'avais une de ces dalles ! ça faisait bien un mois que j'étais dans la rue. J'ai topé, que je suis con ! Et voilà. C'est pas très compliqué, de devenir une putain. Là où il a merdé, c'est qu'il m'aimait bien, Dereck. J'avais le droit de sortir, des fois. Alors j'ai rencontré Peter, et je l'ai aimé.
C'était dans la rue, j'allais m'acheter des clopes, on s'est croisé, on s'est retourné, il a rougi en comprenant que j'étais pas une fille. Il était beau, lui aussi, mais pas pareil. Il était pas beau comme une fille ou un ange, il était beau comme un jeune homme, tout connement. Il m'a payé un café. Et puis, quant il a fallu que je rentre, j'ai tardé. Dereck m'a tabassé, mais il m'a laissé ressortir. J'ai retrouvé Peter et je ne suis plus rentré. Je voulais plus, tu comprends pas bien sûr, même si t'étais pas crevé tu pourrais pas comprendre.

Je l'aimais, simplement.

Ah, ça y est, mes yeux se ferment tous seuls. C'est cool, je vois Peter maintenant.

On était bien, Peter et moi. Il était si doux, si tendre, pas chaste, non, chaste n'est pas le mot, pas du tout même. Il était pas comme Dereck, pas comme les clients, pas comme personne. Peter, quand il me faisait l'amour, je faisais pas semblant. Peter, derrière mes yeux je te vois couvert de sang comme je dois l'être maintenant, j'ai déjà dû perdre un bon litre de sang. Peter...

Peter -

Quand j'ai vu arriver Dereck, j'ai pissé dans mon fut. Forcément. Il m'a toujours foutu une de ces trouilles, Dereck ! Mais là, c'était tellement pire... Je croyais qu'il allait me tabasser à mort, mais il a fait mieux. Il a du raffinement, le must pour un maquereau. C'était pas con, son truc. Un franchement beau système de tordu. Infaillible. Je ne pouvais pas ne pas tenir le couteau, je ne pouvais pas ne pas baisser le bras quand la poignée a tourné... Et Peter, qui rentrait du travail, un travail normal, dans une boîte normale, et il portait son costard gris... Les poulies, à Dereck, c'est son dada.

Tiens, mes doigts me lâchent. ça vient.

Il adorait mettre des poulies partout pour m'attacher avant de me présenter à un nouveau client, pour me faire tourner dans tous les sens, me mettre dans toutes les positions. Il disait que j'étais son pantin préféré. J'ai tué Peter. Il est mort vite, j'ai réussi à détourner la lame pour qu'elle ouvre la jugulaire, il n'a pas trop eu mal. Je n'aimais pas lui faire mal, à Peter. Même si c'est arrivé, une ou deux fois. Lui, il ne m'a jamais fait mal. C'est la seule personne au monde qui ne m'ait jamais fait mal, tu vois.

Ah...

Je sens plus mes mains. Ca y est, elles m'ont tué.

Peter. Peter -

J'ai plus mal. Tu m'as manqué, ces trois jours. Mais ça y est, c'est fini.
Tout.

Moi.

Toi.

La vie.

Et notre amour avec.

Netra, qui écrit des trucs qu'il est le seul à trouver glauques

Ce message a été lu 7027 fois
z653z  Ecrire à z653z

2009-10-13 17:13:34 

 c'est fortDétails
Une fois qu'il tue Ed, son ton change un peu trop même si le fait d'en avoir fini doit forcément changer son humeur.


Trois bricoles qui m'ont sauté aux yeux :
celle que tu m'as filé -- filée
un franchement beau système -- Un
elles m'ont tuées -- tué

Ce message a été lu 6923 fois
Netra  Ecrire à Netra

2009-10-13 21:26:54 

 J'ai corrigé les fautes mais pour le changement de ton... Détails
Bon c'est pas un gros spoiler mais quand même...

 ... si tu suis bien, il y a un petit retournement de situation à la fin du premier paragraphe...
Si d'autres butent, je réécrirai ça mais je croyais que c'était assez clair, puisque le premier narrateur sait que son interlocuteur s'appelle Edward alors que quelques lignes plus bas, le deuxième narrateur (bon c'est le Edward en question, ça c'est pas un scoop) déclare ne pas connaître son nom ! Donc il change pas de ton : c'est le narrateur qui change... Et en bon gigolo qui se respecte, Edward est probablement drogué comme un malade. 

Netra, quoi, mes textes sont prise de tête ? Mais je suis pas le seul, ici ^^

Ce message a été lu 7393 fois
z653z  Ecrire à z653z

2009-10-14 11:45:10 

 alors...Détails
spoiler de demande de qui fait quoi et quand.


 Je comprends mieux mais je ne vois pas quand le 2e narrateur se suicide (vu qu'il veut mourir de ses propres mains qui ont tuées celui qu'il aimait.... si j'ai bien compris) ; et comment il peut mourir après quelqu'un qui tenait une arme et dont il s'est visiblement servi pour se blesser mortellement. 

A part ce détail obscur, il est très bien construit et respecte la consigne.

Ce message a été lu 6710 fois
Netra  Ecrire à Netra

2009-10-14 14:37:22 

 explication des symptômes explicités... Détails
Explication :

 Bon, comment il a pris l'arme et a retourné la situation on sait pas. En même temps l'autre s'y attendait pas, et les bagarres de drogués ont parfois des effets inattendus. Ensuite, je décris les symptômes qui accompagnent son agonie : il s'est à priori ouvert les veines des poignets, sans doute pendant qu'il monologue. T'as plein de solutions : il a pu le faire à coups de dents, d'ongles, de cutter, de couteau, avec un tesson de verre... autant de solutions qui utilise ses propres mains, et qui font de celles-ci le vecteur de sa mort (surtout que ce sont elles qui meurent en premier, comme ça ^^) 
Netra, médicalement correcte

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-10-15 23:35:35 

 WA, exercice n°68, participationDétails
Innocence



Elle l’avait senti. Elle s’y attendait. Il y eut des pas précipités dans la petite cour, un piétinement sur les trois marches du perron, et des coups répétés et violents à sa porte. Ils étaient là tous les deux, hagards, échevelés, en nage. Marcus, blond comme les blés de juin, et sa bien aimée Amina, aussi noire de peau que la nuit la plus sombre.
« Ils sont après nous ! Ils veulent la tuer ! »
Il ne demandait jamais. Il n’avait jamais appris. Tout lui avait toujours été donné.
« Entrez. »
Elle ouvrit le tiroir du bahut, près de la cheminée dont la hotte noire de suie était fissurée depuis longtemps. Il lui restait quatre pièces de cuivre et deux d’argent.
« C’est tout ce que j’ai. Prends le cheval dans l’écurie, et file. Je vais essayer de les retenir. »
Il n’avait rien dit, pas même souri. La porte de derrière avait claqué, et quelques instants plus tard elle avait entendu le galop effréné de Gaffett sur la route qui menait aux collines. Elle frissonna. Elle n’avait jamais été courageuse. Elle aurait bien pleuré, mais ce n’était pas le moment.
Elle prit le panier qu’elle était en train de tresser et s’installa sur le banc, contre le mur de sa petite maison délabrée, dont le toit avait plus de gouttières que de tuiles saines. Ses mains tremblaient un peu en croisant les brins d’osier, mais ils ne le verraient pas, elle s’interromprait à leur arrivée.
Ils arrivèrent. Cinquante paysans furieux, armés de fourches et de pelles, troupeau enragé mené par Gildas, comme toujours.
« On sait qu’ils sont là. Fais sortir la fille.
- Bonjour, Gildas. Je vais bien, et toi ? Beaucoup de travail à la forge ? »
L’homme ricana.
« Tu ne fais pas le poids, pour une fois, sorcière ! »
Les hommes du premier rang s’esclaffèrent.
« Laisse-nous passer. »
Grâce se leva, gonflant son opulente poitrine pour se donner contenance. Les hommes instinctivement reculèrent d’un pas. Même Gildas.
« Tu es chez moi, ici, Gildas. Tu n’as pas d’ordres à me donner. Et ma maison est vide.
-Tu mens ! La piste mène ici. Nous l’aurons, cette diablesse, noire comme l’Enfer !
- L’Enfer n’est que dans ton coeur, Gildas, et dans votre coeur à tous ! Ces deux-là ne vous ont rien fait.
- A mort ! », cria une voix. « A mort la négresse ! »
Grâce fit un pas en avant. Les hommes reculèrent encore.
« Montre-toi, justicier de carnaval ! Ton seul courage c’est de hurler dans la meute, hein ? Vous n’êtes tous que des chiens !
- A mort la sorcière ! », cria un autre homme, et son appel fut répété par un choeur de plus en plus excédé.
- « A mort la sorcière ! A mort ! »
Grâce mit les poings sur ses larges hanches. Vêtue de noir, les dominant de toute sa masse du haut du perron, elle gagnait du temps. Marcus avait besoin de temps pour s’enfuir.
« Eh bien, bande de lâches ! Chiens galeux, vous ne savez qu’aboyer ? Rentrez chez vous, avant que ma colère ne s’abatte ! »
Gildas baissa les yeux. Les cris se tarirent. Les hommes passaient d’un pied sur l’autre, prêts à s’en retourner.
« Je les tiens », pensa-t-elle, et elle leva les yeux vers le ciel clair. Une pierre, tirée de loin, la frappa en plein visage. Elle porta ses mains à son nez d’où le sang giclait fort, et un instant, elle ferma les yeux. Ce fut la curée. Ils l’assommèrent de leurs pelles, l’embrochèrent de leurs fourches, la frappèrent de leurs poings, la piétinèrent de leurs lourds sabots, comme une horde sauvage ivre de sang et de violence, hurlant leur rage en insultes triviales et vulgaires, parce que l’homme est aussi cruel que la bête mais se doit de salir sa proie pour s’en différencier.
Ils tirèrent quelques bottes de paille autour du cadavre qu’ils n’osaient pas déplacer, et ils y mirent le feu.
« Qu’elle brûle en enfer, justice est faite », hurla quelqu’un. Puis, étonnés eux-mêmes de leur facile victoire, ils s’en retournèrent repus et satisfaits, frapper leurs chiens et tancer leurs femmes.



Grâce était l’aînée. Une fille, dans une ferme, ça ne vaut rien. C’est tout juste bon à faire la soupe et à nourrir les poules. Aussi poussa-t-elle de son mieux, malingre et broussailleuse comme une terre en friche, jusqu’à la naissance de Marcus, cinq ans plus tard. Lui, c’était l’héritier, celui qui mènerait la charrue quand le père se ferait vieux, celui qu’on devait servir et honorer parce qu’il serait le maître à son tour. Mais l’enfant était capricieux et n’avait pas d’appétit.
« Je ne vais pas jeter la nourriture, tout de même ! Et ce serait péché de la donner aux chiens. Grâce, viens là, mange ! »
« C’est mal de gâcher, Grâce. Finis ça. »
« Termine cette assiette ou tu tâteras du bâton. »
Grâce s’abreuvait de ses larmes et obéissait. La mère souriait, l’appelait « bonne fille ».
Dix ans plus tard, la mère lui ravaudait les vieilles chemises du père, en maugréant que pour lui faire une jupe il fallait le tissu de deux, vu qu’elle était presque aussi large que haute. Et tout le monde ne l’appelait plus que par le surnom que lui avait trouvé Marcus, dans son insolence toute-puissante d’enfant chéri : « la Grasse ».
Elle essayait, pourtant, de ne point trop grossir, ayant vite compris qu’aucun garçon ne la ferait danser au bal tant qu’elle ressemblerait plus à une vache pleine qu’à une jeune fille en fleur. Elle se privait, endurait la faim pendant des jours et des jours, sans que son tour de taille, qu’elle mesurait avec une ficelle, ne variât d’un pouce. Alors, désespérée, elle s’empiffrait de tout ce qu’elle trouvait, pommes, oeufs, mélasse, farine mouillée d’eau, pain rassis et même maïs cru, à s’en faire exploser, à s’en faire vomir, sachant qu’elle serait battue pour avoir volé, mais que pendant un moment, la panse pleine, elle se sentirait comblée, triomphante, heureuse.
Dix-huit ans, elle aurait dû être mariée, et pas un garçon ne lui avait encore effleuré la main. Vingt ans, la mère ne lui adressait plus la parole et le père grommelait « bouche inutile » quand il la croisait. Pourtant elle travaillait, sans rien demander, sans se plaindre.
Un jour Marcus la suivit à la rivière, et tandis qu’elle se baignait, en chemise, tous les garnements du village, qu’il avait entraînés avec lui, sortirent des fourrés pour se moquer d’elle et lui jeter des pierres. Elle rentra à la ferme, la lèvre fendue, honteuse et furieuse à la fois. Elle gifla Marcus. Il cria. Le père la mit dehors.



Elle trouva refuge dans une masure abandonnée, près du village voisin. Elle s’employa dans les fermes, mais bien vite les gens se moquaient d’elle derrière son dos et il y avait toujours un mauvais plaisant pour lui faire un croche-pied.
Alors elle se mit à tresser des paniers pour les vendre au marché ; elle cultivait un petit potager, élevait quelques poules. Elle se nourrissait peu mais ne maigrissait pas, et ça n’avait plus d’importance.
Un soir elle entendit le bruit d’une charrette sur le chemin, et des voix.
« « Il va crever, ce chien, j’te dis ! Tiens, jette-le là, ça lui fera de la compagnie, à la Grasse, elle pourra même le bouffer si elle veut ! »
Le chien avait couiné en tombant. Dans le silence elle était allée le chercher sans oser allumer la lampe. Il était maigre et vieux, et avait une vilaine plaie à l’épaule, qui empestait la pourriture. Elle le coucha sur la paille, le nourrit, le soigna. Une vieille femme qui vendait des herbes sur le marché lui avait appris quelques recettes. Le chien guérit.
Tout se sait dans les villages, et le reste s’invente et se colporte avec la même sincérité véhémente. Elle avait ressuscité un chien qui puait déjà la charogne, c’était donc une sorcière, d’ailleurs c’était pour cela que son père l’avait chassée, et depuis son départ les récoltes étaient bien meilleures.
Sorcière, pourquoi pas ? S’ils la craignaient un peu, ils n’oseraient plus lui faire du mal. Elle s’habilla de noir. Ses paniers se vendaient mieux, et plus personne ne marchandait. Souvent on lui laissait une bête malade attachée à la barrière pendant la nuit, une chèvre, une vache, un cheval. Quand on revenait la chercher, une autre nuit, on lui laissait une offrande, un sac de farine ou de lentilles, des fromages, un lièvre ou un faisan fraîchement tués. Elle avait de la chance, tous les animaux qu’elle soignait guérissaient rapidement. Seule la vieille marchande d’herbes n’était pas dupe, mais cela l’amusait bien, elle en avait vu d’autres, et puis ce n’était pas ses affaires. Elle vendait ses herbes, et Grâce lui en achetait de plus en plus.


On ne parlait plus que de ça, sur le marché. Un homme noir ! Noir comme la nuit, comme l’enfer, comme la mort ! Et il avait avec lui une femelle, avec des seins lourds comme des pis, et des cheveux tressés comme les crinières des chevaux les jours de foire. Et ils avaient une fille, une sauvageonne au regard fuyant, sûrement aussi vicieuse que ses parents. Ils vivaient sous une tente. Ils empestaient l’animal sauvage, pire qu’un troupeau de putois ! C’était sûrement des assassins ou des sorciers, enfin des créatures du diable ! Il aurait fallu les chasser... mais s’ils se vengeaient ? On les avait à l’oeil, on était plus nombreux, on verrait bien...


Et alors le fils de Borde Basse, oui, le Marcus, il lui a offert un ruban pour ses cheveux, si, si... Et le Toine les a vus s’embrasser au clair de lune. Non ? Si, si ! Elle lui a jeté un sort ! Ah tu aurais vu la tête du père Matthieu quand Marcus lui a dit qu’il voulait l’épouser ! Attends, j’étais sur le chemin, je ramenais l’âne du marché, j’ai tout vu. Le père il a ouvert des yeux comme des soucoupes, il fendait ses bûches, il s’est arrêté la hache en l’air, j’ai cru qu’il allait fendre son fils ! Il a hurlé :
« Jamais, tu m’entends, jamais ! »
On a dû l’entendre jusqu’à la mer ! Le jeune est parti en courant, et le Matthieu, les poings serrés, il est parti voir le père Thomas, à la forge. Ben non, je l’ai pas suivi, c’était mon chemin. Et ça a discuté, ça a crié, et les voisins sont venus voir...


« Pauvre Marcus », pensa Grâce. « Pour une fois il se pourrait qu’il n’obtienne pas ce qu’il désire. Pourra-t-il le supporter? Tout a toujours été si facile pour lui... Mais je le connais, il ne renoncera pas. Têtu comme une mule, tellement habitué à voir céder les autres... »
Elle rit sous cape.
« Mais le père, ça m’étonnerait qu’il change d’avis. Déjà quand les Dilly sont arrivés, il a mis deux ans avant d’accepter de leur vendre ses oeufs, parce qu’ils venaient du nord et qu’un étranger, ça ne peut pas être honnête... Il vaudrait mieux que je ne traîne pas en chemin. On ne sait jamais... »


« Je les tiens » fut sa dernière pensée. Elle leva les yeux vers le ciel clair. Et puis... le nez en sang, elle ne sentit que le premier coup, violemment asséné sur sa tête, où explosa en mille feux un soleil d’apocalypse. Puis une grande lumière blanche, et la nuit, le silence.
Ainsi meurent les innocents, sans qu’une larme ne soit versée.
Narwa Roquen,de plus en plus à la bourre...

Ce message a été lu 6030 fois
Maeglin  Ecrire à Maeglin

2009-10-16 13:22:14 

 WA, exercice n°68, je participeDétails
Un dimanche d'octobre


C'est terminé. C'est terminé et personne ne va mourir. L'intensité dramatique en pâtira sans doute, mais j'expliquerai aux lecteurs qu’il n’est plus que cette façon de lire, à l’envers de la vie, rebroussant une à une les pages pour enfin refluer à la source, retourner au début de l’histoire, là d’où nous étions partis.

Tu te tenais encore ici il y a quelques minutes. Je lisais. Tu allais partir, et j'essayais de comprendre pourquoi tu étais venue. Ça t'agaçais... tu m'as frappé. Deux fois, deux coups au coeur. Être interrompu dans l’exercice délicat de la lecture à contrefil m’a obligé à une épuisante gymnastique de chronologies, à la manière d’un saumon repris par le courant qu’il s’évertuait à remonter.

Tu m'as quitté. Je note que tu m'as quitté un dimanche d'octobre, alors qu'il fait très froid et que j'avais prévu que nous irions dîner chez des amis. Je vais devoir annuler, certes, mais j'ai la fin de notre histoire, je peux continuer à la réécrire.

Tu étais la première. Le reste s’est construit pour que tu survives, pour que la musique continue d’une manière ou d’une autre. Mes projets, mes caprices, mes limites, mes autres amours... jusqu’à ce sofa trop grand pour nous deux où je languis encore, et où l'idée que tu m'échappes commence douloureusement à se faire sentir.

Je n'ai jamais transigé sur notre intimité, j’ai toujours attendu d’être le seul, que les ombres aient terminé avec le feu leurs danses moqueuses, qu’il ne reste enfin entre toi et moi que la pudeur du premier souvenir.

J'avais quoi... deux ans et demi, c'était l'anniversaire de ma soeur et je me rappelle qu'on dansait dans le salon avec des chapeaux de clowns. C'était la première fois que je te voyais.

Peut-être nous sommes-nous déçus l'un l'autre, à trop exiger de nos jeux malhabiles. Je n'étais pas très doué pour ces amusements, et même parfois jaloux des autres qui te tournaient autour, le regard fier, croquant tes chairs à pleines dents. Certains allaient jusqu'à se détourner de toi pour que tu les reprennes. Au fond tu ne restais plus que par habitude.

Ou par intermittence. Nous eûmes de belles années tout de même, quelques cotillons pour ressembler à d'autres, des courses dans les vagues, des espoirs d'horizons. Et souvent, je me souviens, nous marchions simplement ensemble dans la forêt avec le chien et je te trouvais belle.

Ces derniers temps, je restais des heures sur ce sofa à relire notre histoire. Je mangeais. Je buvais. Je fumais. Trop. Je voulais comprendre et tu me demandais de vivre. Tu n'as fait que me quitter un dimanche d'octobre. Alors personne ne va crever ce soir parce que tu t'en vas voir ailleurs. Ils diront que c'est une crise cardiaque: moi, je suis mort à deux ans et demi, à l'instant où je me suis senti vivant.

Je connaissais la fin, il me manquait le reste.

Ce message a été lu 5841 fois
Netra  Ecrire à Netra

2009-10-16 13:29:23 

 Mouais... Détails
Bon, l'histoire est classique, mais sympa, du gars avec son amour interdit qui cherche secours auprès de la frangine oublié... Par contre, heu...

Où est l'émotion ?
Franchement, sauf exercice spécial, de coutume tes textes remuent bien les tripes, et heu là ça m'a pas fait grand chose. Tu es terriblement plus froide que d'habitude, mais pour nous raconter une histoire où, justement, il faudrait beaucoup de chaleur, beaucoup plus de descriptions aussi. Les personnages pourraient être plus hauts en couleur, plus profonds, l'ambiance de méfiance et de commérage plus intense...

Bref, ce texte est je trouve très fade par rapport à ce que tu nous offres en temps normal.

Bon, je sais, je suis cruel alors que tu es à la méga-bourre...
Netra, qui, pour une fois, a à redire sur un texte de Narwa (ça n'arrive pourtant pas souvent !)

Ce message a été lu 6194 fois
Netra  Ecrire à Netra

2009-10-16 13:36:36 

 MélancoliaDétails
Un bien joli texte qui respecte parfaitement la consigne même s'il aurait pu être plus long (c'est moi qui dit ça ??? @-@) car la transition entre le 6ème et le 7ème paragraphe n'est pas très très fluide, on se perd un peu dans ces quelques lignes de flou artistique.
Et, mais ceci n'est qu'un détail... Il est extrêmement rare qu'un enfant ait des souvenirs précis avant 3 ans, sauf "choc" et en général il n'y a que les éléments essentiels dans ce type de souvenir (genre les chapeaux de clown c'est peu probable... La danse, si.) mais je pinaille, là.

Globalement, un texte agréable, aux couleurs pastel et à la musique douce comme un soir parfumé d'octobre...
Netra, que prend la nostalgie.

Ce message a été lu 6738 fois
Estellanara  Ecrire à Estellanara

2009-10-16 16:35:23 

 WA n°68 : participationDétails
Un petit conte cruel. Je ne suis pas sûre d'avoir respecté la consigne...
Edit suite aux corrections de Narwa.

Comme chien et chat





Samedi 11 juillet 19h56

La vioque a fini son assiette. Nous la regardons faire sans toucher à la nôtre. Elle se pourlèche les lèvres, elle sauce, le tout arrosé d'une bonne rasade de rouge. Un peu de crème a coulé le long de ses fanons tremblotants. Sous la table, j'enfonce mes ongles dans le gras de ma main pour ne pas éclater d'un rire dément. Claire demande :
- Alors, c’était bon, maman ? et elle lui fait un grand sourire.
La vioque pince les lèvres et déclare de sa voix légèrement stridente :
- Pour deux mal dégourdis dans votre genre, ce n'était pas mal.
Elle a toujours été très forte pour déguiser une insulte en compliment. Elle ne dit rien qu'il n'y ait une méchanceté cachée dessous, un sous-entendu méprisant. Pour la première fois, Claire et moi restons stoïques. Le temps de la colère et des larmes est passé. La vioque parcourt la pièce du regard en dépliant son cou ridé comme le ferait une tortue cacochyme. Bob, en brave bouledogue pas rancunier, remue la queue depuis son coussin et laisse échapper un petit jappement. La vieille teigne le considère un instant avec dégoût et susurre :
- Princesse... Où es-tu ma minette ? puis plus sèchement : vous ne l'avez pas laissée sortir au moins, Gérard ?
- Bien sûr que non.
Mes yeux accrochent ceux de ma femme et nous partageons un moment d'intense connivence. Nous somme deux criminels en fuite, deux complices, Bonnie et Clyde. Claire hoche la tête. La vioque insiste :
- Où est mon chat, enfin ?!
- Vous ne le reverrez pas, belle-maman.
J'insiste ironiquement sur le titre. C'est la première et la dernière fois que je lui donne du petit surnom affectueux à cette vieille garce. Elle hésite. Elle sent confusément que quelque chose ne va pas mais ses neurones défaillants peinent à établir le contact. Claire affiche toujours un grand sourire. Je reprends avec une furieuse jubilation qu'il n'est plus utile de contenir :
- Vous ne nous reverrez pas non plus. C'est la fin.
La vioque fronce les sourcils. Elle sort un petit mouchoir de dentelle de sa manche et s'éponge les tempes. Elle me toise de ce regard que les visiteurs de zoo réservent aux animaux les plus répugnants et les plus stupides. Puis, elle se tourne vers sa fille :
- Claire, cesse ce petit jeu imbécile et dis-moi ce qui se passe !
L'ordre a claqué comme un fouet et Claire vacille sous l'impact. J'aperçois au fond de ses yeux la petite fille fragile et craintive, prête à obéir, mais c'est la femme qui répond et sa voix s'efforce d'être ferme. Toute trace de soumission a disparu. Je l'observe avec fierté. Ce soir, Claire sera libre; elle se sera débarrassée de ses chaînes. L'honneur de porter le coup de grâce lui revient :
- Je vais te le dire, maman. J'en ai plus qu'assez de tes ordres, de tes caprices, de tes chantages et de ton hypocrisie. Toute ma vie, tu m'as écrasée, dirigée, manipulée. Maintenant, c'est fini.
La vioque ouvre des yeux si ronds qu'on croirait qu'ils vont rouler de leurs orbites sur la moquette. Son teint a pâli jusqu'à virer au gris. Elle transpire à grosses gouttes. Elle veut parler mais son souffle s'étrangle dans sa gorge. Ma femme a repris son sourire courtois. Elle se penche sur la marmite et en extrait un râble et une bonne dose de sauce à la moutarde :
- Reprends donc de ce plat, maman. C'est la dernière fois que tu auras l'occasion d'en manger.

Vendredi 10 juillet 18h12, la veille

Je suis furieux :
- Enfin, Claire, tu m'avais juré que tu ne l'inviterais plus !!!
Je laisse tomber ma sacoche trempée dans l'entrée et je balance mes chaussures à travers la pièce. Je termine une semaine épuisante et j'espérais passer le week-end tranquille. Je m’affale dans un fauteuil :
- Merde à la fin ! La vieille guenon va encore nous pourrir la vie ! Elle ne devait passer que cinq minutes pour récupérer sa saloperie de chat.
- Je sais...
Ma femme baisse la tête. Elle a déjà retiré son tailleur pour se glisser dans son pyjama de flanelle rose, celui imprimé avec des nounours qu’elle réserve pour les coups durs. Elle murmure :
- Je n'ai pas pu lui dire non. Pauline l'a invitée la semaine dernière...
- Alors, si toi, tu ne le fais pas, tu es une fille indigne. Comme d'habitude ! Tu ne vois donc pas qu'elle te manipule ? Et qu'elle essaie de vous monter l'une contre l'autre, ta soeur et toi ?!
- Je sais que j'aurais dû refuser, Gérard. Mais je n'ai pas pu. Avec ma soeur, elle est ma seule famille.
Claire s'est assise sur le tapis, au pied du fauteuil. Son visage est défait, ses épaules basses. Je me rappelle brusquement que ce n’est pas contre elle que je suis en colère. Je lui prends les deux mains :
- Voyons, chérie, on en a parlé des milliers de fois. Etre ta mère ne l’autorise pas à te traiter comme une esclave. Tu sais aussi bien que moi que cette femme est méchante et qu’elle ne t’aime pas.
- Oui, je le sais...
- Avec toutes les vacheries qu’elle nous a fait, on aurait dû la tuer depuis longtemps.
- C’est peut-être ce que je devrais faire. Et ainsi je serais libre.
Claire est mortellement sérieuse. Elle se lève et vient s’asseoir sur mes genoux. Je la serre dans mes bras :
- Je ne comprends pas pourquoi tu continues à lui céder.
- Parce que je suis faible...
- Tu fais les courses pour elle, alors qu’elle n’est même pas grabataire, tu l’emmènes chez le coiffeur, chez la manucure... Et moi, je suis obligé de tondre sa pelouse, de nettoyer ses carreaux... Sinon, elle nous traite comme si nous étions des sans coeur qui ne nous occupons pas des vieux.
- Et tout l’argent qu’elle nous emprunte et qu’elle ne nous rend jamais sous prétexte qu’elle oublie les choses avec sa tête fatiguée. Ah, maman est vieille quand ça l’arrange !
- Elle n’était pas vieille quand il s’est agi de partir aux Seychelles alors qu’elle avait promis de venir à ton anniversaire !
Claire soupire, les yeux dans le vague :
- Je parie que c’était pour ne pas me faire de cadeau. Elle trouve toujours un prétexte. Tu te souviens quand elle a simulé une crise d’angoisse pour nous faire revenir de vacances ? Les seules vacances que nous ayons prises en cinq ans...
- Et quand elle m’appelle vingt fois par jour sur mon portable pour ses problèmes de messagerie Internet ou d’icônes ! Et qu’elle fait la gueule parce que je suis en réunion et que je ne réponds pas !
- Et quand elle me parle interminablement des gosses de Pauline et de la joie d’avoir des enfants alors qu’elle sait très bien que je suis stérile !!
Ma femme se dresse d’un bond et serre les poings à s’en faire blanchir les jointures :
- Dire que pendant des années je lui ai cherché des excuses. Elle est maladroite, négligente, je me disais. Elle ne pense pas à mal. Bien sûr que si !
- Calme-toi, ma chérie. Le docteur Schwartzman a dit d’éviter les émotions violentes.
- Mais c’est à cause d’elle que j’ai fait cette dépression !! Je ne veux pas la voir. Elle va encore me faire souffrir. Elle me dira des choses méchantes en jouant le jeu de la mère aimante... Je la hais !
Elle essuie rageusement les larmes qui coulent sur son menton et elle secoue la tête, faisant valser ses boucles blondes.. Je souris malgré moi. Comme elle est belle... Et je suis trop lâche pour la protéger. Elle continue :
- Et son enfoiré de chat ! Qui a bouffé nos poissons, qui pisse sur nos tapis, sur notre lit, partout ! Et qu’elle nous donne à garder chaque fois qu’elle s’absente.
- C’est vrai. La prochaine fois qu’il me griffe, je le balance contre le mur ! Souvent, j’ai eu l’impression que ta mère aime plus son chat que toi.
- Moi aussi.
Nous restons un moment pensifs. Tout ça me fait penser que je n’ai pas vu Bob ce soir. D’habitude, il vient toujours m’accueillir. Claire pousse un soupir aussi profond que la fosse des Mariannes :
- De toute façon, elle ne m’a jamais témoigné la moindre affection, sauf en public pour faire bien. Quelle salope... Elle nous a gâché notre enfance, à Pauline et à moi. On n’avait jamais le droit de l’embrasser parce que ça aurait abîmé son maquillage. On était punies chaque fois qu’on se salissait. Des gosses et même pas le droit de jouer dehors ! Je voyais bien que les autres avaient le droit, eux. Et papa qui n’était jamais là... Et pas le droit d’inviter des amis. Et elle nous rationnait parce que la nourriture coûte cher ! Je volais des pommes pour moi et ma soeur.
Elle s’arrête de parler et se remet à sangloter. Je reste là comme un con à la regarder et mon coeur se serre. J’ai toujours été dépassé par la méchanceté de la vieille harpie mais moi, au moins, je n’ai pas eu à la supporter enfant. Claire m’a raconté des trucs qui feraient passer David Copperfield pour une histoire humoristique.
- Et elle n’a jamais pu te supporter non plus, mon chéri. Combien de fois j’y ai eu droit, au couplet : tu mérites mieux que lui, il n’arrivera jamais à rien, c’est un paumé...
- Je n’aurais jamais cru qu’elle appellerait mon patron pour lui dire que je ne méritais pas cette augmentation. Quel culot ! Les bras m’en sont tombés. Au moins, il l’a pris avec humour et s’est contenté de me plaindre d’avoir une pareille tarée comme belle-mère.
- Si elle était là, je lui foutrais des baffes !
- Laissons-la venir demain et parle-lui franchement, Claire. Dis-lui tout ça, une bonne fois pour toutes et, quand elle franchira la porte, que ce soit pour ne jamais revenir.
- Je n’aurai pas la force...
- je serai là, je t’aiderai. Je parlerai avec toi.
Une légère roseur se répand sur les joues de ma femme et ses yeux se font rêveurs. Elle imagine sans doute de ce qu’elle dirait. Elle imagine la vie sans le poids intolérable, étouffant de la vioque. Tout à coup, elle se tourne vers moi et s’enveloppe dans ses propres bras, serrant avec force :
- Elle ne lâchera jamais. Elle appellera chaque jour, chaque heure pour nous le faire regretter. Elle se plaindra auprès de ma soeur, auprès de mes amies... Et puis, elle reviendra, elle la jouera magnanime. Elle ne peut pas se passer de nous. Elle est bien trop feignante pour faire son ménage, ses courses et tout le reste, cette vieille carne.
- Ou alors, il faut que nous fassions quelque chose de si terrible qu’elle ne revienne jamais plus. Quelque chose qui lui fasse peur. Comme crever les pneus de sa bagnole...
- Non, ce n’est pas suffisant.
Un concert d’aboiements et de sifflement en furie et une tornade de poils et de crocs déboule dans le salon. Nom de Dieu ! Cette sale bête de Princesse attaque Bob, notre gentil petit bouledogue, qui ne ferait pas de mal à une mouche !! Comment a-t-elle fait pour sortir du garage où on l’avait enfermée ?? La charogne est toutes griffes dehors ; elle vise les yeux. Bob hurle à la mort. Tout d’un coup, je vois rouge. Je me jette dans la mêlée sans réfléchir. J’attrape la saloperie par le cou. Elle me laboure les bras et me crache au visage. Je serre, je serre aussi fort que je peux. Si je lâche, cette bestiole immonde va tuer mon chien ! Je serre encore ; je veux qu’elle crève !
Un craquement sec. Le chat a cessé de se débattre. Claire me touche le bras et je crie de surprise. Je laisse tomber Princesse qui heurte la moquette avec un petit bruit mou. Elle ne bouge plus. Je crois que je l’ai tuée. Je ramasse Bob qui s’était caché sous le buffet. Le pauvre a la truffe en sang. Dans la salle de bain, je nettoie les blessures du chien, qui se laisse faire, le regard triste. Bob aura droit à une saucisse en guise de réconfort tout à l’heure. Claire finit par briser le silence pesant :
- Allez, amour, c’est pas grave. Cet animal était méchant comme une gale. On va s’en débarrasser et on dira à maman qu’il s’est enfui et est passé sous un camion.
- Le chat était moins coupable que la vieillarde teigneuse qui l’a élevé.
Je retourne au salon, le chien sur mes talons, et je ramasse le cadavre de Princesse. Ma femme continue, à présent d’un calme mortel :
- Demain, c’est la dernière fois qu’on la voit. Tu m’as convaincue. Ca fait beaucoup trop longtemps que je reporte cette confrontation. Je suis résolue à en finir. Le grand soir est arrivé.
Le grand soir. Un dernier repas pour en finir. Une idée horrible germe sous mon crâne. Je la contemple, la retourne avec jubilation, je la jauge. Un sourire sadique déforme mes lèvres et un rire un peu fou tombe de ma bouche, comme une poignée de cailloux pointus :
- Qu’as-tu prévu pour le repas, ma chérie ?
Ma femme hésite, interloquée par ce brusque changement de sujet :
- Euh... j’avais pensé à un lapin à la moutarde, pourquoi ?
- Excellent ! La vioque ne reviendra jamais après demain soir, je peux te le garantir. Tu seras libérée d’elle à tout jamais.
Claire me regarde fixement et moi je regarde le cadavre du chat.
- Pas besoin de lapin, demain soir.



Est', presque pas en retard.

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-10-16 22:51:17 

 Droit de réponseDétails
Effectivement, j'ai joué la froideur. L'histoire était déjà désespérée, je n'ai pas voulu tomber dans le mélo, j'ai plus décrit les faits que les émotions. C'est une autre manière d'écrire, à laquelle tu n'es pas habitué de ma part. Mais je revendique le droit de changer de style!
Et si quelqu'un d'autre que moi avait écrit ce texte, t'aurait-il plu davantage?
Peut-être aussi vu mon état de fatigue ai-je préféré garder mes distances pour ne pas m'enliser, mais ça, on ne le saura jamais...
Désolée que ça ne t'ait pas plu. Mais je persiste et signe...
Narwa Roquen,bourrique!

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-10-16 23:09:11 

 Commentaire Netra, exercice n°68Détails
Toi tu dis glauque, moi j'aurais dit hard. Personnellement je n'ai pas eu besoin des spoilers pour suivre le fil, ça m'a paru très clair. La consigne est parfaitement respectée, l'histoire est cohérente, et le raccordement entre le passé et le présent est réussi. C'est une histoire dure, mais qui a cependant son côté romantique, et une trouvaille intéressante, celle des poulies. Personnellement j'aurais juste ajouté quelques phrases sur l'amour entre les deux garçons, pour souligner encore le contraste entre une véritable histoire d'amour et un contexte de drogue et de prostitution.
Quelques détails:
- quant: quant à lui, certes, mais quand un voisin, et quand il me faisait l'amour
- il arrêterai: arrêterait
- on s'est croisé, on s'est retourné: traditionnellemnt, même si "on" désigne "nous", le participe passé reste au singulier
- il a rougit: il rougit, il a rougi
- il a fallut: il fallut, il a fallu


Au total, c'est un bon texte, fort et tonique, qui bouscule un peu, mais je n'ai rien contre.
Narwa Roquen,l'amour toujours l'amour!

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Netra  Ecrire à Netra

2009-10-16 23:17:40 

 Certes,Détails
je ne suis guère habitué à une écriture froide de ta part, et encore moins sur un sujet pareil ^^

Cependant, si c'est sciemment choisi, je respecterai le choix... Même si je trouve qu'une telle histoire aurait gagné à être écrite autrement (mais là c'est une question de point de vue.)
Netra, qui va retourner lire Mélamine ^^

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Netra  Ecrire à Netra

2009-10-16 23:30:07 

 Mouahaha Détails
Je me demandais depuis le début si le lapin était bien un lapin... Très chouette histoire, cruelle et légère, qui se dévore à une vitesse incroyable !

Je trouve, pour ma part, la consigne respectée (même si j'aurais adoré voir la tête de la vielle après compréhension réelle de la situation ^^)
Netra, qui fera attention la prochaine fois qu'on voudra lui servir du lapin...

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Netra  Ecrire à Netra

2009-10-16 23:35:22 

 Fautes corrigées !Détails
Ouf !!! Avec les problèmes de Z à comprendre l'histoire, j'ai eu peur de m'être complètement planté, mais tu me rassures !

Pour les poulies, c'est la faute des Tri Yann, et pour l'ambiance, c'est la faute de Blade Runner (c'est ça ou du r&b toute la journée, au stage... après ne me demandez PAS pourquoi j'ai mis une chanson de Tri Yann au milieu de Blade Runner)

Pour l'amour, je trouvais que ça collait pas au personnage. Il ne sait pas parler d'amour en fait, juste le faire rejaillir dans presque toutes ses phrases sans jamais arriver à le saisir vraiment... Un peu comme sa vie, en fait.
Netra, qui doit avoir un problème avec la douceur

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Maeglin  Ecrire à Maeglin

2009-10-17 10:36:53 

 Les souvenirs et les regrets aussiDétails
'tain, bizarre que tu le trouves agréable et pastel parce que je le voulais bien glauque (et au passage j'ai bien aimé le style du tien, même si je le trouve moi aussi plus "hard" que glauque).

C'est quand même l'histoire d'un mec qui crève comme une merde sur un canapé en s'inventant une mauvaise histoire d'amour avec la vie...

Ok avec toi sur les transitions, je pêche toujours un peu par là et je l'ai écrit entre deux pauses au bureau sans forcément le relire.

Sur la précision des souvenirs, je te rejoins aussi, mais pour l'anecdote c'est bien un "souvenir" personnel, par contre certainement en partie ravivé par les Super-8 familiaux. Ma première bouffée de vie!

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Maeglin  Ecrire à Maeglin

2009-10-17 10:57:13 

 J'adore le lapin!Détails
Même si je l'ai bien vu venir, le texte est assez jubilatoire et finalement léger. Comme je suis tordu, j'aurais aimé creuser la personnalité de la vioque: on la connait surtout par le mauvais côté de la lorgnette et le parti pris est immédiat pour les "jeunes".

Bref, la marâtre fait une excellente "Folcoche" de Vipère au Poing, ce sont les jeunes que je trouve finalement plus "fades", parce que leur haine n'est à mon sens pas assez ambiguë... La moutarde du "lapin" est par contre un excellent liant à cette histoire.

Et merci d'avoir sauvé le chien.
Maeglin

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Netra  Ecrire à Netra

2009-10-17 14:59:07 

 Noires pastelsDétails
Ben, ouais, il est sur son canap' à se pourrir la vie mais c'est pas un texte violent, le mec il fait un peu pitié en fait ^^
Je l'imaginais complètement torché en train de se faire ses films merdeux, mais comme j'étais encore dans l'ambiance de mon texte, ben oui ça paraissait agréable et pastel ^^
Netra, qui doit avoir un problème avec les pastels

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2009-10-17 19:03:43 

 WA - Participation exercice n°68Détails
Un texte en retard...


WE WERE WOLVES



Pour la bande son, appuyez sur PLAY

Mes bras sont rouges. Un sang rouge et brillant coule sur ma poitrine en tièdes rigoles, glisse le long de mes abdominaux, perle sur mon sexe et veine mes cuisses. Je lève les yeux vers la lune descendante et je secoue la tête désespérément. Sa clarté pâlit rapidement, effacée par l’aube indifférente qui filtre déjà au-dessus des arbres. Il n’y aura pas de miracle. Ils ont des chiens et des fusils. Ils sont en colère et rien ne les détournera de leur funeste objectif. La clairière est encore silencieuse mais je perçois leur présence dans le lointain. Des cris et des aboiements. Ils se rapprochent. Ils me cernent. Plus question de fuir. Ni la force, ni le temps. Encore moins la volonté. Tout sera fini ce matin.

Je dépose délicatement mon fardeau sur l’herbe ourlée de rosée. Ses yeux sont clos. Son coeur bat faiblement. De plus en plus faiblement. C’est la première fois que je la vois ainsi, celle qui a couru toutes ces nuits à mes côtés. Nous étions devant tous les autres et entre les arbres, au plus profond de la forêt, nous courions baignés par les rayons d’argent d’une lune pleine et ronde. Cette lumière spectrale qui réveille nos sens et exacerbe nos désirs. Cette lumière chatoyante qui révèle ce que nous sommes vraiment. Comme une pellicule photographique plongée dans son bain argentique. Les rayons d’argent fixent notre nature profonde. L’argent métallique s’écoule dans nos veines.

Je m’agenouille au bord de la rivière. Mon image s’y reflète entre les joncs, une image troublée par les remous du courant le long de la berge. Une image finalement fidèle à ce que je suis. Si cruellement floue et dégradée. Ne suis-je donc qu’un reflet changeant en quête d’une identité insaisissable? Je suis tellement las que mes yeux restent secs. Je ne peux pleurer.

Elle semble si fragile, si menue, si vulnérable. A peine sortie de l’adolescence. Une frange de cheveux sombres est collée par la sueur sur son front. La balle l’a frappée sous l’omoplate. Une balle tirée au jugé. Un coup heureux. Un coup du sort. Elle a trébuché en pleine course, s’agrippant à mon bras pour ne pas tomber. Quelques dizaines de foulées plus tard, malgré mon aide, elle s’est effondrée parmi les grandes fougères. Je l’ai alors soulevée. Elle ne pesait presque rien, j’étais encore fort et sauvage. La lumière cendrée saturait mon sang, élixir merveilleux et surnaturel. Tout contre moi, sa toison était douce et soyeuse. Je pouvais sentir son souffle court et irrégulier au creux de mon cou. J’ai hurlé à la lune qui se cachait au-dessus des arbres mais ma voix s’est brisée. Elle est demeurée indifférente à mon destin. Pourtant ne sommes-nous pas ses enfants ? Le rêve s’enfuyait, je redevenais solaire. C’est un état de fait de plus en plus difficile à accepter. Un ordre des choses de moins en moins naturel. Mes pas ont alors hésité, ma course a ralenti, la fatigue courbant mon échine. Les chiens ont aboyé plus fort, humant la chaleur renouvelée de la piste. De longs coups de sifflets ont retenti derrière nous, hachant la brume du petit matin. Des appels leur ont répondu de loin en loin, provenant de toutes les directions. La battue refermait ses mâchoires. J’ai néanmoins réussi à atteindre la clairière où murmure la petite rivière, l’endroit où je suis né. Où je suis né loup. L’endroit où elle fut mienne au coeur de la nuit complice. Nous revenons toujours au point de départ. La ligne droite n’existe pas. Les solaires ne peuvent comprendre. C’est au-delà de leur pauvre imagination.

Comment s’appelle-t-elle ? Je ne connais même pas son nom. Sa peau est lisse et nue. Une beauté singulière, trop humaine. Insolite pour mes perceptions altérées. L’ai-je croisée auparavant quand je marchais parmi les hommes sous mon apparence solaire? M’aurait-elle jeté le moindre regard en frôlant mon épaule sur le trottoir de la cité? M’aurait-elle reconnu? Que m’importe ! Sous le soleil des hommes, les loups n’existent pas. Nous sommes des loups et nous acceptons la loi de la meute le temps d’une pleine lune. Durant ce court moment, nous chassons et nous aimons. Je l’ai aimée comme un homme n’aimera jamais une femme. Je l’ai aimée bien au-delà de toute notion de possession. C’est une question d’odeur et de fidélité. Le corps qui est étendu là n’est pas la compagne qui a tourné le tapis brillant de ses regards au paroxysme de notre désir. L’odeur que dégage ce corps que la chaleur quitte peu à peu est fade et triste, à mille lieues de l’imprégnation qui a fait chavirer mon coeur de loup.

Les spasmes et les tremblements deviennent de plus en plus violents. Je redeviens solaire. Le temps m’est compté. Quelques minutes au plus. Juste le temps de les affronter une dernière fois. Eux. Les autres. Les étrangers extérieurs à la meute qu’ils ont décimée. Ceux qui me connaissent sous d’autres traits. Ces traits que je veux plus porter. Les hommes et leurs chiens. Les hommes inquiets derrière leurs portes et leurs enceintes. Il paraît que nous sommes descendus des étoiles où nous étions perdus au milieu d’un voyage au long cours. C’est ce que disent les légendes rapportées par les conteurs et les colporteurs. Il parait que le monde d’où nous venons est semblable à celui-ci, un monde autour duquel tourne aussi une lune montante et descendante. Il paraît... telle est notre condition. Juste des apparences. La réalité est que je suis un loup. Un loup sans meute à présent. Celle qui a hurlé de plaisir lorsque la lune pleine a atteint la verticale de la clairière a rendu son dernier soupir. Je ne peux survivre sans elle. Je ne peux attendre une nouvelle pleine lune. Elle ne sera plus là à m’attendre dans le bois.

Les chiens font irruption dans la clairière. Je gronde, babines retroussées et poils hérissés. Leurs aboiements se transforment en jappements craintifs. Queue basse et oreilles rabattues, les chiens réapprennent les rites éternels de soumission. Je sais que je suis un monstre pour les chasseurs, un monstre aux yeux jaunes qui égorge leur bétail et leurs enfants désobéissants. Les chiens se sont aplatis à la lisière des grands arbres, impuissants et soumis. Leurs maîtres surgissent des sous-bois, fusils levés. Ils sont trop nombreux et l’argent se dilue dans mon sang. Je pousse mon dernier hurlement à la lune absente, un long hurlement en forme de testament. Je bande mes muscles quand les chiens des fusils claquent rageusement.

Ces chiens-là n’ont jamais reconnu le loup comme seigneur.

M

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2009-10-17 19:33:01 

 Beurk ^^Détails
Moi j'étais complètement à côté de la plaque, je croyais juste qu'ils avaient empoisonné le plat pour la tuer... Les bougres!

Chuis pas assez sadique dans ma tête :)
Texte qui se lit vite et bien, en tout cas, et qui respecte bien la consigne! ;)

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2009-10-17 20:22:49 

 TristeDétails
Moi je le trouve archi triste ce texte! Les histoires d'amour qui finissent c'est toujours triste, et là en plus c'est tellement bien dit... Maeglin, notre pro de l'amour!! :)

C'est bien, on a des auteurs spécialisés: Roquen en sorcières, Est' en biologie, Maedhros en miroirs, Maeglin en histoires d'amour, ...

Bref, ce texte il sent la peine, la peine longue qui dure et qui est là comme en bruit de fond, de ces douleurs silencieuses qui font que l'automne est vraiment une saison pourrie.

Et c'est un sacré beau texte. A part l'histoire des enchaînements de paragraphes, déjà relevée, mais deux trois détails de rien du tout je n'ai pas envie de t'embêter avec ça :)

Elemm', qui plussoie pour un n°70 "hot" (même si sur le 69 ça aurait été plus drôle!), histoire qu'on se réchauffe un peu vu le temps qu'il fait dehors!!

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Netra  Ecrire à Netra

2009-10-17 21:56:19 

 Chiens et Loups.Détails
Question consigne, c'est respecté.

Question ambiance, j'adore. Les deux premiers paragraphes particulièrement sont de petits trésors de poésie sanglante. Même si il me semble que tu affectionne particulièrement les poursuites à la fin inéluctable, surtout sur des êtres rares, beaux et sauvages. (tu nous avais déjà fait le coup avec un Elfe, non ?)
On visualise très bien la scène et on n'a pas plus envie que le héros qu'il redevienne humain... Un beau tableau, plein de douceur et de sang.
Netra, qui aime les Loups

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2009-10-18 12:49:04 

 Premier paragrapheDétails
Personnellement le ton ne m'a pas dérangée, par contre c'est les premières phrases que j'ai eu beaucoup de mal à comprendre, ce qui fait que le début ne devient compréhensible qu'une fois qu'on a tout lu: on sait qu'il y a une femme à l'intérieur de la maison, des gens dehors, un couple, mais j'ai vraiment eu du mal à comprendre que le couple était dehors, que c'était eux qui voulaient rentrer, que c'était l'homme du couple qui parlait et que "la" (tuer) représentait sa compagne, que c'était à eux que la première femme disait d'entrer...

Bref, le grand flou! Je pensais qu'ils étaient à l'intérieur, car elle entend le bruit dehors, mais tu ne dis pas qu'elle ouvre la porte avant de dire "ils étaient là", du coup ça m'a embrouillée ^^

De plus, tu parles de Marcus qui s'enfuit, mais ne précise pas qu'il part avec Amina, alors ça n'aide pas...

A part ça, sinon, c'est ok! :)


Elemm', je comprends vite mais faut m'expliquer longtemps...

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2009-10-18 13:00:24 

 Comm' NetraDétails
Pour moi l'arrivée dans le deuxième paragraphe m'a posé la question de savoir lequel des deux parlait, mais l'indice du nom l'explique bien, c'était très clair pour moi (comme quoi, des fois je comprends vite pour de vrai... ^^)

Le coup des poulies est en effet tordu mais bien trouvé! Et c'est un bon texte, qui respecte les consignes, avec un univers bien défini, bref, le jury est content :)

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2009-10-18 16:46:38 

 Same junk shoot again.Détails
Une foutue histoire percutante, barge et borderline, plein de haine, de remords et d’amour aussi. Un ton ciselé au couteau, un rythme énergique qui trace sa voie sanglante jusqu’au bout de l’enfer. J’aime bien la façon dont tu t’affranchis des conventions. Pas un mot inutile. Quelques fois cela peut entraîner une certaine confusion mais cela ne nuit pas à l’ensemble. La logique et la raison n’ont pas vraiment cours sous ces attitudes. Pour ces caractères trempés dans l’acide et le torve, ces destins qui se cognent ensemble en cherchant la porte de sortie. Aucune justification sinon l’errance et la déshérence, l’amour à sang unique, les crocs du one shoot. Le récit est une zébrure, une fêlure, aux antipodes des amours de Vérone. Ce n’est pas glauque comme d’autres l’ont déjà dit. Je ne dirais pas hard non plus. Il y a une urgence très moderne dans la façon dont les choses se passent, renforcée par l’emploi du « je ». Il y a un raffinement à la SAW dans l’emploi des poulies.

La consigne est respectée.

M

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2009-10-18 17:31:21 

 Avec elle vient la foi.Détails
C’est une histoire profondément chrétienne que tu nous livres là. Le principal personnage est prénommé Grâce dont la naissance n’a pas couronné l’attente des parents qui souhaitaient un garçon, plus apte à reprendre les affaires familiales. Grâce. Si ce récit devait avoir un seul et infime point discutable cela serait bien ce prénom qui jure un peu avec l’accueil fait à cette fille non désirée.

Or cette femme, à peine tolérée par la communauté rurale, crainte confusément parce qu’elle a des talents qu’on confondait à l’époque trop souvent avec les arts noirs, cette femme que la nature n’a pas flattée, a conservé une âme pure et généreuse et va faire don de sa vie pour protéger la fuite du frère qui l’a toujours méprisée.

Oui, la grâce est une faveur qu’octroie Dieu à celui qui ne la mérite pas par ses actes. Et Marcus la méritait encore moins que quiconque. Je ne vois aucune froideur dans ce récit humaniste. Certes, il n’y a aucun bataillon angélique descendu des cieux, aucun subterfuge pour maquiller la réalité astringente, aucun effet littéraire pour gommer la cruauté campagnarde de ces êtres frustres et incapables de dépasser leurs préjugés. C’est le constat sans appel de la connerie humaine qui a nourri toutes les guerres et toutes les haines. Il paraît qu’avec Internet, les horizons se sont ouverts à tout jamais. Je n’en suis pas si sûr. Regardez du côté de Calais.

La consigne est respectée avec un flash-back séduisant.

M

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-10-18 17:31:56 

 Commentaire Maeglin, exercice n°68Détails
C'est un texte fort mélancolique, en effet, comme le souligne Netra, tout à fait dans tes ambiances familières - souvenirs coin du feu brouillard. C'est aussi un texte difficile à lire où tu entremêles passé et présent d'un paragraphe à l'autre ( bonjour la consigne, je vais bien et toi?), probablement pour que le lecteur se sente aussi perdu que le héros. L'effet de style est très réussi. Après, si je n'étais pas Narwa Roquen, je te dirais que c'est très bien écrit, que ta petite musique est toujours efficace, que tu décris comme personne les impressions et les ressentis... Et tout ceci est vrai.
Mais Narwa Roquen, cette fois, te trouve avare. C'est peut-être de la pudeur, mais ici nous sommes en littérature. Tu nous donnes un album photo à la David Hamilton, sans légendes, les photos sont volontairement floues, c'est artistique, très artistique, trop. Le lecteur est dans les sables mouvants, il n'est sûr de rien, pas même que le héros ait vraiment vécu avec l'héroïne ( c'est d'ailleurs la question sous-jacente du texte: c'est quoi, vivre?). Alors oui, c'est bien écrit, mais nous savons tous que tu as un joli brin de plume. Il te faudrait maintenant discipliner ton talent et nous offrir quelque chose que nous puissions partager avec toi - une tasse de thé?
La dernière phrase est un exemple parfait: c'est paradoxal, théâtral, avec une apparente force dans la simplicité. Mais quel sens veux-tu que le lecteur y donne? Il n'a tout simplement pas la clé. A la longue, le lecteur se lasse des portes fermées.
C'est comme si tu restais au bord d'un lac magnifique, à faire des ricochets. Plonge! L'eau est un peu fraîche au début, mais après, elle est bonne!
Narwa Roquen, méchante sorcière qui pousse les gens du plongeoir... Et certains n'aiment pas du tout!

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Netra  Ecrire à Netra

2009-10-18 18:27:06 

 Na !!! Détails
Bon, OK, vous l'aurez voulu, j'ai changé le titre (et maintenant les gens vont croire que je me prends pour Elemm' et que j'écris des trucs bisounours ^^)

J'ai pas vu les SAW, mais je suppose (et m'autorise à croire) que c'est un compliment, vu le reste du comm'
Quant aux conventions... C'est quoi ??? Et l'inutile je connais pas trop non plus. Merci à tous ceux qui ont pris la peine de lire les aventures du petit Edward ^^
Netra, sans s'encombrer.

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-10-18 20:30:37 

 Commentaire Estellanara, exercice n°68Détails
Os court! Tatie Danielle revient! En pire, puisque celle-ci martyrise ses propres enfants... Voilà le portrait bien brossé d'une terrible mégère, qui cumule à elle seule tous les défauts des mères, des vieilles, des garces... Elle est tellement horrible que le texte ne mentionne même pas qu'elle ait pu un jour vivre avec un homme, tant il est évident que si elle ne l'a pas tué c'est qu'il a dû s'enfuir avant... Mais tu aurais pu encore forcer le trait. "Pour des gens qui ne font jamais la cuisine" est presque gentil. "Pour quelqu'un qui n'a jamais su faire cuire un oeuf" ( par exemple), est plus vilain. "Cesse ce petit jeu imbécile et dis-moi ce qui se passe" , sans le moindre point d'exclamation, et tu dis "l'ordre a claqué comme un fouet". Pour toi qui manies le fouet du Balrog avec une dextérité foudroyante, je me serais attendue à plus dur!
Elle prend tant de place, la vieille harpie, qu'elle en étouffe un peu les autres personnages, mais moi ça me va bien, c'est logique. Juste un détail qui me gêne un peu: Claire, poussée par son mari, décide de résister enfin et pouf, c'est un miracle "c'est la femme qui répond et sa voix est ferme". Ca, j'ai du mal à le croire. Sa voix s'efforce d'être ferme, je veux bien, elle réussit à la rendre ferme, OK. Mais je suis sûre qu'elle fait un effort surhumain, pour s'en sortir, pour survivre, et ça, il faut le rendre.


La consigne est-elle respectée? Oui et non. Le problème c'est que tu veux garder la révélation du lapin pour la fin (à la 2° phrase on pense au poison, mais au mot râble on a compris). Du coup il manque la scène finale, celle où le tyran déchu a une bonne raison de s'étouffer. J'avoue ne pas savoir comment faire mieux!


Quelques bricoles:
-les accents circonflexes! T'es fâchée contre eux? Ce joli petit chapeau qui abrite les voyelles de la pluie ... "la nôtre", "pâli","j'aurais dû refuser", "on aurait dû la tuer"
- oubli d'un e : toute ma vie
-tu fais ses courses pour elle : redondance
- il s'est agit: agi
- elle nous donne à garder à chaque fois: chaque fois ( idem un peu plus bas)
- de toutes façons: de toute façon
- toute à l'heure: tout


Au total c'est un texte sympathique sur les joies de la famille, rondement mené d'une plume toujours sûre, qui égaie un peu une WA plutôt dramatique...
Narwa Roquen, qui ne racontera pas cette histoire à ses chats!

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