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 WA, exercice n°93 Voir la page du message 
De : Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen
Date : Jeudi 28 avril 2011 à 23:09:07
Quatre-vingt treize... Ca ne vous rappelle rien? Bon sang, mais c'est bien sûr! Eh bien, en hommage au Grand Homme, nous marcherons dans ses traces en écrivant une histoire autour de la pauvreté - pas la misère: la misère c'est le désespoir, la pauvreté est toujours relative, fluctuante, compliquée. Dans le genre que vous voudrez, vous utiliserez les ingrédients chers à cet écrivain-dramaturge-poète: réalisme, romantisme, débat d'idées, humanisme... que du lourd! Mais vous pouvez aussi faire un texte humoristique!
Vous avez trois semaines, jusqu'au jeudi 19 mai.
Euh... vous n'êtes pas obligés d'être aussi prolixes que lui...
Narwa Roquen, demain dès l'aube...


  
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Réponses à ce message :
Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2011-04-29 07:54:42 

 Euh... Langue au chat?Détails
... C'est qu'il faut de la culture maintenant pour les WA, zut... 93, 93... J'vois pas... Un autre indice?? J'peux avoir le 50-50 ou l'appel à un ami? Public, à vos boîtiers!!
Ce message a été lu 5660 fois
Fladnag  Ecrire à Fladnag

2011-04-29 08:17:51 

 Trouvé ^^Détails
Moi j'ai trouvé ;o)

C'est parce que t'as pas cherché ce qu'il fallait sur google.

Des fois, les lettres c'est mieux que les chiffres !

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Netra  Ecrire à Netra

2011-04-29 12:41:22 

 Et ben alors ? Détails
Quand tu auras trouvé, si tu as le courage de le lire, je te le conseille ^^
Netra, VH addict

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z653z  Ecrire à z653z

2011-04-29 15:06:54 

 Encore un que je n'ai pas luDétails
Pour l'indice "Grand Homme", il faut être effectivement cultivé. Sinon, j'ai suivi le même chemin que Fladnag.
Et j'ai presque fini mon 13e roman de la saga de Zola. Quand j'aurais fini ces 20 volumes, je m'attaquerai certainement aux 5 tomes des misérables.

Ce message a été lu 6286 fois
Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2011-04-30 10:34:14 

 En fait j'ai pas cherchéDétails
Google c'est triché. J'avais bien pensé à  Victor Hugo  mais ma certitude avoisinait les 5% donc je n'ai pas considéré avoir la réponse, mais l'indice de Netra augmente ce pourcentage. Mh mh.... Si c'est lui, j'avais adoré ce que j'en avais lu au lycée. Mais suis toujours pas sûre...

Edit de Fladnag : ajout de la balise spoiler ;o)

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2011-04-30 14:21:01 

 Bande de Schtroumpfs!Détails
Comment pouvez-vous prétendre à écrire si vous ne lisez pas les Grands? Moi qui me disais, en taisant volontairement le nom de l'auteur, que j'exagérais, que j'allais me faire chambrer... Demain dès l'aube! Le célébrissime ! J'avais failli mettre la tristesse d'Olympio... C'est pour le coup qu'il pleure, le pauvre homme! Filez tous à la bibliothèque la plus proche, et je ne veux voir qu'une tête! Scrogneugneugooglegroumpfdegroumpf!
Narwa Roquen, alias Super Nanny

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2011-05-14 19:47:03 

 WA - Participation exercice n°93Détails
VIH... quand tu nous tiens! Une histoire de brume et de séparation, quand les enfants s'envolent hors de nos bras....

AU BOUT DU CONTE


Marie émerge lentement de la poche de brouillard. Un brouillard épais et poisseux, moite, qui colle à la peau, qui stagne sur le trottoir. Il fait encore presque nuit dans ce petit matin d’hiver. Marie est une silhouette menue. Son bonnet lacé sous le menton lui donne un air de lutin, de petit faune. Ses joues ont rougi sous la morsure retenue de l’hiver. Il ne fait plus vraiment froid à présent. Juste une sensation de froid. Ni intense ni cruelle. Une fraîcheur différente. Les feux tricolores lui disent bonjour en clignotant en ballet synchronisé pendant qu’elle chemine sous les guirlandes lumineuses qui lui rappellent que c’est bientôt Noël. Elle n’est plus aussi émerveillée que la première fois bien sûr. Le plaisir de la découverte s’est estompé. Mais cela reste beau et attendrissant. Marie ne croît plus au Père Noël. Qui croit en lui de nos jours ? Marie rêve en laissant ses chaussures l’emporter vers l’école. Elles connaissent tellement le chemin qu’elle pourrait presque fermer les yeux. Marie rêve en longeant des murailles grises et fermées. Marie rêve d’un pays lointain, d’un pays de Cocagne où elle pourrait vraiment exister. Où sa vie pourrait être écrite différemment. Loin d’ici. Marie a presque sept ans. Mais elle sait tant de choses qui la font pleurer quelquefois au fond de son lit quand elle a terminé ses prières et après que sa maman l’ait tendrement embrassée une dernière fois. Après qu’elle ait éteint la petite veilleuse.

Marie a presque sept ans. L’âge où les enfants perdent peu à peu les douces illusions de la prime enfance. Sept ans. Comme un miroir, il ne faut jamais briser le coeur d’un enfant de cet âge. Sept ans de malheur. L’école est loin alors Marie presse le pas. Elle n’a pas envie d’être en retard. De devoir s’expliquer avec les gorilles qui gardent l’entrée du centre scolaire sécurisé. Elle mourrait de honte et d’effroi. Dans sa classe, Billy un jour n’a plus reparu. Cela faisait la troisième fois qu’il était en retard. Des plus grands ont raconté de terribles histoires dans la cour de récréation, en jouant à leurs jeux violents sous le regard évaluateur des surveillants vêtus de treillis. Des histoires à vous flanquer la chair de poule. Marie a écouté en ouvrant ses grands yeux bleus. Elle s’est arrêtée au beau milieu de sa partie de marelle. Elle est restée à cloche-pied, vacillante, au centre d’une case, son caillou poussé bien plus loin que le paradis. Il faut croire que le paradis n’est pas pour Marie n’est-ce pas?

Sur le trottoir d’autres petites silhouettes se dépêchent pour rejoindre le havre de sécurité de l’école. L’aube fait la grasse matinée, prend son temps pour disperser le clair-obscur de cette matinée de décembre. Dimanche, c’est Noël. Pour Marie, cela résonne comme un moment de bonheur avec sa maman. Elles dresseront la table avec la belle nappe blanche, les assiettes en pseudo porcelaine, et les verres à pied achetés en solde. Marie s’occupera des toasts et des bougies qui sentent bon. Et des mille et un autres petits détails. Evidemment, Papa ne sera pas là. Il n’aura pas de permission forcément. Maman lui a expliqué. Pourquoi il n’était jamais présent lors des anniversaires et des autres fêtes. Elle le comprend d’autant plus facilement que les pères de plusieurs de ses amies sont également absents. Partis pour protéger les frontières. Au journal télé régulièrement, les images montrent des villages incendiés, des lourds véhicules chenillés et des soldats aux formes alourdies par leurs équipements. Ils ont plus l’air de machines humanoïdes que d’êtres humains mais c’est pour leur bien. De tels équipements sont nécessaires dans ces contrées hostiles et étranges, aux atmosphères suffocantes.

Marie a localisé sur une carte l’endroit où le régiment de son papa est stationné. Son petit doigt a suivi une ligne imaginaire qui relie sa ville à cette autre bourgade dans le sud, au-delà de la mer. Elle a cherché sur la toile des photos mais tout ce qu’elle a obtenu, c’est l’apparition d’un panneau rouge et blanc en plein milieu de l’écran indiquant « ACCES ILLEGAL ». Une ligne de petits caractères défilant au bas de la page avertissait des risques encourus en cas de violation de l’interdiction. En vertu des directives européennes sur la sécurité intérieure, a ânonné Marie. L’Europe. Alors cela doit être important. Elle a questionné sa maman sur le sujet.

« C’est une ville ennemie qui abritait des écoterroristes ! »

Marie sait ce qu’est un écoterroriste. C’est une notion basique, apprise au cours de sa première année élémentaire après la classe maternelle. Un horrible mot pour des horribles personnes qui veulent envahir son pays, piller ses richesses et imposer leurs lois barbares.

« Ils ne sont pas comme nous ! » leur a répété toute l’année l’institutrice, vêtue du treillis réglementaire.

Marie rêve donc en marchant vers son école. Les transports scolaires ont une nouvelle fois été suspendus à cause des restrictions énergétiques. Les cars sont cloués au dépôt et le métro souterrain est fermé. L’énergie électrique a sans doute été réquisitionnée pour des besoins prioritaires. Certainement militaires. Tout ce qui est militaire est par définition prioritaire.

Marie rêve d’avoir vraiment froid comme dans les histoires que lui raconte sa mère avant d’éteindre la veilleuse.

Entraînée par le torrent vagabond de ses pensées, elle se souvient de celle du bonhomme de neige. Celui que les enfants ne voulurent pas voir fondre quand l’hiver toucha à sa fin. Elle avait frémi lorsque les premiers rayons d’un nouveau soleil mordirent la tendre neige qui étincela avant de commencer de goutter tout doucement. Il fondait jour après jour et tous les efforts des enfants pour réparer les dégâts furent vains quand la neige vint à manquer. Elle avait retenu son souffle quand ils essayèrent de sauver le vieux bonhomme de neige qui ne pouvait pas bouger. La carotte à la place du nez, les morceaux de charbon à la place des yeux, la pipe plantée de guingois et le vieux chapeau informe vissé sur le sommet de sa tête toute ronde ne la firent plus sourire du tout. Cela l’avait au contraire rendue triste et attentive. Elle avait respiré quand l’oncle touché par le désespoir de ses neveux, les aida à placer le bonhomme de neige sur la plateforme arrière de sa fourgonnette. Elle s’était finalement endormie après qu’ils l’eurent déposé loin dans le nord, là où l’hiver ne s’endort jamais vraiment. Confusément, le sens de cette histoire l’avait remuée au plus profond d’elle-même. Il y avait des similitudes cachées qu’elle n'était pas parvenue à exprimer. Une leçon de vie qu’elle ne comprenait pas encore mais qui était bien là, derrière d’inoffensifs mots. Une vérité bien plus grave que sa maman avait gardée pour elle. Mais Marie s’était promis qu’elle la découvrirait quand elle serait plus grande.

Il y a forcément une raison pour qu’elle se souvienne de cette histoire précisément aujourd’hui. Ce n’est pas la neige. Il n’y a plus de neige. Alors quoi ? Marie fronce les sourcils, sa façon de se concentrer. Mais son attention est distraite quand, précédée par une mugissante sirène, une puissante voiture de police passe en trombe, sa lumière rouge stroboscopique balafrant les façades aveugles.

Marie perd le fil de ses pensées. L’école n’est plus très loin. A peine la voiture de police a-t-elle disparu que deux gros fourgons surgissent à leur tour, lancés à sa poursuite. Deux lourds hannetons, noirs et métalliques, noirs munis d’étroits hublots cadenassés derrière d’épais grillages. Des véhicules aux grosses roues, bardés d’antennes filaires et paraboliques avec de gros chiffres peints en blanc sur leurs flancs, gyrophares éteints. Cela pourrait être un attentat ou une scène de violence urbaine. Ou n’importe quoi d’autre. Le convoi semble se diriger vers le centre ville. C’est toujours la même histoire. Là-bas vivent les classes aisées qu’il faut défendre à tout prix. Ici, c’est la banlieue. Les choses n’ont pas la même valeur.

Puis la rue recouvre sa tranquillité dans le demi-jour naissant. Cela fait maintenant près d’une heure que Marie a quitté l’appartement où elle vit. Sa maman s’était levée bien avant elle pour lui disposer sur la table les ingrédients de son petit déjeuner avant de partir travailler. Marie avait rempli à moitié le bol d’un lait reconstitué. Elle avait ajouté ensuite de la poudre chocolatée qui s’était agglutinée en gros grumeaux à la surface du lait bouillant. Marie s’était employée à les atomiser à petits coups de cuillère jusqu’à ce que la boisson devienne onctueuse. Elle avait claqué la porte sur l’appartement désert quand l’heure de partir à l’école avait sonné. Marie a presque sept ans. A cet âge, il faut se débrouiller, surtout quand l’argent est compté. Ce n’est pas à cause des impôts. Ils sont réduits à leur plus simple expression de nos jours. Mais à cause de la cherté de tout le reste.

Un jour, sa maman lui avait raconté que sa propre mère lui avait confié que, de son temps, les choses étaient différentes. Il y avait des lois qui protégeaient les gens, surtout ceux qui n’étaient pas riches. Des lois protectrices. Des lois justes qui essayaient de répartir équitablement les richesses produites et réduire au mieux les inégalités. Des lois qui étaient faites pour tous. Les lois avaient perdu peu à peu du terrain. A présent, il n’y avait plus que le contrat. Il parait qu’il garantit plus efficacement la liberté.

« Où est grand-mère ? »

Marie connaît évidemment ce que signifie ce mot. Dans beaucoup d’histoires que lui raconte sa maman, les grands-parents jouent des rôles souvent importants. Elle avait quatre ans quand elle posa cette question. Sa maman avait souri tristement, en faisant un vague geste de la main.

« Elle vit dans une grande maison, calme et agréable où on s’occupe bien d’elle. Elle l’a bien mérité ! »

« On peut aller la voir ? »

« Il faut attendre un peu chérie ! Tu es trop petite. Le voyage est long et cher ! »

« Tu as des holos ? »

Marie avait découvert une femme pas si âgée que ça, qui souriait en fixant quelque chose qui se situait dans son dos. Sûrement celui qui tenait l'enregistreur, pensa Marie. C’était dans un parc. Il y avait des arbres et des pelouses. Cette femme ressemblait beaucoup à sa maman. Marie s’était rapprochée de la projection holographique. Des yeux rieurs et intelligents qui trahissaient une vivacité d’esprit singulière. Ce que Marie voyait ne correspondait pas à ce qu’elle imaginait en écoutant l’histoire du Petit Chaperon Rouge. Le visage qu’elle scrutait était bien trop jeune, bien trop lisse. Où étaient donc passées les rides ?

C’était encore un mystère.

« Marie, as-tu vu des personnes aussi vieilles que la grand-mère du conte dans les rues ? »

« Non ! » Sa réponse avait fusé. C'était une révélation. Marie n’en avait effectivement jamais croisé. NI en allant à l’école, ni en faisant les courses le samedi, ni dans les rues quand avec sa maman, elle léchait les vitres des boutiques du centre ville sans jamais y entrer. Les articles qu’elles contenaient n’avaient pas d’étiquettes. Quand le prix n’est pas affiché, cela veut simplement dire que c’est trop cher pour vous. Tout le monde sait ça. Les habitants des quartiers périphériques n’avaient pas les moyens.

Marie avait réfléchi. Elle n’avait jamais croisé une seule personne dont l’apparence était fidèle à sa représentation mentale de la vieillesse. Les vieilles personnes n’existaient donc que dans son imagination ?

« C’est un peu plus compliqué que ça chérie !

Sa mère l’avait doucement embrassée avant de continuer :

« Tu comprendras plus tard. Comme moi. Comme tout le monde. Ce n’est pas un secret mais pour les petits enfants si ! »

Puis elle avait ouvert le précieux livre de contes et Marie n’y avait plus pensé, toute accaparée par les aventures du Petit Poucet. Sa maman savait parfaitement raconter les histoires, insufflant vie aux personnages, modifiant la tessiture de sa voix pour passer de l’un à l’autre. Marie avait remonté le drap sous son menton en tremblant quand les pauvres parents s’étaient résolus, la mort dans l’âme, à perdre leurs enfants au fond de la forêt. Pauvre Petit Poucet! Elle s’endormit avant la fin de l’histoire et son rêve fut peuplé de cailloux blancs qui flottaient dans le ciel, matérialisant une route qui se perdait droit vers le sud. Elle entreprit de la suivre. Mais ce n’était qu’un rêve et quand elle se réveilla au matin, elle avait tout oublié. Marie est une rêveuse. Or le monde dans lequel elle vit n’est pas fait pour les rêveurs !

Je connais bien Marie. Je l’observe chaque fois qu’elle vient à pied à l’école. Elle grandit. Oh oui ! Elle devient une petite fille adorable. Elle a de grands yeux et son regard est tellement profond. Bien sûr, elle ne me voit pas. Comment le pourrait-elle? Si c’était en mon pouvoir, j’irais là où elle habite. Je monterais la garde au pied de son immeuble toute la nuit s’il le faut, pour empêcher les cauchemars d’effrayer son sommeil. Je jouerais le marchand de sable et de ma flûte, je tirerais les plus belles mélodies pour qu’elle s’endorme en paix. Je ne cherche pas à ce qu’elle me remarque. J’en serais désolé. Je préfère qu’elle ignore tout de moi. Mais je ne peux vivre loin d’elle.

Quand je la regarde, je peux deviner ce qu’elle ressent. Son humeur. Son état d’esprit. Je n’ai vu aucun bus scolaire ce matin. Elle ne va donc pas tarder. Ne vous méprenez pas. Je serais capable de mourir pour elle. D’une certaine façon j’aurais dû mourir pour elle. Mais la Mort n’a pas voulu de moi là-bas au-delà du Mur. En revanche, elle a pris tout ce qui était en dessous de ma taille. Tout. Un engin artisanal a explosé sous moi. Les docteurs m’ont rafistolé du mieux qu’ils pouvaient. J’ai survécu pour découvrir qu’aucune prothèse n’était possible. La Mort a été compatissante. Elle a permis que je conserve mes souvenirs et mes yeux. Ensemble, cela ne sert à rien. C’est sans doute une forme d’humour. Je ne l’ai toujours pas comprise. J’ai signé tous les papiers. Grâce à eux, je ne constitue pas une charge pour Marthe. Aucune chance que les huissiers saisissent son maigre salaire pour payer les soins médicaux et tout le reste.

Marthe a compris bien sûr. Elle a pleuré mais elle s’est résignée. Pour Marie. Pour elle un peu aussi. Quand elle a signé au bas de la dernière feuille, c’est comme si elle avait tiré un trait sur notre vie d’avant. Quand nous nous aimions. Quand nous étions heureux. Car nous avons été heureux, ça oui ! Jusqu’à ce que mon numéro sorte au tirage mensuel de la loterie militaire. Comme je n’étais pas assez riche pour payer le droit de refuser, je suis parti au front. Signer ces foutus papiers, c’était jurer de ne plus se revoir, ne plus correspondre, disparaître à jamais de la vie de l’autre. C’était ça le deal ! Foutu contrat ! Je suis certain que si j’avais eu du fric, j’aurais pu me payer les services d’un avocat qui l’aurait mieux négocié. Mais j’ai eu droit à un formulaire standard aux clauses pré-remplies à mon désavantage, avalisé par la machine installée dans le greffe du tribunal.

J’aurais pu aussi en finir pour de bon. Cela aurait été facile. Quelques pilules à mélanger et à avaler. Mais il y avait Marie. Je n’ai pas trouvé la force de tout lâcher. Aujourd’hui ma vie est un cul-de-sac et je suis las et je me sens si vieux. Bien avant l’âge. Il me reste plus d’un demi-siècle à attendre la Maison du Déclin. Marie aura sept ans à la fin de la semaine. Le jour de Noël. N’est-ce pas merveilleux ? Sept ans, un âge fragile et précieux. Sept ans. Il y a soixante dix ans, j’avais aussi sept ans. Elle va passer sur l’autre trottoir de la rue que bordent les grilles de la résidence pour invalides de guerre. De mon lit, en tournant un peu la tête, je la verrai. La Mort m’a laissé la vue et celle-ci est devenue perçante. Le jour se lève enfin. Une voiture de police traverse mon champ de vision à vive allure, suivie bientôt par deux véhicules de l’avant blindé des troupes de défense de l’intérieur. La voilà, toute de rouge vêtue, son capuchon rabattu sur sa tête. On dirait le petit Chaperon Rouge. Marthe m’avait écrit que Marie adorait les contes. Perrault. Andersen. Et tous les autres. Moi, je suis le pauvre soldat de plomb qui regarde passer sa petite demoiselle.

Je ne vois jamais son visage alors je suis obligé de l’imaginer à partir de la dernière photo que Marthe m’a envoyée. Au début c’était frustrant. A présent, je le fais sans effort. Des traits affermis, débarrassés de la mollesse enfantine, plus précis dans leurs contours, avec cette ébauche de féminité encore endormie qui transparaît quand la lumière se fait plus vive, rasante. C’est ma fille. C’est Marie. Elle résume ce que je fus. Car elle n’est rien dans ce que je suis devenu. Elle va bientôt disparaître au coin de la rue. Chaque fois c’est douloureux.

Marie, ne grandis pas trop vite ma chérie ! La vie est longue et cruelle pour ceux de notre condition. Tant que tu écouteras ta maman, je vivrai dans les contes qu’elle te lira. Le jour viendra où tu cesseras d’y croire et tu te détourneras de ces histoires, devenue insensible à leur douce magie. Ce jour-là, vois-tu ma chérie, je serai définitivement mort.


M

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z653z  Ecrire à z653z

2011-05-16 14:25:01 

 LundiDétails
Alors, cette fois-ci, j'ai du mal à saisir.
Le narrateur aurait 77 ans ("Il y a soixante dix ans, j’avais aussi sept ans.") et vu son âge, il pourrait être le grand-père de Marie mais la plupart des phrases semblent indiquer qu'il est son père. Il y a aussi l'histoire des personnes âgées qu'on ne voit jamais (ou alors de manière holographique et ils ne paraissent pas leur âge) et que l'histoire se situe dans le futur (où justement tout est possible).
Ai-je loupé un indice ?
Et il y a l'histoire de Billy qui disparaît.

J'attends les clés :)

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2011-05-16 20:58:48 

 Maedhros 1 - Z653Z 0 (joke!)Détails
Oui, il faut bien reconnaître que j'ai été très minimaliste dans la description du background qui sous-tend cette histoire. C'est un peu la raison pour laquelle j'ai employé le terme de "brume".

C'est un paysage assez mystérieux dont on sait qu'il s'étend bien plus loin que ce que l'on peut en voir. Mais les détails sont estompés, dissimulés.

Alors bien entendu, peut-être ai-je réussi au-delà de mes espérances, c'est à dire que j'ai échoué à laisser suffisamment de lumière dans le fond du couloir.

Si vous lisez ce qui suit, vous aurez des clés, enfin quelques clés :

 - Alors oui, le papa a bien 77 ans. Dans ce futur guère appétissant, les couples ne peuvent avoir des enfants qu'à partir de 70 ans.

- Physiquement, les humains ont repoussé les injures de la vieillesse, ce qui explique le fait qu'il n'y a pas de "vieillards" au sens commun du terme. Cependant, même repoussé au maximum, la mort les fauche autour des 140/145 ans. A partir de 135 ans, l'âge se venge et rattrape le temps perdu : les esprits et les corps sont atteints d'une dégénérescence incontrôlable. Incapables de travailler, grabataires, ils sont envoyés dans des Maisons du Déclin, surchargées et indignes (surtout pour ceux qui n'ont pas les moyens).

- En conséquence, les "enfants" (on ne précise pas s'il s'agit d'enfants naturels ou procréés de façon artificielle) ne peuvent pas connaître leurs grands-parents.

Ne me demande pas pourquoi, c'est un parti-pris, un postulat de départ. En plus, la narration colle d'abord plus ou moins à la petite fille. Le monde est vu à partir de sa fenêtre et elle ne comprend pas tout de ce qui l'entoure.

Enfin, pour Billy, j'ai juste esquissé sa disparition (cela laisse un pan de mystère). Peut-être ayant accumulé le nombre de retards maximum, il aura été frappé d'une sanction d'exclusion définitive, édulcorée par ses camarades (c'est un monde dur, en guerre!) Peut-être que la sanction est encore plus lourde (travaux forcés ou pire!). 



Voilà.

Ce fut un texte bizarre à écrire. J'ai été pris au bout de quelques lignes par cette atmosphère brumeuse et je n'ai pas pu m'en débarrasser !


M

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2011-05-23 22:31:52 

 WA n°93, participationDétails
QUATRE-VINGT QUATORZE



On ne sait jamais de quoi demain sera fait, pour intelligent qu’on soit. On va, pressé par la contingence de choses que l’on croit essentielles. Et le hasard, qu’il soit Chance ou Malédiction, se charge de brouiller les cartes. Prenez Augustin Dulac, par exemple. Il peste contre le sort en redescendant l’escalier de ciment qui mène à la Mairie de Sorgueville, ce 2 août 2069, parce que les employées ont refusé de lui ouvrir. C’est un Monsieur, c’est un Ascète, et il doit tenir demain une conférence pour promouvoir son dernier e-book « Atteindre la sérénité ».
Il peste parce qu’il est venu chercher les clés de la salle des fêtes, et qu’elles sont chez un obscur agent de service, un dénommé Poupou, à quelques kilomètres delà. Il est cinq heures du soir, c’est vendredi, et le ciel s’obscurcit de minute en minute. Déjà un grondement lointain a troublé le conférencier, qui vit dans l’Immense Capitale sous une bulle géante où le climat est toujours contrôlé. Les orages, la neige, c’est le lot des contrées hostiles et sauvages, là où vivent des bouseux incultes qui ne méritent pas l’honneur qu’il leur fait de venir les initier à la Sérénité. Mais il doit vendre. Son éditeur a bien insisté.
Qu’est-ce que cette femme rondouillarde et lunettée lui a dit, déjà ? A gauche après la nationale ? A droite ? Les premières gouttes s’écrasent sur le cockpit, aussitôt balayées par l’essuie-glace automatique. Pour le prix, ils auraient pu en mettre sur les côtés, on n’y voit rien... Il descend la vitre. Elle a dit « une maison aux volets verts ». Dulac jette un regard circulaire et ricane. Stupide créature ! Ils sont bleus, les volets ! C’est une maison, ça ? Plus jamais, plus jamais ! Il se jure que c’est la dernière fois qu’il s’aventure dans les provinces lointaines, cette paysannerie rétive sur laquelle glisse le Progrès comme l’eau sous le balai de l’essuie-glace... Plutôt aller discourir devant les Colonies Lunaires, même s’il souffre terriblement du mal de l’espace...
Il frappe à l’espèce de panneau déglingué qui ressemble à une porte. La pluie redouble de violence. Un homme âgé, en bleu de travail, vient lui ouvrir.
« Monsieur... Poupou ? »
Un coup de tonnerre tonitruant couvre la réponse du vieillard. En se retournant machinalement vers son véhicule, il réalise que des trombes d’eau s’abattent en un rideau opaque sur son aéroglisseur synchrotonique à énergie solaire, ce petit bijou flambant neuf qui lui a coûté le prix de deux week-ends sur Mars ! Et il a laissé la vitre ouverte !
« Je reviens ! »
La carte ne répond pas à ses pressions frénétiques. Une histoire de champ magnétique, sûrement, il regrette maintenant de ne pas avoir lu plus attentivement les 427 pages de la notice. Il essaie de forcer les portières, de tirer sur la vitre pour la remonter. Le verrouillage est total, et la pluie s’engouffre par paquets sur le siège en daim bleu et le tableau de bord en acacia massif. Il tente de descendre la vitre, de passer le bras pour insérer la carte, ça pourrait tout débloquer... Peine perdue. La vitre reste coincée à mi-course. En désespoir de cause il ôte sa veste, la déploie à cheval sur le toit pour protéger un peu le poste de pilotage. Mais une rafale de vent la jette à terre. Il est trempé, l’eau lui dégouline sur le front et dans le dos, et ses bottines sur mesure deviennent plus lourdes à chacun de ses trépignements.
« Rentrez ! », lui crie le vieux. « C’est la Saint Julien ! Ca va durer au moins deux heures ! »
Il court se mettre à l’abri.
« C’est comme ça, ici », reprend le vieil homme en s’agenouillant à grand peine pour allumer la cheminée. « A la saint Julien, au moins deux heures dure le grain ! Vous êtes tout mouillé ! Je vais vous chercher de quoi vous changer. »
Augustin Dulac contemple d’un oeil inquiet la terrible flambée qui s’embrase dans l’âtre. A sa connaissance, seules les peuplades primitives usent encore de ce moyen de chauffage. La pièce est mal éclairée ; son regard scrute les murs blancs et nus, le sol dallé de rouge sombre, deux fauteuils à moitié éventrés près du feu, et devine à l’arrière-plan une table sans doute en bois avec quatre chaises autour. L’homme est-il un Ascète ? Ce n’est pas possible. Un Ascète vit pieds nus, au ras du sol, sur d’épais tapis et de nobles coussins brodés de mandalas. Un Ascète ne porte pas ces horribles bottes en caoutchouc qui crissent sur le sol à chaque pas – comment prendre la posture du lotus avec ces chaussants grossiers ?



Vêtu d’une chemise en flanelle à gros carreaux et d’un pantalon de toile abondamment reprisé, chaussé d’étranges pantoufles à la propreté douteuse et trois fois trop grandes pour lui, Augustin Dulac, terré dans un fauteuil, goûte avec réticence le vin de noix qui lui a été offert – qui sait quelles cochonneries infâmes il peut y avoir dedans ! Mais quand il regarde par la fenêtre, il n’a aucune envie de se retrouver dehors. C’est une vraie tempête comme il en a vu dans les films, vent violent, pluie battante, tonnerre qui fait trembler les murs, lumière crue d’éclairs incessants, arbres qui gémissent, sifflements sous la porte et fracas de branches heurtant le toit.
« Je... Je suis Augustin Dulac ; je suis venu chercher les clefs », soupire Dulac dans un sursaut d’espoir en l’avenir.
- « Ah », fait son hôte en se levant difficilement du fauteuil en vis-à-vis, « la Mélane déborde. On ferait mieux de monter à l’étage. »
Augustin Dulac sursaute en suivant le regard tranquille du vieillard. Un flot de boue noirâtre s’infiltre sous la porte, avançant inexorablement vers le centre de la pièce, marée sordide et envahissante que rien ne pourra arrêter. Parasites, bactéries, toxines, peut-être même sangsues, serpents, scorpions... Tous les phantasmes terrifiants de ses livres d’écolier ressurgissent en grimaçant dans sa mémoire troublée. Il refuse de mourir dans ce trou perdu, pas ici, pas maintenant... Il suit le vieil homme sur l’échelle de meunier dont le haut se perd dans l’obscurité. Frissonnant d’impatience, il se retient pour ne pas bousculer le maître des lieux qui gravit péniblement les marches une à une. Il fait noir là-haut et Augustin Dulac a un haut le corps quand une chose étrange et vivante lui passe entre les jambes en miaulant de rage...
« Attendez, j’allume... Il n’y a pas l’électricité, ici, c’est le grenier... Mes enfants y couchaient, avant... De toute façon quand il y a un orage, ça coupe. Je suis en train de bricoler un groupe électrogène, mais c’est pas fini, je voudrais utiliser l’énergie de la Mélane, mais elle est irrégulière... »
Une allumette flamboie et deux lampes s’éclairent sur la table – lampe à huile ? à pétrole ? Augustin Dulac frémit d’horreur : un animal – un chat ? c’est un chat, non ? – est perché sur l’armoire, un autre sur le bras d’un fauteuil, un troisième sur un tas de cartons...
« Je vous présente mes chattes : Pépette, Farine, Guenille... et Moka... Où es-tu, Moka ? Viens là, ma belle...Je m’en suis douté dès ce matin. Quand elles s’installent en haut, c’est qu’on va être inondé. Remarquez, depuis le temps, j’ai l’habitude. Asseyez-vous, asseyez-vous... Je vais nous préparer à dîner, qu’est-ce que vous en pensez ? »
Augustin Dulac évite de penser. Il entame une respiration carrée ( inspir quatre temps, rétention quatre temps, expir quatre temps, rétention quatre temps) pour surmonter l’angoisse qu’il sent monter en lui aussi sûrement que l’eau au rez de chaussée. Les quatre créatures qui le braquent impudemment de leurs yeux jaunes ou verts le mettent mal à l’aise. Est-ce qu’ils n’ont pas dit aux infos que cette engeance avait disparu de la surface de la terre ? Qu’on les avait exterminés, ces monstres allergisants et cruels qui arrachaient les yeux des humains et étouffaient les nourrissons dans leurs berceaux ?
Un Esprit Supérieur ne se laisse jamais troubler bien longtemps. Augustin Dulac est parvenu à la Sérénité, il est le Maître de sa vie, les émotions du commun des mortels n’ont aucune prise sur lui. Il mène une vie exemplaire, ne se nourrit que de riz et de compléments alimentaires, il vit été comme hiver dans une atmosphère purifiée, ionisée, aseptisée, à la température constante de 22°. Il ne commet aucun excès, ne cède à aucune addiction, médite six heures par jour et écrit tous les après-midi. Son esprit est sain, son corps est sain, il ne fait jamais de cauchemar. Il ne rêve jamais. Son loft en plein centre de la Capitale est meublé avec austérité, et même avec un certain dépouillement. Le futon est certifié AP (Authentique et Pur). Il ne possède qu’une seule armoire où sont rangés les costumes juste sortis du pressing. Il est livré trois fois par jour par un food-maker labellisé AP. C’est un peu plus cher, mais la pureté est à ce prix.
Visualiser un très grand arc en ciel, ouvrir le chakra supérieur, celui de l’immatériel, du Pur Esprit. Par précaution, tout de même, visualiser les dorje protecteurs en une sphère compacte autour de lui. Arrière, Esprits du Mal, je suis et resterai dans la pureté, je suis dans l’Esprit Absolu et l’Esprit Absolu est en moi...
On frappe au carreau. Des petits coups secs, répétés, insistants.
« Ah, te voilà, mon Kao ! »
Le vieux ouvre la petite fenêtre, et dans un tourbillon de feuilles mouillées un monstre noir bat des ailes avant de se poser sur la table, à moins d’un mètre d’Augustin Dulac, qui instinctivement lève le bras pour protéger son visage.
« Ne craignez rien ! C’est Kao, il est parfaitement apprivoisé !
- C’est un... C’est...
- Un corbeau, oui ! Ils sont tellement intelligents ! Oh... pardon, si vous pouviez vous déplacer un peu... »
L’homme va chercher une pile de petites bassines en plastique et les pose au sol, à des endroits qu’il choisit en regardant vers le haut. Il s’est à peine relevé que d’énormes gouttes d’eau s’écrasent dedans, avec des « ploc » sinistres.
« Il y a des gouttières, la maison est vieille. Il faudrait que j’aille changer quelques tuiles... mais il a beaucoup plu en juillet, ça glissait... Et je n’ai plus vingt ans...
- Vous avez quel âge ? », demande Dulac pour être poli.
- Je suis de 94.
- 94 ? », répète machinalement l’invité involontaire. 94, ça lui dit quelque chose. Il lui semble bien que son grand-père était né cette année-là. Est ou était, il ne sait pas. Lui et son père sont (étaient ?) fâchés. Il n’a pas de souvenir précis à part le rictus méprisant de son père quand il disait : « un pauvre type, c’est tout. »
- « Oui », continue le vieux, « vous savez, l’année où Mandela a été élu président ! Bon, c’est aussi l’année où Kasparov s’est fait battre par un ordinateur, mais ça, c’est moins bien... »
Augustin Dulac regarde l’homme d’un air stupide, et l’autre reprend patiemment :
« Oui, c’était il y a longtemps, et on ne vous apprend plus l’Histoire, hein ? A quoi bon, puisque tout est stocké sur le net... Nous, on nous farcissait la tête. Vous, on vous apprend juste à communiquer... Oh, ça vous rend sûrement plus intelligents, je dis pas... »
Dulac se rengorge. Dehors la nuit est tombée, mais la tempête ne faiblit pas. Il ne va pas passer la nuit là ! Il faut qu’il trouve un taxi... Fébrilement, il cherche son téléphone dans la poche de sa veste mouillée.
« Y a pas trop de réseau, ici » murmure le vieux qui a sorti des aliments – probablement – d’une toute petite armoire réfrigérée et s’affaire, en lui tournant le dos, sur un plan de travail posé contre le mur.
« C’est un satellitaire », répond Dulac machinalement. C’est une évidence, mais ici, il a l’impression d’avoir voyagé à l’envers dans le temps. Il pianote tant et plus, essaie tous les serveurs, mais la réponse est invariable : « pas de connexion ».
« Vous aimez l’ail ? »
Dulac hausse les épaules. C’est une plante médicinale, sans doute, indispensable dans cet environnement pollué. Va pour l’ail.
La poêle à frire grésille sur une flamme bleue.
« Mais... sans électricité ?
- Ici on trouve encore des bouteilles de gaz, pour les vieux comme moi. Pour la monter à l’étage c’est toute une histoire, ça pèse un âne mort... »
Dulac a l’impression d’être en terre étrangère et de ne pas parler la langue.
« Et voilà ! Omelette aux escargots, salade de pissenlits, et en dessert les dernières figues du jardin. Avant, on les cueillait en septembre, même octobre, en automne...Mais les saisons se sont décalées...
- L’automne, c’est le 21 août, non ?
- Maintenant ! », s’esclaffe le cuisinier. « Mais de mon temps... et de tous les temps, d’ailleurs, c’était le 21 septembre ! Non, non, je radote pas... Bon, c’est pas grave, allez... Mangez tant que c’est chaud ! »
Dulac goûte prudemment un morceau de cette étrange substance qui emplit l’assiette ébréchée posée devant lui. C’est étrange. La texture est un mélange de ferme, de moelleux et de croquant. Le goût est... épicé, parfumé, innovant. Son estomac gargouille. Il a faim. Il risque peut-être sa vie, mais c’est une aventure que son karma lui propose, et les dorje qu’il a installés en pensée autour de lui sauront le protéger. Ce que le vieil homme appelle figues, ce sont des choses molles, recouvertes d’une pellicule sombre qu’il faut enlever. Le contenu est rouge, sucré, fondant, parsemé de petits grains... et la saveur est extraordinaire !
« Ah ! Vous voyez bien ! On peut vivre bien même en province... Pas de la même manière que dans la Capitale, pour sûr, mais quand on a réchappé de la Grande Guerre... On sait apprécier ce qu’on a...
- La Grande Guerre ?
- Ben si, quand même ! Non ? Même ça, on ne vous en a pas parlé ? »
Le vieux secoue la tête d’un air désolé.
« Ca s’est fini en 20, vous êtes né en quoi ? 39 ? 40 ? »
Augustin Dulac boit à petites gorgées son verre de vin. On lui a toujours présenté ce breuvage comme la source de tous les maux, comme un poison perfide et redoutable. Mais ce soir, dans la quiétude temporaire de ce grenier, au coeur de l’orage violent qui maltraite le monde de l’autre côté des murs, il se sent fort.
« Racontez-moi. »
L’homme lui reverse une rasade.
« Ca a commencé en 18. Quand j’ai quitté l’école, en 12, il n’y avait pas de travail. Alors je me suis engagé dans l’armée, et comme j’étais malin, je suis devenu pilote. Forcément, en cas de guerre, on est les premiers à y aller, et puis on peut pas dire non.
- Mais c’était quoi, cette guerre ?
- A nous on nous a dit que les Chintoks voulaient nous envahir – déjà qu’on n’avait plus de travail à cause d’eux... Mais après on a su qu’on leur avait raconté la même chose... C’était toujours comme ça, les politiques nous faisaient marcher sur la tête, tout ce qu’ils voulaient c’était s’en mettre plein les poches, sur notre dos de préférence. C’était avant que les Xirtziens arrivent... Bref, on volait sur des engins à quinze millions pièce, de vrais bijoux...J’avais serré la main du Président avant de décoller, j’étais capitaine, j’étais jeune, et je me suis bien fait avoir, comme tout le monde... En fait, c’était des conneries. On était grassement payé pour dézinguer des mecs qui étaient payés aussi pour nous descendre. On aurait tous fait des économies si on s’était juste assis pour discuter. Avec la différence on aurait pu sauver l’Afrique. Mais les Chintoks et nous on avait ça en commun, l’Afrique on en avait rien à battre !
Oh oh... »
Augustin Dulac a juste rentré la tête dans les épaules quand un fracas épouvantable a fait trembler le toit. Il est en pleine Sérénité, le vin est une boisson magique dont les politiques ont voulu priver l’humanité pour retarder leur accession à l’Eveil... Tout ça c’est la faute des Chintoks... Il ne comprend pas pourquoi le vieux a tout à coup l’air inquiet.
« Ca, c’est le frêne. La poutre tiendra pas. Restez là. »
L’homme va fouiller dans le fond du grenier et revient en traînant à grand bruit une longue tige de métal qui se termine par une plaque carrée. Les chats sont partis se cacher, c’est déjà ça. Le corbeau, imperturbable, picore les miettes dans l’assiette de son maître.
« Pourriez m’aider ? C’est lourd !», halète celui-ci en commençant à verticaliser l’étrange objet. « Là... On le cale sous la poutre... Tenez bon, là, bien droit... Je le bloque... Ca y est. Toujours avoir un étai sous la main, c’est la première règle de la sagesse. »
Il se met à rire, tandis que ses paroles font écho dans la mémoire embrumée d’Augustin Dulac, Ascète.
« La première règle de la sagesse... Mais non, ce n’est pas ça... La Première Règle... Je la connais, bien sûr, je les connais toutes, je... »
Un autre choc violent sur le toit vient interrompre ses pensées confuses, tandis que le vieillard reprend :
« Juste à temps, hein ! Eh bien, je ne manquerai pas de bois pour l’hiver. Faites pas cette tête, on devrait s’en sortir... Vous êtes pas d’ici, pas vrai ? Vous faites quoi dans la vie ?
- Euh... », hésite le conférencier qui ne s’attendait pas à être questionné. « J’habite la Capitale. Je suis Ascète.
- C’est quoi, ça ?
- Nous... nous sommes une ... un... Nous méditons et nous enseignons la Voie de la Sérénité.
- Ah... Et on vous paie, pour ça ?
- Naturellement ! La Sérénité a un prix !
- Ah bon... Donc vous appauvrissez les gens.
- Mais non, pourquoi ?
- Forcément ! Si vous vous enrichissez, vous appauvrissez les autres, c’est mathématique. Soit vous créez un besoin, et vous avez un nouveau marché, et vous appauvrissez vos clients, soit vous détournez le marché d’un concurrent sur un besoin existant, et vous appauvrissez le concurrent. Aucune société ne peut fonctionner autrement, à moins de vivre sur le troc. Non ?
- Mais je... Je suis un Ascète, je vis dans le Dépouillement... »
L’éclat de rire du vieux a quelque chose de ravageur. Il semble à Augustin Dulac qu’une étincelle fugace s’est allumée dans ses yeux, mais il est distrait par le retour des quatre chats qui sont venus s’asseoir sur le bout de la table, à sa droite, côte à côte, et qui le fixent de leurs yeux impénétrables.
« C’est la vie », soupire l’homme en remplissant les verres. « Même les Xirtziens auront du mal à changer ça... Vous avez déjà vu mourir un homme ? »
L’Ascète avale une grande gorgée de vin.
« Non... Mais la mort n’est qu’un passage, et quand on est préparé...
- Je parle pas de voir un homme mort. Ca choque toujours, c’est répugnant, mais on n’y peut rien. Non, je parle du gars qui est dans tes bras et qui s’en va... »
Augustin Dulac a toujours été le premier dans sa classe de dialectique. Il a eu 100/100 à l’examen final. Mais il est extrêmement fatigué. Et il reste sec.
« Au début, la Guerre, c’était marrant », continue le vieil homme d’une voix profonde. « On larguait, on criait de joie quand on avait fait mouche. Fallait échapper aux missiles et aux chasseurs, mais c’était comme un jeu vidéo grandeur nature... Comme la fête foraine, tu mets dans le mille et tu gagnes un nounours... Et puis un jour ils m’ont canardé, je me suis éjecté. Mon pote Manu s’est posé en catastrophe pour me récupérer, et c’est lui qui s’est fait tuer. Il me regardait en souriant, il me disait :
« T’as toujours eu une veine de cocu, mon salaud !
- Manu, attends, je te ramène, dans une heure t’es à l’hosto, tu vas te faire toutes les infirmières... »
Son sourire s’est crispé dans la douleur. Il voulait faire le brave mais ses yeux crevaient de trouille. Et puis il s’est arrêté. Arrêté de tout. De parler, de sourire, de respirer. Ce moment-là, tu y crois pas. Ca n’a pas de sens. Une seconde avant, une seconde après, et la différence c’est que ton copain s’est arrêté de vieillir. J’ai hurlé. J’ai pleuré. J’ai dégueulé. Autour ça sifflait de partout, et j’en avais rien à foutre. J’ai réussi à ramener son corps. Le Commandant a dit que c’était bien pour sa veuve. J’ai pensé qu’il me prenait pour un con. »
Augustin Dulac a l’impression d’entendre le bruit d’une fusillade. Dans les yeux du vieux il voit des avions qui décollent, des militaires qui hissent un drapeau, une femme qui pleure avec un enfant dans ses bras. Il a sûrement développé son empathie, ça lui servira pour décrocher son Troisième Degré... La bouche pâteuse, il marmonne :
« Il n’y aura plus jamais de guerre. Les Xirtziens l’ont promis.
- Ouais. Ils sont venus pour ça, pour sauver l’humanité. Mais tu vois, mon gars, je suis pas sûr qu’ils aient encore tout compris. Et je suis pas sûr que ce soit une bonne chose... Tiens, regarde, le jour se lève... Qu’est-ce qu’il fait froid ! », ajoute l’homme en se frottant les bras.
Sans réfléchir, Augustin Dulac ôte la grosse chemise en flanelle et en recouvre les épaules du vieux. Au même moment, les quatre chats se couchent et ferment les yeux. Le corbeau s’envole vers un coin sombre.
« Je suis sûr que ton engin va démarrer, maintenant. L’eau a dû se retirer. Tu devrais essayer. »
Comme dans un rêve, l’Ascète prend ses vêtements secs sous son bras et descend l’escalier. Le rez de chaussée n’est plus qu’humide. Dehors, il fait grand jour. Le glisseur clignote à l’appel de la carte. La portière s’ouvre. Le moteur démarre. Il va droit devant lui, se demandant comment il va se repérer pour aller... où, déjà ? Il se retrouve devant la salle des fêtes, sans avoir compris comment. Un homme encore jeune, le visage poupin et presque chauve, lui fait de grands signes.
« Monsieur Dulac ! Je suis Poupou, l’agent de la Mairie ! J’ai vos clefs ! Désolé pour hier soir, je...
- Vous êtes qui ? »
Le ciel est clair et le soleil brille, mais c’est dans la tête de Dulac que l’orage se déchaîne. Il arrache les clefs de la main de l’homme et fait rugir le moteur. Demi-tour, la nationale, à droite, et... Devant lui s’étend une vaste prairie, avec en son centre un grand frêne, droit et solitaire. Demi tour, il prend l’autre route, et trouve une maison aux volets verts. Il s’arrêt devant la grille peinte en noir. Sur la boîte aux lettres, il lit le nom de l’occupant « Rémi Poulenc. »
Les mains tremblantes, il éteint le moteur. Devant lui, sur la route, il voit un chat noir qui marche paisiblement, la queue dressée. L’animal s’arrête, se retourne, puis disparaît dans un fourré.
Augustin Dulac va annuler sa conférence. Ca, il en est sûr.
Narwa Roquen,dans les cerises

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z653z  Ecrire à z653z

2011-05-24 13:55:23 

 Et le GPS ?Détails
C'est amusant quand on lit un auteur depuis plusieurs histoires, on se demande quand vont arriver les éléments récurrents (chat et/ou cheval, la plupart du temps). Il y a un petit côté rassurant que j'ai ressenti à l'arrivée au grenier.

En 1994, c'étaient des parties de blitz que Kasparov a perdues. En même temps, c'était le début de la "supériorité" des machines.

"il a l’impression d’avoir voyagé à l’envers dans le temps".
Parce qu'on peut voyager dans le temps dans l'autre sens en 2069 ?

C'est fréquent que 4 chats s'assoient au même endroit pour former un groupe ?

J'avais presque oublié le coup du tonnerre qui empêche Augustin d'avoir la confirmation d'avoir la bonne personne en face de lui. De toutes façons, ça n'avait plus grande importance par la suite.

J'ai un moment cru que le vieux était son grand-père.

Sinon l'histoire est captivante, un peu comme on écoute les histoires des aïeux qui nous enrichissent.

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2011-05-25 21:13:29 

 La direction de l'A7Détails
Ce thème aura résonné curieusement autant pour toi que pour moi. Mon texte était lunaire et brumeux, le tien est également hanté et nostalgique. Alors, c’est ça l’avenir qui nous attend après la grande et ultime guerre.

Le titre est un clin d’oeil au thème de l’exercice. Il y a eu 93, tu apportes 94. Moi, de l’année 1994 je retiens les lauriers de Pulp Fiction et de la liste de Schindler et les disparitions de Senna et de Nixon et l’ouverture du tunnel sous la Manche.

Deux mondes coexistent : un monde de lumière et un monde réel. Le monde d’au-dessus (évolution +1) et le monde d’en-dessous (niveau 0). Le monde des lumières avec son intelligentsia fédérée autour des valeurs spirituelles (merci Malraux) tellement obnubilé par sa réussite qu’il en a oublié l’essentiel, comme toutes les aristocraties ou les xxxxcraties issues des sociétés précédentes, protégées des autres par des barrières visibles ou invisibles et sûres de leur légitimité. Après elles, le déluge... Justement l’orage devient le pont naturel entre les deux.

Ce vieil homme fait-il partie de la trajectoire spirituelle de l’ascète ? Il lui fait découvrir, grâce aux plaisirs simples oubliés, une dimension supplémentaire, où il devient sensible à d’autres sensations, d’autres émotions, d’autres perspectives... Il le rend humain, et c’est bien là le thème qu’il fallait illustrer.

La pluie est peut-être symbolique, comme pour laver son corps et son esprit, les préparer à recevoir d’autres informations. Est-ce le 3ème degré tant attendu ? Mais cela ne cadre pas avec le background que tu as esquissé, sauf à imaginer qu’il y a une élévation derrière l’élévation !

En tout cas, l’histoire est habilement menée, ménageant le suspense jusque dans les dernières lignes. Mention spéciale pour les souvenirs de guerre qui font vrai (l’exploitation des peuples est bien vue !). La juxtaposition des besoins bassement matériels et des aspirations spirituelles de l’ascète est savoureuse.

Au rayon des bricoles, j’aurais écrit « fantasmes » au lieu de « phantasmes » et « chinetoques » au lieu de « Chintoks » mais ce dernier cas se discute !


M

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2011-05-25 22:46:11 

 Commentaire Maedhros, exercice n°93Détails
L’hiver, la brume, la solitude. On s’accroche à un espoir de printemps en sachant qu’un autre hiver viendra. Dans cette histoire mélancolique, tous tes personnages sont seuls. Seule, la petite fille qui a sûrement la meilleure place mais qui sent confusément qu’elle est aux portes de l’enfer. Seule, la mère courageuse et résignée (Marthe, celle qui travaille et se dévoue sans aucun bénéfice). Seul, le père-pélican sacrificiel, pris au piège de sa lucidité. Autour, un monde futuriste militaire, élitiste, inégalitaire, inhumain. C’est pas gai...
Ca m’évoque ces vers de Rostand :
« Dans ce trajet si court de la branche à la terre
Comme elles savent mettre une beauté dernière
Et malgré leur terreur de pourrir sur le sol
Veulent que cette chute ait la grâce d’un vol... »



Bricoles :
- Marie ne croît plus : croit
- VIRGULES : avant « n’est-ce pas », « permission, forcément », « journal télé, régulièrement », « l’oncle, touché par », avant « chérie » (2 fois), et « ma chérie » (1 fois )
- Elle a cherché sur la toile des photos : elle a cherché des photos sur la toile
- D’inoffensifs mots : des mots inoffensifs
- Deux lourds hannetons, noirs et métalliques, noirs munis d’étroits hublots : le 2° « noir » est-il une faute de frappe ?
- Pour lui disposer sur la table : le « lui » est inutile


La pauvreté de tes personnages est discrète. Elle les condamne sans appel au malheur, mais elle est pudiquement noyée dans la brume des regrets. Pas de révolte, pas de hurlement. Ici on meurt en silence, sans espoir à transmettre.
Il est très difficile d’écrire un texte en mode mineur. La plupart du temps, les lecteurs passent à côté, assoiffés qu’ils sont d’émotions distrayantes et de poudre aux yeux. Je trouve que tu t’en sors très bien pour décrire l’horrible avec des pattes de velours, aidé en cela par un background solide comme un roc. J’ai juste été glacée par l’intro.
Dis, Maedhros, raconte-nous encore une histoire...
Narwa Roquen,toujours dans les cerises

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2011-05-25 22:51:16 

 Pour une fois...Détails
... que je sème des petits cailloux, comme Maedhros, personne ne les voit! Personne n'a lu "Procrastination", de Pratchett? Ou "De bons présages"? Les chattes, le corbeau, non?
Narwa Roquen,frustrée!

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z653z  Ecrire à z653z

2011-05-26 11:39:22 

 inculture littéraireDétails
Les références cinématographiques de Maedhros me parlent plus que les références littéraires classiques ou modernes.

Je n'ai lu que : Agatha Christie (2), Stephen King (4), Allan Poe (1), Frank Herbert (4), Zola (14), Jack London (2),... environ 40 livres en comptant les pièces de théâtre (mais je ne compte pas les livres et contes pour enfants).

Alors que j'ai vu plus d'une dizaine de films par an au cinéma pendant 15 ans, sans compter ceux que j'ai vus à la télévision ou en vidéo/dvd (je dois facilement atteindre le millier) ; et que j'ai lu environ 200 bandes dessinées.

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2011-05-26 15:34:01 

 Quelle chance!Détails
... Si tu n'as pas encore lu "Procrastination" de Pratchett, fonce! Tu vas te régaler, veinard! Et "De bons présages" de Pratchett et Gaiman, est génial aussi. Et en plus court, mais à mon avis au dessus de tout, "Le faucheur", toujours de Pratchett.
Narwa Roquen,Pratchettophile

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2011-05-30 17:28:45 

 Je me lève et je confirme !Détails
De bons présages est un must absolu.
(J'ai pas encore lu les autres mais j'ai la ferme intention de lire tout Pratchett dans un avenir proche)

Est', moins qu'une ombre de forum...

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