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De : Maedhros Date : Jeudi 17 mai 2007 à 18:11:42 | ||
La 3ème partie.... _____________ La voix s’élève, fluide et musicale. Une voix douce et miséricordieuse. Aucun accent identifiable. La voix d’un ange aurait cette tessiture mais Anis n’a jamais vu d’ange. Il contemple les lèvres, blanches et scellées, du masque impérial. « Oui, tu es celui que je cherchais. Ecoute bien. Quand ce matin, le soleil s’est levé, elle s’est mariée alors que les cloches retentissaient dans toute la cité de Toulouse. A midi, elle sera rayonnante, au bras de son époux, le Colonel Roland, le héros des marches du Sud, la sentinelle indomptable. Tous s’inclineront devant eux. Il rejoint son poste, sur le rempart. Mais ce soir, oui, ce soir, quand le soleil se couchera sur l’ouest, elle sera une jeune veuve, une jeune veuve éplorée car Roland sera étendu, blessé à mort, au pied du rempart. Le coup qui l’aura impitoyablement abattu ne viendra pas de face.» Anis ne dit mot. Son destin vire de bord. Cap sur cap. Le cours de sa vie change. Les Dames Blanches maîtrisent l’influx mantique qui porte la conscience au-delà du présent, démêlant les écheveaux des probabilités évènementielles infinies. Il convient seulement d’écouter et de retenir. « Ce futur s’écrit peu à peu dans les sables de notre temps. Il est porteur de ruine pour notre forteresse. Il y a longtemps, très longtemps, le prince d’un royaume oublié est tombé devant les murs de sa cité, sous les yeux de son père, défié par un ennemi vengeur et implacable. Sa mort entraîna la chute de la cité dont il était le protecteur. Roland est un avatar de cet antique héros. Il tombe et notre forteresse sera ébranlée jusqu’à ses fondations en raison d’une chaîne de causalités trop longue pour être ici expliquée. Le temps s’écoule rapidement ! » La vache frémit, chassant les mouches qui l’assaillent de tous côtés. « Tu peux rompre cette funeste chaine. Toi et toi seul. Tourne le dos au village et bifurque au prochain carrefour vers les montagnes. Tu entreras bientôt dans un village abandonné, celui qui n’a ni église ni moulin. Ecoute ce que te dira le diable qui vit dans la grotte. Il te faudra déjouer ses ruses et ses tentations. Ensuite, tu croiseras les aurostères. Exauce leur voeu et partage leur peine. Gravis le flanc de la montagne et tu toucheras au but. Mais si le soleil se couche avant que tu aies fini, tout sera perdu. Garde-toi de te séparer de la vache, elle sera utile avant la fin. » La lumière se fait plus intense, comme focalisée au-dessus du rocher. Anis est baigné dans une stase chaude et lumineuse. Il ferme les yeux mais la lumière pénètre ses paupières closes, inondant son esprit d’une marée brumeuse et scintillante. Elle irradie ses membres, de l’intérieur vers l’extérieur, impression de dilatation. Cela dure une microscopique éternité. Quand il rouvre les yeux, la Dame Blanche a disparu, ne laissant aucune trace derrière elle. Anis reprend peu à peu possession de son corps. Il est saisi d’un imperceptible balancement, obéissant encore à une pesanteur étrangère. Il regarde la route qui s’étend devant lui. Plus rien ne l’attend là-bas. Il se retourne. C’est de ce côté qu’il lui faut aller. Ainsi qu’elle le lui a dit. Il n’hésite pas, répondant naturellement à l’appel de la Dame Blanche : « lo que a de ser no puede faltar ». Il revient donc sur ses pas. A quelques centaines de mètres, il parvient au carrefour annoncé. Un chemin de terre battue, aux ornières profondes, s’ouvre sur sa gauche, serpentant en pente douce sur le piémont de la montagne. C’est décidé, il s’y engage résolument, d’un pas tranquille et assuré, la blonde d’Aquitaine sur ses talons. M Ce message a été lu 6770 fois | ||
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