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De : Onirian Page web : http://oneira.net Date : Vendredi 18 juin 2010 à 16:51:03 | ||
En retard, comme il se doit, voici ma participation. L'idée de base est un peu trash, mais j'ai essayé de rester à peu près soft dans la forme (quoique...). Ame sensible ou très imaginative, passez votre chemin... -- Ce n'était pas vraiment douloureux... Pas vraiment. Juste... étrange, dérangeant, décalé, déroutant. Désagréable ? Oui, sans aucun doute, mais d'une manière nouvelle, incongrue. Mike était un cafard. Ce n'est pas une image, en cet instant, il était véritablement un cafard. Un doigt humain, le sien en l'occurence, lui pressait la carapace, jusqu'au point de rupture, qui eut lieu quelques secondes plus tard. Obscurément, il avait conscience de mourir. Non, d'être mort. Il avait tout autant conscience des organes d'insecte qui maculaient sa main. C'était sale, mais l'insecte ne bougeait plus, ça c'était agréable. Mike ouvrit les yeux aussi grand qu'il le put, et pris une grande respiration, avant de se souvenir qu'il n'avait plus d'yeux, ni de nez et qu'à priori, rien n'indiquait qu'il fût en un lieu où l'air avait une quelconque raison d'exister. Combien de fois était-il mort, écrasé par ses propres doigts, par ses pieds ? par un bâton qu'il tenait ? Beaucoup, trop. Les insectes n'ont pas de nerf, ils ne ressentent pas la douleur, ce qui n'empêchait pas l'expérience d'être tout à fait déplaisante. Une mort, suivit d'un instant de lucidité, sans doute pour réfléchir à sa vie et ses actes, puis une nouvelle mort et ainsi de suite. Une forme de purgatoire. L'expérience fonctionnait toujours suivant le même schéma, bien qu'elle fût unique et indescriptible à chaque fois. Il était tout autant le tortionnaire, lui enfant, et le torturé, en l'occurrence des insectes. Pendant ces pauses, il commençait cependant à craindre la suite. Tout était chronologique. Il revivait chacun de ses petits assassinats, les pattes arrachées, les corps broyés, les antennes brisées. Mais l'anniversaire de ses huit ans approchait à grand pas, et c'est cela qui le terrifiait. Les insectes ne ressentent pas la douleur, les mammifères si. Il était Cob. Un labrador de sept ans qui avait eu une très mauvaise idée, allez suivre un rat à la cave. L'escalier était encombré, il était tombé, il avait mal. Mais heureusement, Mike était là, Mike était son ami, il allait le sortir de là. Le jeune garçon s'approcha et attacha Cob. Cob ne s'inquiéta pas, à chaque fois qu'il allait promener, on lui accrochait un collier autour du cou. Moins serré sans doute, et d'habitude il pouvait bouger la tête plus facilement, mais Cob n'avait pas été sage et Mike était toujours gentil avec lui. C'est le premier coup de marteau qui avait été le plus douloureux, car il avait frappé en deux endroits à la fois. Sur la patte avant-gauche, écrabouillée plus que brisée et sans sa confiance en son Maître, pourquoi Mike faisait ça ? C'était si douloureux ! Insupportable ! Il hurla. Il voulut mordre, mais le collier l'en empêcha. Le second coup confirma le premier. Cob ne comprenait pas, étrangement, c'était cela le pire. Mike souffrait d'être ce chien qu'il torturait. Et il prenait plaisir à être le bourreau. Mais la main qui tenait l'outil se mit à souffrir des coups donnés, donc reçus. Il n'avait aucun contrôle. Comme un film que l'on visionne en boucle, la fin ne change jamais. L'expérience devint vite intolérable. Dans ses souvenirs, Mike avait à peine joué avec Cob, il avait eu trop peur de se faire prendre par ses parents. Si on lui posait des questions, il dirait que les marques de coups venaient des marches de l'escalier. Il psalmodiait cette excuse, tout en frappant, encore et encore, ce sont les marches de l'escalier. C'est avec un soulagement non feint qu'il vit partir le coup qui allait tuer Cob, juste derrière la tête, mais ce soulagement se transforma en hurlement muet quand la douleur explosa dans son crâne. Il était de nouveau lui même. Essoufflé... non, l'air n'existe pas. Qu'allait-il arriver ? Il tentait de se souvenir. Après Cob, de nouveau des insectes, mais ils seraient fades. Non, l'étape suivante, ce serait sans doute le serpent... Celui à qui il donnait des souris vivantes. Serait-il le serpent ? La souris ? Les deux ? Il savait qu'il n'allait pas tarder à l'apprendre. Un psychologue lui avait dit un jour qu'il ne possédait aucune forme d'empathie, et que c'était un problème. Bien sûr, Mike n'avait rien compris, allez expliquer le bleu à un aveugle, ou Bach à un sourd. En plus, ce n'était pas vrai qu'il ne ressentait rien, Cob avait été un vrai pur moment de jouissance, qu'il avait eu bien du mal à retrouver une fois adulte. Par les enfers, toutes ces... Il était un insecte, à nouveau. Presque soulagé. Le doigt allait l'écraser, ce serait désagréable, mais pas tant que ça. Il comprit plus qu'il ne sentit que son armure chtonienne se brisait, et qu'il se rependait. Rapide. Puis il devint un autre insecte. Non, une colonie. Des fourmis. A un niveau primaire, il avait conscience de l'urgence, sauver les larves, protéger la reine, ramener à manger, tout se mêlait dans une compréhension primitive. Et il brûlait. Il tenait la loupe de son père, qui lui avait montré comment il était possible de chauffer du bois en concentrant les rayons. Il brûlait, une fois, deux fois, cent fois lui semblait-il. Il brûlait les fourmis ; il brûlait, fourmi. Combien de temps cela dura ? Trop, et pas assez. Il mourut, après la colonie, il y en eut d'autres, d'un insecte au suivant. La gène de ne plus pouvoir voler, la joie de tenir une aile de mouche au bout d'une pince à épiler. Puis se fut fini. De nouveau seul, dans cet espace éthéré, sans haut ni bas, ce lieu intangible où il existait, à défaut d'être. Il n'avait plus aucun doute sur ce qui allait suivre, prédateur et proie. Le serpent avait vécu trois ans, avant de mourir étouffé par la souris qu'il venait de manger. Trois ans, à raison d'un repas par semaine, cela faisait quoi... cent cinquante morts, digérés par un serpent. Il avait regardé chacune d'entres elles avec délectation, parfois cela pouvait durer quasiment une heure avant que le petit rongeur cesse de couiner. Mais cela n'était rien. Il l'endurerait. Non, ce qui le terrifiait réellement, c'était les filles. Car il ne s'agissait plus d'heures, mais de jours, de mois pour les plus résistantes, et parfois, plusieurs en même temps. Il était Lydie, une jeune fille de dix-sept ans. Peu d'éducation, mais jolie, de ces beautés un peu vulgaire, mais terriblement excitante. Pourquoi pas les souris ? Indistinctement, il sut que c'est parce qu'elles ne lui montreraient rien qu'il ne savait déjà, ou peut-être parce que pour un serpent, manger des souris est naturel, ou tout simplement parce que ce n'est pas elles qu'il craignait mais bien Lydie. Il, elle, était attachée aux barreaux d'un lit. Elle ne savait pas où elle était, rien n'était familier... et ces arbres par la fenêtre, ce n'était pas sa cité. Non, c'était son antre, à lui. Une maison achetée pour une bouchée de pain, en pleine forêt, l'eau était fournie par un puits, et l'électricité n'était qu'un rêve de citadin. Par acquis de conscience, il avait cependant fait rajouter des isolants sonores, mais il n'y avait personne à des kilomètres à la ronde. Il avait drogué la fille, puis l'avait amenée ici. Il voulait jouer, retrouver le plaisir d'avec Cob. Elle était habillée d'un jean moulant et d'un t-shirt trop court. Il sortit son couteau, et, doucement, délicatement, déchira ses vêtements en fins lambeaux. Elle était terrifiée, horrifiée. Il était terrifié, horrifié. L'empathie, c'était donc ça ? Il était tiraillé entre deux sentiments, une haine pure et profonde de l'empathie, ce monstre immonde qui lui faisait voir le monde par l'oeil de ses jouets, et un océan de peur, blanc, profond, puissant, qui tentait d'emplir tout son être. Les larmes qui coulaient sur les joues de Lydie étaient les siennes. Il approcha la lame de son bras, la pointe du couteau perça la chair et fit naître une perle rouge. Un coup sec et le poinçon devint estafilade. Pas si douloureux, pas encore. Il avait tant rêvé de ce moment, mais moins qu'il le craignait désormais. Les secondes s'écoulèrent en prenant leur temps. Lentes, s'étirant d'instants d'éternité en infinis. Il plaça son petit doigt de la main gauche dans un étau portatif, amené pour l'occasion. Il serrait tendrement, presque avec amour, et la douleur affluait par vague. C'est au premier craquement qu'elle devint véritablement intolérable, mais il continuait pourtant. Mais pourquoi continuait-il ? Elle avait mal, il avait mal ! Que cela cesse ! Par les dieux, qu'était-il entrain de faire ? Elle hurlait la douleur de Mike, à moins que ce ne soit l'inverse, pitié ! Mais la pitié ne vint pas. La séance dura une heure, jusqu'à ce que Lydie finisse par s'évanouir, mais lui, vivant, sentait toujours les feux brulants des plaies qu'il avait causé. Le doigt écrasé, les lambeaux de chairs découpées, les brulures, les aiguilles, et cette voix, sa voix, qui murmurait en permanence que c'était l'escalier, qu'elle devait arrêter d'aboyer. La séance repris plus tard... C'était la première, il ne maitrisait pas bien son sujet, elle vécut trois jours. Il viola son cadavre, mais bien qu'il ne soit plus que lui ; elle était morte ; il ressentit toute l'horreur de son acte et se mit à maudire le plaisir qu'il revivait. L'espace éthéré. S'il n'avait pas d'yeux, il pleurait pourtant. Le temps n'avait plus de sens. En avait-il jamais eu ? Il revécut toutes les filles, toutes les tortures, toutes les morts. Il devint fou à chaque fois, mais toujours, dès qu'il revenait, sa lucidité refluait. Puis soulagement ultime, vint sa mort à lui. Une fille qui lui avait échappé s'était emparée de l'étau qui enserrait son petit doigt et lui avait fracassé le crâne. Conscience, une dernière fois. Dans le ventre d'une femme, sa nouvelle mère. Comment vivre avec ces souvenirs ? Quand la lumière le frappa, il oublia tout, et enfin, il put crier. -- Onirian, petit copathe. Ce message a été lu 7406 fois | ||
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