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 WA, exercice n°64 Voir la page du message 
De : Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen
Date : Jeudi 2 juillet 2009 à 22:35:58
Toute chose a son contraire... Cette fois vous allez écrire un texte où les sensations seront à l'honneur. Nous avons cinq sens. Enfin, certains en ont davantage... Pensez à les utiliser tous...

Vous avez deux semaines, jusqu'au jeudi 16 juillet.
Nul doute que ce sera sens...ationnel!
Narwa Roquen,sentir, ressentir, pressentir...


  
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Réponses à ce message :
Maedhros  Ecrire à Maedhros

2009-07-15 22:35:57 

  WA - Participation exercice n°64 (edit)Détails
Une histoire curieuse. J'y reviendrai.

---

LIESSE WEEK-END


(AMOR VINCIT OMNIA)



ABSENCE



L’ascenseur industriel file vers le haut à pleine vitesse. La cabine tangue franchement et je dois m’agripper à une barre chromée pour ne pas être trop ballotté. Autour de moi, certains autres mineurs ont l’air de morts-vivants surpris par les éclairs stroboscopiques des leds de sécurité. D’autres ont des silhouettes beaucoup plus menaçantes, hérissées d’angles cybernétiques. C’est la dernière rotation, la plus tardive, celle qui flirte toujours avec l’extrême limite. La moins chère aussi. Pendant que nous attendions tout à l’heure, une rumeur grondante enflait sous nos pieds remontant des entrailles de ce monde. Les démons se sont réveillés et ils ont faim. Sentant le sang chaud sous la chair fraîche, ils se sont lancés à nos trousses. Nous serrons tous les fesses même s’ils ne pourront rattraper la nacelle qui accélère toujours. La moindre micro-coupure d’alimentation nous livrerait impuissants à leur insatiable appétit. Notre voyage va durer près d’une heure.

Ceux qui n’ont pu acheter un ticket aller-retour resteront cloîtrés derrière les sas blindés des bunkers. Ils prieront pour que l’épaisseur des murs et du métal contienne les assauts des créatures qui vivent encore plus bas. Deux jours. Ils resteront enfermés deux jours dans les abris de survie. C’est le temps que mettent la lune et le lointain soleil de ce système à défaire leur étrange conjonction. Quarante huit heures terrestres. C’est long je le sais : au début, je suis resté plus souvent qu’à mon tour coincé en bas, faute de fric. Je peux attester que les heures sont bien plus longues que nulle part ailleurs. Surtout quand les vieux, les complets, se mettent à parler des légendes qui circulent au fond des boyaux. Des légendes toujours racontées sotto voce. Des légendes où les démons réussissent à s’infiltrer dans les bunkers. Des légendes faites de silence et de mort, de violence et de chaos derrière des portes hermétiquement closes. Aucun des faits qu’elles rapportent n’a été confirmé. Ni démenti. Les plus jeunes en rigolent en se tapant sur les cuisses avec leurs prothèses de préhension. Ils font aveuglément confiance à notre technologie en buvant à longs traits la pisse d’âne qui coule des fontaines de recyclage. Une bière à boire bien glacée pour éviter de gerber. Mais les plus jeunes ne peuvent savoir. Leur conditionnement est encore trop récent. Ils mettront du temps à récupérer ce qu’ils ont laissé derrière eux. Ils ont une confiance aveugle au sens premier du terme. Ils boivent cette bière sans sourciller. Je ne suis plus très jeune maintenant. J’extrais depuis pas mal de temps le Sang des Etoiles et je ne crois plus à grand-chose. Personne n’a apporté de réponse à cette simple question : pourquoi faut-il encore des hommes pour faire ce que n’importe où ailleurs les machines font bien mieux?

Sur cette planète rien n’est gratuit. J’ai péniblement économisé mes points dans le noir et le froid de la galerie. J’ai sué à plusieurs dizaines de kilomètres sous la croûte verglacée de cette planète. Plus haut, la froide lumière du soleil nain ne parvient pas à estomper l’éclat des étoiles qui parsèment la voûte d’un ciel carmin. J’ai creusé la roche dure et rebelle derrière mon tunnelier aux dents étincelantes pendant près d’un siècle. J’ai ouvert les veines de ce monde plus profond et plus loin que beaucoup. J’ai un rêve secret. Le même rêve partagé par tous les mineurs. Parmi les veines irisées du minerai dont le moindre gramme est payé des fortunes dans les systèmes centraux, je recherche une concrétion anarchique. Une anomalie géologique. Une pierre précieuse. Une pierre si précieuse qu’elle damne le coeur des hommes. Une pierre et je suis riche pour mille ans. Une pierre et tous mes voeux se réalisent. Une pierre et elle m’aimera pour toujours. Une seule pierre. Mais j’ai l’impression de n’être qu’un sinistre petit Poucet qui n’arrive pas à retrouver les cailloux qu’il a semés pour regagner sa maison. Alors je continue à extraire du minerai tout en sachant que cela ne me rendra pas riche. Peut-être un peu plus complet.

Aujourd’hui, c’est moins important. C’est le début du week-end. Chaque seconde qui passe me rapproche un peu plus de la surface. Un peu plus d’elle. Je suis tellement impatient de la revoir qu’il me semble que cette ascension ne se terminera jamais. Elle m’attend. Elle m’attend. Comme d’habitude. Comme chaque fois. Comme chaque fin de semaine où je remonte à la surface. Elle m’attend. Elle seule me donne la force de résister. Elle m’offre tout ce qui me manque. Elle m’apporte de quoi nourrir mes rêves et tenir tout seul au fond des galeries, l’oreille toujours à l’affût du bruit inattendu. Mais cela ne dure que quarante huit heures.

C’est difficile de chasser de sa mémoire les horreurs qui vivent en dessous. Difficile de ne pas penser aux cauchemars qui hantent les lisières. Difficile d’oublier l’angoisse permanente de la panne mécanique quand le trépan saute sur son axe. Difficile de ne pas se rappeler tous ceux qui n’ont pas eu de chance. J’en ai rencontrés quelques uns au détour d’une galerie. Assis contre la paroi ou stoïquement debout, leurs os blanchis, ils tiennent un vulgaire caillou serré entre leurs phalanges translucides. La mort les a obligeamment attendus pendant qu’ils se perdaient au coeur d’une illusion mortifère, parfaitement immobiles sous l’assaut d’une vermine s’insinuant en longues colonnes par tous leurs orifices naturels. Ils me fixaient de leurs orbites creuses et ils riaient la bouche grande ouverte. La vie est une comédie. Une cruelle comédie. Il n’existe aucune statistique. J’ignore même le nombre exact de mineurs qui travaillent dans ce puits et je ne connais aucun mineur des autres puits. Mais la mort rôde et les sirènes hurlent au moins une fois par semaine.

Mais je ne désespère pas, dites-le bien aux autres. J’ai gagné le droit d’être ici. J’ai vendu tout ce que j’avais au consortium intergalactique pour une concession temporaire. J’ai vendu tous mes biens matériels et cela n’a pas suffi à payer plus de la moitié du billet aller. Alors je leur ai vendu une bonne partie de ma vie. En fait toute la partie à venir. Cela a permis d’atteindre l’avant-dernière porte des étoiles. Il ne restait bien moins que l’infini pour parvenir à destination mais ils ne m’avaient pas dit que c’était le saut le plus onéreux. Alors j’ai vendu ce qu’ils voulaient dès le départ.

J’étais quelqu’un de bien. Je prie tous les jours pour que cela soit vrai. J’espère que cette conviction n’est pas le produit d’un addon implanté durant les opérations de bioalésage. J’étais quelqu’un de bien avant. Je me raccroche à cette idée. Elle m’a aimé pour ça. Elle me l’a dit, me l’a souvent répété. Elle l’a prouvé d’une certaine façon en acceptant de venir avec moi. Sans elle, je ne serais pas parti.

Ce soir, j’arrive mon amour...


INNOCENCE



Hiver 38. Planète Terre. Je suis un artiste. Enfin ce qu’il en reste. Je suis au bout du rouleau. Physiquement et mentalement. Je ne progresse plus. Mes crises sont de plus en plus fréquentes. Les pilules de moins en moins efficaces. Je n’arrive plus à retranscrire la moindre émotion originale. J’ai tout lu. Tout vu. Tout entendu. Comme nous tous dans ce foutu univers. Je recherche quelque chose de neuf. J’ai beau bidouiller mes jouets sophistiqués, altérer mes interfaces de cognition, ce que je produis ne me satisfait pas. Quand je crois tenir le début du commencement d’une séquence inédite, cela ne dure que le temps que met mon cerveau surdopé à retrouver l’analogie. La frustration naît aussitôt. J’efface. J’efface. Même si je suis sûr qu’il n’y aurait eu que moi pour reconnaître la diminution déjà utilisée. Cela réveille les fantômes qui me narguent sur mon épaule. Mozart, Stonedhreim, les Beatles, Ang Lee Myato. Ils ricanent tous et se foutent de moi. « Copieur... copieur... copieur... ». Qu’ils aillent se faire foutre, tous autant qu’ils sont !

Comment trouver ce que je ne connais pas ? Les feuilles de partition à peine entamées traînent un peu partout. La note fatidique arrive chaque fois un peu plus vite. Le moment où le démon sur mon épaule me susurre à l’oreille : « je connais cet accord ! Je connais ce glissando ! ».

Je ferme les yeux et je me retrouve sous le Dôme, la plus grande salle de spectacle de ce côté-ci du mur. Un effort et je me rappelle. Mon chant du cygne. Ma dernière représentation.

Le martèlement des fûts étourdissants de puissance et de brutalité. La cadence qui s’emballe sur un rythme infernal. La ligne de basse qui gronde, profonde et tellurique, hargneuse et hypnotique. Les guitares saturées qui hurlent au premier plan, entremêlant à une vitesse effrénée riffs hallucinés et breaks monumentaux. Les choeurs angéliques des claviers et des cordes qui pleurent tout autour, leurs larmes de sang formant des étoiles filantes éclaboussant la blancheur de la scène où évoluent douze fois douze danseurs drapés en blanc et drapés en noir. Ils encadrent une flamme vivante au milieu des fumigènes toxiques et des éclairs pyrotechniques. Tendue vers l’avant, les mains loin du corps, suspendue au-dessus du vide, elle était là sur la scène démesurée, elle, Eurydice, mon amour.

La machine lancée à toute allure, mon Juggernaut, gigantesque et monstrueux, mon tsunami qui devait tout emporter sur son passage. Rien ne se passa comme je l’avais prévu.

Un silence accablant à la fin du spectacle. Un fiasco total. Aucune empathie. Aucune émotion. Les visages sont restés cachés derrière les masques. La pire humiliation pour un artiste. Rien que des masques blancs et impassibles. Quelques applaudissements. Une piètre aumône. Les danseurs et les musiciens m’ont regardé, décontenancés. J’étais assis au premier rang. J’ai su immédiatement que c’était ma dernière représentation. J’aurais voulu disparaître sous terre. Ne pas être là. Pourtant, je me suis levé et j’ai salué. J’aurais dû m’ouvrir les veines mais je suis un lâche.

En rentrant, j’ai bu. Beaucoup. Des alcools mélangés à des excitants. Elle a voulu... elle a voulu me réconforter et je n’ai pas compris. Elle s’est approchée trop près et dans mon délire, j’ai cru voir autre chose. J’ai fait un geste pour me défendre. Trop violent. J’ai tendu les mains. Trop tard. Comme au ralenti, comme dans un brouillard, j’ai vu son corps partir en arrière, en arrière, en arrière. J’ai vu s’élever la cascade inversée des éclats de verre de la table basse qui tournoyaient en tous sens. Chaque éclat renvoyait mon visage grimaçant.

Elle ne m’a pas accusé. Elle m’aime trop. Lâchement, je n’ai pas protesté. Je me suis contenté de la regarder, allongée les yeux fermés, sa poitrine se soulevant au rythme des étranges machines qui s’occupaient d’elle. Quelqu’un est venu me voir. J’ai écouté distraitement. Je n’arrivais pas tout simplement à comprendre ce que me disait le chirurgien. Je l’ai embrassée sur le front une dernière fois.

Comment rechercher ce que l’on ne connaît pas ? Comment retrouver ce qui a été perdu ? J’ai attendu, espérant qu’elle se réveillerait et que tout recommencerait. Il paraît que certains artistes expriment magnifiquement le désespoir et la douleur. Moi, je suis resté hébété devant mon clavier virtuel en pleurant. Pas une note n’est sortie de ma détresse. J’en étais tout simplement incapable. Je contemplais mes mains qui tremblaient et je me prenais la tête. J’ai cru devenir fou plus d’une fois quand je ressortais de l’hôpital sans autre espoir que de revenir le lendemain. J’étais riche. J’étais célèbre. Malgré tout. Mais tout ça était vain et pathétique. Que vaut l’or quand l’amour est absent ? Que valent les honneurs quand le bonheur n’est pas là ? J’ai besoin d’elle auprès de moi. J’ai besoin de sa vie autour de la mienne, de son corps autour du mien, de sa voix sur ma musique, de ses bras et de sa bouche, de sa force et de sa faiblesse, de sa colère et de son désir. J’ai besoin d’elle plus que tout.

Elle est si proche et si loin. Je peux la toucher mais ses yeux restent clos.

Un jour, quelqu’un a frappé à ma porte. J’ai ouvert un canal. Un visage élaboré pour correspondre à l’archétype du vendeur sérieux et professionnel. Il appartenait au Consortium. Il m’a présenté son offre. Leurs programmes de traçage étaient vraiment au point. C’était le bon moment et le bon produit, correspondant à mon désir inavoué. Qui n’a pas entendu parler de la planète Abondance ? La seule planète de l’univers dont les sous-sols regorgent de sang des étoiles, cette source inépuisable d’énergie pour les industries stellaires. Cette source d’énergie qui a supplanté toutes les autres devenues horriblement coûteuses. Le conseiller m’a patiemment expliqué les différentes clauses du contrat. Il savait déjà que j’étais d’accord sinon il ne m’aurait pas contacté. J’étais un client idéal. Il m’offrait une porte de sortie pour fuir cet enfer. Il m’a aussi expliqué pour Eurydice. Elle serait prise en charge par leurs services durant tout le temps de mon engagement. Elle aurait accès aux meilleurs soins et aux meilleures techniques. J’ai coupé la communication juste après qu’il m’ait dit qu’il y avait aussi une autre possibilité pour elle et pour moi.

Le jour suivant, je poussais la porte de leurs bureaux à Paris. J’ai payé le prix et signé sur toutes les pages avec mon paraphe adénisé, la plus haute sécurité juridique. « Cela remplace la plume trempée dans le sang, m’a dit en souriant le juriste assis en face de moi. Et cela nous évite de passer pour les Diables que nous ne sommes évidemment pas ! ». Il n’était pas plus le Diable que je n’étais Faust

Je pars demain. Il ne me reste plus rien. Je laisse tout ici. Tout sauf Eurydice. Je n’ai plus en seul dollastre sur mes comptes. Mes propriétés sont leurs propriétés à présent. Même ma vie leur appartient pour un temps. Je ne possède que ce que j’ai sur le dos et j’ai en poche mon billet. C’est un aller simple. Comme tous ceux qui partiront en même temps que moi. Finalement, j’ai accepté leurs ultimes conditions. Eurydice m’accompagne. D’une certaine façon.

Je m’agrippe à la balustrade du chalet accroché au flanc du Mont Blanc qui repousse le ciel de sa masse imposante et uniformément pierreuse. Sur la plaine, loin en contrebas, j’aperçois les bateaux qui larguent leurs amarres dans le port de Lyon. Leurs immenses voiles solaires se déploient pour accumuler l’énergie. S’éloignant des quais, ils glissent majestueusement vers l’ouest, gagnant progressivement de la vitesse. Il leur faudra avaler beaucoup de kilomètres pour atteindre l’océan. Et encore, il s’agit plutôt de grandes mares reliées les unes aux autres par d’artificiels canaux. J’attends que mon dernier jour Terre s’achève sur cette maudite terrasse en contemplant stérilement les marées immobiles dessinées par les sables atlantiques.


REMINISCENCE.


Les portes de l’ascenseur s’ouvrent et nous sortons de la cabine confinée. Le hall d’accueil du puits 28 est quasi désert en cette heure tardive. Je lève les yeux vers le haut du dôme qui me surplombe de plusieurs centaines de mètres. Quelques annonces sont diffusées sur les panneaux géants qui encadrent l’esplanade. La plupart des commerces ont baissé leurs rideaux. Après quelques saluts, il ne reste bientôt que moi. Derrière un comptoir, un androïde m’observe. Il me connaît. C’est presque devenu mon ami. C’est le superviseur affecté à ce puits. Ses interfaces sont réduites au minimum. Un visage plus ou moins régulier, deux yeux qui lui confèrent un air vaguement asiatique, une bouche sèche et peu mobile et deux bras quasi humains qui garnissent une poitrine métallique. Chauve. A quoi lui serviraient des cheveux ?

« Bonsoir M. Fosse. » me dit-il avec une diction parfaite et androgyne.

« Bonsoir Oratio! » Ce n’est pas son nom mais qu’importe. Il est programmé à répondre aux humains dans la limite de ses compétences. J’ai trouvé Oratio parfait. A travers lui, ne m’adresse-je pas à celui qui est Dieu pour moi? J’aurais besoin de me rendre à la Clinique. »
« Je consulte votre compte M. Fosse » me répond-il en continuant à me regarder.

C’est ça. Vérifie. J’ai bien compté de mon côté. J’ai suffisamment à mon crédit. Ce n’est pas pour le plaisir que je remonte par la dernière rotation. Cela fait douze ans ce soir. Douze putains de longues années. J’ai dû faire attention à la moindre dépense.

Car nous sommes des esclaves volontaires de par notre contrat. Des esclaves puisque notre vie appartient à un tiers. Nous sommes des outils animés, des outils doués d’âme. Je ne peux me plaindre. Le Consortium est scrupuleux sur le respect du contrat. Il me traite bien. J’ai accès à tout ce dont j’ai besoin et qui ferait pâlir d’envie certains travailleurs pauvres qui se croient libres sur bien des mondes. Je ne me rappelle pas non plus le cas d’esclaves qui auraient payé pour le devenir. Je peux me tromper.

«Effectivement M. Fosse! Vous avez atteint aujourd’hui même le nombre de points nécessaires. Félicitations si je puis me permettre. J’ai contacté la clinique. Ils sont bien entendu prêts à vous recevoir. »

« Merci Oratio, c’est toujours un plaisir ! »

Je suis crasseux et fourbu. Tant pis. Plus vite cela sera fini, plus vite je rejoindrai Eurydice. Je prends un tube qui me dépose dans l’aire de prise en charge de la clinique située sous un autre dôme. Depuis mon arrivée, j’y suis venu cinq fois. La dernière fois, c’était il y a exactement douze ans. Je ne reconnais pas l’hôtesse d’accueil, une femme sans âge. Normal, les personnels médicaux ne sont pas prisonniers ici. Elle daigne me sourire. Professionnelle jusqu’au bout des ongles manucurés.

« Bonsoir M. Fosse. Nous avons été avertis de votre visite. Tout est prêt. Vous connaissez la procédure à en juger par votre dossier médical. »

Je me contente de hocher la tête. Sûr que je connais la procédure.

« Vous savez que votre choix sera irréversible ? Vous avez lu attentivement le paragraphe sur les risques inhérents et les incompatibilités particulières ? »
« Je suis prêt je vous dis. Vous voulez que je signe une décharge ? »
Elle est étonnée, presque offusquée.
« C’est inutile. Cela fait partie de votre contrat initial. Je dois vous poser ces questions. Elles sont sur ma fiche !»
Je me calme. Elle n’est pas responsable sauf de me faire perdre du temps.
« Veuillez m’excuser. Je suis fatigué. Et impatient. »
« Bien. Alors je continue. Tout est enregistré et figurera en annexe à votre contrat. Votre décision est conforme aux points 822 et suivants du contrat. Vous avez assez de crédit sur votre compte personnel. Dès que vous franchirez cette porte, là, sur ma gauche, vous ne pourrez revenir en arrière. Avez-vous bien compris ?
« Oui ! » Je fais sobre.
« Votre décision étant réputée irréversible, vous ne pourrez pas attaquer le Consortium sur les conséquences qu’elle aura entraînées. Notamment en ce qui concerne les risques majeurs énumérés ci-après... »
Elle fait une pause.
« Voulez-vous les entendre ? »
« Quoi, les risques ? Non ! » l Elle m’adresse un remerciement muet.
« Tant mieux. Approuvez-vous tout ce que j’ai dit? Si oui, je vais recueillir votre paraphe adénisé. Voilà. C’est fait. Si je peux me permettre, félicitations. Je vois que votre dernière visite était relative au rétablissement des fonctions locomotrices inférieures. »

Une porte s’ouvre, découpant un morceau de néant sur le mur brillamment éclairé. L’hôtesse m’observe. Je me dirige vers l’ouverture. Juste quelques heures de sommeil en moins mais ça vaut la peine. Eurydice m’attendra un peu plus longtemps mais je sais qu’elle sera heureuse. Je ne marque aucune hésitation en m’enfonçant dans l’obscurité.

Quand j’émerge du tube après l’intervention, la lumière insolite où se mêlent les rayons de la lune et du soleil nain, baigne l’esplanade déserte. Il est encore trop tôt. Les blocs récréatifs sont regroupés dans un secteur ouest du dôme 28. Je presse le pas, empruntant une allée bordée de petits arbustes au feuillage persistant. Je longe un parc arboré, habilement agencé afin que toutes les perspectives soient fermées par des artifices végétaux. J’atteins le petit bâtiment qui abrite ma modeste cabine personnelle.

J’ouvre la porte, le coeur battant. Le coeur battant... J’avais oublié cette sensation. Comme chaque fois. Je redeviens ce que j’étais là-bas sur Terre. Peu à peu.

« Eurydice, mon amour, je suis rentré ! »

Je m’assieds sur le minuscule canapé-lit fatigué. Eurydice m'a attendu. Tout près. Je saisis délicatement un petit cube et je le serre sur ma poitrine. Comme d'habitude je vais rester là jusqu'à la fin du week-end. Cette fois-ci Eurydice sera blottie tout contre mon coeur flambant neuf.

M

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-07-15 23:14:17 

 WA, exercice n°64, participationDétails
Indigo







Mmmh... Gorge aime glace framboise, coule froide comme Torrent, mais Torrent moins de parfum... Petite boule de Rouge, Langue aime framboise, comme Peau aime été, Soleil... Mais pas trop Soleil. Soleil parfois brûle et Peau souffre. Madame Vidal gentille, mais madame Vidal pas contente si elle voit Raphaël voler la glace...
« Combien de fois te l’ai-je dit, Rafi ? Tu me le demandes ! Est-ce que je t’ai déjà refusé quelque chose ? »
Voix sait imiter madame Vidal, et Alex le facteur, et Karl le maréchal-ferrant... Voix aime imiter, Oreille dit à Voix comment faire, et Madame Vidal rit !
Mais glace volée bien meilleure pour Gorge !
« Rafi ! »
Oumf ! Madame Vidal appelle. Courir. Oh... Voiture dans l’allée, visite. Pas aimer visites.
« Rafi, viens là ! »
Fille avec valise sort de voiture. Pas content. Madame Vidal pas dit que visite aujourd’hui, pas changé, madame Vidal veut que Raphaël propre quand client.
« Ah, te voilà ! Mon Dieu, dans quel état ! Excusez-le, mademoiselle... C’est Rafi, mon ouvrier. Il s’occupe des chevaux et de la ferme, mais il m’aide aussi pour le gîte. Il va porter votre valise au bungalow. Hein, Rafi, tu portes la valise de mademoiselle Lemercier au 4. Et après tu files te changer ! Tu t’es tout barbouillé de... Encore la glace à la framboise, hein, c’est ça ? »
Bouche sourit toute seule. Raphaël doit avoir l’air embêté parce que madame Vidal gronde. Mais Bouche a encore goût de framboise, fraîcheur de framboise, petits grains ramassés dans le Soleil, cuits dans la bassine jaune, et puis machine à glace, avec crème... Rouge, Rouge, Rouge ami de Ventre, Rouge Force joyeuse Energie de la Terre...
Reculer. Yeux de Fille tristes. Ombre pas bonne, ombre grise sale autour de tête, chagrin mange Energie, mort...
« Eh bien, Rafi, tu rêves ? »
Tête se secoue, chasser ombre, valise à porter, ombre pas bonne, froid dans Dos même si Soleil fort. Mains tremblent. Chasser ombre ! Framboise, framboise... Pas suffisant ! Courir avec valise, poser valise devant porte du 4, courir, courir, Reine ! Reine au pré sous le tilleul, broute. Ventre collé contre Reine, Tête sur dos de Reine, Reine gentille, Reine vivante, Reine réchauffe, Reine gros cheval qui tire calèche, poil sent bon, chaleur de Reine sent Soleil vivant, Reine pas peur, Reine console.
« Rafi, va te changer ! Et après tu fais la tournée d’eau, la baignoire est vide dans le pré du Fagot’ ! »
Soupir sort de Gorge. Travail pour Raphaël.
« Je suis fière de toi, Raphaël ! Tu vas gagner ta vie comme tout le monde, maintenant ! »
Maman fière de Raphaël parce que Raphaël travaille. Maman pas venue depuis longtemps, Maman morte a dit madame Vidal mais Maman toujours là dans le Tout. Maman fière. Raphaël travaille.


« Rafi, arrête de rôder la nuit ! La nuit c’est fait pour dormir ! »
Mais Nuit, madame Vidal la connaît pas. Nuit toujours gentille, cacher Raphaël, personne se moque.
« Eh, le mongol ! »
Pas dans Nuit. Dans Nuit Forces circulent, résonnent dans Tête, dans Ventre, dans Pieds. Lune chante pour arbres et fleurs, étoiles rient protègent, connaissent le Tout connaissent Maman. Et quand Nuit chaude, mieux ! Roses, freesias, aubépine, magnolia appellent Raphaël avec chanson sucrée pour Nez, comme framboise pour Langue. Chanson bleu clair, chanson d’oiseau libre dans ciel... Et Tête aime aussi, parfum Maman dors bien mon chéri fais de beaux rêves... Lumière au 4. Pas couchée ? Yeux voient par fenêtre. Fille pleure devant photo. Raphaël sait. Ombre de mort. Fille pas compris que Mort pas méchante. Peur méchante ! Mais Mort autre chose, retour au Tout. Fille pas pleurer ! Yeux se ferment, Tête cherche tête Fille. Brouillard gris, désordre comme chambre madame Vidal, pas joli désordre, chambre Raphaël toujours rangée, choses pas aimer désordre, après se cachent. Même désordre dans tête quand oiseau tombe du nid, petit coeur trop vite, Peur, mauvais, Peur et désordre... Tête envoie Force à Fille, Bleu, pas bleu du ciel, pas bleu de Nuit, Bleu de Tête, Bleu qui calme qui voit et qui chasse Peur. Fille touche sa tête, Force est arrivée, se couche éteint lumière. Tête bien travaillé. Toucher Reine pour enlever fatigue et dormir.



« Oh, c’est joli ! Vous peignez depuis longtemps ?
- Depuis toute petite. Mais là j’ai décidé de me mettre à l’aquarelle, je manque encore un peu de pratique ... Je suis vraiment bien ici, madame Vidal. La nuit dernière j’ai dormi... C’est ma première nuit de sommeil tranquille depuis... l’accident de... mon compagnon...
- Le temps doit faire son oeuvre, ma pauvre petite ! Ah, je voulais vous dire : Rafi est parfois un peu collant. S’il vous embête, n’hésitez pas à me le dire. Il est un peu dérangé, mais c’est un brave garçon.
- Oh sûrement... Mais quel dommage qu’il soit... enfin... comme ça... Son visage est d’une telle beauté...
- Oui, c’est vrai, il est mignon...
- Vous pensez que je pourrais faire son portrait ?
- Ca, je ne sais pas... Rafi a peur de beaucoup de choses. Par exemple il a horreur qu’on le prenne en photo. Mais vous n’avez qu’à lui demander... Allez, je vous laisse. On mange à midi et demi. »


Potager à désherber, entendu Fille et madame Vidal ce matin en vidant brouettes fumier, pas vu joli dessin, pas le temps, madame Vidal toujours demande quelque chose, et puis rentré paille cet après-midi, jolies bottes, chevaux contents cet hiver, et conduit tracteur un peu, madame Vidal veut pas mais Rémi copain, fils de monsieur Bergougnoux, Bergougnoux grognon scrogneugneu Bergougnoux grognon mais Rémi gentil, Rémi mon ami Rémi... Désherber tout le temps... Petites plantes pas méchantes parfois piquent mais Mains pas mal, habituées, madame Vidal dit qu’elles mangent terre à tomates et après tomates petites. Langue aime aussi tomates petites mais madame Vidal préfère grosses. Grosse tomate, après farcie avec viande et petite laitue hachée menu avec ail et basilic... Hmmm... Fini désherber, envie voir dessin. Doucement, pas déranger Fille, madame Vidal a dit pas déranger.
Fille a peint pré de Reine, tilleul, et joli ciel avec nuages qui bougent. Dessiné Reine, pas encore de couleur. Ooh !
« Bleu !
- Raphaël ! Tu m’as fait peur ! C’est ce bleu, là, il te plaît ? »
Tête dit oui, sourire vient tout seul.
« C’est du bleu indigo.
- In...di...go !
- C’est ça !
- Couleur de Reine !
- Hein ? Le cheval ? Non, le cheval il est gris...
- Reine Indigo ! Calme dans Tête, Reine toujours donne... Indigo ! »
Yeux de Fille deviennent grands, croit pas. Sourit.
« OK, OK, calme-toi, d’accord... Je vais la peindre en bleu. Là... Ca te va ? Voilà. Le cheval est bleu.
- Indigo !
- Indigo, oui. »
Sourire. Bonheur chaud dans Coeur. Fille gentille, bien dessiné Reine. Mains blanches, fines, ongles roses, jolis, dessin Reine joli, Soleil chaud bonheur Ventre sourire Fille Lumière blanche...
« Rafi, va te doucher, on passe à table ! »
Courir vite, doucher vite, essuyer vite, linge sale panier, T-shirt propre, jambe dans pantalon, chaussures, lacets, pas trop vite sinon noeud mal fait, l’autre jambe... Rentre pas, pantalon trop petit, vite, chaussure coincée, ah... ooh... retard pour dîner, madame Vidal gronder mais pantalon méchant, piège, pas bouger, comme Reine prise dans fil l’autre jour, Mains libèrent Reine mais tout seul... ooh... tout seul mourir sans manger, larmes, Yeux brûlent, Yeux brouillard, balancer calmer bercer Maman Reine...
« Raphaël ? Ca va ? Raphaël... Je peux entrer ?
- Oui... Ooh...»
Fille entre, Raphaël par terre, piège du pantalon, balancer calmer bercer...
« Oh la là... Attends, je vais t’aider, tu t’es coincé... Oui, j’ai compris, mais tu dois mettre les tennis après le pantalon, tu l’as bien fait de l’autre côté... Oh c’est dur ! Attends, j’y arrive. Tu étais pressé, c’est ça. Là, regarde, voilà. Je défais le lacet, maintenant tu peux passer la jambe... Plus qu’à refaire le noeud et c’est bon ! Attends attends... »
Fille essuie larmes sur Joues. Petit mouchoir blanc doux comme caresse de Maman, sent muguet et jasmin, Fille sourit, gentille.
« Mer-ci.
- Pas de quoi. Allez, à table ! »
Main fine jolie blanche tendue, Main aime pas toucher gens, trop mous, mais jolie main fine pas molle, douce comme mouchoir blanc, sait dessiner Reine Indigo et défaire piège pantalon frisson Dos bonheur Bouche rire !


Oreille entend.
« Rafi, où tu vas ? Elle est pas bonne, ma tarte ?
- Rentrer Reine et Domino et Jackpot et Astérix : orage !
- Mais non, il ne pleut pas ! Finis ton dessert. »
Fesses bougent pour dire allez, madame Vidal croit pas, Dolly entre oreilles basses, file sous la table, Dolly entend aussi.
« Dolly sait orage aussi ! Rentrer chevaux !
- D’accord, d’accord ! »
Tonnerre très fort maintenant, grosses gouttes, Reine aime pas orage...
« Attends, je vais t’aider.
- Je viens aussi !
- Rentrez Domino, alors, c’est le plus facile, le licol est à l’entrée du pré, c’est le poney pie... »
Reine contente rentrer, mais sage, attend Jackpot et marche derrière Dos. Fille mouillée sourit, emmène Domino avec licol vers écurie.
« Et il les rentre comme ça, lui, sans rien ?
- Ah oui mais ça, y a que lui qui puisse le faire ! Même moi je n’y arrive pas ! Il n’a même pas besoin de leur parler, les chevaux, il en fait ce qu’il veut ! »



Feu de cheminée, serviettes, changer encore T-shirt, tous mouillés mais Fille rit et madame Vidal contente.
« Eh bé ! Quelle averse ! Tu avais raison, Rafi, tu sens toujours l’orage venir, hein ?
- Oreille entend, madame Vidal. Comme Dolly.
- On dit : j’entends, Rafi. »
Tête se secoue.
« Oreille entend.
- Bon, comme tu veux. Un peu plus de tarte ? Allez, tu as bien travaillé aujourd’hui, et puis tu peux manger ce que tu veux, toi, tu ne grossis pas ! »
Tarte aux pommes, cannelle, vanille... Ventre un peu plein mais Langue dit encore. Orage tape très fort et Dolly pleure sous table, Main cherche tête de Dolly, Dolly Peur tremble, Main sur tête de Dolly, donner Force Bleue... Indigo ! Comme Reine à Tête. Dolly redevient calme, soupire, se recouche.


« Raphaël, je peux faire ton portrait ?
- Por-trait ?
- Oui, tu sais, comme j’ai dessiné Reine... Je voudrais dessiner ton visage. Tu veux bien ? Là, mets-toi là, sous la lampe...
- Indigo ?
- Euh... Non, pas forcément... Juste un fusain, tu vois, ce crayon, là... Voilà, comme ça. Ne bouge pas. »
Fille dessine papier avec crayon. Pas bouger mais Dos gratte mais pas bouger. Fille sourit, contente, mains fines ongles roses cheveux mouillés pour Domino yeux verts joli Vert couleur du coeur couleur de Maman centre du monde peau Fille claire douce comme mouchoir Popaul devient dur pas bien Raphaël sale pas bien pas toucher Raphaël jamais toucher pas bien Maman fâchée yeux de Fille regardent Raphaël puis papier puis Raphaël mais pas Raphaël regardent dur chose dure Popaul pas bien table fauteuil pas bouger faire plaisir à Fille gentille Dos gratte et Popaul et Fille yeux dangereux prennent de Raphaël aspirent comme moustique plus dangereux vide trou vertige Raphaël pas vide Coeur bat vite Peur allez ! toucher Reine après, toucher Reine toucher Reine toucher Reine toucher Reine...
« Raphaël ! Où tu vas ?
- Je vous l’avais dit, hein ? Il est comme ça, Rafi, incompréhensible ! Autant il voit et il entend mieux que nous et il fait ce qu’il veut avec les bêtes, autant il va avoir peur de choses toutes simples... Si vous voulez mieux, c’est une espèce de Martien... Ca fait dix ans qu’il travaille pour moi à la ferme, depuis que mon mari est mort... Il a fait des progrès, vous savez, il a appris à se doucher tout seul, à se raser... Mais bon, c’est Rafi... Il a dû aller voir Reine, pour sûr... Venez, je prends la torche... Doucement, il ne faut pas le réveiller... Vous voyez ? Il s’est couché en boule, dans la paille, entre les pattes de la jument... Tout à l’heure quand elle va se coucher, vous pouvez être sûre qu’elle se collera contre lui et ça ne va même pas le réveiller... Huit cent kilos, la bête, mais son Rafi, c’est quelque chose... »
Narwa Roquen,qui adore les framboises
Narwa Roquen, l'imagination est plus importante que la connaissance ( Einstein)

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Maeglin  Ecrire à Maeglin

2009-07-16 10:57:26 

 WA64 - Une participation brouillonne, assez chargée, et qui manque d'enchaînementsDétails
L'Orchidée Palatine

Extrait de l'Herbier Excentrique du Margrave de Garlaban

L'Orchidée Palatine se veut en tout point sensationnelle. Prenez son origine: nimbée de mystères baroques, elle agite depuis plusieurs siècles les querelles des historiens-philosophes, qui la placent tour à tour dans le savoir-faire d'un roi loufoque épris d'absolu et de botanique, dans la volonté céleste d'illuminer le règne des êtres doués de pensée d'une parfaite compagnie, ou encore – hypothèse la plus poétique – dans un de ces pataquès symboliques qui voudrait que nous agrémentions nos chaotiques existences d'inamovibles jalons de grâce dont l'objet ambitieux mais nécessaire est de répondre à l'écho de nos dérisoires destinées.

Faire sens. Voilà en somme la délicate proposition de l'Orchidée Palatine, que l'étymologiste trouvera sans trop forcer son talent aux jardins des Puissants de notre monde, tant la renommée et la légende de cette fleur attirent depuis des siècles la convoitise d'orgueilleux roitelets et d'empereurs provinciaux.

Pour le jardinier ordinaire, on décrira néanmoins ici la magnificence de l'Orchidée Palatine en prenant garde de respecter à la lettre le protocole botanique. On se s'appesantira point trop ardemment sur l'image cavalière en vogue chez les courtisanes de la noblesse continentale selon laquelle le bulbe duveteux de l'espèce ressemblerait à s'y méprendre à une paire de testicules d'un jeune chevalier en retour de campagne.

De sa tige souple, on parcourra toutefois avec un plaisir plus licite les stries veloutées et amphigouriques d'un vert sobre tirant l'été vers l'aigue-marine. Quelques feuilles discrètes et fortement nervurées prennent à leur plénitude des teintes cérusées. Au toucher, celles-ci caressent agréablement le doigt, lui abandonnant une fragrance caractéristique de coriandre anisée dont l'extrait est utilisé par les chefs d'office, notamment pour relever certains poissons blancs.
Si les boutons grenat évoquent au printemps les perles des huîtres brunes, la fleur définitive est composée de corolles multiples qui se déploient au fil des jour en calices purpurins se recourbant vers le sol.

Une première singularité accompagne la fin de la floraison: à leur exacte maturité les pétales prennent alors une texture extrêmement sensible et réactive à la brise. Ainsi le moindre brin de vent se prenant dans ceux-ci révèle à l'auditeur attentif une mystérieuse mélopée de chuintements discrets et harmonieux. La curiosité de ces accords perpétuellement renouvelés provoqua en l'an 429 de notre ère la constitution d'un symposium de ménestrels de renom, de savants occultes et d'universitaires versés en musicologie afin de retranscrire et d'étudier la mélodie de l'Orchidée Palatine.

La seule avancée notoire de ce colloque fut d'écourter considérablement l'espérance de vie des pompeux participants: les plus artistes d'entre eux finirent leur existence complètement ruinés à vouloir enrichir leurs créations d'absconses arythmies ou de modulations cacophoniques tenant plus de la meute de chiens de chasse traquant un sanglier dans une fabrique de faïences que de la transmutation de l'histoire musicale de notre civilisation. Les plus érudits produisirent une somme considérable de documents illisibles, inventant pour l'occasion une trentaine de systèmes de notation musicale entre lesquels ils ne surent jamais véritablement trancher. Quelques perfectionnistes virulents furent même internés aux Hospices Royaux de la capitale, où l'on peut encore admirer de nos jours la salle commune dans laquelle ils perpétrèrent leurs débats scolastiques jusqu'à épuisement en traçant d'indéchiffrables idiomes sur les voûtes de chaux.

De la musicalité de l'Orchidée Palatine reste néanmoins l'hédoniste frivolité de s'y perdre une heure ou deux, le temps d'une sieste d'été ou d'une méditation nocturne, et de s'en réveiller avec quelques vers mélodieux en tête pour embellir nos journées. Que nous le voulions ou non, la science n'y apportera guère: au mieux entendre ses variances, anticiper ses inflexions, s'imprégner de la musique jusqu'à s'y confondre, en craindre les dissonances ou s'impatienter d'une harmonie. Écouter encore, vivre dans le contretemps, en dehors de toute mesure, ou bien coller à la partition et n'improviser que pour la servir.

Mais n'abusons pas trop des envolées lyriques inspirées par la musique de notre singulière plante, puisqu'il faudra se réserver pour d'indissociables inspirations olfactives, rappelant de prime abord les senteurs humides d'une forêt après la pluie auxquelles viennent s'inviter quelques touches exotiques. Car si le pédoncule conserve jalousement ses arômes de fenouil persillé, les corolles exhalent au crépuscule des longues journées de canicule des parfums de retour de voyages où se mêlent d'étranges fruits impatients de soleil et les épices enivrantes d'empires lointains. Bouillis, pilés, broyés et enrichis de graisses rares, les maîtres-nez extraient des jeunes pétales de l'Orchidée Palatine un substrat odorant à l'origine de délicieux parfums dont le plus célèbre et le plus mystérieux (sa composition étant gardée secrète par la confrérie), baptisé « Safran de Nuit », fut porté par l'Impératrice Pelissandre elle-même, dont on disait avec malice qu'elle manoeuvrait l'ardeur de ses amants en fonction du nombre de gouttes de la précieuse fragrance qu'elle vaporisait le soir dans sa chevelure.

S'il vous faut encore toucher du doigt l'extraordinaire de l'Orchidée Palatine, je vous invite à l'apprécier d'une manière autrement plus subtile: à tâtons, lorsque le vent frôle ses calices, prenez un instant pour en caresser les contours. Laissez au moins une fois dans votre vie les espiègles vibrations dévolues à la musicalité de l'Orchidée Palatine se transmettre à votre main, parcourir votre bras en chatouillements puis résonner enfin jusqu'au profondeurs obscures de votre corps. Vos doigts seront tel ce jeune amant découvrant le corps offert de sa dulcinée lors de noces tactiles et frissonnantes, effleurant les duvets naissants d'une corolle fragile, palpant avec une pudeur maladroite mélangée d'envie les chairs pourpres et mauves des pétales frémissants, se frayant un chemin jusqu'au pistil gorgé d'étamines, perles d'orange veloutées maculant de poussière d'or les inflorescences amaranthines de l'orchidée.

Ne faîtes point grief à votre serviteur de conclure cet exposé par les usages culinaires de notre sujet: j'ai exposé maintes fois dans mon précédent ouvrage « L'Art Savoureux de notre siècle » ma modeste théorie selon laquelle les Choses de la Bouche savent délivrer à ce monde le sublime raccourci de nos sens. Du doux frétillement de l'assiette encore chaude et plaisante au regard, des textures audacieuses que prennent certains aliments en cuisson ou données par le tour de main du maître queux en passant par les délicats arômes d'abord humés, puis goûtés par le connaisseur, il n'est point d'autre lieu que la Table où nos sens se taquinent l'un l'autre pour nous offrir un bouquet de voluptés sensitives.

Concernant le bouquet, l'Orchidée Palatine ne saurait en manquer puisqu'elle est surnommée en cuisine « Fleur du Roi Gourmet ». Appellation abusive néanmoins, puisque les premières utilisations culinaires de l'espèce sont recensées dans une chronique villageoise de Septentrion au chapitre des « Médecines éventuelles » en ces termes précis: « L'orchis du paladin gouste bon dans la volaille et guérisse volontiers du gras-manger en infusion de sépales. De forts jus en peut tirer pour la compagnie des brouets d'hiver ou un massepain relever. » En méthodistes persistants, nous savons désormais que l'espèce recèle trois principales saveurs: si nous avons d'ores et déjà évoqué le pédoncule et les feuilles, l'emploi des pétales permet d'élaborer de savants fonds de sauce, distinctement violacés et permettant d'adjoindre une touche fruitée aux préparations. Les pistils enfin sont parcimonieusement utilisés en qualité d'épice, rappelant un mélange de safran et de sésame virant en fin de bouche sur le genièvre.

Pour les novices, une recette de la Haute Tradition gastronomique saura sans doute mieux décrire l'affolement gustatif provoqué par l'Orchidée Palatine. Les « Quenelles Palatines » permettent en effet au gourmand de savourer en quelques bouchées fines l'éventail des possibilités offertes par la « Fleur du Roi Gourmet ». Une purée de sars et de vieilles est pochée à l'infusion de feuilles d'orchidée, et l'on sert les quenelles tiédies accompagnées d'un risotto aux vins cuits et aux pétales pourpres puis recouvertes d'une sauce au beurre enrichie au pollen palatin.

Orchidée Palatine, avons-nous cueilli tous tes mystères? Dans quelle lande de notre perception t'épanouis-tu le mieux? Savants, Princes et Poètes d'un jour, vous qui cherchez du sens à votre quête douloureuse, sachez débusquer dans les lisières de votre tortueux chemin le répit des plénitudes éphémères...

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Maeglin  Ecrire à Maeglin

2009-07-16 11:29:36 

 Sensas!Détails
J'ai aimé la "prise directe" avec ces moments de vie, comme si l'on avait branché le tuyau directement de la sensation au lecteur. Les "seconds rôles" sont attachants. Bref, je suis fan.
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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-07-19 22:40:38 

 Commentaire Maedhros, exercice n° 64: attention, spoiler!Détails
Par Oromë, que cette histoire est étrange ! Le mythe d’Orphée est ici revisité façon SF, dans un monde aussi obscur qu’halluciné... Je planche dessus depuis 4 jours et comme le héros, je suis confrontée à ma propre impuissance... à en comprendre les subtilités ! Certes, j’ai décodé le jeu de mots du titre, grâce à l’aide de mon entourage. Mais pour le reste...
Pour sauver sa bien-aimée du coma dont il est responsable, le héros se vend à un Organisation diabolique qui après les avoir transformés plus ou moins en robots, envoie des humains creuser dans les entrailles infernales d’un planète glacée pour en extraire un minerai excessivement précieux. Au fil des années, ils pourront racheter des parties d’eux-mêmes jusqu’à redevenir complets. A moins que par une chance extraordinaire ils ne découvrent la pierre précieuse qui comblera tous leurs voeux.
Oui, mais...
- Eurydice est-elle vraiment vivante ? Qu’est ce que c’est que ce petit cube ?
- Pourquoi les gens sont-ils robotisés puis rehumanisés ?
- Pourquoi les complets continuent-ils à travailler ?
- Quel ce conditionnement qui rend les jeunes gens aveugles ? Quand ils se tapent sur les cuisses de rire, ont-ils vraiment des cuisses ? Quelle est cette bière étrange ?
- Qu’est-ce que le bioalésage ? Le creusement des os pour y ajuster des prothèses ?
- Qu’est-ce que le saut ?
- Et comme le demande le héros, pourquoi ont-ils besoin d’humains pour faire le travail d’une machine ?

Je ne peux qu’admirer l’imagination exceptionnelle quoique sacrément tortueuse qui a présidé à l’élaboration de ce texte, même si je n’ai ni le QI ni la culture SF qui me permettraient de l’apprécier à sa juste valeur. Je n’ai pas non plus trouvé beaucoup de sensations à me mettre sous la dent. Mais je suppose que tu as pris la consigne à contre-pied pour coller au contexte hautement technologique.
Quelques bricoles :
- « ma dernière représentation » : manque le point
- Fautes de frappe : « je n’ai plus en seul dollastre », « tout être prêt »


Pour une fois que ta concision me gêne, c’est un comble ! J’applaudis à l’exploit créatif qui me rappelle un peu Ph. K.Dick. Mais j’ai eu la même impression qu’en lisant cet auteur (et je sais que je vais en faire hurler plus d’un) : une sensation d’éloignement extrême... Mais dans le genre, il n’a pas de doute, c’est une réussite !
Narwa Roquen,décidément plus à l'aise dans la fantasy!

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-07-21 22:13:33 

 Commentaire Maeglin, exercice n°64Détails
Désolée pour le retard, j’ai été un peu débordée et j’ai horreur de bâcler mes commentaires : par respect pour les auteurs , j’aime bien prendre le temps de lire et de relire...
C’est un texte alambiqué, d’une sophistication extrême à la limite de la redondance, mais qui sied à merveille à la description de cette fleur aussi éloignée de la marguerite que la merguez l’est de la brochette ris de veau-St Jacques au beurre blanc... C’est sucré comme une liqueur de myrtille, et jubilatoire comme un grand galop dans les chaumes... Ton langage fleuri, volontairement d’époque, finement ciselé, passe de l’envolée lyrique à la suggestion égrillarde pour jeune fille en fleur avec un art consommé !
Tous les sens sont ici à l’honneur : la vue, l’ouïe, le toucher, l’odorat, le goût... avec en plus l’humour subtil dont tu assaisonnes les propos de l’auteur présumé, imbu de son élitisme raffiné et ne s’adressant qu’aux gens de bien.
Je trouve ton auto-critique injustifiée : ça se lit bien, si on a un peu de souffle pour atteindre le prochain point, et Google à portée de main (amphigourique : joli !). Mais c’est tout à fait adapté au contexte !

De plus il y a quelques somptueuses envolées :
- la musicalité de l’orchidée
- les moeurs de l’impératrice Pelissandre ( une bonne copine à moi !)
- et le summum, c’est à partir de « laissez au moins une fois dans votre vie... », jusqu’à la fin du paragraphe.

Quelques bricoles :
- pourquoi « l’étymologiste » ?
- Fautes de frappe : « on se s’appesantira point », « qui se déploient au fil des jour »
- répétition : « les pétales prennent... », « brin de vent se prenant... »
- et tant que j’y suis : « les pétales prennent alors » : le « alors » est superflu.


On sent que tu t’es bien amusé à écrire ce texte, et pour une fois, tu as mis un titre, qui est excellent : que du bonheur !
Narwa Roquen,qui s'est régalée!

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2009-07-22 14:22:40 

 Commentaire MaëglinDétails
Eh oui, avec le titre peu vendeur de ton message, j'aurais failli passer à côté de ce texte d'une qualité surprenante!!

Bon, moi aussi, dès demain, je me mets à lire le dictionnaire avant de dormir. Je suis toujours gênée quand il faut décrire les sensations et les perceptions trop longuement, car je ne trouve jamais assez de mots pour dire sans répéter. Chez toi, le vocabulaire est aussi varié et délicieux que les qualités de ladite fleur...

Le premier paragraphe m'a fait penser à du Desproges. Par la suite, quelques phrases ont encore des accents de sa voix, mais ta poésie a quelque chose de serein que la sienne n'a pas, sans vouloir l'offenser... ;)

Et puis que dire, c'est joli, volontairement pompeux et drôle donc pas du tout ennuyeux, et pour ce qui est de la consigne, mazette!, si ça, ça n'est pas la description des 5 sens (voire plus!), je ne sais pas ce qui pourrait l'être! Une réussite absolue et un très beau moment que tu nous offres là. Chapeau bas, Monsieur Maeglin...

Elemm', enchantée

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2009-07-22 14:46:45 

 Commentaire NarwaDétails
Excellent texte en effet, quels personnages peuvent être plus proche des sensations internes que ceux qui sont en décalage avec le monde externe...
Par ailleurs, très jolie histoire d'une rencontre, et le portrait décrit me fait penser trait pour trait au (seul) trisomique que j'ai eu l'occasion de fréquenter un peu, je dirais donc que ça a l'air très authentique!!

Et comme toujours, un cadre que tu affectionnes, des chiens et des chevaux, des fruits et de la cannelle :D

Elemm', c'est bon les framboises!

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2009-07-22 14:52:27 

 Comm MaedhrosDétails
Curieuse ton histoire, en effet....

Ce n'est pas du tout le genre de texte auquel je m'attendais sur un tel exercice, le côté froid, compliqué, tordu de ton univers et même de ton personnage sont à l'opposé des sensations simples, instinctives, immédiates, auxquelles je m'attendais. Mais euh, pourquoi t'as fait ça?? ^^
Pourtant, il y avait matière à développer sur les émotions, au moins (peur, amour, impatience, etc)

Mis à part ça, texte intéressant qui mériterait cependant quelques explications: sa chérie est dans le cube? de quelle façon? Où est-elle sinon? Moi non plus j'ai pas tout compris, m'enfin... Tu nous ferais pas un p'tit spoiler histoire de nous aider, dis??

Elemm', à vot' bon coeur, M'sieur l'artiste :)

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Maeglin  Ecrire à Maeglin

2009-07-23 13:25:48 

 Crise de foieDétails
C'est un texte un tantinet "crise de foie": c'est très bon à écrire sur le moment, mais l'abus rend l'inspiration écoeurante et j'ai besoin de temps pour passer à autre chose!
J'ai donc bâclé la mise en forme et ne me suis pas trop relu avant d'envoyer le texte, tant mieux et merci pour vos critiques!

L'histoire de l'étymologiste faisait référence à l'adjectif "palatin" et sa relation avec les "puissants" du monde, puisqu'on trouve principalement les orchidées dans ces jardins.

A bientôt,
Maeglin

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2009-07-24 12:43:15 

 Quelques réponses...Détails
C'est vrai que j'ai obéi d'une façon traversière à la consigne. Mais j'ai bien parlé des sens : vision, goût, audition, toucher... même dans les sous-titres (joke).

La comparaison avec PK Dick me flatte : c'est un de mes auteurs favoris.

Tu trouveras ci-dessous des éléments de réponse même si tout ne répondra pas à tes attentes mais Abondance est une planète également rêvée où les dimensions ne sont pas forcément cartésiennes.

- Eurydice est-elle vraiment vivante ? Qu’est ce que c’est que ce petit cube ?

Eurydice ne s’est pas réveillée de son coma traumatique. Le Consortium a implanté ses constantes vitales et ses schémas cérébraux dans un petit cube lorsqu’il a acquis le corps physique pour permettre à Fosse d’acheter entièrement son voyage.

- Pourquoi les gens sont-ils robotisés puis rehumanisés ?

Abondance est un monde étrange avec un environnement agressivement hostile. Le sang des étoiles possède la particularité inexpliquée de perdre les propriétés qui le rendent irremplaçable s’il est extrait par des machines. Seuls des humains adaptés peuvent évoluer de façon relativement acceptable dans les sous-sols. Aussi doivent-ils d’abord être améliorés pour résister à la fois physiquement et psychologiquement à cet environnement. C’est le bioalésage. Ensuite, une fois acclimatés et s’ils le souhaitent, s’ils en ont les moyens, ils ont la possibilité de racheter leurs organes cryogénés. La notion de jeunes et de vieux ne vaut donc que pour ce monde, sans référence avec une notion d’âge réel. Les vieux sont généralement ceux qui sont les plus anciens mineurs et les complets sont ceux qui ont réussi, mais est-ce réellement un succès, à racheter tout ce qui leur avait été retiré lors du bioalésage.


- Pourquoi les complets continuent-ils à travailler ?

L’extraction du minerai ne permet pas aux mineurs d’acheter le billet de retour dont le tarif est prohibitif. D’abord ils rachètent leurs organes, propriété du Consortium. Ils n’ont pas le choix, cela fait partie du contrat. Ils ne peuvent pas par exemple, repartir bioalésés et remplacer leurs organes manquants ailleurs, dans un autre monde, où les tarifs sont bien moins chers. En outre, tout est facturé sur Abondance et facturé de façon à maintenir les mineurs en situation de dépendance financière. Fosse le dit : il ne deviendra pas riche en extrayant du minerai.


- Quel ce conditionnement qui rend les jeunes gens aveugles ? Quand ils se tapent sur les cuisses de rire, ont-ils vraiment des cuisses ? Quelle est cette bière étrange ?

La bière est une mauvaise bière, chaude et brassée de façon industrielle. Sans plus.


- Qu’est-ce que le bioalésage ? Le creusement des os pour y ajuster des prothèses ?

C’est le bioalésage. Au sens original, l’alésage est l'opération qui consiste à usiner avec soin la surface intérieure d’un cylindre ou toute autre pièce creuse. C'est aussi le résultat de cette opération (wikipédia). Par extension, le bioalésage est une opération d’affinage qui rend un humain compatible avec les conditions de vie régnant sur (sous) Abondance : membres cybernétiques, amélioration des fonctions cardiovasculaires, rectification des organes de la vision, du goût, de l’audition....

Cela permet aux mineurs d’avoir l’illusion d’évoluer dans un environnement pas trop éloigné de ce qu’ils connaissent car la réalité d’Abondance est trop étrangère.

De plus, le Consortium rend ces opérations obligatoires pour renforcer encore son pouvoir sur eux.

- Qu’est-ce que le saut ?

C’est un banal saut dans l’hyper-espace

- Et comme le demande le héros, pourquoi ont-ils besoin d’humains pour faire le travail d’une machine ?

Ainsi que dit plus haut, Abondance est une planète étrange. Le minerai perd ses propriétés s’il est extrait par des machines. Seuls les créatures douées de vie peuvent faire ça. Une fois conditionné en barres, il devient exploitable classiquement. Seule son extraction obéit à ce curieux impératif.

M

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-07-24 13:15:46 

 Pfiououou!!!Détails
Nom d'une baguette magique! Je n'aurais jamais pu comprendre sans tes explications! Je ne sais pas si tu avais fumé la moquette pour écrire ça, mais c'est phénoménal!
Narwa Roquen,tourneboulée!

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2009-11-05 17:09:53 

 Exercice 64 : Maeglin => CommentaireDétails
Ce texte à l’idée bizarre et originale respecte parfaitement la consigne. Certains passages sont pittoresques, comme le coup du « jeune chevalier en retour de campagne », ou l'Impératrice Pelissandre. La langue est très recherchée, dans un style original, baroque et précieux, parfois surchargé en adjectifs, ai-je trouvé. Globalement, c’est agréable et dépaysant, même si certains passages sont difficiles à comprendre. J’ai eu l’impression que, cédant à l’envie d’aligner des mots rares aux sonorités inédites, tu avais parfois négligé le sens des phrases. Exemples : quel rapport entre l'étymologiste et la suite du paragraphe ? Des stries peuvent-elles être amphigouriques ? Une teinte peut-elle être cérusée ? Le mot amaranthine existe-t-il ? Peut-on associer un doux frétillement à une assiette ? Au-delà de ça, c’est fort plaisant à lire. Le passage en vieux français est très réussi.

Est', hop hop hop.

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2009-11-18 14:33:46 

 Exercice 64 : Narwa => CommentaireDétails
Joli personnage et habile interprétation de la consigne. Le style narratif original et plein de bizarrerie rendent ton personnage vivant : la curieuse séparation d’avec ses organes qui sont quasiment des parties autonomes, la vision des auras, la notion de temps floue, le pouvoir mental... Il a également des pensées tout à fait intéressantes, comme « choses pas aimer désordre, après se cachent ». Cela le rend attendrissant et réaliste, pour autant qu’on puisse en juger. Dommage que la fin casse brutalement son côté innocent et enfantin...

Est', en pleine lecture.

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2009-11-18 14:35:13 

 Exercice 64 : Maedhros => CommentaireDétails
Houla, encore un texte à énigme. Encore quand on dispose de suffisamment de pistes, OK mais là, ce n’est pas le cas et cela génère plus de frustration chez moi que d’intérêt. La première partie démarre sur les chapeaux de roues avec tellement de vocabulaire et de notions bizarres que je me suis totalement égarée. La deuxième partie est un poil plus claire. J’ai supposé qu’il s’agissait d’un flash-back. Tu es toujours aussi à l’aise pour décrire la musique. Joli « les sables atlantiques ». Agl, j’ai rien compris à la fin. J’avais cru comprendre qu’elle était dans le coma et qu’il économisait pour la soigner avec une technique particulièrement chère. Là du coup, je suis perdue. L’intervention portait sur lui ? Elle est morte ? Qu’est ce cube ?
Tu m’as encore perdue en route. Après lecture des commentaires et spoilers, je réalise que j’ai raté encore plus de choses que je ne pensais, snif. Ouais K. Dick je pige rien non plus, à part Do androids dream of electric sheeps.


Est', en pleine lecture.

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-11-18 21:25:47 

 Oui mais...Détails
... handicapé ou pas, c'est un adulte! Et il a une sexualité, comme tout le monde...
Narwa Roquen, un chat est un chat...

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2009-11-18 22:44:50 

 A ce propos...Détails
... ça n'a rien à voir avec Faeries, mais ça a à voir avec la question qui est abordée ici: je viens de visionner un reportage de "Complément d'Enquêtes" diffusé lundi dernier sur France 2 (visible gratuitement sur le net ici, émission du 16 novembre 2009, onglet "reportages", celui intitulé "Le droit au plaisir"), donc je vous le fais partager: il traite de la question de la sexualité des adultes handicapés, qui, en France, d'après le reportage, est souvent bridée par camisole chimique; en Belgique et en Suisse, la question commence à se poser autrement avec l'intervention d' "assistants sexuels", voire de prostitués, avec les problèmes juridiques de proxénétisme pour les institutions ou tuteurs qui mettent en relation l'handicapé et la personne, ou de prostitution pour ces "aidants" un peu particuliers.
Je trouve la question intéressante...

Elemm', y'a pas de lieu ou d'heure pour se poser les bonnes questions

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-11-19 22:14:05 

 Intéressante...Détails
... et complexe! Mais il y a tant de gens qui se voilent la face, parce que "ces gens-là", tout de même... Alors qu'un humain est un humain, et quelles que soient ses performances physiques ou intellectuelles, il a droit au plaisir. Mais d'un autre côté, la prostitution est rarement choisie, et même si elle l'est, est-ce que c'est une bonne chose? Je parle là de dignité humaine. Alors, déshabiller Paul pour habiller Pierre... J'avoue ne pas avoir trouvé la réponse, mais le débat mérite d'être ouvert.
Narwa Roquen, un chat est toujours un chat...

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2009-11-20 08:18:49 

 Assistants sexuels et prostitutionDétails
En fait, dans le reportage, il y a deux types d'intervenants qui me semblent à distinguer: prostituées et assistants sexuels; l'un de ces derniers explique qu'il peut s'agir simplement de "tendresse", de gestes sensuels, d'une aide à la masturbation, etc. Je ne sais pas dans quelle mesure le corps de l'aidant est ici impliqué; je ne sais pas dans quelle mesure ça peut être assimilé à de la prostitution; je ne sais pas dans quelle mesure cette "entrée dans l'intimité du sujet " est différente de celle des aides à la toilette, par exemple. Je ne sais pas du tout non plus quelle est la nature du lien qui unit les deux protagonistes. Quant à la prostitution, qui est, je pense aussi, rarement un choix, mais qui évite sans aucun doute d'autres souffrances pas choisies non plus, je me demande aussi....

Elemm', qui se demande.... et qui fait pas avancer le schmilblick!

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2009-11-21 15:44:05 

 En effet...Détails
... une question intéressante, à laquelle on ne pense jamais. Mais, je pense que, comme le souligne le début de l'émission, la misère affective et sexuelle moderne s'étend à tous les types de population...

Est', pauvre monde.

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Maeglin  Ecrire à Maeglin

2009-11-21 20:32:40 

 Misère, misèreDétails
Alors je n'ai pas vu le reportage, ça m'a l'air bien sérieux et je suis tout d'accord, mais cette dernière remarque me touche plus que je ne l'aurais souhaité.

Maeglin,
qui manque d'inspiration pour un 69bis

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2009-11-22 23:06:02 

 ReportageDétails
Je l'ai regardé et je le conseille. C'est noir comme sujet mais hyper intéressant. J'ai trouvé le gars qui s'appelle Aldo dans le sujet sur le tourisme sexuel d'une lucidité et d'un recul impressionnant sur son comportement.
Le sujet sur les exhibitionnistes est également édifiant. J'ai été choquée par le fait que le mec qui s'exhibait refuse d'admettre qu'il a fait du mal et que la personne qui l'a vu est réellement une victime. C'est pourtant bien le cas. Voir un exhibitionniste, c'est une véritable agression et en plus, c'est se retrouver très près d'un authentique pervers, un gars qui apprécie le malheur des autres. Et ça fout la trouille !
Et le sujet sur les handicapés donne fichtrement à réfléchir. Je reviens du coup sur ma remarque rapport au texte de Narwa, quand je disais que c'était dommage de casser le côté enfantin et innocent du héros. Il se trouve que je connais un trisomique. Et il semble, pour autant que je puisse en juger étant donné qu'il est quasiment incapable de parler, qu'il ait un développement mental proche de celui d'un enfant de 8 ou 10 ans. C'est un gars charmant, très gentil, très affectueux et vraiment bien intentionné, contrairement à tant gens que nous côtoyons. Il m'a toujours fait l'impression d'une sorte d'ange, une personne qui ne serait pas touchée par toutes les formes de corruption de l'âge adulte. Je ne sais pas trop comment exprimer ça. Jusque là, je m'étais toujours plu à le considérer comme un vrai enfant, innocent moralement et du point de vue sexuel. Du coup, j'en viens à me demander à quel point je me trompe. Et aussi, je me demande si on ne lui inflige pas une castration chimique dans l'établissement dans lequel il vit. Dur dur...

Est', allongée sur le divan.

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2009-11-22 23:08:40 

 CertesDétails
Tu dois avoir raison. Ma réaction est due à une fausse idée que je me fais des trisomiques, idée causée par un manque d'information. Ou peut-être que c'est plus confortable de les considérer comme des gosses, histoire de ne pas trop se poser de questions...

Est', sur le divan.

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Elemmirë  Ecrire à Elemmirë

2009-11-23 07:41:52 

 Misère bisDétails
Quand on n'a pas d'amour, on a du chouchen et des crêpes :)

Elemm' qui pique dans le tas de crêpes de Netra pour la bonne cause; avec miel ou nutella?

PS: A propos de miel, j'ai trouvé hier sur un marché médiéval un miel à la cannelle qui déchire.... ^^

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Netra  Ecrire à Netra

2009-11-23 13:51:20 

 mais le tas est open !!! Détails
Tout le monde peut en prendre, hein !!! Faut bien se consoler !!!
Netra, y'a plus de chouchen...

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2009-11-28 19:23:20 

 PrécisionDétails
Raphaël n'est pas trisomique, il serait plutôt autiste. Il redoute le contact humain, alors que le trisomique est plutôt "collant". Il est sujet à des crises de panique, alors que le trisomique est volontiers jovial. Et surtout, il n'est pas structuré: les différentes parties de lui sont perçues comme indépendantes, quand il parle de "Raphaël" il se réfère à l'image globale que les autres ont de lui , et enfin et surtout il ne dit jamais "je" (j'y avais bien veillé!). Mais je suis sûre qu'Elemmirë pourrait t'expliquer ça bien mieux que moi...
Narwa Roquen, un chat est un chat, mais il y a toutes sortes de chats...

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