Un autre cycle d'éternité se termine.
Le Temps s'est arrêté.
L'oraison frondeuse de l'orage fond sur l'horizon de toute part. Seule au milieu du malstrom, la montagne malmène la monotonie du monde mourant. Mais toute vie est la promesse d'une mort à venir.
Les noirs nuages s'avancent en dévorant le monde qui disparaît dans leur obscurité. De leurs ventres cotonneux jaillissent sans fin mille éclairs aux lumières électriques, déchirant le ciel en lui arrachant les derniers pans de réalité, comme une main rageuse détruisant les pans d'un tableau.
L'orage des temps derniers s'étend sur le monde qui s'efface. La terre et les hommes qui y vivaient ont disparu, happés dans les limbes. Condamnés par l'oubli, les Dieux sont retournés au néant de leurs origines. Les derniers des derniers parmi les hommes sont tombés les uns après les autres en tentant de rallier la montagne et de s'y rassembler.
A présent il en reste trois. Déjà l'un d'entre eux fléchit, chétif, et s'allonge pour ne plus se relever. Ils ne sont plus que deux, main dans la main, seuls à affronter le monde qui se meurt et les entraîne avec eux. Le moment est peut-être venu de penser à s'arrêter, pour finir.
Ils continuent pourtant, mais il n'en est qu'un qui atteint le sommet. Intimidé, il s'avance vers le palais immense et austère, tout de pierres. Au fond de la salle jalonnée de colonnades, un trône sculpté dans la roche attend en lui faisant face. Nulle trace de celui qui aurait dû se trouver ici.
Que faire ? Tout serait-il perdu ?
Il n'est de destin que celui que nous nous construisons.
L'homme s'avance et s'installe sur le trône.
Alors l'orage cesse et tout s'arrête.
Et soudain tout reprend, l'orage gronde à nouveau.
L'homme se lève et revient sur ses pas.
Seul le destin que nous nous construisons existe.
Tout n'est pas perdu ; tout est à faire.
Nulle trace de celui qui aurait dû se trouver là : il s'en est allé, au-delà de la salle jalonnée de colonnades où semble l'attendre un trône sculpté à même la roche. Déjà il quitte le palais immense et austère, empli de confiance. Il descend et trouve une compagne sur son chemin.
Le temps est peut-être venu de penser à voir plus loin, pour commencer. A présent qu'ils sont deux ils peuvent affronter le monde qui leur reste à construire, main dans la main. Bientôt vient les rejoindre un petit être chétif qui se lève à leur côté. A présent ils sont trois.
D'autres viennent se rajouter, premiers parmi les premiers et tous commencent à s'éparpiller en groupes. Alors, revenant au souvenir des hommes, les Dieux sortent du néant de leurs origines. Là où il n'y avait rien émergent peu à peu des terres, des peuples, des pays : l'orage des temps premiers s'efface et le monde se dessine.
En partant, les mille éclairs aux lumières électriques jaillissant du ventre cotonneux des nuages impriment dans le ciel de nouveaux horizons comme autant de pinceaux sur un tableau encore vierge. Les noirs nuages s'éloignent en laissant une traînée de réalité qui se matérialise dans leur sillage.
Et toute mort est la preuve d'une vie passée. Le monde naissant s'étend tout autour de la montagne immuable environnée d'une multitude changeante. Partout sur l'horizon disparaît la ligne noire de l'orage et son chant de louanges rugissantes.
Le Temps a repris sa course.
Un autre cycle d'éternité commence.
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