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De : Maedhros  Date : Samedi 27 janvier 2007 à 17:50:33 | ||
| Exercice périlleux. J'ai choisi l'uchronie. Bonne lecture. --------------- Laissez-moi vous parler de lui. Je ne suis qu’un bioffon, son gentil bioffon. Mais je le connais mieux que personne. Mieux que lui-même. La pièce où nous nous trouvons est pleine de son absence. Voyez ces tableaux aux murs. Dans les cadres dorés, les visages sont empreints d’une expression de distance ennuyée, vaguement hautaine, sûrement méprisante. Les fronts sont hauts, les nez aquilins et les prunelles sombres. La lignée remonte loin, fil ténu dans l’histoire de ce monde, jusqu’au concile de Troyes. Des chefs de guerre, des diplomates, des Hauts Rois. Dévisagez-les attentivement. Ils ont les traits des maîtres de ce Royaume. Il est là, uniforme de parade et cravache claquant sur des cuissardes lustrées. A bien y regarder, il est au centre de cette pièce comme il est au centre de ce monde. Est-ce l’art du peintre, l’intelligence de l’architecte, la magie de l’endroit ? Il est grand, très grand. Longiligne. Comme tous ceux de sa lignée. Les gardiens génétiques du Royaume des Cieux sont parmi les plus illustres de l’Empire des Hommes. Ses yeux fixent un point invisible d’ici, au-delà des frontières de ce temps, comme habités par une vision angélique qui le transcende. Cet envoûtement terrasse l’imprudent spectateur qui a laissé errer son regard dans ce magnétisme hypnotique. Il est jeune, dans la fleur de l’âge. Un demi-dieu paré des attributs de la puissance divine. Il dompte les vagues de la mer et les sirènes des étoiles. A la tête des fantassins de l’Ordre, il a chargé les légions ailées des Nuages de Magellan. Il a porté haut les couleurs de son étendard argent à la croix potencée d’or, cantonnée de quatre croisettes du même métal. Les grandes fenêtres en ogive de la salle des Honneurs dominent vertigineusement la plaine millénaire où l’Occident et l’Orient confondent dans un poudroiement onirique leurs plus antiques traditions. Les minarets et les clochers rivalisent d’audace architecturale pour ensorceler le ciel alors que le troisième Temple étend ses structures concentriques non loin. L’esplanade des ambassades prolonge la perspective dans le soleil couchant. Là, les représentants des puissances de ce monde proclament leur éternelle allégeance au Roi de Jérusalem. Aujourd’hui, le Prince est vieux, très vieux. Il possède toujours la majesté naturelle de sa lignée, ce port altier devant lequel tous baissent le regard, n’osant ou ne pouvant soutenir l’ardent brasier qui brûle toujours au fond de ses yeux. Mais la Terminaison le guette. Les biosorciers ont vaillamment combattu l’avance inexorable des ans. Longtemps, ils ont repoussé l’échéance fatidique. Mais le fleuve du temps s’écoule pour tous et la vie éternelle est encore une promesse écrite seulement dans les livres sacrés. Chaque soir le trouve un peu plus fatigué qu’au matin malgré les nanoagents qui luttent, armée invisible, dans son organisme. Mais les défaites sont de plus en plus nombreuses et les renforts de moins en moins efficaces ! Je suis son bioffon, celui qui l’amuse et le conseille, les grelots de mon grand tricorne soulignant l’ironie de mes propos. Momos, mon ancêtre, aurait été fier de moi ! J’ai tenu tête au grand Sergueï Ivanov, l’ambassadeur de la Troisième Rome qui voulait m’étriper hier soir, un soir de beuverie. La vodka a coulé à flots cette nuit. Les chevaliers de la Garde Franque ont ricané avant de rouler sous la table tandis que je dansais comme un Fou dans le vacarme des infrabasses. J’ai cependant gardé un oeil discrètement lucide sur les représentants de la Reine Victoria XIV, imperturbables dans leurs uniformes rouges et blancs. Ils se sont contentés de siroter tranquillement leur whiskey natal. Certains, parmi eux, avaient cet accent grossier des colonies américaines. J’étais néanmoins rassuré car veillaient les Chevaliers du Temple et nul n’ignore leur devise : « Le chevalier du Christ donne la mort en toute sécurité et la reçoit avec plus d'assurance encore. S'il meurt, c'est pour son bien, s'il tue, c'est pour le Christ. » Il n’existe pas meilleur guerrier. Mais je suis aussi le confident intime, la marionnette biologique du Prince. Les dés sont jetés et les décrets signés. La Terminaison aura bien lieu, le Royaume des Cieux est éternel et sa loi est divine. La jeune fille est belle, nièce de l’Empereur de Moscou. Une beauté stupéfiante, blondeur innocente et promesse infernale, création idéale des magiciens génétiques slaves de la Maison des Tsars. Les protocoles ont été respectés. Elle est magnifique et ses schémas biologiques sont parfaitement compatibles avec la Terminaison. Elle s’appelle Nathalie. J’en suis aussi amoureux mais c’est dans l’ordre des choses n’est-ce pas ? Rappelez-vous, je ne suis qu’un bioffon ! J’ai un maigre rôlet à tenir dans cette comédie cosmique. Le grand ordonnateur des festivités c’est moi. Les Maisons Impériales bruissent de rumeurs étranges dans ces temps troublés. L’humeur ombrageuse du Roi de Jérusalem les plonge dans un embarras de plus en plus inquiétant. Les Maisons d’Orient, rangées sous la bannière de l’Empire du Milieu, réclament des gages de sécurité. Les Maisons Mineures, l’Hindustan, la Confédération Inca, l’Empire Olmèque et la Nation Zoulou restent prudemment en retrait. Les Maisons d’Occident sont préoccupées par leur expansion dans les étoiles. Elles ont abandonné les affaires domestiques aux mains d’administrateurs sans envergure. Les colonies d’outre-espace requièrent toute leur attention. Les conflits aux confins des Nuages de Magellan menacent leur expansion économique. D’ici, vous pouvez contempler l’astroport des Etoiles, hyperstructure de verre et de béton formant une verrue dans la plaine de Judée, au-delà des murs de la cité. Là, se dressent les nefs galactiques, immenses flèches dressées dans le ciel. L’une d’entre elles partira bientôt, emportant dans ses flancs, une nouvelle ruche Je suis pensif, seul dans cette immense salle. Je ne suis rien, juste un pion, le fou du Roi. Il en reste un dans l’ombre de la Croix. Tous en ont entendu parler. Peu l’ont réellement vu. C’est le pilier indestructible de la puissance du Royaume des Cieux. Il me connaît. C’est le Grand Maître de l’Ordre du Temple, Arnaud de Castille. Un personnage austère et froid, distant et impénétrable. Il est toujours vêtu d’un long manteau fuligineux, sans autre signe ou insigne qu’un lourd collier d’acier étincelant auquel est suspendu la représentation stylisée du Baphomet. Mais chut, tout est en place. Le rideau peut maintenant se lever sur le dernier acte. La Terminaison. M Ce message a été lu 6414 fois | ||
WA n°9, participation 
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 3 Exercice 9 : Maedhros => Commentaire - Estellanara (Jeu 14 jun 2007 à 17:23) 3 Commentaire Maedhros,ex n°9 - Narwa Roquen (Jeu 1 fev 2007 à 18:05) 4 Jeune...jeune - Maedhros (Jeu 1 fev 2007 à 21:43) |
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