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De : Maeglin  Ecrire à Maeglin
Page web : http://Maeglin
Date : Mercredi 1 juillet 2009 à 16:45:42
La troisième fois que tu viens ces jours-ci.

J'ai fini par te plaire. Une manière comme une autre de finir. Blessée, je t'ai traquée sans honte, alors ne t'en veux pas de tourner autour de mon presque cadavre. Je meurs pour rien, en faisant ce qu'en somme j'ai su faire de tout: m'en contenter sans joie. Tu écriras sans doute à ma mère, mais je n'ai rien à lui raconter. Invente. Je n'ai pas le goût des choses solennelles.

Une lame traversa mon dos puis mon abdomen. A quelle bannière avait-elle prêté allégeance? Qui me laissa pour mort à la fin du combat? Un ami, un inconnu, un frère? Je ne reconnus personne. Ils me transportèrent avec les autres sur une charrette de fortune. Une jeune estafette à l'oeil fendu chercha longtemps ma main; je la regardai faire un moment puis m'endormis tout à fait.

Tu cherches quelque chose qui n'existe pas. Une raison de continuer à t'acharner sur mes chairs moribondes. Tu t'agites autour de moi comme pour donner corps à ta dévotion. Avant l'aube, tu seras fatiguée mais absoute. Je serai un macchabée docile et généreux, ne t'épuise pas à me donner le change: lorsque tu sortiras de cette chambre, mon histoire t'appartiendra. Et tu sauras quoi en faire.

Son dernier souffle se mua en borborygme. Le roi gisait sans gloire, dans la boue et le sang, et je l'avais tué comme une paysanne. Sans plaisir ni obstacle particuliers. Ses barons repoussaient les charges de notre cavalerie et il s'était rué sur la piétaille pour ainsi dire par caprice, comme un adolescent obèse à qui l'on interdit les douceurs. La lance pivota par hasard en direction de son torse et déchira violemment le blason pour lequel j'avais combattu lors d'une campagne précédente. Il tomba mollement de son cheval, je l'égorgeai sans réfléchir.

Tu t'es trouvé un héros, ma petite courtisane. Tu peux m'aimer sans crainte, je ne viendrai plus te rappeler ce que nous aurions dû être. Je t'ai réconfortée tant de fois... Ne le prends pas pour de la rancoeur: cette partie de notre histoire est morte bien avant moi. Quelques mèches de ta chevelure gênent ma respiration. Je n'ai pas la force de te le reprocher; ce dernier geste que ma main esquisse pour dégager mon visage de leur emprise, tu leur diras sans doute que c'était un signe de tendresse à ton égard.


  
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Réponses à ce message :
Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-07-05 22:48:51 

 Commentaire Maeglin, exercice n°63Détails
C'est un texte entre deux eaux, en demi teintes, tout à fait accordé à l'état physique du héros, entre la vie et la mort. C'est un genre où tu te plais bien, tout en esquisses ombrées, où la précision n'est là que pour ouvrir la porte à la suggestion.
Certes ton héros est dans l'empathie, puisqu'il devine les pensées de l'autre, mais il est tellement distancié des émotions violentes qu'on ne peux pas vraiment te reprocher d'avoir enfreint la consigne. De plus, même cette empathie apparente n'est peut-être qu'un leurre, et les dernières phrases jettent le doute là-dessus (ce passage est d'ailleurs excellent): le héros voit tout à travers le filtre de son égocentrisme, alors peut-être qu'il ne devine pas, qu'il parle seulement à la place de l'autre comme le font ceux qui ne respectent personne...


Une question: pourquoi:"je l'avais tué comme une paysanne"? Ce féminin m'a égarée un bon moment, je me suis demandée si c'était toujours la même personne qui parlait!
J'ai bien aimé la comparaison "comme un adolescent obèse...". Je ne suis pas sûre que dans un contexte moyennâgeux ce soit la plus adaptée ( qui se préoccupe de traiter l'obésité quand la famine et la maladie sont toujours aux aguets? ), mais elle est bien trouvée.
Et "je ne viendrai plus te rappeler..": c'est un futur.

J'aimerais bien que tu mettes un titre à tes participations.
Merci de nous avoir accueillis une fois de plus dans ton petit monde...
Narwa Roquen, voyageuse entre les mondes

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Maeglin  Ecrire à Maeglin

2009-07-06 11:53:30 

 Les réponsesDétails
Encore merci pour ces commentaires: c'est clairement une motivation supplémentaire pour écrire, des babioles ici et pourquoi pas me relancer dans quelque chose de plus ambitieux.

Sinon évidemment ma petite faute de conjugaison conditionnel/futur qui signe chacun de mes textes, et pourtant je relis... mais je suis bien rouillé et il me faudra un peu de temps pour réviser tout ça.

Des réponses maintenant: pourquoi une paysanne? Je me suis également posé la question: je voulais un contraste fort entre le roi et le contexte de sa mort... je me suis dit qu'entre "un" paysan et "une" paysanne, il y avait peut-être encore cette petite différence du paysan mâle qui prend sa fourche ou sa faux pour défendre le village, et la "paysanne" quasiment impuissante devant une potentielle agression. C'est très peu justifiable en fait, mais une fois écrit j'ai trouvé l'image suffisamment dérangeante pour la laisser vivre dans les pensées du personnage.

Sur l'adolescent, j'ai aussi eu cette réflexion, mais je me suis laissé convaincre par l'adolescent de cour surprotégé et capricieux. L'image reste un peu anachronique, mais je l'aimais bien aussi...

Sur les titres... ma foi j'ai un peu de mal à titrer ces petits exercices, la plupart du temps j'abandonne l'affaire car j'estime que ça fait rentrer plus vite le lecteur dans l'action. C'est voulu la plupart du temps (pas sur le prochain ceci dit), mais je veux bien essayer de me l'imposer.

Merci pour tout,
Maeglin

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2009-07-11 15:29:00 

 En champ bellique par singulier duelle...Détails
C’est un texte assez hypnotique qui se déploie sous nos yeux. Des phrases brumeuses tissent une trame éthérée où la logique semble s’estomper. Une histoire crépusculaire où se mêlent le fracas étouffé de batailles médiévales, les vestiges d’une romance esquissée et la confusion qui s’empare d’un esprit moribond, ce côté virevoltant du chaos annoncé.

Le style, le rythme et l’harmonie des mots soutiennent bien le propos de ce récit qui possède une indéniable élégance,cette distance entre une réalité implacable et l'apesanteur d'une âme déjà en partance. J’aime bien aussi ces images à peine effleurées, à peine murmurées laissant dans l’ombre le superflu et la logique (« tu t’agites autour de moi pour donner corps à ta dévotion »).

C'est en fait l'extrême détachement du protagoniste agonisant qui permet formellement le respect de la consigne.

M

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2009-10-28 11:59:17 

 Exercice 63 : Maeglin => CommentaireDétails
Euh... à la première lecture j’ai rien compris. Qui parle ? Pourquoi cette alternance de temps ? Y a-t-il un ou plusieurs morts ? A la 2e lecture, pas mieux... Certaines phrases m’ont laissée perplexe :
« Une jeune estafette à l'oeil fendu » oeil fendu ??, « comme pour donner corps à ta dévotion » dévotion de qui ? pourquoi ? , « Quelques mèches de ta chevelure gênent ma respiration. ».
En tant que lectrice, les textes où on explique moins que le nécessaire, moi je trouve ça décourageant. Ne pas tout dire, ne pas mâcher le boulot du lecteur, lui permettre une lecture active, une interaction avec le texte, OK. Mais là, où est donc Ariane ??? Est-ce donc moi qui suis idiote ?

Est’, patraque et mal lunée.

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