Souvenez-vous... Vous aviez tant marché pour fuir l’horreur et la misère... Seul ou en petit groupe, rasant les pans de murs des villes démolies, rampant dans les friches calcinées, sursautant au moindre bruit... volant pour manger, buvant aux ruisseaux comme des loups traqués, vous avanciez pourtant. La peur était si forte qu’elle effaçait presque la douleur, celle du corps rompu, malmené, écartelé, et même celle de l’âme, lourde de deuils et d’abandons.
Avec d’autres compagnons d’infortune, qui vous renvoyaient l’image pitoyable de votre propre déchéance, vous avez enfin embarqué. Vous avez détourné la tête pour ne pas voir leurs yeux, exorbités de votre propre terreur et de votre même volonté de survivance. Le vaisseau était en partance et nul ne savait encore si ce voyage ne serait pas le dernier. Devant vous il y avait une immensité noire et d’autres dangers terribles dont vous espériez tout bas qu’ils ne seraient pas pires que ceux auxquels vous aviez déjà échappé. Vous êtes restés là, terrés dans votre solitude unique, impuissants, prisonniers, ayant remis votre sort entre les mains d’un équipage soucieux et peu disert.
Et vous avez maudit l’espoir qui vous torturait sans relâche, et vous vous êtes demandés mille fois combien de temps vous pourriez endurer cette souffrance, tandis que la mort grimaçante vous tendait chaque jour une main faussement compatissante...
Et puis, sans prévenir, c’est arrivé. Vous avez frotté vos yeux brûlants comme au sortir d’un mauvais rêve, vous vous êtes levés, tremblants, incrédules, éblouis... Elle brillait de tous ses feux, elle était plus belle encore que dans le plus fou de vos songes hallucinés, et ce n’était pas un mirage ! C’était la Terre de votre espérance, la Terre qui vous justifiait de toutes vos fuites, de tous vos crimes, de tous vos courages et de toutes vos lâchetés... Sa lumière bénie vous invitait et vous pardonnait, vous accueillait et vous recréait. Etes-vous tombés à genoux ? Avez-vous serré une main, étreint un corps inconnu avec une tendresse inouïe, avez-vous chanté, crié, ou êtes-vous restés simplement immobiles, éperdus dans l’extase de ce voeu exaucé ?
Vous ne pouvez pas avoir oublié ! Racontez-nous au-delà de quel océan, de quel désert, de quel espace infini vous avez trouvé votre Terre salvatrice. Racontez-nous comment vous avez frémi, tremblé, vibré, faites revivre pour nous les couleurs, les musiques, les émotions...
Ainsi, dans le Cercle, les yeux des Faëriens brilleront pour vous, car la lumière du coeur est la seule qui ne meurt jamais.
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